EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre Ier
Réforme de l'audiovisuel public
Article 1er
Création de la société holding France Médias et transformation de l'INA en société pour pouvoir intégrer la holding

Cet article vise à créer une société holding dénommée France Médias regroupant les sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde ainsi que l'établissement public Institut national de l'audiovisuel (INA) dont le statut est à cette fin modifié en société anonyme.

Le rapport2(*) de nos collègues Jean-Pierre Leleux et André Gattolin du 29 septembre 2015 a mis en évidence la nécessité de traiter conjointement les questions relatives au financement, à l'organisation et à la gouvernance de l'audiovisuel public. La disparition redoutée de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) en juillet 2022 a relancé le débat sur les moyens de l'audiovisuel public et donc sur ses missions et son organisation.

Si la nécessité d'un secteur audiovisuel public puissant est aujourd'hui toujours majoritairement partagée par les Français, c'est à condition que les crédits publics qui lui sont affectés fassent l'objet d'une utilisation efficace, cohérente et contrôlée. Or la dispersion de l'audiovisuel public non seulement est source de coûts et d'inefficacité mais elle constitue un obstacle de taille au développement d'une offre de proximité de qualité réunissant les savoir-faire de France Télévisions et Radio France et à l'émergence d'offres numériques attractives recourant aux bases de données et à l'intelligence artificielle.

Le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique présenté par Franck Riester, alors ministre de la Culture, et discuté par commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale en mars 2020, reprenait l'idée du rapport Leleux-Gattolin de regrouper les quatre principales sociétés de l'audiovisuel public (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, INA) au sein d'une société holding détenue intégralement par l'État. L'article 59 de ce projet de loi réécrivait même entièrement le titre III de la loi du 30 septembre 1986 afin de clarifier et actualiser sa rédaction à l'aune du regroupement proposé et des nombreuses modifications intervenues au fil des ans.

La présente proposition de loi reprend l'essentiel des dispositions de l'article 59 du projet de loi de 2020 concernant la création de la société holding, son organisation, sa gouvernance et ses modalités de répartition des moyens sans toutefois réécrire entièrement le titre III de la loi du 30 septembre 1986 pour des raisons inhérentes aux initiatives parlementaires qui ne disposent que d'un temps limité pour être débattues en séance publique.

Ceci étant, les équilibres du texte adopté par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale en mars 2020 ont été maintenus, notamment en ce qui concerne les modalités de nomination du président de la holding et des directeurs généraux des filiales. Par contre, la rédaction en vigueur du titre III est conservée et la proposition de loi vient le compléter ou le modifier uniquement pour procéder au regroupement des sociétés sans remettre à plat l'ensemble des missions ni l'ordonnancement des différents articles qui le composent comme le faisait le projet de loi de 2020 dans un esprit de codification.

Correspondance des numéros d'articles entre le projet de loi de 2020
et la proposition de loi

Proposition de loi déposée par Laurent Lafon

Projet de loi déposé par Franck Riester

44 A

44

44 IV bis

44-4

44-1

50

47

51

47-1

52

47-2

52-1

47-3

53

47-4

53-1

47-5

53-2

47-6

55

48-1-A

56-6

48-1

57

53

54

I. - Une réorganisation de l'audiovisuel public attendue, nécessaire et respectueuse des identités de ses composantes

Alors que l'article 59 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique réécrivait la totalité du titre III de la loi du 30 septembre 1986, le chapitre Ier de la présente proposition de loi comporte neuf articles portant réforme de l'audiovisuel public.

L'article 1er poursuit trois objectifs : créer la société holding France Médias, modifier le statut de l'INA d'établissement public en société afin de lui permettre d'intégrer la holding et élargir le champ des filiales pouvant être créées entre les différentes entités de l'audiovisuel public.

Le troisième alinéa de l'article 1er crée ainsi un nouvel article 44 A dans la loi du 30 septembre 1986 afin de créer France Médias, une société holding détenue à 100 % par l'État et détenant elle-même 100 % des sociétés nationales de programme précitées et de l'INA (lui-même transformé en société anonyme par le même article 1er de la présente proposition de loi).

Cette holding aura des missions limitées puisqu'il lui reviendra de définir les orientations stratégiques des sociétés du groupe et de veiller à la cohérence et à la complémentarité de leurs offres. La holding aura en particulier à conduire des actions communes et à définir des projets de développement intégrant les nouvelles techniques de diffusion et de production. Comme l'indiquait déjà en 2020 la rapporteure de l'Assemblée nationale Aurore Bergé : « la constitution de ce groupe vise à mieux armer l'audiovisuel public face au développement du numérique et aux nouveaux usages en matière audiovisuelle ».

La compétence stratégique de la holding impose de lui attribuer la capacité de répartir les moyens publics entre ses différentes sociétés filles. La répartition des ressources publiques entre les composantes du groupe confère ainsi à la holding une responsabilité financière d'ensemble et une capacité à arbitrer entre différentes priorités.

Le choix d'un regroupement à travers une holding plutôt qu'au moyen d'une fusion pure et simple permet de préserver l'identité des filiales France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA qui demeureront des acteurs opérationnels et assumeront la pleine responsabilité éditoriale des programmes proposés.

Toutefois, France Médias ayant parmi ses missions celle de veiller à la cohérence et à la complémentarité des offres de programmes des sociétés filles, la société holding sera nécessairement conduite à coordonner leurs politiques éditoriales. France Médias devra donc assurer un rôle de pilotage stratégique sans interférer dans la gestion opérationnelle.

Le rapporteur considère que la holding devra demeurer une structure légère et ne pas constituer un échelon administratif ou un poste de coûts supplémentaires. Les personnels en charge de la définition de la stratégie dans chacune des quatre entreprises de l'audiovisuel public pourront être regroupés pour créer un service mutualisé auprès du président de France Médias.

La création de la holding ne devrait au final engendrer qu'un coût limité. Elle constituera a contrario un outil précieux pour procéder à des mutualisations dans tous les domaines possibles (immobilier, informatique, achats, rédactions...). Si la création d'une société holding est compatible avec le maintien des statuts des personnels, elle n'exclut pas la création de filiales dédiées à des objectifs particuliers (offre de proximité, information, formation, innovation, fonctions support...) afin de renforcer la coordination et d'accroître l'efficacité des actions menées.

II. - Une transformation de l'INA en société indispensable pour lui permettre d'intégrer la holding

La proposition de loi ne revient pas sur la rédaction de l'article 44 en vigueur dans la loi du 30 septembre 1986 qui définit les missions de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde alors que le projet de loi de 2020 consacrait un article à chacune des sociétés filles et actualisait leurs missions.

