Rapport n° 425 (2022-2023) de Mme Marta de CIDRAC , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 15 mars 2023

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N° 425

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 mars 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d' emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique ,

Par Mme Marta de CIDRAC,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot , président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec , vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin , secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

676 , 763 et T.A. 73

Sénat :

305 et 426 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a examiné, le 15 mars 2023, le rapport de Marta de Cidrac sur la proposition de loi déposée par M. Denis Masséglia, Mme Aurore Bergé et plusieurs de leurs collègues, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique. Le texte initial de l'Assemblée nationale affichait deux objectifs distincts : exonérer le secteur de la presse du paiement de la contribution financière, en l'excluant de la filière REP et fusionner les filières REP emballages ménagers et papier .

Pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, sortir la presse de la REP est un dangereux précédent, crée un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets, ainsi qu'une régression environnementale et juridique . Elle a donc modifié le dispositif proposé, afin de mieux concilier protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse .

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

I. FILIÈRES À RESPONSABILITÉ ÉLARGIE DES PRODUCTEURS (REP) : LE PRINCIPE POLLUEUR-PAYEUR APPLIQUÉ À LA PRÉVENTION ET À LA GESTION DES DÉCHETS

Le dispositif de la responsabilité élargie des producteurs (REP) est une application du principe « pollueur-payeur » , en transférant la responsabilité de la prévention et de la gestion des déchets aux producteurs.

Source : Ministère de la transition écologique

La majorité des producteurs s'acquittent de cette obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation et versent en contrepartie une contribution financière appelée éco-contribution .

Les contributions versées aux éco-organismes doivent être modulées sous la forme de primes ou de pénalités, en fonction de critères de performance environnementale des produits.

Deux filières REP sont concernées par la présente proposition de loi : les REP emballages ménagers et papier. Leur rôle principal est de soutenir financièrement le service public de gestion des déchets (SPGD) , géré par les collectivités territoriales.

Ces filières partagent ainsi des similitudes opérationnelles , notamment avec une collecte harmonisée par les collectivités territoriales via le « bac jaune » et un éco-organisme opérant sur les deux gisements, Citeo .

Elles sont toutefois de taille inégale :

REP Emballages (2021)

REP Papier (2020)

II. LA PROPOSITION DE LOI DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE EXCLUSION DE LA PRESSE DE LA FILIÈRE À RESPONSABILITÉ ÉLARGIE DES PRODUCTEURS ET UNE FUSION DES FILIÈRES REP EMBALLAGES MÉNAGERS ET PAPIER

A. EXONÉRER LA PRESSE DU PAIEMENT DE LA CONTRIBUTION FINANCIÈRE PAR UNE EXCLUSION DE LA REP

Le secteur de la presse fait aujourd'hui face à des difficultés conjoncturelles et structurelles .

La proposition de loi propose de remédier à cette situation, en exonérant la presse du paiement de sa contribution financière.

Montant de la contribution financière dont la presse
devait s'acquitter en 2023

Elle prolonge en contrepartie le système existant de la « contribution en nature », qui devait prendre fin au 1 er janvier 2023 en application de la loi « AGEC » de février 2020.

« Contribution en nature » = mise à disposition gratuite d' encarts pour informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des déchets.

Pour garantir la conformité du dispositif au droit européen, cette « contribution en nature » serait toutefois organisée via une convention de partenariat entre l'État et les syndicats de presse, en dehors de la filière REP.

è la proposition de loi conduit donc à exclure la presse de la REP.

Des critères de performance environnementale que la presse s'engagera à respecter seront également inscrits dans cette convention de partenariat.

B. LA FUSION DES REP EMBALLAGES MÉNAGERS ET PAPIER

La fusion des REP emballages ménagers et papier constitue le deuxième axe de la proposition de loi . Cette fusion vise :

- à apporter une simplification administrative, notamment pour les collectivités territoriales, qui pourront contractualiser avec l'éco-organisme via un contrat unique, en lieu et place de deux contrats distincts ;

- à répondre au mouvement accompagné par la loi « AGEC », qui a permis une harmonisation des systèmes de collecte des déchets d'emballages et de papiers sur l'ensemble du territoire national en 2023 ;

- à renforcer les synergies entre les deux filières, notamment dans un contexte de recours accru aux papiers et cartons pour les emballages en remplacement des emballages plastiques.

III. AU SÉNAT, LA POSITION DE LA COMMISSION : FUSIONNER LES FILIÈRES REP EMBALLAGES MÉNAGERS ET PAPIER, POUR SIMPLIFIER ET RENFORCER LES SYNERGIES, ET MAINTENIR LA PRESSE DANS LA REP, TOUT EN OFFRANT DES GARANTIES AU SECTEUR

A. UNE FUSION DES FILIÈRES REP QUI POURRAIT ÊTRE SOURCE DE SIMPLIFICATION ET DE SYNERGIES

La commission porte un regard favorable à la fusion des filières REP, qui pourrait être source de simplification et de synergies. Dans cette logique, elle a donc adopté un amendement de la rapporteure supprimant le principe de non-mutualisation des coûts entre les filières , introduit par l'Assemblée nationale.

B. EXCLUSION DE LA PRESSE DE LA REP : LA NÉCESSITÉ D'AJUSTER UNE PROPOSITION DÉSÉQUILIBRÉE, POUR MIEUX CONCILIER PROTECTION DU SERVICE PUBLIC DE GESTION DES DÉCHETS ET PRÉSERVATION DU SECTEUR DE LA PRESSE

1. Sortir la presse de la REP : un dangereux précédent, un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets, une régression environnementale et juridique

La commission suivant sa rapporteure a pointé les trois écueils majeurs de la proposition de loi adoptée par les députés.

a) Un dangereux précédent, de nature à fragiliser l'ensemble des REP

Sortir la presse de la REP pourrait constituer un dangereux précédent susceptible d'affaiblir l'ensemble des REP.

Ce serait en effet la première fois dans l'histoire de ce système - né en France dans les années 1990 et ayant essaimé partout en Europe - qu' un gisement serait retiré de la REP.

D' autres secteurs pourraient à l'exemple de ce premier régime d'exception demander des aménagements et des exonérations pour l'avenir, au détriment des collectivités territoriales et de la protection de l'environnement.

b) Un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets

Le dispositif proposé aura de surcroît un impact financier sur le service public de gestion des déchets (SPGD) géré par les collectivités territoriales.

Si ce manque à gagner ne saurait être surestimé au regard du coût total du SPGD (8,8 milliards d'euros), le texte s'inscrit toutefois dans un contexte d'augmentation des charges du SPGD causée notamment par la hausse des prix de l'énergie ou encore l'augmentation significative de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

c) Une régression environnementale et juridique

La seule condition posée à l'exonération de la presse des obligations de la filière REP est de « participer » à une convention de partenariat . Le texte ne prévoit donc aucune sanction du non-respect des engagements environnementaux par les publications de presse ou de mise à disposition gratuite des encarts , à la différence de ce qui prévalait dans le mécanisme transitoire issu de la loi « AGEC ».

2. Ajuster une proposition déséquilibrée, pour mieux concilier protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse

La commission a donc fait le choix de proposer une option alternative, conciliant de manière plus satisfaisante protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse : c'est le sens de l'amendement de la rapporteure qu'elle a adopté.

Cet amendement vise : 1) à maintenir la presse dans le champ de la REP ; 2) mais en permettant de moduler les contributions financières de la filière REP pour les produits contribuant à une information du public d'intérêt général sur la prévention et la gestion des déchets, notamment par la mise à disposition gratuite d'encarts, sous réserve de respecter des critères de performance environnementale fixés par décret.

è Cette modulation des contributions sous forme de prime pourra pleinement bénéficier aux publications de presse.

Les encarts que le secteur de la presse pourra mettre à disposition seront recentrés sur l'objet même des filières REP : la prévention et la gestion des déchets.

Les avantages de cette proposition sont nombreux...

Elle préserve l' intégrité de la REP en réintégrant la presse en son sein.

Elle est financièrement neutre pour le SPGD , car les primes versées devraient être compensées par la filière REP.

Elle offre des garanties environnementales , en conditionnant l'octroi des primes à l'atteinte de critères de performance environnementale.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et des producteurs de papier et exclusion des publications de presse du champ de la REP

Cet article poursuit un double objectif :

- fusionner les filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et des producteurs de papier ;

- exclure les publications de presse du champ de la REP, tout en conservant l'obligation existante de mise à disposition gratuite d'encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique.

L'Assemblée nationale a validé ce dispositif, en y apportant des précisions sur la prise en charge des coûts au sein de la filière ainsi créée, d'une part, et en apportant des garanties environnementales et des garanties pour les collectivités territoriales concernant la mise à disposition gratuite d'encarts publicitaires, d'autre part.

La commission approuve la fusion des filières REP, qui pourrait être source de simplification et de synergies. Elle a adopté un amendement COM-3 de la rapporteure supprimant le principe de non-mutualisation des coûts entre les filières, introduit par l'Assemblée nationale.

La commission a toutefois exprimé son opposition à l'exonération de la presse de la REP, telle que proposée par le texte adopté par l'Assemblée nationale. Sortir la presse de la REP serait un dangereux précédent susceptible de fragiliser l'ensemble des filières REP. La proposition induirait, de surcroît, un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets, actuellement affecté par une augmentation significative de ses charges. Le signal ainsi donné constituerait en définitive une régression environnementale et juridique par rapport à la loi « AGEC ».

Dans un souci de pragmatisme, la commission estime possible d'envisager une option alternative plus équilibrée, présentant l'avantage de concilier protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse : c'est le sens de l'amendement COM-2 de la rapporteure qu'elle a adopté. Cet amendement propose le maintien de la presse dans le champ de la REP, d'une part, tout en permettant de moduler les contributions financières de la filière REP pour les produits contribuant à une information du public d'intérêt général sur la prévention et la gestion des déchets, notamment par la mise à disposition gratuite d'encarts, d'autre part. Cette modulation des contributions pourra pleinement bénéficier aux publications de presse.

La commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié.

I. La presse, bénéficiaire d'un traitement dérogatoire au sein d'une filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) de papier, aujourd'hui distincte de la filière REP des producteurs d'emballages ménagers

A. La responsabilité élargie des producteurs (REP), une application du principe « pollueur-payeur » s'appliquant dans une vingtaine de filières

Le principe de responsabilité élargie des producteurs (REP), introduit par la loi du 15 juillet 1975 1 ( * ) , constitue une application du principe « pollueur-payeur » , en transférant la responsabilité de la prévention et de la gestion des déchets aux producteurs : ce principe est aujourd'hui fixé au I de l'article L. 541-10 du code de l'environnement.

L'essentiel des producteurs s'acquittent de cette obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation. Ils versent à cet éco-organisme une contribution financière appelée éco-contribution 2 ( * ) .

Les éco-organismes , agréés par les pouvoirs publics 3 ( * ) pour une durée maximale de six ans renouvelable, doivent répondre aux objectifs fixés par le cahier des charges annexé aux arrêtés portant cahier des charges des éco-organismes de la filière REP.

Deux modèles de fonctionnement des éco-organismes existent :

- les éco-organismes financiers : dans ce système, les éco-contributions collectées par les éco-organismes auprès des producteurs sont redistribuées aux collectivités territoriales 4 ( * ) assurant la collecte et le tri des déchets. Ce modèle concerne les déchets ménagers et assimilés , relevant du service public de gestion des déchets (SPGD) ;

- les éco-organismes organisationnels : dans ce système, les éco-contributions collectées auprès des producteurs sont utilisées par les éco-organismes pour contractualiser avec des opérateurs assurant la collecte et le traitement des déchets.