Ces dernières sont donc préservées dans leur forme actuelle à l'image du rôle reconnu à France Télévisions en matière de création et de production audiovisuelles et de diffusion de programmes de proximité en régions à travers des décrochages spécifiques. De même, les missions de Radio France sont également maintenues telles qu'elles figurent déjà à l'article 44 notamment en ce qui concerne les obligations qui lui sont faites de concevoir et de programmer des émissions de radio à caractère national et local et de valoriser le patrimoine et la création artistique en particulier au travers de ses formations musicales (l'Orchestre national de France, l'Orchestre philharmonique de Radio France, la Maîtrise et le Choeur de Radio France).

Les projets de rapprochement des offres de proximité de France Télévisions et Radio France à travers des matinales communes et une offre numérique de proximité auraient pu justifier la création d'une cinquième filiale au sein de la holding consacrée à l'offre de proximité en rassemblant les moyens de France 3 et de France Bleu. Ni l'auteur de la proposition de loi, ni le rapporteur n'ont néanmoins estimé judicieux de précipiter cette évolution dans un texte législatif en se substituant aux dirigeants des entreprises concernées pour décider d'une telle évolution et aux partenaires sociaux pour en définir le rythme et ses modalités.

Si la proposition de loi ne prévoit donc pas de modifier les dispositions en vigueur de l'article 44 relatives à France Télévisions, Radio France et France Médias Monde, elle le complète néanmoins par un nouveau paragraphe IV bis consacré à l'Institut national de l'audiovisuel qui reprend les dispositions prévues par l'article 44-4 du projet de loi de 2020. Ce nouveau paragraphe reprend les dispositions en vigueur concernant l'INA figurant aux articles 49, 49-1 et 50 de la loi du 30 septembre 1986 relatives aux missions de l'institut en matière de conservation des archives audiovisuelles, d'exploitation des extraits de ces mêmes archives audiovisuelles et d'innovation et de recherche dans le domaine de la production et de la communication audiovisuelle. La rédaction du paragraphe IV bis modifie par ailleurs le statut de l'INA d'établissement public industriel et commercial en société anonyme afin de permettre à l'établissement de pouvoir intégrer la société holding France Médias.

III. - La possibilité pour France Médias de créer des filiales

L'article 44-1 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit déjà que France Télévisions, Radio France et France Médias Monde puissent créer des filiales mais seulement afin de poursuivre des missions différentes de celles prévues à l'article 43-11. La nouvelle rédaction de l'article 44-1 prévue par l'article 1er élargie sensiblement le champ de ces filiales puisqu'elles pourront concerner la holding France Médias, chacune des quatre sociétés filles ainsi que la société ARTE-France y compris pour l'exercice des missions qui leur sont assignées par le titre III de la loi du 30 septembre 1986.

Cette rédaction pourrait ainsi permettre à la société holding de créer une filiale consacrée à la formation professionnelle qui aurait pour mission principale d'assurer la formation de l'ensemble des personnels des sociétés filles mais elle pourrait également permettre de regrouper les moyens consacrés à France Info ou à l'offre de proximité. A noter que cette nouvelle rédaction pourrait aussi permettre, le cas échéant, des coopérations nouvelles entre les entreprises de l'audiovisuel public national et ARTE-France, en matière d'éducation ou de gestion des data par exemple.

IV. - Les modifications adoptées par la commission

La commission a adopté deux amendements présentés par le rapporteur qui concernent les dispositions relatives à l'INA insérées dans l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 précitée.

L'amendement COM-36 apporte plusieurs modifications à l'alinéa 6 visant d'une part à prévoir que l'INA est également en charge de la conservation des programmes diffusés sur les services délinéarisés des sociétés nationales de programmes et que d'autre part l'INA a pour mission de mettre à disposition de ces sociétés les archives qu'il conserve.

Le même amendement étend les missions de l'INA en termes de conservation et d'exploitation des archives à toute filiale de France Médias ayant une activité d'édition de services ou une activité de production de programmes.

L'amendement modifie également une référence à l'alinéa 7 relatif à l'exploitation des archives audiovisuelles en prévoyant qu'elle exploite également les extraits des archives des filiales des sociétés mentionnées à l'article 44 A et 44 créées en application du premier alinéa de l'article 44 lorsqu'elles ont une activité d'édition de services ou une activité de production de programmes.

L'amendement supprime par ailleurs la dernière phrase de l'alinéa 8 de l'article 1er relative au droit d'utilisation prioritaire de ces archives qui était reconnu aux sociétés nationales de programmes mais dont elles n'avaient pas l'usage. Il corrige enfin une erreur matérielle au neuvième alinéa de ce même article 1er.

Le second amendement COM-37 du rapporteur adopté par la commission vise à donner une base législative à la vocation de l'INA d'assurer la formation continue des personnels de l'ensemble des chaînes de l'audiovisuel public.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 1er bis (nouveau)
Inscription de TV5 Monde dans la loi du 30 septembre 1986

Cet article additionnel, adopté par la commission à l'initiative du rapporteur, vise à insérer un article 45 A dédié à TV5 Monde dans la loi de 1986 en reprenant les dispositions prévues par l'article 46 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique.

Le projet de loi relatif la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique débattu en commission des affaires culturelles à l'Assemblée nationale en mars 2020 prévoyait dans une nouvelle rédaction de l'article 46 de la loi du 30 septembre 1986 de reconnaître la chaîne internationale francophone en consacrant ses missions. Cette référence à TV5 Monde avait, selon le président de la chaîne, été très appréciée par les gouvernements partenaires.

Le présent article additionnel proposé par le rapporteur ( COM-38) crée ainsi un nouvel article 45 A dans le titre III de la loi du 30 septembre 1986 précitée qui prévoit que la société TV5 Monde a pour mission principale de contribuer à la diffusion et à la promotion de la langue française, de la diversité culturelle de la francophonie et de l'expression de la créativité audiovisuelle et cinématographique, ainsi que des autres industries culturelles francophones dans le monde, notamment par la production, la programmation et la diffusion d'émissions de télévision ou l'édition de services de communication au public en ligne.

La rédaction retenue par l'amendement est identique à celle proposée pour l'article 46 du nouveau titre III tel qu'elle figurait dans le projet de loi adopté par la commission des affaires culturelles en mars 2020. Elle comprend cependant un ajout faisant référence à la possibilité pour TV5 Monde de produire des programmes.

Même si l'essentiel des programmes de la chaîne francophone sont fournis par les éditeurs de services des pays partenaires, TV5 Monde a développé une activité de production dirigée vers le continent africain qui mérite d'être soutenue et valorisée. La chaîne internationale francophone coproduit par exemple des séries en Côte d'Ivoire et au Sénégal, où les secteurs audiovisuels sont les plus dynamiques. Elle participe également à travers sa chaîne Tivi5 au développement de l'industrie de l'animation et des programmes jeunesse en Afrique.

La commission a adopté cet article additionnel.

Article 2
Détention par l'État de la totalité du capital de la société France Médias

Cet article vise à établir que le capital de la société France Médias est entièrement et directement détenu par l'État. Il soumet la société au droit des sociétés anonymes ainsi qu'aux dispositions particulières concernant les sociétés à participation publique et leur adjoint, ainsi qu'à ses filiales, des commissaires du Gouvernement.

L'article 2 prévoit une nouvelle rédaction de l'article 47 de la loi du 30 septembre 1986 précitée. Celle-ci reprend les dispositions de l'article 51 du projet de loi concernant la détention du capital de la société holding France Médias créée par l'article 1er.

La rédaction en vigueur de l'article 47 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit que l'État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France. La nouvelle rédaction proposée par l'article 2 de la proposition de loi pour cet article 47 prévoit que l'État détient directement la totalité du capital de la société France Médias.

Le deuxième alinéa précise que les sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel, sont soumises à la législation sur les sociétés anonymes ainsi qu'à l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, sauf dispositions contraires de la présente loi et que leurs statuts sont approuvés par décret.

Enfin, le dernier alinéa prévoit que des commissaires du Gouvernement sont désignés auprès des sociétés France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel dans les conditions prévues à l'article 15 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014.

L'ensemble des dispositions prévues par la nouvelle rédaction de l'article 47 inscrivent résolument la nouvelle société holding France Médias dans le secteur public ce qui constitue une garantie importante pour son avenir.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 3
Gouvernance de la société France Médias et de ses filiales

Cet article détermine les modalités de nomination des dirigeants de la société France Médias ainsi que de ses quatre filiales (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA).

I. - Une gouvernance trop complexe, peu efficace et inadaptée pour conduire les transformations nécessaires

Plusieurs articles de la loi du 30 septembre 1986 déterminent la composition des conseils d'administration de France Télévisions (art. 47-1), Radio France (47-2), France Médias Monde (art. 47-3) tandis que l'article 47-4 prévoit que le président de chacune des trois entreprises est nommé pour cinq ans par l'Arcom à la majorité des membres qui le composent sur le fondement d'une décision motivée se fondant sur des critères de compétence et d'expérience.

L'article 47-4 prévoit également que les candidatures sont présentées et évaluées sur la base d'un projet stratégique et que les nominations interviennent trois à quatre mois avant la prise de fonction effective. L'article 47-5 prévoit quant à lui que le mandat des trois présidents peut leur être retiré par l'Arcom par décision motivée.

L'application des dispositions prévues par ces cinq articles s'est traduite par plusieurs conséquences qui ne garantissent pas une gouvernance pleinement satisfaisante :

- les mandats des trois présidents ne sont pas synchronisés ce qui complique la définition d'un projet d'ensemble pour l'audiovisuel public ainsi que les coopérations entre les entreprises ;

- les candidats n'ont pas accès aux données financières de l'entreprise, leur projet stratégique est donc souvent peu en phase avec la réalité de l'entreprise. Ce défaut d'information donne lieu à une iniquité de taille lorsqu'un président sortant est candidat à la reconduction de son mandat et peut s'appuyer sur sa connaissance exhaustive de l'entreprise ;

- l'Arcom ne pouvant garantir le secret des candidatures, le processus de sélection interdit dans les faits à des dirigeants en poste dans des entreprises de médias privées de se porter candidats. Les personnalités désignées par l'Arcom ont ainsi souvent une expérience limitée dans la gestion des sociétés de droit privé et dans la transformation de ces dernières ;

- les nominations par l'Arcom ne garantissent pas que les personnalités choisies sur la base d'un projet recevront l'assentiment de l'État actionnaire qui, pourtant, tient les cordons de la bourse à travers la définition de l'enveloppe de crédits dévolue à l'audiovisuel public et la répartition de ces moyens entre les trois entreprises ;

- le délai de trois à quatre mois entre la nomination et la prise de fonction prévu par l'article 47-4 n'a pas démontré sa pertinence, introduisant une forme d'intérim à la tête des entreprises concernées source de perte de temps ;

- la négociation de contrats d'objectifs et de moyens distincts entre l'État et chaque société ne permet pas de définir une stratégie globale cohérente. La définition d'un certain nombre d'objectifs communs dans les derniers COM n'a pas permis de développer véritablement des actions transversales réunissant les compétences des différentes entités.

Le regroupement des entreprises de l'audiovisuel public doit permettre de redéfinir la gouvernance en distinguant mieux le rôle de l'actionnaire chargé de définir les moyens et les missions ; la présidence de la société holding en charge de l'élaboration de la stratégie et de la répartition des moyens et les dirigeants opérationnels de chaque filiale qui demeureront compétents pour assurer le fonctionnement quotidien de chaque entreprise et la mise en oeuvre de la stratégie commune.

II. - Une clarification de la gouvernance indispensable pour permettre l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie ambitieuse pour l'audiovisuel public

L'article 3 de la proposition de loi propose une nouvelle rédaction des articles 47-1 à 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 afin de définir la composition du conseil d'administration de la société France Médias (art. 47-1), la composition des conseils d'administration des quatre sociétés filles (art. 47-2), les conditions de nomination du président de la société holding et des directeurs généraux des sociétés filles (art. 47-3), les modalités de retrait de leur mandat (art. 47-4) ainsi que l'octroi d'une voix prépondérante au président de la société holding en cas de partage des voix au sein du conseil d'administration.

Plus précisément, la nouvelle rédaction envisagée par l'article 3 de la proposition de loi pour l'article 47-1 prévoit que le conseil d'administration de la société France Médias comprend, outre le président-directeur général, onze membres dont le mandat, d'une durée de cinq ans, est renouvelable.

Le conseil d'administration de la société France Médias comprendrait ainsi :

- un député et un sénateur désignés par la commission permanente chargée des affaires culturelles de leur assemblée respective ;

- un représentant de l'État nommé dans les conditions prévues à l'article 4 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ;

- deux administrateurs nommés dans les conditions prévues au II de l'article 6 de la même ordonnance ;

- deux personnalités indépendantes nommées par décret, après avis conforme de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ;

- deux personnalités indépendantes désignées par le conseil d'administration de la société, après avis conforme de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ;

- et deux représentants des salariés élus en application du chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

Le rapporteur constate que cette composition du conseil d'administration de la société France Médias, respectueuse du principe de parité (alinéa 10), est identique à celle qui était prévue par l'article 52 du projet de loi de 2020 à une différence près puisque le texte adopté par la commission des affaires culturelles en mars 2020 remplaçait la présence de parlementaires par celle de personnalités indépendantes désignées sur proposition de leur président par les commissions chargées des affaires culturelles des deux assemblées statuant à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Le rapporteur partage le souci de l'auteur de la proposition de loi de maintenir un lien entre la représentation parlementaire et l'audiovisuel public afin de pouvoir évaluer les besoins, identifier les priorités et comprendre les difficultés rencontrées.