Certaines filières REP, mettant en oeuvre les deux modèles de financement, sont « mixtes ».

Avant la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire du 10 février 2020 (dite loi « AGEC ») 5 ( * ) , il existait douze filières REP, aujourd'hui mentionnées à l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement :

- les équipements électriques et électroniques (DEEE) 6 ( * ) (au 5°) ;

- les piles et accumulateurs 7 ( * ) (au 6°) ;

- les véhicules hors d'usage (VHU) 8 ( * ) (au 15°) ;

- les emballages ménagers 9 ( * ) (au 1°) ;

- les papiers imprimés et les papiers graphiques (au 3°) ;

- les éléments d'ameublement (DEA) 10 ( * ) (au 10°) ;

- les produits textiles, linges de maison et chaussures (au 11°) ;

- les produits chimiques ménagers (DDS) 11 ( * ) (au 7°) ;

- les pneumatiques (au 16°) ;

- les bateaux de plaisance ou de sport (au 18°) ;

- les dispositifs médicaux perforants utilisés par les patients en auto-traitement (DASRI) 12 ( * ) (au 9°) ;

- les médicaments à usage humain (au 8°).

La loi « AGEC » a complété cette liste par dix nouvelles filières, créées ou devant être créées entre 2021 et 2025 :

- les emballages professionnels (2025) 13 ( * ) , y compris les emballages utilisés par les professionnels de la restauration (2023 14 ( * ) ) (au 2°) ;

- les produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment (2022) (au 4°) 15 ( * ) ;

- les jouets (2022) (au 12°) ;

- les articles de sport et de loisirs (2022) (au 13°) ;

- les articles de bricolage et de jardin (2022) (au 14°) ;

- les huiles minérales ou synthétiques (2022) (au 17°) ;

- les produits du tabac (2021) (au même 19°) ;

- les gommes à mâcher (les chewing-gums ) (2024) (au 20°) ;

- les textiles sanitaires à usage unique (2024) (au 21°) ;

- les engins de pêche contenant du plastique (2025) (au 22°).

En plus du quasi-doublement des filières intégrées, la loi « AGEC » a largement modifié le régime des filières REP pour le rendre plus robuste : en aggravant notamment les sanctions associées (art. L. 541-9-5 et L. 541-9-6 du code de l'environnement), en instituant une instance de gouvernance - la commission inter-filières REP - et une instance de contrôle des filières - la direction de supervision des filières REP au sein de l'Agence de transition écologique (Ademe), ou encore en renforçant la modulation des éco-contributions .

Les contributions versées aux éco-organismes doivent ainsi être modulées sous la forme de primes ou de pénalités , en fonction de critères de performance environnementale , parmi lesquels la quantité de matière utilisée, l'incorporation de matière recyclée, l'emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, la visée publicitaire ou promotionnelle du produit, l'absence d'écotoxicité et la présence de substances dangereuses, en particulier lorsque celles-ci sont susceptibles de limiter la recyclabilité ou l'incorporation de matières recyclées (art. L. 541-10-3 du code de l'environnement).

À cet égard, la loi « AGEC » a prévu que ces primes ou pénalités - aussi appelées « éco-modulations » - puissent être supérieures au montant de l'éco-contribution versée par le producteur : elle a donc permis, théoriquement, à certains producteurs de bénéficier d'un soutien financier au titre de la REP.

B. Les REP emballages ménagers et papier : des REP financières, de taille inégale, soutenant le service public de gestion des déchets

1) La REP emballages ménagers : une filière historique, structurelle dans le financement du service public de gestion des déchets

La filière des producteurs d'emballages ménagers occupe, à plusieurs titres, une place particulière dans le système français des REP.

Elle est tout d'abord la plus ancienne filière REP , créée par un décret du 1 er avril 1992 16 ( * ) . Elle constitue, par ailleurs, la REP financière la plus emblématique : les emballages ménagers étant en effet collectés et triés dans le cadre du service public de gestion des déchets (SPGD), les contributions financières collectées par les éco-organismes financent directement les collectivités territoriales en charge de la collecte et du tri de ces déchets.

Le III de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement précise que les coûts supportés par le service public de gestion des déchets d'emballages ménagers sont pris en charge par les éco-contributions de la filière à hauteur de 80 % (en tenant compte des coûts de référence d'un service de gestion des déchets optimisé tenant compte de la vente des matières traitées). Cette exigence constitue la transcription en droit national de l'article 8 bis , point 4 de la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, qui prévoit un taux de couverture des coûts supportés par le SPGD d'au moins 80 % « pour les régimes de responsabilité élargie des producteurs mis en place en vue d'atteindre des objectifs de gestion des déchets fixés par les actes législatifs de l'Union ». Ce taux de couverture de 80 % constitue une dérogation au principe, posé par la directive, d'une couverture intégrale des coûts par les producteurs assujettis à la REP.

Les éco-organismes agréés pour les emballages ménagers sont au nombre de deux : Citeo - éco-organisme historique de la filière - et Léko - éco-organisme plus récent. Les agréments de la filière arrivent à leur terme à la fin de l'année 2023 : un nouvel agrément est donc bientôt attendu pour les années 2024-2030 .

Le tonnage contribuant à la REP a augmenté de manière continue depuis 10 ans, pour atteindre près de 5,4 millions de tonnes en 2020 (voir schéma ci-dessous).

Source : Ademe

Le montant total des éco-contributions a cru plus encore, passant de 420 millions d'euros en 2009 à 784 millions d'euros en 2020 , sous l'effet conjugué de la hausse des tonnages mis en marché, de l'évolution des tarifs et des modalités de l'éco-modulation.

Source : Ademe

Le montant des contributions perçues était de 850 millions d'euros en 2021 .

Ce chiffre pourrait dépasser les 900 millions d'euros en 2023 et continuer à croître dès 2024 en raison de la révision du cahier des charges de la filière, attendue d'ici la fin de l'année.

2) Une filière REP papier compétente sur un gisement de plus en plus restreint

Instituée en France en 2006, la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers imprimés et des papiers graphiques - filière nationale volontaire non imposée par le droit européen - couvre depuis le 1 er janvier 2017 tous les imprimés papiers , gratuits ou non, ainsi que les publications de presse et les imprimés découlant d'une mission de service public, à l'exception des livres . Elle couvrait, avant cette date, les seuls imprimés non sollicités.

Dans ce cadre, les metteurs sur le marché de ces papiers doivent prendre en charge le coût de la prévention et de la gestion des déchets qui en résultent.

Pour ce faire, les metteurs sur le marché versent une éco-contribution auprès d'un éco-organisme agréé pour cette filière. Le produit de l'éco-contribution est ensuite reversé aux collectivités territoriales qui ont la charge de la collecte, du tri et du recyclage des papiers, dans le cadre du service public de gestion des déchets (SPGD). À l'instar de la REP emballages ménagers, la REP papier est à ce titre considérée comme une filière financière .

En application de l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement, les éco-contributions sont modulées pour orienter les metteurs sur le marché vers l'éco-conception et la recyclabilité .

Source : Citeo

Citeo, également agréé pour la filière REP emballages ménagers, est aujourd'hui le seul éco-organisme agréé pour la filière REP papier . Cet agrément doit s'achever à la fin de l'année 2023 .

Les tonnages de papier collectés par les collectivités dans le cadre du SPGD baissent régulièrement depuis plusieurs années, notamment sous l'influence de la dématérialisation continue des activités ou encore du recul de la distribution des prospectus publicitaires .

Le graphique ci-après met en évidence cette baisse structurelle depuis le début des années 2010 , l'augmentation observée en 2017 s'expliquant par le changement de périmètre de la filière.

Source : Ademe

En dépit de l'augmentation continue de l'éco-contribution moyenne acquittée par tonne de papier, la baisse tendancielle du gisement ainsi que l'absence de contribution financière de la presse du fait de l'existence d'une « contribution en nature » (voir infra ) a conduit à un recul progressif des éco-contributions reversées aux collectivités territoriales .

Source : Ademe

Source : Ademe

Le montant de l'éco-contribution s'élevait ainsi à 62 millions d'euros en 2020.

En appliquant les taux de soutien actuellement prévus dans le cahier des charges de la filière REP, le soutien pourrait atteindre, en 2023, 67 millions d'euros pour l'ensemble des collectivités .

La charge supportée par les collectivités territoriales est d'autant plus grande qu'il existe, dans le cadre de la filière REP papier, un « taux d'acquittement » qui prévoit, à la différence de l'ensemble des autres filières REP, que les coûts induits par les déchets de papier issus des metteurs sur le marché assujettis à la filière REP, mais qui ne contribuent pas à un éco-organisme, soit supportée par les collectivités et non par les autres metteurs sur le marché.

Il revient ainsi aux collectivités de prendre en charge les coûts de collecte des producteurs qui ne contribuent pas financièrement, soit :

- les assujettis qui ne remplissent pas leurs obligations ;

- ceux qui en sont exonérés par la loi (ex. livres) ;

- les entreprises de presse qui s'acquittent d'une contrepartie du fait de leur « contribution en nature ».

Le manque à gagner induit par le taux d'acquittement - hors exonération des entreprises de presse du fait de la contribution en nature - est estimé à 13 millions d'euros en 2023 .

De plus, contrairement à la REP emballages, le taux de soutien des collectivités par la filière REP papier n'a pas été réévalué en 2022 . La mise à jour de ce taux de soutien en 2023 pourrait accroître le montant de l'éco-contribution de 24 millions d'euros .

En cas de révision du taux de soutien des collectivités pour 2023, dans l'hypothèse d'une suppression du taux d'acquittement et d'un maintien de l'exonération financière dont bénéficie la presse, le soutien total que l'éco-organisme apporterait aux collectivités serait de 104 millions d'euros en 2023 .

C. Une possibilité dérogatoire pour la presse papier de ne pas contribuer financièrement au service public de gestion des déchets qui prend fin en 2023

1) Un cadre dérogatoire appliqué à la presse jusqu'en janvier 2023

La presse , qui représente 21 % du tonnage soumis à la REP papier 17 ( * ) , bénéficie depuis son inclusion dans le champ de la filière, en janvier 2017, d'un dispositif dérogatoire lui permettant de contribuer « en nature » , contrepartie au non-versement de l'éco-contribution.

L'article 91 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a ainsi permis le versement des contributions sous forme de prestations en nature, à travers la mise à disposition d'encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.

La possibilité de contribuer en nature est toutefois entrée en contradiction avec la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets qui prévoit explicitement, en son article 8 bis , point 4, que les metteurs sur le marché versent des « contributions financières » dans le cadre de la REP à laquelle ils appartiennent.

Par ailleurs, le même article 8 bis , point 4, prévoit, pour les REP mises en place avant le 4 juillet 2018 en vue d'atteindre des objectifs de gestion des déchets fixés uniquement par une législation nationale, que les producteurs de produits supportent au moins 50 % des coûts induits . Cette exigence a été transcrite dans notre droit à l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement, qui prévoit une exigence de couverture des coûts supportés par le SPGD (en fonction des coûts de référence d'un service de gestion des déchets optimisé tenant compte de la vente des matières traitées) à hauteur d'au moins 50 %, au plus tard le 1 er janvier 2023 pour les déchets d'imprimés papiers et de papiers à usage graphique. Ce taux de couverture de 50 % constitue une dérogation au principe, posé par la directive, d'une couverture intégrale des coûts par les producteurs assujettis à la REP.