Le neuvième alinéa de l'article 3 prévoit que le président-directeur général de la société France Médias est également président des conseils d'administration des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel. Cette présidence non exécutive doit permettre d'assurer la cohérence de la stratégie menée par chacune des filiales avec le projet global.

Si les filles de la société holding partagent le même président, elles n'en ont pas moins leur propre conseil d'administration et elles sont dirigées par un directeur général qui bénéficiera d'une large autonomie au quotidien. Le texte prévu par l'article 3 pour la nouvelle rédaction de l'article 47-2 pour définir la composition des conseils d'administration de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et de l'INA reprend ainsi les dispositions de l'article 52-1 du projet de loi de 2020 en maintenant cependant la présence de deux parlementaires. Chaque conseil d'administration est composé de neuf membres dont le mandat d'une durée de cinq ans est renouvelable.

Les neuf membres composant chaque conseil sont désignés comme suit :

- un député et un sénateur désignés par la commission permanente chargée des affaires culturelles de leur assemblée respective ;

- un représentant de l'État nommé dans les conditions prévues à l'article 4 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ;

- un administrateur nommé dans les conditions prévues au II de l'article 6 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée ;

- deux personnalités indépendantes désignées par le conseil d'administration de la société France Médias, dont une parmi les personnes nommées au titre des 4° et 5° de l'article 47-1 de la présente loi ;

- deux représentants des salariés élus en application du chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public ;

- ainsi que le directeur général nommé dans les conditions prévues à l'article 47-3 de la présente loi.

Le rapporteur rappelle que les conseils d'administration de France Télévisions et de France Médias Monde comprennent chacun 14 membres tandis que le conseil d'administration de Radio France comprend 12 membres. Le choix de ramener chaque collège à neuf membres, tout en respectant le principe de parité (alinéa 18) constitue donc un gage de souplesse et d'efficacité pour chaque entité.

Les modalités de nomination du président-directeur général de la société France Médias sont définies par l'article 47-3 qui prévoit qu'il est nommé pour cinq ans par décret délibéré en Conseil des ministres, sur proposition du conseil d'administration, après avis conforme de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique et après avis des commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat en application de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Ce mode de nomination est identique à celui prévu par l'article 53 du projet de loi de 2020. Il clarifie le processus de nomination en répartissant les rôles :

- le conseil d'administration a pour mission de proposer un candidat ce qui permet d'assurer la confidentialité du processus de recrutement et donc d'élargir le nombre de candidats possibles ;

- l'État-actionnaire doit valider ce choix, ce qui est cohérent avec le fait que c'est à l'État que revient le choix des missions et des moyens dévolus à l'audiovisuel public ;

- l'Arcom et les commissions en charge de la culture peuvent refuser ce choix. Si aucun critère n'est évoqué pour justifier leur décision on peut néanmoins considérer que l'expérience du candidat et la cohérence et la qualité de son projet devraient constituer des éléments importants pour établir l'avis qui sera rendu.

Le paragraphe II de la nouvelle rédaction proposée pour l'article 47-3 prévoit que les directeurs généraux des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel, sont nommés pour cinq ans par le conseil d'administration de chaque société, sur proposition de son président, à la majorité des membres qui le composent et après avis conforme de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique.

Le choix des directeurs généraux par le président de la société holding doit permettre de garantir la cohérence dans la mise en oeuvre de la stratégie commune mais également la loyauté du management des filiales vis-à-vis de celui qui aura reçu pour mission de favoriser les mutualisations et le développement d'offres transversales.

Afin d'assurer dans les meilleures conditions la succession entre les directeurs généraux et la recherche de candidats de qualité, le deuxième alinéa du paragraphe II (alinéa 22 de l'article 3) prévoit que si le conseil d'administration de la société concernée décide, sur proposition de son président, de ne pas reconduire le directeur général des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel dans ses fonctions, il rend publique sa décision au plus tard quatre mois avant l'échéance du mandat du titulaire.

Enfin, signe que les filiales conserveront une large autonomie opérationnelle, le dernier alinéa du paragraphe II établit que, par dérogation au sixième alinéa de l'article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, les directeurs généraux de ces quatre sociétés en seront les directeurs de la publication, ce qui signifie qu'ils conserveront la maîtrise éditoriale des programmes.

Enfin, le paragraphe III du nouvel article 47-3 prévoit que les candidats au renouvellement de leur mandat ne prennent pas part aux procédures mises en oeuvre par les conseils d'administration afin de préserver la liberté de choix du conseil d'administration.

De la même manière que l'article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986 prévoyait la possibilité pour l'Arcom de retirer leur mandat aux présidents de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde, la nouvelle rédaction proposée pour l'article 47-4 définit les conditions de retrait de leur mandat pour le président de la société France Médias ainsi que pour les directeurs généraux des filiales.

Le mandat du président-directeur général de la société France Médias peut ainsi lui être retiré par décret délibéré en Conseil des ministres suite à une décision motivée du conseil d'administration de cette société ayant fait l'objet d'un avis conforme de l'Arcom. L'intervention du régulateur constitue une garantie pour s'assurer que le motif porte bien sur la gestion de l'intéressé et est motivé par l'intérêt de la société.

De la même manière, la nouvelle rédaction de l'article 47-4 prévoit que le mandat des directeurs généraux des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel peut leur être retiré, par le conseil d'administration de chaque société, sur proposition de son président, à la majorité des membres qui le composent et après avis conforme de l'Arcom.

Afin de préserver la liberté de choix des conseils d'administration, la rédaction de l'article 47-4 prévoit que le président ou le directeur général concerné ne pourra pas prendre part au processus de décision portant sur le retrait de leur mandat.

Enfin, le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 47-4 prévoit qu'en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, d'un ou plusieurs sièges de membre du conseil d'administration des sociétés mentionnées aux articles 44 A et 44, le conseil d'administration délibère valablement jusqu'à la désignation d'un ou des nouveaux membres, sous réserve du respect des règles du quorum. En cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, de la présidence du conseil d'administration, le doyen d'âge des personnalités indépendantes exerce les fonctions de président-directeur général.

L'article 3 propose également une nouvelle rédaction de l'article 47-5 qui prévoit qu'en cas de partage des voix au sein du conseil d'administration de France Médias ou d'une de ses quatre filiales, la voix du président est prépondérante.