En 2019, le taux de couverture des coûts dans la filière papier, inférieur, était d'environ 30 % 18 ( * ) . Pour 2023 , le coût net du système optimisé de gestion des papiers graphiques soumis à la filière REP et pris en charge par les collectivités est estimé à 208 millions d'euros. En appliquant les taux de soutien actuellement prévu dans le cahier des charges de la filière REP, le soutien s'élèvera en 2023 à 67 millions d'euros pour l'ensemble des collectivités, pour un taux de couverture du SPGD de 32 % .

L'obligation d'une contribution financière à la REP et la nécessité d'augmenter le taux de prise en charge des coûts par la filière ont ainsi conduit le législateur à mettre fin, à l'occasion de la loi « AGEC » 19 ( * ) , sur proposition du Gouvernement, au régime dérogatoire dont bénéficiait la presse à compter de janvier 2023. Cette évolution avait été présentée par le Gouvernement comme l'unique solution pour mettre la filière REP papier en conformité avec le droit de l'Union européenne .

La presse a donc continué à bénéficier de la « contribution en nature » de la promulgation de la loi AGEC jusqu'au 1 er janvier 2023 .

Ce bénéfice a toutefois été conditionné à l'intégration de fibres recyclées dans les publications , de manière à ce que la teneur en fibres recyclées des papiers de presse mis sur le marché atteigne, en moyenne, un taux d'au moins 50 % avant le 1 er janvier 2023 (article L. 541-10-19 du code de l'environnement, créé par l'article 72 de la loi « AGEC »).

Le même article L. 541-10-19 a par ailleurs déterminé les modalités de mise en oeuvre de cette mise à disposition gratuite de ces encarts publicitaires, destinés à informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des papiers graphiques et des autres déchets :

- la gestion de ces encarts devait être assurée par l'éco-organisme , dans le cadre de conventions de partenariat avec des associations environnementales, des associations de consommateurs, des représentants de collectivités territoriales et les éco-organismes agréés pour d'autres filières REP, afin de mener des campagnes de communication nationales et régionales ;

- les collectivités territoriales compétentes en matière de gestion des déchets pouvaient solliciter la mise à disposition des encarts de la presse locale publiée à l'échelle territoriale correspondante ;

- les projets de messages devaient être soumis pour avis au comité des parties prenantes de chacun des éco-organismes concernés . En cas d'avis défavorable, ils devaient être soumis à l'avis conforme de l'autorité administrative.

Un décret du 29 décembre 2020 20 ( * ) , modifiant les articles D. 543-212, D. 543-212-1 à D. 543-212-3 du code de l'environnement, ainsi qu'un arrêté du 1 er octobre 2021 21 ( * ) pris sur le fondement de l'article D. 543-212-3, ont notamment précisé les modalités d'évaluation de la contribution en nature par équivalence au montant de la contribution financière due et les critères de performance environnementale ouvrant droit à la contribution en nature.

Ces dispositions réglementaires ont été abrogées le 1 er janvier 2023.

Équivalence entre la contribution en nature et la contribution financière
(résumé de l'article 2 de l'arrêté du 1 er octobre 2021)

L'éco-organisme doit indiquer au donneur d'ordre le montant de sa contribution au titre de son obligation de responsabilité élargie compte tenu de la déclaration de tonnage annuel de publications mises sur le marché l'année précédente. Le donneur d'ordre doit alors indiquer à l'éco-organisme le montant qu'il compte acquitter par la mise à disposition d'encarts publicitaires.

La valorisation d'un encart publicitaire mis à disposition dans le cadre de la contribution en nature est établie à 50 % du tarif public affiché par l'éditeur.

À l'issue de l'année, la part de contribution éligible à un acquittement sous forme de prestations en nature est corrigée en fonction des quantités de publications mises sur le marché et du respect effectif des critères de performance environnementale.

Lorsque la contribution en nature éligible corrigée est inférieure au montant de contribution en nature que le donneur d'ordre s'était engagé à acquitter, il est procédé à une régularisation de la contribution sous forme financière, ou sous forme de contributions en nature, en tenant compte de la quantité d'encarts qui ont été effectivement mis à disposition. Lorsque la contribution en nature éligible corrigée est supérieure au montant de la contribution en nature qu'il s'était engagé à acquitter, l'éco-organisme peut proposer des modalités de régularisation, dans la limite de la contribution en nature éligible corrigée. Lorsque la contribution en nature correspondant à la quantité d'encarts qui ont été effectivement mis à disposition est supérieure à la contribution en nature éligible corrigée, il n'est pas procédé à une régularisation.

Critères de performance environnementale ouvrant droit à la contribution en nature (article D. 543-212-2)

« I. - La teneur minimale en fibres recyclées du papier permettant à un donneur d'ordre d'être éligible aux prestations en nature est :

1° Pour les publications de presse imprimées sur papier journal, de 50 % à compter du 1 er janvier 2021 ;

2° Pour les publications de presse autres que celles mentionnées au 1°, la teneur minimale en fibres recyclées du papier est fixée à 10 % à compter du 1 er janvier 2022. Aucune teneur minimale n'est exigée en 2021.

Les autres fibres sont issues de forêts durablement gérées.

II. - Lorsque les conditions mentionnées au I sont remplies, les donneurs d'ordre peuvent s'acquitter de leur contribution sous forme de prestations en nature sous réserve que leurs publications répondent aux critères définis au III. Chacun d'entre eux permet d'utiliser la prestation en nature comme mode de règlement de la contribution financière due dans la limite d'un cinquième de son montant arrondi à l'euro inférieur.

III. - Les critères mentionnés au II sont les suivants :

1° La teneur minimale en fibres recyclées du papier doit être de 50 % puis de 75 % à compter respectivement du 1 er janvier 2021 et du 1 er janvier 2022 pour les publications de presse imprimées sur papier journal et de 10 % puis de 50 % respectivement à compter des mêmes dates s'agissant des autres publications de presse ;

2° La publication ne doit pas contenir plus d'un élément perturbateur du recyclage. Pour l'application de ce critère, jusqu'au 31 décembre 2021, les emballages destinés à l'acheminement d'une publication dans le cadre d'un abonnement ne sont pas comptabilisés dans les éléments perturbateurs du recyclage ;

3° Le cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier sur lequel est imprimée la publication, l'imprimerie dans laquelle elle est imprimée et le centre principal de diffusion de la publication doit être inférieur à 1 500 km ;

4° Les informations relatives aux caractéristiques environnementales de la publication qui sont mentionnées dans l'arrêté prévu à l'article D. 543-212-3 doivent être indiquées en caractères apparents dans celle-ci ;

5° La publication doit être imprimée sans ajout d'huiles minérales ou avec des encres à faible teneur en huiles minérales.

Le critère mentionné au 5° ne s'applique pas aux publications pour lesquelles il n'existe pas d'encres alternatives aux encres avec ajout d'huiles minérales ou pour lesquelles la technologie d'impression utilisée ne nécessite pas l'emploi de telles encres. Dans ce cas, la part de contribution en nature est portée à un quart pour chacun des autres critères mentionnés au présent article lorsqu'ils sont respectés. »

En l'état du droit, la presse papier doit donc contribuer financièrement à la REP papier depuis janvier 2023 .

En ce qui concerne l' estimation des contributions dues au titre de cette année, en tenant compte de la prochaine revalorisation des taux de soutien à la tonne des collectivités par l'éco-organisme, celles-ci s'élèveraient à 22 millions d'euros en cas de maintien du « taux d'acquittement » et à 26 millions d'euros en cas de suppression de celui-ci .

2) Une participation massive des metteurs sur le marché au système de contribution en nature, mais une faible adhésion des collectivités territoriales

Au total, 480 metteurs sur le marché ont bénéficié de la contribution en nature en 2021 . Le secteur d'activité de la presse a ainsi pu s'acquitter de sa contribution à hauteur de 90 % sous forme de prestations en nature .

La répartition entre contribution en nature et contribution financière est la suivante pour cette même année 2021 :

Catégorie

Contribution financière

Contribution en nature

Contribution totale

Presse payante sur papier journal

0,3 M€

7,5 M€

7,8 M€

Presse magazine

1,4 M€

6,2 M€

7,6 M€

Presse gratuite d'information

0 M€

0,4 M€

0,4 M€

Total

1,7 M€

14,1 M€

15,9 M€

9 campagnes de sensibilisation ont été dernièrement mises en oeuvre sur ce fondement. Les bénéficiaires ont été :

- des collectivités territoriales via la presse locale :

*Aix Marseille Métropole ;

*Nice Métropole ;

*Corse (SYVADEC).

- des éco-organismes :

*Citeo, dans le cadre de la filière Papiers graphiques ;

*Citeo, dans le cadre de la filière Emballages ;

*Corepile et Srelec, dans le cadre de la filière Piles et accumulateurs ;

*Dastri, dans le cadre de la filière Dispositifs médicaux perforants utilisés par les patients en auto-traitement ;

*Pyreo, concernant les engins de signalisation de détresse, dans le cadre de la filière Produits chimiques (DDS).

- une association environnementale :

*France nature environnement.

II. La proposition de loi initiale des députés : exclure la presse de la REP et fusionner les REP emballages ménagers et papier

L'article 1 er de la proposition de loi initiale vise, d'une part, à exonérer la presse du paiement de la contribution financière, tout en maintenant le système existant de « contribution en nature ».

Il propose, d'autre part, la fusion les filières REP emballages ménagers et papier.

A. Exonérer la presse du paiement de la contribution financière, tout en maintenant la « contribution en nature », par une exclusion de la REP

La proposition de loi s'inscrit dans un contexte particulièrement difficile pour le secteur de la presse qui n'est pas épargné par l'inflation :

- le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Si l'ensemble de la presse est touché à des degrés divers, la presse quotidienne régionale - dont la pagination est importante - l'est particulièrement.

- la hausse du coût de l'énergie affecte également les coûts de distribution, de transport et de fabrication de la presse.

Le graphique suivant montre par ailleurs l'évolution du coût de production de papier et carton (base 100 en 2015).

Source : INSEE

Ces difficultés conjoncturelles s'ajoutent à des fragilités économiques structurelles : depuis plusieurs années, les ventes de la presse papier diminuent de 5 % par an . Entre 2011 et 2021, d'après l'Alliance de la presse d'information générale, association regroupant plusieurs syndicats de presse, le nombre de journaux imprimés a ainsi diminué de 41 %.

Pour aider le secteur à faire face à ces difficultés conjoncturelles et structurelles, l'article 1 er de la proposition de loi vise à exonérer la presse du paiement de la contribution financière - soit 22 à 26 millions d'euros en 2023 dans l'hypothèse d'une réévaluation du taux de soutien de la filière REP papier aux collectivités territoriales - tout en maintenant le système existant de « contribution en nature » .

Le texte initial prévoit ainsi :

- la conclusion d'une convention de partenariat entre le ministre chargé de l'environnement, le ministre chargé de la communication et les organisations professionnelles d'entreprises de presse représentatives afin de déterminer les conditions dans lesquelles les publications de presse, au sens de l'article 1 er de la loi n° 86-897 du 1 er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, mettent gratuitement à disposition des espaces de communication destinés à informer le public sur la transition écologique . Le 3° de l'article 1 er procède pour ce faire à une réécriture de l'article L. 541-10-19 du code de l'environnement ;

- l' exclusion de la presse de la REP papier . À cette fin, l'article 1 er exclut explicitement les publications de presse , au sens de l'article 1 er de la loi n° 86-897 du 1 er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, de la liste des produits ou matériaux dont les producteurs sont assujettis à la REP , inscrite à l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, à condition que ces publications participent à la convention de partenariat précédemment évoquée (cinquième alinéa de l'article 1 er ).

La proposition de loi pérennise ainsi le système de la « contribution en nature », en plaçant toutefois ce système en dehors du champ de la REP .

Le maintien du système de « contribution en nature » en dehors de la REP vise à garantir la conformité de la proposition de loi à l'article 8 bis , point 4, de la directive (UE) 2018/851 du 30 mai 2018 , qui impose explicitement aux metteurs sur le marché de verser des « contributions financières » dans le cadre de la REP à laquelle ils appartiennent (voir supra ). Par ailleurs, le maintien de la presse dans la REP papier, sans versement d'une contribution financière, aurait, à droit et pratique constants, conduit à une méconnaissance de l'obligation de couverture des coûts du SPGD à hauteur d'au moins 50 % (voir supra ).

B. Une fusion des REP emballages ménagers et papier

L'article 1 er de la proposition de loi initiale vise, d'autre part, à fusionner les filières REP emballages ménagers et papier.

Le 1° de l'article réorganise ainsi la rédaction de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, qui liste les produits ou matériaux dont les producteurs sont assujettis à la REP, pour regrouper au sein d'un même 1° d'une part (« a) ») les emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les ménages et ceux consommés hors foyer et, d'autre part (« b) »), les imprimés papiers et les papiers à usage graphique . Le même 1° abroge en conséquence le 3° de l'article L. 541-10-1 qui assujettit actuellement les imprimés papiers et les papiers à usage graphique à la REP.

Le 2° de l'article 1 er procède à une coordination au III de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement relatif à la prise en charge des coûts du service public de gestion des déchets par les éco-contributions versées par les producteurs assujettis aux REP emballages ménagers et papiers.

La fusion des filières REP passera par l' adaptation des textes réglementaires d'application et la mise à jour du cahier des charges définissant les obligations pour les éco-organismes qui voudraient être agréés pour la filière.

Deux options sont à disposition :

- un cahier des charges et un agrément unique pour l'ensemble du gisement ;

- des cahiers des charges et des agréments distincts avec des objectifs différenciés pour les emballages ménagers et les papiers.

Selon le ministère de la transition écologique interrogé par la rapporteure, « un agrément unique serait plus à même d'apporter les bénéfices attendus en termes de synergie entre les emballages et les papiers graphiques et permettrait d'imposer un contrat unique pour l'ensemble de la filière « emballages ménagers » et « papiers graphiques » entre les éco-organismes et les collectivités, ce qui permettra une simplification contractuelle. En cas d'agrément séparé, les synergies seront essentiellement administratives à travers un cahier des charges unique et un calendrier commun entre les deux catégories d'agrément. »

III. L'examen à l'Assemblée nationale : des précisions et garanties apportées, sans remise en cause de la fusion des filières et de l'exclusion de la presse de la REP

A. Des garanties environnementales et des garanties pour les collectivités territoriales concernant la mise à disposition gratuite d'encarts publicitaires

En commission du développement durable et de l'aménagement du territoire et en séance publique, l'Assemblée nationale a tout d'abord apporté plusieurs précisions concernant la mise à disposition gratuite d'encarts publicitaires.

1) Le contenu des encarts publicitaires : des communications recentrées sur le tri des déchets, l'économie circulaire et la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité

L'objet de ces encarts a été précisé par un amendement n° CD28 de Mme Danielle Brulebois, modifié par un sous-amendement n° CD69 du rapporteur M. Denis Masséglia, adoptés en commission, ainsi que par un amendement n° 43 de M. Alexandre Portier, adopté en séance publique : ils seront destinés à informer le public exclusivement sur le tri des déchets, l'économie circulaire et la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité .

Un amendement n° CD21 de M. Guy Bricout, adopté en commission, a par ailleurs prévu que le contenu de ces communications soit établi en concertation avec les parties prenantes .

2) Les bénéficiaires des encarts publicitaires précisés : collectivités territoriales, EPCI, communication des filières REP, et ONG

Un amendement n° CD57 du rapporteur adopté en commission, ainsi que plusieurs amendements adoptés en séance publique ( n° 11 de M. Jean-Jacques Gaultier et n° 13 de Mme Danielle Brulebois, sous-amendés par un sous-amendement n° 45 du Gouvernement, ainsi qu'un amendement n° 51 du Gouvernement) ont prévu que la convention précise notamment les conditions dans lesquelles la majorité des encarts mis gratuitement à disposition peut être utilisée par les collectivités territoriales , par les établissements publics de coopération intercommunale , par les structures à but non lucratif chargées de gérer, pour le compte des producteurs, la fin de vie de leurs produits dans le cadre des actions de communication inter-filières mentionnées à l'article L. 541-10-2-1 du code de l'environnement et par les associations agréées pour la protection de l'environnement.

3) Des engagements environnementaux demandés aux publications de presse

Le même amendement n° CD57, adopté en commission sur proposition du rapporteur, a également prévu que la convention de partenariat définisse des critères de performance environnementale que les publications s'engagent à respecter, ces critères devant notamment porter sur l' écoconception des publications de presse et la teneur minimale en fibres recyclées afin de garantir un taux élevé de recyclage et sur l' élimination de l'usage des huiles minérales dans les encres d'impression.

Un amendement n° 35 de M. Nicolas Thierry adopté en séance publique, modifié par trois sous-amendements n° 46 , 47 et 48 du rapporteur, a précisé que ces critères ne peuvent être moins exigeants d'un point de vue écologique que ceux définis en application de l'article L. 541-10-19 du code de l'environnement, dans sa version issue de la loi « AGEC » .

4) Des précisions sur les modalités d'élaboration et d'application de la convention de partenariat

Plusieurs amendements ont enfin été adoptés en commission et en séance publique concernant les modalités d'élaboration et d'application de la convention de partenariat .

L'amendement n° CD57 du rapporteur, adopté en commission et précédemment évoqué, a prévu que la convention de partenariat soit établie après une consultation des collectivités territoriales .

Des amendements, adoptés en commission à l'initiative du rapporteur, prévoient par ailleurs que la convention de partenariat soit conclue par l'État plutôt que par le ministre chargé de l'environnement, le ministre chargé de la communication ( n° CD60 ), pour une durée de trois ans renouvelable ( n° CD61 ).

Enfin, un amendement n° 18 de M. Anthony Brosse adopté en séance publique, modifié par deux sous-amendements du rapporteur n° 49 et 50 , prévoit que les syndicats de presse estiment annuellement la valeur et le nombre des encarts publicitaires mis gratuitement à disposition. Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale devront être informés de ces estimations.

5) Des modalités d'application précisées par décret

L'amendement n° CD57 du rapporteur, adopté en commission et précédemment évoqué, dispose que les modalités d'application de l'article L. 541-10-19, tel que modifié par la présente proposition de loi, seront déterminées par décret .

B. Des précisions apportées quant à la fusion des filières REP, notamment afin de ne pas mutualiser les coûts des deux filières

En commission, l'Assemblée nationale a par ailleurs procédé à deux modifications concernant la fusion des filières REP.

D'une part, l'amendement n° CD64 du rapporteur, adopté en commission, vise à préciser que les producteurs d'emballages et de papiers couvriront exclusivement les coûts de gestion qui découlent de leurs produits respectif s. À cette fin, il complète le III de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement relatif à la prise en charge des coûts du service public de gestion des déchets par les éco-contributions versées par les producteurs assujettis aux REP emballages ménagers et papiers.

D'autre part, l'amendement n° CD62 du rapporteur, adopté en commission, apporte une précision rédactionnelle, afin de réunir les deux gisements dans un 1° unique de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement, sans distinction entre un a) et un b), comme le faisait la proposition de loi initiale.

Un amendement n° CD65 du rapporteur adopté en commission opère enfin une coordination rédactionnelle à l'article L. 541-10-25 du code de l'environnement, relatif à la filière REP portant sur les produits chimiques.

IV. La position de la commission : maintenir la presse dans la REP, tout en offrant des garanties au secteur, et fusionner les filières REP emballages ménagers et papier, pour simplifier et renforcer les synergies

A. Une fusion des filières REP qui pourrait être source de simplification et de synergies

La fusion proposée pourrait, à tout le moins, constituer une source de simplification administrative bienvenue , notamment pour les collectivités territoriales, qui pourront contractualiser avec l'éco-organisme via un contrat unique, en lieu et place de deux contrats distincts.

Elle pourrait, par ailleurs, répondre au mouvement accompagné par la loi « AGEC », qui a prévu une harmonisation des systèmes de collecte des déchets d'emballages et de papiers sur l'ensemble du territoire national au plus tard le 31 décembre 2022 (art. L. 541-10-18 du code de l'environnement) : ce dispositif est désormais en place sur la quasi-totalité du territoire , l'ensemble des emballages (hors verre) et papier étant collectés dans un même bac de tri afin de faciliter le geste de tri pour les citoyens.

La fusion pourrait même contribuer à renforcer les synergies entre les deux filières , notamment dans un contexte de recours accru aux papiers et cartons pour les emballages en remplacement des emballages plastiques. La fusion permettrait ainsi de renforcer les synergies en matière d'écoconception , par exemple pour remplacer des substances, telles que les huiles minérales, dont la loi « AGEC » a prévu l'interdiction tant pour les emballages (1 er janvier 2022) que pour les papiers graphiques (1 er janvier 2023 pour les lettres de prospectus publicitaires et de catalogues non sollicités visant à faire de la promotion commerciale ; 1 er janvier 2025 pour des impressions à destination du public) 22 ( * ) .

Ces éléments d'appréciation n'écartent toutefois pas l'ensemble des interrogations soulevées par le texte adopté par l'Assemblée nationale et par ses implications.

1) Des implications sur le taux de couverture des coûts supportés par le SPGD ?

La rapporteure s'est tout d'abord interrogée sur l'implication de la fusion des filières REP sur le taux de couverture des coûts supportés par le SPGD (le III de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement fixant ce taux à 80 % pour les déchets d'emballages ménagers et à 50 % pour les déchets d'imprimés papiers et de papiers à usage graphique).

L'article 8 bis , point 4, de la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets, prévoit en effet un taux de couverture des coûts supportés par le SPGD d'au moins 80 % « pour les régimes de responsabilité élargie des producteurs mis en place en vue d'atteindre des objectifs de gestion des déchets fixés par les actes législatifs de l'Union » et « pour les régimes de responsabilité élargie des producteurs mis en place le 4 juillet 2018 ou après cette date en vue d'atteindre des objectifs de gestion des déchets fixés uniquement par la législation de l'État membre ».

Or, la filière qui résulterait de la présente proposition de loi serait mise en place après la date du 4 juillet 2018 : la fusion des filières pourrait-elle, dès lors, impliquer d'harmoniser à 80 % le taux de prise en charge des coûts supportés par le SPGD ?

La rapporteure estime que la directive devrait permettre à la filière papier de conserver le bénéfice d'un taux de 50 % , dès lors qu'elle était déjà assujettie à la REP avant juillet 2018.

2) La non-mutualisation des coûts des deux filières : un ajout de l'Assemblée nationale contraire à l'objet du texte

La commission estime par ailleurs que les alinéas introduits à l'Assemblée nationale, prévoyant que les éco-contributions versées par les producteurs d'emballages et de papiers couvrent exclusivement les coûts de gestion des déchets issus respectivement des emballages et des papiers, ne sont pas opportuns : ils limitent la portée de la fusion en empêchant effectivement les possibilités de synergie financière entre les emballages et les papiers graphiques.