III. - Les modifications adoptées par la commission

Le rapporteur a été sensible au fait que la composition du conseil d'administration de la société France Médias ne comportait pas de personnalités possédant des compétences reconnues à l'international. Plutôt que de prévoir la présence d'un représentant du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, le rapporteur a proposé au travers d'un amendement COM-39 que l'une des deux personnalités indépendantes au moins nommées par le conseil d'administration bénéficie d'une expérience reconnue à l'international, ce qui ouvre la voie à des profils plus nombreux ayant des compétences à l'international.

Le rapporteur a par ailleurs indiqué qu'il était favorable à une évolution des modalités de nomination du président de la société holding afin de tenir compte des remarques constructives qui ont été tenues lors des auditions notamment par le président de l'Arcom et la présidente de France Médias Monde. Il a ainsi déclaré, lors de sa présentation en commission, qu'il entendait préparer un amendement dans la perspective de la séance publique supprimant la nomination du président de France Médias en conseil des ministres et prévoyant une nomination par l'Arcom sur proposition du conseil d'administration de la société, la sélection des candidatures étant réalisée par un comité de nomination.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4
Coordinations consécutives à la création de la société France Médias

Cet article procède à plusieurs coordinations rendues nécessaires du fait de la création de la société holding France Médias. Il prévoit une nouvelle rédaction des articles 47-6 et 48-1-A. Il modifie les articles 48, 48-1, 48-2, 48-3, 48-9, 48-10 et abroge les articles 49, 49-1 et 50 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.

I. - Plusieurs coordinations devenues indispensables suite à la création de la société France Médias

Les modifications apportées par l'article 3 dans la nouvelle rédaction proposée pour l'article 47-6 de la loi du 30 septembre 1986 visent à ajouter une référence à la société France Médias à une référence à France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, ARTE France et l'INA. De la même manière, la modification proposée de la rédaction de l'article 48 de la loi du 30 septembre 1986 vise également à adjoindre une référence à la société France Médias à la référence déjà présente aux quatre sociétés de l'audiovisuel public national.

La nouvelle rédaction proposée par le sixième alinéa de l'article 3 pour l'article 48-1-A relatif à l'interdiction pour France Télévisions et Radio France d'accorder un droit exclusif de reprise de leurs programmes diffusés par voie hertzienne terrestre reprend les dispositions prévues par l'article 56-6 du projet de loi de 2020 afin d'étendre cette interdiction à France Médias Monde et aux filiales de France Médias exerçant une activité d'édition de services.

Le septième alinéa de l'article 3 modifie le premier alinéa de l'article 48-1 concernant les mises en demeure par l'Arcom afin de les étendre à France Médias, à l'INA et aux filiales créées en vertu de l'article 44-1 exerçant une activité d'édition de services. Le huitième alinéa procède à une coordination similaire aux articles 48-2, 48-3 et 48-10.

Enfin, compte tenu de l'insertion des dispositions concernant l'INA dans un nouveau paragraphe IV bis de l'article 44, le dernier alinéa de l'article 3 supprime les articles 49, 49-1 et 50 de la loi du 30 septembre 1986 devenus sans objet.

II. - Un article adopté sans modification par la commission

Le présent article ne comportant que des coordinations, la commission l'a adopté sans modification.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 5
Conventions stratégiques pluriannuelles et répartition des moyens

Cet article vise à réécrire l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relatif aux contrats d'objectifs et de moyens pour leur substituer des conventions stratégiques pluriannuelles. Il tend également à prévoir les modalités de répartition des moyens issus des dotations publiques entre les différentes entités de l'audiovisuel public.

I. - Des COM dénués de véritable portée stratégique et financière

L'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 prévoit que des contrats d'objectifs et de moyens (COM) sont conclus entre l'État et France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, ARTE-France et l'INA pour une durée comprise entre trois et cinq ans. Ces COM déterminent un certain nombre de priorités concernant notamment les axes de développement, les investissements de France Télévisions dans la production, le montant des ressources publiques affectées aux différents organismes, le montant du produit attendu des recettes propres, les axes d'amélioration de la gestion financière et des ressources humaines ainsi que, le cas échéant, les perspectives en matière de retour à l'équilibre financier.

Les COM sont transmis aux commissions parlementaires compétentes qui peuvent formuler un avis. L'Arcom donne pour sa part un avis sur les COM de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde. Des rapports d'exécution des COM sont présentés chaque année devant les commissions compétentes par France Télévisions, Radio France, France Médias Monde.

Le paragraphe III de l'article 53 prévoit que chaque année le Parlement approuve la répartition de la ressource publique entre les différents organismes affectataires. Cependant, si les parlementaires peuvent transférer des crédits d'un programme à un autre au sein de la même mission, l'expérience montre qu'il leur manque une vision d'ensemble qui permettrait d'affecter des crédits à des actions prioritaires transversales. Dans les faits, c'est le Gouvernement qui détermine les moyens de chaque société en l'absence de débat public et donc sans avoir à véritablement justifier ses arbitrages.

Le paragraphe VI fixe le principe de l'absence de publicité entre 20 heures et 6 heures sur les chaînes de France Télévisions sans toutefois préciser les modalités de recours au parrainage qui a eu tendance à contourner l'interdiction de diffuser de la publicité après 20 heures.

Enfin, un paragraphe VI bis issu d'une proposition de loi d'origine sénatoriale3(*) prévoit que les programmes destinés prioritairement aux jeunes de moins de douze ans ne comportent pas de messages publicitaires tant sur les chaînes linéaires que sur les services délinéarisés de France Télévisions.

Le rapporteur rappelle que ces contrats d'objectifs et de moyens n'ont pas de portée contraignante pour l'actionnaire et qu'ils n'ont pas toujours été respectés à l'exception notable de la période 2018-2022 marquée par la mise en oeuvre d'une trajectoire budgétaire pluriannuelle. Les nombreux objectifs des COM en ont par ailleurs souvent fait des documents sans réelle portée stratégique s'apparentant davantage à un exercice de communication qu'à une feuille de route permettant de refléter la volonté de l'actionnaire. Les objectifs des COM illustrent en réalité davantage les projets des sociétés que la vision stratégique de l'État, celui-ci étant dépourvu des outils qui lui permettraient de définir des priorités à un moment où tous les paradigmes sont remis en cause par la délinéarisation des offres de programmes.

Dans ces conditions, les COM apparaissent comme des outils assez lourds à réaliser du fait des nombreuses consultations qu'ils occasionnent et peu pertinents pour mener à bien de véritables mutualisations compte tenu des résistances des dirigeants de chaque entreprise mais également du fait de la brièveté des passages des ministres de la Culture dans leurs fonctions4(*) qui permet aux dirigeants de l'audiovisuel public de faire « le dos rond » en attendant que la volonté réformatrice d'un ministre soit interrompue par le prochain remaniement...