Cette précision ne semble en tout état de cause pas nécessaire au respect du principe d'égalité de traitement des producteurs de produits , inscrit à l'article 8 de la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets.

Par ailleurs, la rédaction proposée entre en contradiction avec l'article L. 541-10-2 du code de l'environnement , qui prévoit que les coûts qui doivent être supportés par la REP vont au-delà des seuls coûts de gestion des déchets .

La commission a donc adopté un amendement COM-3 supprimant le principe de non-mutualisation des coûts introduit par l'Assemblée nationale .

B. Exclusion de la presse de la REP : ajuster une proposition déséquilibrée, pour mieux concilier protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse

1) Sortir la presse de la REP : un dangereux précédent, un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets, une régression environnementale et juridique

La commission est défavorable à l'exclusion de la presse de la REP , telle que proposée par le texte adopté par l'Assemblée nationale.

(a) Un dangereux précédent, qui pourrait fragiliser l'ensemble des REP

Sortir la presse de la REP pourrait tout d'abord constituer un dangereux précédent qui pourrait affaiblir l'ensemble des REP.

Ce serait en effet la première fois dans l'histoire de ce système - né en France dans les années 1990 et ayant essaimé partout en Europe - qu'un gisement serait retiré de la REP.

D'autres secteurs pourraient se fonder sur ce précédent pour demander des aménagements et des exonérations à l'avenir , au détriment des collectivités territoriales et de la protection de l'environnement.

(b) Un manque à gagner pour le service public de gestion des déchets

Le dispositif proposé aura de surcroît un impact financier sur le service public de gestion des déchets (SPGD) géré par les collectivités territoriales .

Si ce manque à gagner ne saurait être surestimé au regard du coût total du SPGD 23 ( * ) , le texte s'inscrit toutefois dans un contexte d'augmentation des charges du SPGD, causée notamment par la hausse des prix de l'énergie ou encore l'augmentation significative de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

(c) Une régression environnementale et juridique

Enfin, le texte initialement proposé constitue une régression environnementale et juridique par rapport au dispositif de « contribution en nature » transitoire issu de la loi « AGEC ». La rapporteure note les améliorations apportées par les députés à ce sujet , mais les estime insuffisantes.

La principale difficulté réside dans le support juridique choisi par les auteurs de la proposition de loi - une convention de partenariat plutôt qu'un acte réglementaire - pour organiser le système des encarts publicitaires et inscrire les critères de performance environnementale que les publications de presse devront respecter.

L'outil que constitue la convention de partenariat, qui fera nécessairement l'objet d'une négociation, risque inévitablement d'affaiblir l'État dans sa relation avec les syndicats de presse . Il n'existe à cet égard aucune garantie que ses intentions soient fidèlement retranscrites et donc appliquées par les publications, en matière environnementale ou de mise à disposition des encarts.

De plus, dans la version adoptée par l'Assemblée nationale, la seule condition posée pour l'exonération de la presse des obligations de la filière REP est de « participer » à la convention de partenariat . Le texte ne prévoit donc aucune sanction du non-respect des engagements environnementaux ou de mise à disposition gratuite des encarts, contrairement au système transitoire issu de la loi « AGEC », qui prévoyait explicitement que les publications de presse qui ne contribuaient pas en nature devaient alors contribuer financièrement à la filière. L'accès à la « contribution en nature » était également très clairement conditionné au respect des engagements environnementaux.

Pareillement, la proposition de loi ne détaille pas la valeur de la « contribution en nature » à laquelle les publications de presse seront assujetties. Le système transitoire issu de la loi « AGEC » prévoyait une équivalence entre contribution en nature et contribution financière : un assujettissement à la contribution financière pouvait ainsi être décidé dans les cas où la valeur de la contribution en nature réellement acquittée était inférieure au montant dû en principe au titre de la REP.

2) La possibilité d'un dispositif alternatif, conciliant protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse

La commission regrette avant tout que des alternatives au dispositif proposé n'aient pas été explorées par les auteurs de la proposition de loi, par le Gouvernement ou par l'Assemblée nationale.

La rapporteure rejoint certes le constat partagé selon lequel le maintien de l'état du droit antérieur au 1 er janvier 2023 - maintien de la presse dans le champ de la REP papier et mise à disposition gratuite d'encarts publicitaires - serait contraire au droit européen .

La commission estime toutefois nécessaire d'envisager une option alternative, conciliant protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse : c'est le sens de l'amendement COM-2 de la rapporteure qu'elle a adopté .

Cet amendement maintient tout d'abord la presse papier dans le champ de la REP, en procédant ainsi à une réécriture du 1° de l'article L. 541-10-1.

Par ailleurs, l'amendement vise à ce que le montant de la contribution financière des produits assujettis à la nouvelle REP fusionnée puisse être modulé sous forme de prime , lorsque ces produits contribuent à une information du public d'intérêt général sur la prévention et la gestion des déchets, en particulier sur le geste de tri, notamment par la mise à disposition gratuite d'encarts d'information , sous réserve que ces produits respectent par ailleurs des critères de performance environnementale. Les modalités de mise à disposition gratuite des encarts d'information, leurs caractéristiques techniques et les critères de performance environnementale devront être définis par décret . Cette modulation des contributions financières pourra pleinement bénéficier aux publications de presse . Les encarts que le secteur de la presse pourra mettre à disposition seront recentrés sur l'objet même des filières REP : la prévention et la gestion des déchets .

Cette précision serait inscrite à l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement, article ayant vocation à rassembler l'ensemble des dispositions propres à la nouvelle REP fusionnée. L'amendement abroge, en conséquence, l'article L. 541-10-19 qui comportait les dispositions propres à la REP papier.

Au cours des travaux préparatoires à la loi « AGEC », cette option avait été envisagée par les services ministériels dans leur réponse au questionnaire de la rapporteure Marta de Cidrac 24 ( * ) .

Cette solution présente plusieurs avantages :

- elle préserve l'intégrité de la REP en réintégrant la presse en son sein ;

- elle est financièrement neutre pour le service public de gestion des déchets , car les primes versées devraient être compensées par une augmentation des contributions des autres metteurs sur le marché soumis à la même filière REP, soit via le renforcement des pénalités sur d'autres critères, soit via une augmentation de la contribution de base ;

- elle offre des garanties environnementales , en conditionnant l'octroi de la prime à l'atteinte de critères de performance environnementale.

La commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié.

Article 2

Entrée en vigueur rétroactive de l'article 1er

Cet article prévoit une entrée en vigueur rétroactive de l'article 1 er de la présente proposition de loi au 1 er janvier 2023.

À l'Assemblée nationale, il a été précisé que les agréments des éco-organismes devront être mis en conformité avec le même article 1 er lors de leur prochain renouvellement, en décembre 2023.

La commission, sous le bénéfice d'un amendement de clarification, a adopté l'article 2 ainsi modifié.

I. Une entrée en vigueur rétroactive de l'article 1 er

L'article 2 de la proposition de loi prévoit une entrée en vigueur rétroactive de l'article 1 er de la présente proposition de loi au 1 er janvier 2023.

En l'état du droit, le système dérogatoire permettant à la presse de contribuer « en nature » à la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers imprimés et des papiers graphiques, en lieu et place d'une contribution financière, prend fin le 1 er janvier 2023.

L'article 2 vise ainsi à éviter le versement des contributions financières par les publications de presse pour la période comprise entre le 1 er janvier 2023 et la promulgation éventuelle de la proposition de loi.

II. À l'Assemblée nationale, une précision ajoutée dans le texte adopté tendant à ce que les agréments des éco-organismes ne soient mis en conformité que lors de leur prochain renouvellement

En séance publique, un amendement n° 9 de la rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, Mme Géraldine Bannier, a été adopté afin de compléter l'article 2 de la proposition de loi par un II, pour préciser que les agréments des éco-organismes mentionnés au V de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement seront mis en conformité avec l'article 1 er de la présente loi lors de leur prochain renouvellement , qui doit intervenir avant janvier 2024.

III. Une entrée en vigueur rétroactive justifiée par les difficultés du secteur de la presse

La commission accueille favorablement cette entrée en vigueur rétroactive .

La rapporteure a toutefois constaté que les éco-organismes mentionnés au V de l'article L. 541-10-18 du code de l'environnement, visés au II de l'article 2, sont ceux mis en place par les producteurs des produits mentionnés aux 1° et 2° de l'article L. 541-10-1 du même code, soit :

- les emballages ménagers ainsi que, en application de l'article 1 er de la proposition de loi qui fusionne les filières REP emballages ménagers et papier dans un 1° de l'article L. 541-10-1, les papiers imprimés et les papiers graphiques ;

- les emballages professionnels (2° du même article).

La commission a donc adopté, sur sa proposition, un amendement COM-4 recentrant la rédaction sur les éco-organismes mis en place en application du 1° de l'article L. 541-10-1. Cet amendement précise par ailleurs que les agréments devront être mis à jour au plus tard le 1 er janvier 2024, date avant laquelle leur renouvellement est prévu.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3

Demande de rapport sur les conséquences de la proposition de loi,
en particulier de l'exclusion des publications de presse du champ
de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP)
des papiers imprimés et des papiers graphiques

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement évaluant les impacts de la proposition de loi. Le rapport doit, en particulier, évaluer la pertinence et les impacts de l'exemption des publications de presse du champ de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers imprimés et des papiers graphiques ainsi que les impacts de la contribution en nature du secteur de la presse. Ce rapport doit également évaluer l'opportunité d'étendre au secteur de la presse l'obligation d'éco-contribution.

Les évolutions apportées à l'article 1 er rendant cette demande de rapport sans objet, la commission a supprimé l'article 3.

L'article 3, introduit à l'Assemblée nationale en commission par un amendement n° CD26 de M. Vincent Thiébaut, prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la proposition de loi, d'un rapport évaluant les impacts du texte. Le rapport doit, en particulier, évaluer la pertinence et les impacts de l'exemption des publications de presse du champ de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers imprimés et des papiers graphiques ainsi que les impacts de la contribution en nature du secteur de la presse. Ce rapport doit également évaluer l'opportunité d'étendre au secteur de la presse l'obligation d'éco-contribution.

Les évolutions apportées par la commission à l'article 1 er rendent la demande de rapport prévue par le présent article 3 sans objet.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a donc adopté un amendement COM-5 de suppression de cet article.

La commission a supprimé l'article 3.

Article 4

Demande de rapport sur l'application de la loi

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'application de la proposition de loi, évaluant par ailleurs la mise en oeuvre de la convention de partenariat et établissant un bilan du respect des critères de performance environnementale que cette convention définit.

Les évolutions apportées à l'article 1 er rendant cette demande de rapport sans objet, la commission a supprimé l'article 4.

L'article 4, introduit à l'Assemblée nationale en commission par un amendement n° CD58 du rapporteur M. Denis Masséglia, prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la proposition de loi, d'un rapport sur son application . Ce rapport doit par ailleurs établir un bilan de la mise en oeuvre de la convention de partenariat prévue par l'article 1 er de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale et du respect des critères de performance environnementale que cette convention définit.

Les évolutions apportées par la commission à l'article 1 er rendent la demande de rapport prévue par le présent article 4 sans objet.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a donc adopté un amendement COM-6 de suppression de cet article.

La commission a supprimé l'article 4.

Article 5

Demande de rapport sur les aides financières de l'État
à la presse écrite et la situation des papeteries

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement dressant un état des lieux des aides financières actuelles et nouvelles potentielles de l'État à la presse écrite, du nombre de papeteries et des lignes de production en France et en Europe, ainsi que des mesures prises pour en limiter la fermeture.

La commission a supprimé l'article 5.

L'article 5, introduit à l'Assemblée nationale en commission par un amendement n° CD27 de Mme Danielle Brulebois, modifié en séance publique par un amendement n° 40 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la proposition de loi, d'un rapport dressant un état des lieux des aides financières actuelles et nouvelles potentielles de l'État à la presse écrite, du nombre de papeteries et des lignes de production en France et en Europe, ainsi que des mesures prises pour en limiter la fermeture.

La commission a adopté un amendement COM-7 supprimant cette demande de rapport.

Un état des lieux des aides à la presse est déjà publié tous les ans et accessible sur le site « data.gouv.fr ».

La commission a au demeurant constaté que ces aides avaient fait l'objet de nombreux rapports , tels que le rapport d'information de M. Michel Laugier, au nom de la commission de la culture, de la communication et de l'éducation du Sénat sur la situation de la presse quotidienne régionale (n° 805, 20 juillet 2022) ou encore le rapport d'information de M. Roger Karoutchi, au nom de la commission des finances du Sénat sur les aides à la presse écrite (n° 692, 16 juin 2021).

La commission a supprimé l'article 5.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 15 mars 2023, la commission a examiné le rapport de Mme Marta de Cidrac sur la proposition de loi n° 305 (2022-2023) portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous sommes réunis ce matin pour examiner la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique, déposée par M. Denis Masséglia et Mme Aurore Bergé et adoptée par l'Assemblée nationale.

Cette proposition de loi émane de la majorité présidentielle et le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte. Autrement dit, il s'agit d'un projet de loi qui ne dit pas son nom.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Comme l'a justement rappelé le président, cette proposition de loi est en réalité un projet de loi qui ne dit pas son nom.

Je commencerai par vous rappeler les deux objectifs distincts affichés par le texte adopté par l'Assemblée nationale. Le premier est d'exonérer le secteur de la presse du paiement de la contribution financière, en l'excluant de la filière REP. Le second est de fusionner les filières REP d'emballages ménagers et des producteurs de papier.

Permettez-moi de vous partager au préalable quelques éléments de contexte, qui contribueront à éclairer ma présentation et nos échanges.

Tout d'abord, la proposition de loi porte sur la responsabilité élargie des producteurs, qui constitue une application du principe « pollueur-payeur », puisqu'elle transfère la responsabilité de la prévention et de la gestion des déchets aux producteurs.

La majorité des producteurs s'acquittent de cette obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes dont ils assurent la gouvernance, auxquels ils transfèrent leur obligation et versent en contrepartie une contribution financière appelée éco-contribution. Les contributions versées aux éco-organismes doivent être modulées sous la forme de primes ou de pénalités, en fonction de critères de performance environnementale des produits.

Deux filières sont concernées par la présente proposition de loi : la REP emballages ménagers et la REP papier. Leur rôle principal est de soutenir financièrement le service public de gestion des déchets, géré par les collectivités territoriales. Ces filières partagent ainsi des similitudes opérationnelles, notamment avec une collecte harmonisée par les collectivités territoriales par le biais du « bac jaune » et un éco-organisme opérant sur les deux gisements, Citeo. Elles sont toutefois de taille inégale : en 2021, 850 millions d'euros étaient collectés et transférés aux collectivités territoriales au titre de la REP emballages, contre seulement 62 millions d'euros en 2020 pour la REP papier. Les deux filières connaissent de surcroît des dynamiques inversées : la REP emballages a doublé en dix ans, quand la REP papier décroît régulièrement, en raison notamment de la dématérialisation continue des activités ou encore du recul de la distribution des prospectus publicitaires.

Ensuite, la presse, qui représente environ 20 % du tonnage soumis à la REP papier, bénéficie, depuis son inclusion dans le champ de la filière, en 2017, d'un dispositif dérogatoire lui permettant, si elle le souhaite, de contribuer « en nature » et d'échapper ainsi au versement de l'éco-contribution. Cette contribution en nature consiste en une mise à disposition gratuite d'encarts pour informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des déchets. Elle entre toutefois en contradiction avec la directive « Déchets » de 2018, qui prévoit explicitement que les metteurs sur le marché versent des « contributions financières » au sein de la REP à laquelle ils appartiennent. C'est pourquoi nous avions mis fin, à l'occasion de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi « Agec », au régime dérogatoire dont bénéficiait la presse. Ce dernier a perduré depuis la date de promulgation de la loi jusqu'au 1 er janvier 2023. Le bénéfice de la « contribution en nature » avait été conditionné au respect de critères de performance environnementale comme l'intégration de fibres recyclées dans les publications.

J'en viens maintenant au contenu du texte adopté par l'Assemblée nationale.

Le premier volet de la proposition de loi vise à exonérer le secteur de la presse du paiement de la contribution financière, soit 22 à 26 millions d'euros en 2023, en l'excluant de la filière REP. Il s'agit de l'aider à faire face à des difficultés conjoncturelles et structurelles que nous connaissons bien : doublement du prix du papier en un an, augmentation des coûts de l'énergie, diminution structurelle des ventes de la presse papier de 5 % par an, notamment. Ces problématiques avaient été soulevées par le récent rapport d'information de notre collègue Michel Laugier, fait au nom de la commission de la culture.

En contrepartie, la proposition de loi pérennise le système de la « contribution en nature », en le plaçant toutefois en dehors du champ de la REP, pour assurer la conformité du texte au droit de l'Union européenne. Elle prévoit ainsi la conclusion d'une convention de partenariat entre l'État et les syndicats de presse, afin de déterminer les conditions dans lesquelles les publications de presse mettent gratuitement à disposition des espaces de communication destinés à informer le public sur le tri des déchets, l'économie circulaire et la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité. Ces encarts doivent bénéficier majoritairement aux collectivités territoriales et aux intercommunalités, à la communication des filières REP ainsi qu'aux associations agréées pour la protection de l'environnement. Le texte prévoit également que la convention de partenariat définit des critères de performance environnementale que les publications s'engagent à respecter.

Le deuxième volet du texte, bien distinct, prévoit la fusion des REP emballages ménagers et papier. Cette fusion poursuit plusieurs objectifs.

Premier objectif : simplifier les procédures administratives, notamment pour les collectivités territoriales, qui pourront contractualiser avec l'éco-organisme par l'intermédiaire d'un contrat unique, en lieu et place de deux contrats distincts.

Deuxième objectif : répondre au mouvement accompagné par la loi « Agec », qui a harmonisé les systèmes de collecte des déchets d'emballages et de papiers sur l'ensemble du territoire national en 2023.

Troisième objectif : renforcer les synergies entre les deux filières, notamment dans un contexte de recours accru aux papiers et cartons pour les emballages en remplacement des emballages plastiques.

J'en viens, pour terminer, à mes observations sur ces différentes propositions.

Sur le premier volet, je porte un regard favorable à la fusion des filières REP, qui pourrait en effet être source de simplification et de synergies. J'estime néanmoins que les alinéas introduits à l'Assemblée nationale, prévoyant que les éco-contributions versées par les producteurs d'emballages et de papiers couvrent exclusivement les coûts de gestion des déchets issus respectivement des emballages et des papiers, ne sont pas opportuns : ceux-ci limitent la portée de la fusion en empêchant effectivement les possibilités de synergie financière entre les emballages et les papiers graphiques. Je vous proposerai donc un amendement tendant à leur suppression.

Je serai beaucoup plus critique sur le volet du texte relatif à la presse, qui présente plusieurs écueils majeurs. Je considère tout d'abord que sortir la presse de la REP pourrait constituer un dangereux précédent susceptible d'affaiblir l'ensemble des REP. Ce serait en effet la première fois dans l'histoire de ce système - il est né en France dans les années 1990 et a essaimé partout en Europe - qu'un gisement serait retiré de la REP. D'autres secteurs pourraient utiliser ce premier régime d'exception en vue de demander des aménagements et des exonérations pour l'avenir, au détriment des collectivités territoriales et de la protection de l'environnement.

Je rappelle que tout ce qui n'est pas pris en charge par les metteurs sur le marché doit être financé par les collectivités territoriales et les contribuables locaux. Le dispositif proposé aura donc un impact financier sur le service public de gestion des déchets. Si ce manque à gagner ne saurait être surestimé au regard du coût total du service public, le texte s'inscrit toutefois dans un contexte d'augmentation des charges, due à la hausse des prix de l'énergie ou encore à l'augmentation significative de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

Enfin, la seule condition posée à l'exonération de la presse des obligations de la filière REP est de « participer » à une convention de partenariat. Le texte ne prévoit donc aucune sanction du non-respect des engagements des publications de presse, à la différence de ce qui prévalait dans le mécanisme transitoire issu de la loi « Agec ».

Nous ne pouvons pas accepter une telle régression environnementale et une telle atteinte au service public de gestion des déchets géré par nos collectivités territoriales.

Je vous proposerai donc une autre solution, conciliant de manière plus satisfaisante protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse.

L'amendement que je vous présenterai vise ainsi à maintenir la presse dans le champ de la REP ; les contributions financières de la filière REP seraient toutefois modulées pour les produits contribuant à une information du public d'intérêt général sur la prévention et la gestion des déchets, notamment par la mise à disposition gratuite d'encarts, sous réserve de respecter des critères de performance environnementale fixés par décret. Cette modulation des contributions sous forme de prime pourra pleinement bénéficier aux publications de presse.

Les avantages de cette proposition sont nombreux. Celle-ci préserve l'intégrité de la REP en maintenant la presse en son sein. Elle est financièrement neutre pour le service public de gestion des déchets, car les primes versées devraient être compensées par la filière REP. Elle offre enfin des garanties environnementales, en conditionnant l'octroi des primes à l'atteinte de critères de performance environnementale. Cette option avait d'ailleurs été envisagée par les services ministériels au cours des travaux préparatoires à la loi « Agec », que j'avais menés il y a quatre ans.

Vous l'aurez compris, ma priorité est de préserver les filières REP pour protéger le service public de gestion des déchets et nos collectivités territoriales. Mes propositions tiennent également compte de la situation difficile dans laquelle se trouve la presse et apportent une réponse proportionnée aux difficultés auxquelles ce secteur fait face. Voici le chemin de crête que je vous propose d'emprunter ce matin.

M. Joël Bigot . - Cette proposition de loi présentée par un député de la majorité vise à exempter la presse de toute contribution aux éco-organismes. Cette initiative est sans doute la première d'une longue litanie ; par exemple, les secteurs du textile et du bâtiment rencontrent eux aussi des difficultés.

Je ne souscris pas à l'analyse de la rapporteure sur la fusion des filières REP emballages ménagers et papier. Les deux secteurs ne pèsent pas le même poids financier : certes, la fusion simplifierait les choses, mais la provenance des produits ne serait plus tracée. En revanche, je rejoins la rapporteure sur l'exemption qui serait accordée à la presse : cela reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore pour d'autres secteurs et cela viderait la loi « Agec » de sa substance. J'ai déposé un amendement visant à ce que la presse participe au financement de la filière par une contribution en nature, grâce à des encarts, et par une contribution financière, à hauteur de 50 % chacune.