Le rapporteur rappelle par ailleurs que la commission de la culture du Sénat a donné un avis défavorable5(*) à l'adoption des derniers COM 2020-2022 au motif qu'ils ne portaient en réalité que sur deux ans en contradiction avec l'article 53 et qu'ils ne constituaient « qu'un ersatz de réforme de l'audiovisuel public », leur préparation ne s'étant appuyée par ailleurs « sur aucune évaluation sérieuse de la situation des entreprises de l'audiovisuel public au regard de l'adaptation de leur offre de programmes aux attentes du public et n'(ayant) fait l'objet d'aucune véritable concertation, notamment avec les personnels des entreprises concernées ».

II. - Des conventions stratégiques pluriannuelles plus opérationnelles

Le présent article 5 prévoit une nouvelle rédaction de l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 qui reprend les dispositions prévues par l'article 59 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique pour rédiger le nouvel article 54 de la loi du 30 septembre 1986 dans le cadre de la nouvelle numérotation adoptée à l'occasion de la refonte opérée du titre III.

Il maintient ainsi, dans son paragraphe I, le remplacement des COM par des « conventions stratégiques pluriannuelles » (CSP) dont la durée ne pourra excéder cinq années civiles. Principale distinction avec les COM, une seule convention sera conclue entre France Médias et l'État en remplacement des quatre COM conclus avec chacune des entités. Cette centralisation de la définition de la stratégie dans un document unique constitue une conséquence de la création de la société holding France Médias mais elle a également pour intérêt de consacrer la définition d'une stratégie unique pour l'ensemble du groupe. La convention pluriannuelle stratégique signée entre l'État et France Médias pourra ainsi définir des priorités transversales pour le groupe là où les COM n'étaient pas en mesure de dépasser les résistances et l'inertie propres à chacune des entités. À noter que la nouvelle rédaction proposée pour l'article 53 prévoit également la conclusion d'une convention stratégique pluriannuelle entre ARTE-France et l'État.

Alors que les objectifs des COM étaient considérés comme trop nombreux, les nouvelles « CSP » devront se concentrer sur trois aspects majeurs pour l'activité de France Médias et ARTE-France :

- les orientations stratégiques et les axes prioritaires de leur développement ;

- le coût prévisionnel de leurs activités pour chacune des années concernées qui sera évalué grâce à des indicateurs quantitatifs et qualitatifs d'exécution et de résultats ;

- et les prévisions pluriannuelles de ressources publiques qui leur seront affectées.

Afin de mieux identifier les actions de la société holding, la nouvelle rédaction de l'article 53 prévoit également que la CSP de France Médias devra distinguer la part maximale de la ressource publique que la société holding conservera pour ses missions propres, la part de la ressource qui sera répartie par la société holding entre ses différentes filiales ainsi que la part de la ressource qui sera consacrée à la conduite de projets d'intérêt commun à tout ou partie de ses filiales. Le rapporteur estime particulièrement nécessaire ces dispositions qui doivent permettre d'affecter des moyens à des projets transversaux, ce qui n'était pas véritablement possible avec les COM actuels.

La CSP de France Médias devra également déterminer le montant du produit attendu des ressources propres de chacune des filiales en distinguant les ressources issues de la publicité et du parrainage, les ressources issues des services qui donnent lieu au paiement d'un prix ainsi que les axes d'amélioration de la gestion financière et des ressources humaines. La CSP devra également distinguer concernant France Médias Monde les ressources issues des établissements publics de l'État concourant à la mise en oeuvre de la politique de développement qui servent à financer les actions d'aide au développement de FMM.

Le rapporteur remarque que ces dispositions concernant la répartition ces moyens au sein de France Médias permettent de dissiper les inquiétudes de certains dirigeants de sociétés de l'audiovisuel public qui justifient leurs réserves à tout regroupement au motif que les moyens communs pourraient être captés par France Télévisions. Non seulement cette crainte n'apparaît plus fondée mais de surcroît une société comme France Médias Monde voit inscrit dans la loi le principe d'un financement par l'aide au développement ce qui revient à le pérenniser comme le demande sa présidente depuis plusieurs années.

La nouvelle rédaction de l'article 53 prévoit ensuite que les CSP ainsi que leurs éventuels avenants devront être transmis aux commissions permanentes chargées des affaires culturelles, des finances et des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat qui auront six semaines pour donner leur avis.

Le paragraphe II de la nouvelle rédaction proposée par cet article pour l'article 53 prévoit qu'il reviendra au conseil d'administration de la société France Médias et au conseil de surveillance de la société ARTE-France d'approuver leurs conventions stratégiques pluriannuelles et de délibérer sur leur exécution annuelle.

Dans le prolongement des dispositions concernant la répartition des moyens au sein de la société France Médias, le troisième alinéa du paragraphe II prévoit que les conseils d'administration des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, Institut national de l'audiovisuel devront être consultés, chacun en ce qui le concerne, sur le projet de convention stratégique pluriannuelle entre l'État et la société France Médias, ainsi que sur l'exécution annuelle de celle-ci.

Enfin, de manière comparable à ce que prévoit déjà l'article 53 en vigueur pour les COM actuels, le dernier alinéa du paragraphe III de la nouvelle rédaction de l'article 53 indique que chaque année, avant l'examen du projet de loi de règlement, les sociétés France Médias et ARTE-France présentent aux commissions permanentes chargées des affaires culturelles, des finances et des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur l'exécution de leur convention stratégique pluriannuelle.

Le paragraphe III de la nouvelle rédaction de l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit que chaque année, avant l'examen du projet de loi de finances, le Parlement sera informé de la répartition indicative de la ressource publique élaborée sur proposition de la société holding France Médias en distinguant les trois parties déjà mentionnées dans la CSP à savoir la part maximale réservée à la société holding pour mener ses missions propres, la part rétrocédée à chacune des filiales et la part consacrée à la conduite de projets d'intérêt commun. Le cinquième alinéa du paragraphe III précise que lorsque ces montants sont différents de la programmation prévue dans la CSP, le Parlement est informé de la justification des écarts constatés. Une nouvelle fois le rapporteur ne peut que souligner que des garanties ont été prises afin d'éviter tout arbitraire dans la répartition des moyens.

Le paragraphe IV prévoit qu'à compter du 1er janvier 2025 la société holding France Médias détermine la répartition de la ressource publique entre les trois parts déjà mentionnées.