M. Stéphane Demilly . - Comme d'autres sans doute, j'ai été saisi par plusieurs acteurs - notamment l'industrie papetière -, qui regrettent de ne pas avoir été suffisamment associés à cette réflexion. Selon eux, cette fusion n'apportera aucun bénéfice, des synergies ayant déjà été instaurées entre acteurs. Les collectivités locales ont investi en faveur de l'amélioration de la collecte du papier et des cartons. Cette fusion ne se concrétisera que par l'élaboration d'un cahier des charges commun : cette simplification administrative est-elle justifiée, tant la démarche est complexe ?

En outre, la fusion risque de perturber le fonctionnement des deux filières, à un moment particulièrement inopportun. Un arbitrage devrait être rendu cette année au sujet de la consigne pour recyclage des bouteilles plastiques. Plusieurs acteurs, tels que Cora ou Leclerc, ont aussi annoncé une réduction de leurs prospectus. Dans ce contexte, ne faut-il pas préserver les spécificités de ces deux filières ?

M. Jacques Fernique . - Cette proposition de loi est en effet une astuce pour prolonger l'exemption de contribution financière dont bénéficie la presse.

J'identifie deux problèmes contradictoires. Premièrement, un manque à gagner de 15 à 22 millions d'euros pour les collectivités territoriales responsables du service public de la gestion des déchets, car le principe du « pollueur-payeur » ne s'applique pas vraiment. Deuxièmement, la presse connaît de grosses difficultés économiques, alors qu'elle joue un rôle démocratique essentiel. Je suis plutôt d'accord avec la proposition de compromis élaborée par la rapporteure, en vue de trouver un équilibre viable tant pour les collectivités territoriales que pour les éditeurs. Cette proposition ne doit pas entrer en contradiction avec la directive « Déchets » et la loi « Agec ». Nous souhaitons que la presse participe au financement de la filière par une contribution en nature, grâce à des encarts, et par une contribution financière, à hauteur de 50 % chacune. Une exemption totale serait un mauvais signal envoyé à l'ensemble des acteurs économiques.

La rapporteure souhaite favoriser une synergie financière entre les deux filières du papier et de l'emballage, dont les volumes respectifs sont déséquilibrés, grâce à la fusion. Ce jeu de vases communicants est sans doute utile.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Je salue moi aussi le travail de la rapporteure.

La presse est en très grande difficulté : à l'heure actuelle, 3,6 millions de journaux sont édités chaque jour, contre 5,2 millions voilà dix ans. En outre, le prix du papier a doublé, pour un surcoût de 120 millions d'euros. Je souscris à la proposition visant à mêler contribution en nature et contribution financière.

Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, les débats ont montré une différence d'interprétation sur la directive « Déchets » de 2018 : les contributions à la REP doivent-elles être exclusivement financières ? Des contributions en nature sont-elles envisageables ? De plus, l'article 2 prévoit une application du texte à partir du 1 er janvier 2023 : je m'étonne de cette disposition rétroactive.

M. Didier Mandelli . - Je remercie moi aussi la rapporteure pour son excellent travail sur un dossier délicat.

J'aurais préféré que l'État assume son choix, en maintenant la presse dans la REP, tout en la soutenant financièrement pour l'aider à acquitter son éco-contribution. Certes, le secteur est en difficulté, mais ce n'est pas le seul. Exclure la presse du dispositif de la REP est une erreur : chacun doit assumer sa part.

En outre, je ne suis pas sûr qu'il incombe aux autres opérateurs d'être solidaires du secteur. Certains contributeurs des REP autres que la presse pourraient solliciter le droit de promouvoir des actions en faveur de l'environnement sur leurs emballages en vue d'être exemptées de contributions.

M. Cyril Pellevat . - La fusion des REP entraînera-t-elle la fin de la garantie de reprise pour les papiers graphiques ? Les contrats de reprise seront-ils les mêmes pour ces derniers et pour les emballages ménagers ?

Ce texte complète la loi « Agec », qui prévoit que la collecte séparée des emballages papier soit harmonisée sur l'ensemble du territoire national. Or ses dispositions ne sont pas assez précises en aval : quelles sont les conséquences pour les professionnels du recyclage ? Une concertation est-elle prévue ?

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Comme l'a dit M. Mandelli, ce texte est piégeux pour le Sénat, d'où les propositions que je vous ai présentées ce matin.

Monsieur Bigot, j'ai entendu votre souhait de maintenir la presse dans la REP : nous nous rejoignons sur ce point. En outre, fusionner les deux REP est fondamental pour assurer la viabilité de l'ensemble du dispositif.

En réalité, l'objectif principal de ce texte est d'exonérer le secteur de la presse de contribution financière tout en maintenant le système de contribution en nature, en tenant compte toutefois de la directive européenne, qui interdit des contributions non financières au sein de la REP. Monsieur Houllegatte, les contributions non numéraires sont donc interdites au sein de la REP ; c'est pourquoi je propose de nous appuyer sur les dispositifs d'éco-modulation pour prolonger le système de contribution en nature.

Extraire le secteur de la presse de la REP papier reviendrait à franchir une ligne rouge à laquelle je ne me résous pas. Dès lors, que faire pour permettre à la presse de poursuivre son rôle sans qu'elle soit durablement touchée par une éco-contribution numéraire ? De fil en aiguille, je suis arrivée à la conclusion suivante : seule la fusion des deux REP assurera la viabilité du système, parce qu'elle élargit l'assiette des contributeurs, et, partant, répartit équitablement la contribution.

Une fois l'assiette agrandie et la presse maintenue dans cette nouvelle REP, il est évident que quelqu'un doit payer. La compensation de ce manque à gagner, qui représente un montant de 20 millions d'euros - contre 1 milliard d'euros pour la filière emballages -, pourra se faire sans douleur, d'autant plus que les encarts d'information bénéficieront directement à la filière REP. J'assume cette position.

Monsieur Demilly, nous avons entendu toutes les parties prenantes, y compris les représentants du secteur du papier. Ils se posaient la question de l'intérêt de la fusion des filières REP. Je comprends certaines inquiétudes, mais les conséquences seront limitées pour la filière papier. D'un point de vue pratique, Citeo gère les deux REP ; de plus, les éco-organismes ne s'opposent pas à ce projet.

Monsieur Mandelli, comme vous le soulignez, il appartenait au Gouvernement d'aider directement le secteur de la presse, sans nécessité de passer par une proposition de loi, le Parlement ne pouvant, quant à lui, imposer une telle mesure qui serait tombée sous le coup de l'article 40 de la Constitution.

Monsieur Pellevat, votre question ne fait pas partie en tant que telle de la proposition de loi. Je renvoie l'éco-modulation au décret que devra prendre le Gouvernement.

Monsieur Houllegatte, la période transitoire issue de la loi « Agec » courait jusqu'au 1 er janvier 2023. Toutefois, les contributions financières dues par les publications de presse n'ont pas encore été perçues par Citeo.

M. Jacques Fernique . -Notre idée de répartition à parts égales entre contribution en nature et contribution numéraire provient peut-être d'une lecture erronée, mais la réglementation européenne prévoit une certaine souplesse pour que les États membres puissent, sous certaines conditions, s'écarter de la norme ; d'où notre proposition.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Une contribution en nature au sein de la REP est malheureusement incompatible avec le droit européen.

Ma proposition n'est sans doute pas parfaite, mais c'est la moins mauvaise, car elle préserve les collectivités territoriales, ainsi que le secteur de la presse.

M. Jean-Claude Anglars . - Comme d'autres, j'étais inquiet pour la presse quotidienne régionale (PQR), qui joue un rôle important dans nos territoires. La rapporteure a formulé une proposition équilibrée.

M. Joël Bigot . - Je remercie la rapporteure pour la qualité de son travail. Après la fusion, je comprends que des synergies financières pourront s'établir entre les deux filières. L'éco-contribution, qui sert à financer la collecte et le tri, est préservée : je m'en réjouis pour les collectivités territoriales. Cela dit, d'autres acteurs assumeront la part que la presse ne paiera pas.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Oui. L'ensemble de la REP prendra en charge le fait que la presse ne paiera pas d'éco-contribution financière. Mais la filière bénéficiera en contrepartie des encarts d'information mis à disposition par la presse ! Les encarts seront donc valorisés.

Monsieur Anglars, nous avons tous senti l'inquiétude de la presse quotidienne régionale dans nos territoires. J'ai tenu informé notre collègue Michel Laugier de notre réflexion : la commission de la culture est satisfaite de l'équilibre trouvé. Les représentants de la presse sont certes un peu inquiets, car ils auraient préféré sortir de la REP, mais je les ai rassurés : dans les faits, rien ne changera pour eux.

M. Jean-François Longeot , président . - À mon tour de remercier Marta de Cidrac. La solution idéale pour répondre à cette situation n'existe pas. La solution trouvée par la rapporteure semble la plus équilibrée.

Mme Évelyne Perrot . - Qu'entendez-vous par l'idée d'une contribution partielle ?

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Les acteurs de la presse contribuent au financement du système soit uniquement par l'intermédiaire d'encarts, soit par le biais d'éco-contributions numéraires s'ils le souhaitent. Ce choix laissé aux publications de presse perdurera à l'avenir.

En application de l'article 45 de la Constitution et de l'article 44 bis du Règlement du Sénat, je vous propose de retenir dans le périmètre du texte les dispositions relatives aux filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et papier ; à la contribution de la presse à la transition écologique ; aux moyens utilisés pour informer le public sur la transition écologique.

Il en est ainsi décidé.

Examen des articles

Article 1 er

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-2 vise à concilier de manière plus satisfaisante protection du service public de gestion des déchets et préservation du secteur de la presse. Il maintient le secteur de la presse papier dans le champ de la REP et ne porte pas atteinte à leur intégrité. Il permet toutefois d'appliquer des éco-modulations pour les produits qui contribueront à informer le public sur la prévention et la gestion des déchets.

Ma proposition satisfait, partiellement, les amendements COM-8 rectifié et COM-9 rectifié : j'en demande donc le retrait ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.

M. Joël Bigot . - Je maintiens mon amendement, car je considère qu'il est plus équilibré : renvoyer la décision au sujet de l'éco-modulation à un décret du Gouvernement m'inquiète.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Votre amendement n'est pas conforme à la directive européenne.

M. Joël Bigot . - Ce débat a déjà eu lieu à l'Assemblée nationale.

M. Jacques Fernique . - Je reconnais que mon amendement COM-9 s'appuyait sur une mauvaise interprétation de la directive européenne. Toutefois, je ne suis pas rassuré par la réponse de la rapporteure, lorsque cette dernière soutient que rien ne changera pour les éditeurs de presse.

L'amendement COM-2 est adopté. En conséquence, les amendements COM-8 rectifié et COM-9 rectifié deviennent sans objet.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-3 vise à supprimer le principe de non-mutualisation des coûts des filières REP papier et emballages ménagers.

L'amendement COM-3 est adopté.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement de clarification COM-4 concerne la mise à jour des agréments des éco-organismes.

L'amendement COM-4 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3 (nouveau)

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-5 tend à supprimer l'article 3, qui n'a plus de sens dès lors que l'on fusionne les deux REP.

L'amendement COM-5 est adopté.

L'article 3 est supprimé.

Article 4 (nouveau)

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-6 vise à supprimer l'article 4, qui n'a plus d'objet.

L'amendement COM-6 est adopté.

L'article 4 est supprimé.

Article 5 (nouveau)

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-7 tend à supprimer l'article 5, pour les mêmes raisons que celles que j'ai évoquées précédemment.

M. Jacques Fernique . - Je comprenais les motivations ayant conduit à la suppression des deux articles précédents. En revanche, je m'interroge sur la suppression de l'article 5. Mme la rapporteure a précisé tout à l'heure que des dispositions contraignant l'État à aider la presse tomberaient sous le coup de l'article 40. Or l'article 5 est pertinent, puisqu'il prévoit la remise d'un rapport dressant un état des lieux des aides à la presse.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Vous avez raison : ce ne sont pas exactement les mêmes raisons qui motivent mon amendement COM-7 que celles ayant justifié les deux amendements précédents. Le rapport prévu par l'article 5 serait redondant avec des rapports récents déjà publiés au sujet des aides à la presse. De plus, un état des lieux des aides à la presse est déjà publié tous les ans et accessible sur le site data.gouv.fr .

M. Jacques Fernique . - Certes, mais on veut inciter l'État à en faire plus.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Je considère que ce nouveau rapport serait superfétatoire.

M. Didier Mandelli . - Les aides de l'État à la presse figurent effectivement sur le site data.gouv.fr . Une partie de ces aides aurait d'ailleurs pu être utilisée pour régler les éco-contributions comme je l'ai évoqué dans la discussion générale. Si le Gouvernement avait pris ses responsabilités et avait assumé son choix, nous n'aurions pas eu à examiner ce texte.

L'amendement COM-7 est adopté.

L'article 5 est supprimé.

Intitulé de la proposition de loi

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - L'amendement COM-1 tend à modifier l'intitulé de la proposition de loi, en cohérence avec le contenu du texte issu des travaux de la commission.

L'amendement COM-1 est adopté.

L'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Les sorts des amendements sont repris dans le tableau suivant :

Article 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

2

Maintien de la presse dans le champ de la REP. Eco-modulation pour les produits de la REP contribuant à l'information du public d'intérêt général sur la prévention et la gestion des déchets, en particulier sur le geste de tri, notamment par la mise à disposition gratuite d'encarts d'information, sous réserve que ces produits respectent par ailleurs des critères de performance environnementale

Adopté

M. Joël BIGOT

8 rect.

Maintien de la presse dans la filière REP. Assujettissement pour moitié via une "contribution en nature", pour moitié via une "contribution financière"

Satisfait ou sans objet

M. FERNIQUE

9

Maintien de la presse dans la filière REP. Assujettissement pour moitié via une "contribution en nature", pour moitié via une "contribution financière"

Satisfait ou sans objet

Mme de CIDRAC, rapporteure

3

Suppression du principe de non-mutualisation des coûts des filières REP papiers et emballages ménagers

Adopté

Article 2

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

4

Amendement de clarification concernant la mise à jour des agréments des éco-organismes

Adopté

Article 3 (nouveau)

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

5

Suppression de l'article 3

Adopté

Article 4 (nouveau)

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

6

Suppression de l'article 4

Adopté

Article 5 (nouveau)

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

7

Suppression de l'article 5

Adopté

Proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme de CIDRAC, rapporteure

1

Modification de l'intitulé de la proposition de loi

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, PORTANT FUSION DES FILIÈRES À RESPONSABILITÉ ÉLARGIE DES PRODUCTEURS D'EMBALLAGES MÉNAGERS ET DES PRODUCTEURS DE PAPIER ET AMPLIFICATION DES ENCARTS PUBLICITAIRES DESTINÉS À INFORMER LE PUBLIC SUR LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 25 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 26 ( * ) .

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 27 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 28 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a arrêté , lors de sa réunion du 15 mars 2023, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 305 (2022-2023), adoptée par l'Assemblée nationale, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique (procédure accélérée) .

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :

- aux filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers et papiers ;

- à la contribution de la presse à la transition écologique ;

- aux moyens utilisés pour informer le public sur la transition écologique.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 21 février 2023

- AMORCE : MM. Nicolas GARNIER , délégué général, et Joël RUFFY , responsable du service institutionnel

- Table ronde Collectivités territoriales en charge du service public de gestion des déchets

• Intercommunalités de France (AdCF) : Mmes Odile BEGORRE MAIRE , vice-présidente, Anaëlle CONTREPOIS , conseillère Déchets, économie circulaire, agriculture, commande publique, et Montaine BLONSARD , responsable des relations avec le Parlement

• Association des maires de France (AMF) : Mmes Sylviane OBERLÉ , responsable - mission prévention des pollutions et Charlotte DE FONTAINES , chargée des relations avec le Parlement

- Table ronde « Secteur de la presse »

• Fédération nationale de la presse d'information spécialisée (FNPS) : Mme Catherine CHAGNIOT , directrice générale et M. Laurent BÉRARD-QUÉLIN , président, directeur général de la Société générale de presse

• Alliance de la presse : MM. Jean-Michel BAYLET , président, PDG du Groupe La Dépêche du Midi, Pierre PETILLAULT , directeur général, et Mme Léa BOCCARA , responsable du pôle juridique de l'Alliance de la presse d'information générale

• Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) : MM. Alain AUGE , président, Nicolas MATHIEU , directeur des opérations et des achats chez Bayard Presse et membre de la commission développement durable, et Mme Julie LORIMY , directrice générale

- Commission inter-filières de responsabilité élargie des producteurs : M. Jacques VERNIER , président

- Cercle national du recyclage : M. Bertrand BOHAIN , délégué général

- Conseil national de l'économie circulaire : M. Jean-Michel BUF , président

Jeudi 23 février 2023

- CITEO : MM. Jean HORNAIN , directeur général, Julien DUBOURG , directeur relations clients, et Laurent GRAVE-RAULIN , directeur des relations institutionnelles

- Agence de la transition écologique (ADEME) : MM. Boris RAVIGNON , président du conseil d'administration et vice-président du CR Grand Est, et Jean-Charles CAUDRON , direction de la supervision des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP)

- Eco-organisme des entreprises responsables (LEKO) : M. Patrick BARIOL , directeur général, et Mme Marion HALBY , responsable des affaires Institutionnelles et Collectivités

- Union française des industries des cartons, papiers et celluloses (Copacel) : MM. Paul-Antoine LACOUR , délégué général, et Jan LE MOUX , directeur économie circulaire et politiques produits

- Culture papier : MM. Pierre BARKI , président d'honneur

- Direction générale des médias et des industries culturelles - ministère de la culture : MM. Alexandre KOUTCHOUK , sous-directeur de la presse écrite et des métiers de l'information, Stéphane BURON , chef du bureau du régime juridique de la presse, et Mme Claire ROLLAND , adjointe au chef du bureau

Mardi 28 février 2023

- Ministère de la transition écologique et solidaire - Direction générale de la prévention des risques : M. Vincent COISSARD , sous-directeur des déchets et de l'économie circulaire et Mme Nadia HERBELOT , cheffe du bureau des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP)

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl22-305.html


* 1 Loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux.

* 2 Les producteurs peuvent, de manière dérogatoire, mettre en place un système individuel de collecte et de traitement agréé, lorsque leurs produits comportent un marquage permettant d'en identifier l'origine, lorsqu'ils assurent une reprise sans frais des déchets en tout point du territoire national accompagnée, si elle permet d'améliorer l'efficacité de la collecte, d'une prime au retour visant à prévenir l'abandon des déchets et qu'ils disposent d'une garantie financière en cas de défaillance (I de l'article L. 541-10 du code de l'environnement).

* 3 L'autorité administrative d'instruction des demandes d'agréments est constituée par les ministres chargés de l'environnement et de l'économie, auprès desquels le dossier de demande d'agrément doit être déposé. La commission inter-filières REP, instance de gouvernance des filières, rend un avis sur les projets de cahiers des charges qui fixent le cadre et les objectifs de chacune des filières et sur l'agrément des éco-organismes.

* 4 Selon l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales, la collecte et le traitement des déchets des ménages constituent une compétence obligatoire des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale, « éventuellement en lien avec les départements et les régions ».

* 5 Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 6 Filière rendue obligatoire par le droit européen.

* 7 Filière rendue obligatoire par le droit européen.

* 8 Filière rendue obligatoire par le droit européen. La loi « AGEC » a étendu cette filière aux véhicules à moteur à deux ou trois roues, ainsi qu'aux quadricycles à moteur, à compter du 1 er janvier 2022. Le décret concrétisant cette extension n'a été pris qu'en novembre 2022 (décret n° 2022-1495 du 24 novembre 2022 relatif à la gestion des véhicules hors d'usage et à la responsabilité élargie des producteurs de voitures particulières, de camionnettes, de véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur).

* 9 Filière rendue obligatoire par le droit européen à compter du 1 er janvier 2024.

* 10 La loi « AGEC » a étendu cette filière aux éléments de décoration textile, à compter du 1 er janvier 2022. Le décret concrétisant cette extension n'a été pris qu'en juillet 2022 (décret n° 2022-975 du 1 er juillet 2022 relatif à l'extension aux éléments de décoration textiles de la filière à responsabilité élargie du producteur des éléments d'ameublement et modifiant diverses dispositions relatives aux déchets).

* 11 La loi « AGEC » a étendu cette filière à l'ensemble des déchets issus de ces produits, y compris les produits utilisés par les professionnels, qui sont susceptibles d'être collectés par le service public de gestion des déchets (SPGD), à compter du 1 er janvier 2021.

* 12 La loi « AGEC » a étendu cette filière aux équipements électriques ou électroniques associés aux DASRI à compter du 1 er janvier 2021.

* 13 Filière rendue obligatoire par le droit européen à compter du 1 er janvier 2024.

* 14 L'article 28 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a reporté l'entrée en vigueur de cette REP pour les professionnels de la restauration au 1 er janvier 2023, alors qu'elle était initialement prévue au 1 er janvier 2021.

* 15 L'entrée en vigueur de la REP bâtiment a été reportée à 2023.

* 16 Décret n° 92-377 du 1 er avril 1992 portant application pour les déchets résultant de l'abandon des emballages de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 modifiée relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux.

* 17 Le reste du gisement est principalement constitué d'éditions publicitaires, de papiers de bureaux et de catalogues commerciaux. Source : Ademe.

* 18 En 2023, il est estimé que le coût net du système optimisé de gestion des papiers graphiques soumis à la filière REP et pris en charge par les collectivités sera de 208 M€. En appliquant les taux de soutiens actuellement prévus dans le cahier des charges de la filière REP, estimé à 67M€ pour l'ensemble des collectivités, le taux de couverture du SPGD est de 32 %.

* 19 Article 72 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 20 Décret n° 2020-1725 du 29 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation relatives à la responsabilité élargie des producteurs.

* 21 Arrêté du 1 er octobre 2021 relatif aux modalités de contribution des publications de presse sous forme de prestation en nature à la prévention et à la gestion de leurs déchets.

* 22 Article 112 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 23 Le coût du SPGD en 2018 était de 8,8 milliards d'euros. Ce coût est amoindri par 1,6 milliard d'euros de recettes (soutiens des éco-organismes, reventes de matériaux et d'énergie, aides). Le coût supporté par les collectivités était au total de 7,2 milliards d'euros en 2018.

* 24 Extrait du questionnaire de la rapporteure d'août 2019 : « Il pourra être envisagé d'appliquer le mécanisme de modulation de l'éco-contribution prévu au nouvel article L. 541-10-3 du code de l'environnement à la mise à disposition d'encarts publicitaires par les metteurs sur le marché. À titre d'exemple, il pourrait être envisagé que les éditeurs de presse qui souhaitent mettre à disposition des encarts publicitaires relatifs à la prévention, au tri sélectif et au recyclage de tous les produits puissent bénéficier d'un bonus applicable à leurs éco-contributions ».

* 25 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 26 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 27 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 28 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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