Le paragraphe V constitue la seule véritable modification apportée au texte examiné par les députés en mars 2020 puisque ce dernier prévoyait en particulier au paragraphe VI du nouvel article 54 que la principale source de financement de France Médias, de ses quatre filiales et d'ARTE France est constituée par le produit de la contribution à l'audiovisuel public (CAP). La suppression de cette taxe affectée dans le cadre de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 rendait nécessaire de préciser dans la proposition de loi de nouvelles modalités de financement.

Compte tenu du débat toujours en cours sur les différents moyens de financer l'audiovisuel public le président Laurent Lafon a souhaité préciser que la principale source de financement de la société France Médias, de ses filiales et d'ARTE France devait être constituée par une ressource publique de nature fiscale, pérenne, suffisante, prévisible et prenant en compte l'inflation. Cette rédaction exclut par définition un financement des sociétés de l'audiovisuel public par des dotations budgétaires mais elle laisse la porte ouverte soit à la création d'une nouvelle taxe qui pourrait prendre la forme d'une taxe universelle payée par chaque foyer, soit à la pérennisation d'un financement par une fraction du produit de la TVA sous réserve d'une modification de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Le rapporteur considère que cet apport de la proposition de loi est particulièrement important car il permet de traiter de manière globale à la fois l'organisation, les missions et le financement de l'audiovisuel public, le regroupement des sociétés apparaissant comme une condition de la mise en place d'un financement pérenne garantissant l'indépendance de l'audiovisuel public conformément aux préconisations formulées par la commission de la culture depuis son rapport de 2015.

Le paragraphe VI reprend l'essentiel des dispositions en vigueur dans l'actuel paragraphe VI de l'article 53 concernant les modalités de diffusion de la publicité sur France Télévisions et notamment le principe de l'interdiction de 20 heures à 6 heures. À noter que le projet de loi de 2020 reprenait ces dispositions dans un article 56-10 consacré exclusivement à France Télévisions qui avait pour particularité d'autoriser la publicité sur France Télévisions lors de la retransmission des événements d'importance majeure comme le demande la direction du groupe public depuis plusieurs années. Le rapporteur ne peut que rappeler le souhait exprimé régulièrement depuis 2015 dans plusieurs rapports que le financement de l'audiovisuel public dépende de moins en moins de la publicité afin de pouvoir renforcer la spécificité de son identité. À cet égard, il se réjouit que le dernier alinéa du paragraphe VI de cet article 5 maintienne le principe de l'interdiction de la publicité dans les programmes de France Télévisions destinés aux enfants de moins de douze ans.

Les paragraphes II et III de l'article 5 procèdent à des coordinations afin de remplacer des références au COM par des références à la nouvelle convention stratégique pluriannuelle dans les articles 46 et 56-1 de la loi du 30 septembre 1986.

III. - Les modifications adoptées par la commission

Le rapporteur a souhaité clarifier la place de la publicité et des parrainages dans les modèles économiques des sociétés de l'audiovisuel public. La situation de France Télévisions et de Radio France se distingue à cet égard de celle des autres sociétés de l'audiovisuel public qui ne recourent pas ou peu à la publicité.

Si le contrat d'objectifs et de moyens de Radio France prévoit bien un plafonnement de la publicité à hauteur de 42 millions d'euros, celui-ci ne tient pas compte des campagnes d'intérêt général faisant l'objet de rémunérations ni de la publicité sur les supports digitaux qui ont pris une importance croissante au fil des années. Le groupe France Télévisions n'est pas astreint pour sa part à un quelconque plafonnement de ses recettes publicitaires que ce soit sur ses antennes linéaires ou sur ses sites et applications numériques. Il a, par ailleurs, pris l'habitude de contourner l'interdiction de recourir à la publicité après 20 heures par des tunnels de parrainages entre 20h30 et 21h qui ont rendu inopérante, au moins partiellement, l'interdiction législative de recourir à la publicité sur ces créneaux.

Alors que les recettes publicitaires des groupes publics ont augmenté ces dernières années, les entreprises privées sont quant à elles confrontées à une baisse de leur chiffre d'affaires dans un contexte concurrentiel accru avec les plateformes sur fond de ralentissement économique qui éloigne les annonceurs des écrans télévisés.

C'est dans ce contexte que le rapporteur a souhaité poser le principe de la définition d'un plafonnement de la part des recettes publicitaires de France Télévisions, Radio France et de France Médias Monde défini en fonction des montants de ressources publiques qui leur sont attribuées.

L'amendement COM-40 rectifié du rapporteur prévoit ainsi d'introduire un nouvel alinéa dans l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 prévoyant que le niveau de ce plafonnement incluant les recettes publicitaires digitales sera fixé dans la convention stratégique pluriannuelle. Dans l'esprit du rapporteur, ce plafonnement devrait dans un premier temps veiller à stabiliser le montant de l'ensemble de ces recettes sur tous les supports avant d'engager dans un second temps une baisse à mesure que d'autres sources de financement pourront être dégagées comme les revenus attachés à la production pour France Télévisions que la proposition de loi s'attache à développer.

La commission a également adopté un amendement COM-41 du rapporteur modifiant le paragraphe V de la nouvelle rédaction prévue par cet article pour l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 afin de mentionner TV5 Monde parmi les sociétés financées par une dotation publique de même nature que celle qui financera France Médias, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, l'INA et ARTE-France.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6
Coordinations consécutives à la création de la société France Médias

Cet article procède à deux coordinations au sein de l'article 57 de la loi du 30 septembre 1986 consécutives à la création de la société France Médias qui modifie la gouvernance des entreprises mentionnées à l'article 44 de la même loi.

L'article 57 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit dans son paragraphe II les modalités d'exercice du droit de grève dans les sociétés nationales de programme.

Le présent article prévoit ainsi que le préavis de grève doit être adressé au président-directeur général et non plus au président des sociétés visées. Il précise par ailleurs qu'il revient au directeur général et non plus au président de la société concernée de prendre les dispositions nécessaires pour assurer la continuité du service.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 7
Transformation de l'INA en société anonyme

Cet article vise à transformer en société anonyme l'établissement public Institut national de l'audiovisuel afin de pouvoir l'intégrer à la société holding France Médias.

L'article 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose que l'Institut national de l'audiovisuel (INA) est un établissement public industriel et commercial (EPIC). La transformation de l'INA en société anonyme aura notamment pour conséquence de ne plus le soumettre au principe de spécialité, l'objet social d'une société commerciale étant défini de manière large, dans un but de souplesse.

Le présent article reprend les dispositions de l'article 77 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique qui visait à transformer l'INA en société anonyme afin de lui permettre d'intégrer la société holding France Médias. Ces dispositions n'avaient pas été codifiées dans la loi du 30 septembre mais elles figuraient au chapitre II du projet de loi consacré aux dispositions transitoires. Le présent article maintient le principe d'une disposition transitoire qui n'est pas appelée à figurer dans la loi du 30 septembre 1986.

Le paragraphe Ier de cet article 7 prévoit tout d'abord que l'établissement public Institut national de l'audiovisuel sera transformé en société anonyme au 1er janvier 2024. À cette date, son capital sera entièrement détenu par l'État qui transférera immédiatement les actions correspondantes à la société France Médias, conformément à l'article 8 de la présente proposition de loi. Le texte précise que cette transformation n'emportera ni création d'une personne morale nouvelle, ni cessation d'activité, ni conséquence sur le régime juridique auquel sont soumis ses personnels. Durant cette période transitoire, la continuité de la personne morale et des activités de l'INA est assurée et le régime juridique des personnels sera préservé.

Le deuxième alinéa de l'article prévoit par ailleurs que les biens de l'établissement public Institut national de l'audiovisuel relevant du domaine public seront déclassés à la date de sa transformation en société anonyme et deviendront la propriété de la société anonyme Institut national de l'audiovisuel. Le troisième alinéa contient des dispositions permettant de protéger ces biens en prévoyant que l'État puisse s'opposer à leur cession, à leur apport, à la création d'une sûreté sur ces biens, ou subordonner leur cession, la réalisation de leur apport ou la création de la sûreté sur ces derniers à la condition qu'elle ne soit pas susceptible de porter préjudice à l'accomplissement des missions de service public de l'Institut. La liste des biens concernés est définie par décret.

L'alinéa 3 dispose en outre que les biens collectés par l'INA au titre du dépôt légal resteront la propriété de l'État. On peut rappeler que l'établissement, en vertu des dispositions qui définissent la consistance du domaine public mobilier et qui organisent le dépôt légal sur le territoire français métropolitain et d'outre-mer, est dépositaire, et non propriétaire, des documents qu'il collecte dans ce cadre. L'INA continuera à remplir sa mission de collecte du dépôt légal dans les mêmes conditions puisque l'article L. 132-3 du code du patrimoine ne fait pas obstacle à l'exercice de cette mission par une société anonyme.

Le quatrième alinéa prévoit le transfert de l'ensemble des biens, droits, obligations, contrats, conventions et autorisations de l'établissement public à la société anonyme INA de plein droit et sans formalité, à la date de la transformation. L'ensemble des opérations est réalisé à titre gratuit et ne donne lieu au paiement d'aucun droit, ni d'aucune indemnité ou taxe, ni de la contribution de sécurité immobilière liée à l'enregistrement des actes authentiques prévue à l'article 879 du code général des impôts.

Le cinquième alinéa prévoit les dispositions de transition en matière de comptabilité. Les comptes de l'exercice 2023 de l'établissement public devront être approuvés dans les conditions du droit commun par l'assemblée générale de la société INA. Le bilan au 31 décembre 2023 de la société Institut national de l'audiovisuel sera constitué à partir du bilan de clôture de l'établissement public à la date de sa transformation et du compte de résultat du premier exercice de la société, ouvert à la date de sa formation.

Le paragraphe II prévoit les dispositions de transition relatives à la gouvernance de l'INA. À la date de la transformation de l'EPIC en SA, le président de l'EPIC deviendra de droit président-directeur général de la société. Il deviendra directeur général de la même société dès lors que la présidence non-exécutive sera confiée au président de France Médias ainsi que le prévoit l'article 3 de la proposition de loi. Le texte prévoit également la continuité des mandats des administrateurs de l'EPIC, des représentants du personnel élus (alinéa 7) et de celui des commissaires aux comptes (alinéa 8).

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 8
Création de la société France Médias et mise en place de sa gouvernance

Cet article prévoit les dispositions transitoires nécessaires à la création du groupe France Médias à compter du 1er janvier 2024.

Cet article reprend les principales dispositions des articles 78, 79, 80, 81 et 82 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique qui organisait la création de la société holding France Médias. Ces dispositions transitoires n'ont pas vocation à être intégrées dans la loi du 30 septembre 1986.

Les paragraphes I et II reprennent les dispositions de l'article 78 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle qui crée la société France Médias.

Le premier alinéa du I prévoit plus précisément la création de la société France Médias au 1er janvier 2024 ainsi que l'apport du capital des sociétés nationales de programmes et de l'INA par l'État à la holding France Médias à la même date.

Le deuxième alinéa prévoit la continuité des droits et obligations des sociétés intégrées dans le groupe. Ainsi, l'apport de leur capital n'a aucune incidence sur les biens, droits, obligations, contrats, conventions et autorisations de ces sociétés et n'entraîne pas de modification des contrats et des conventions en cours. Il ne donne lieu à aucun paiement, notamment d'impôt.

Le troisième alinéa prévoit que l'apport des actions est réalisé à la valeur nette comptable des titres. Pour les opérations de transformation d'établissement public industriel et commercial en société anonyme, cette valeur nette comptable est généralement égale à la valeur totale des dotations reçues par l'établissement public et inscrites à ce titre au passif de son bilan.

Le paragraphe II prévoit l'approbation des statuts des deux nouvelles sociétés créées, France Médias et l'INA, dans un délai de six semaines à compter du 1er janvier 2024, dans les conditions fixées par l'article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, c'est-à-dire par décret.

Les statuts des sociétés nationales de programme, France Télévisions, Radio France et France Médias Monde, sont mis en conformité avec la loi à compter de la première nomination du président de la société France Médias, par application du I de l'article 47-3 de la loi du 30 septembre 1986 précitée.

Le paragraphe III reprend les dispositions de l'article 79 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle. Il prévoit un délai de deux mois à compter de la création de la société pour la désignation des sept premiers membres du conseil d'administration, visés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 6° du nouvel article 47-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, à savoir les deux représentants du Parlement, le représentant de l'État, les deux administrateurs désignés par l'État et les deux personnalités indépendantes désignées par décret après avis conforme de l'Arcom.

Le deuxième alinéa du III prévoit que dans cette période transitoire, le président-directeur général de France Médias est le doyen d'âge parmi les personnalités indépendantes mentionnées à l'article 47-1. Son mandat prend fin avec la nomination du président-directeur général par décret du Président de la République. Ce président transitoire aura pour mission de déposer les statuts de la société avant leur approbation par décret dans un délai de six semaines à compter du 1er janvier 2024 en application du II de l'article 8 et d'organiser, en application du quatrième alinéa du paragraphe III, dans un délai d'un mois suivant la désignation des représentants des salariés, la cooptation des deux membres visés au 5° de l'article 47-1 précité.

Le troisième alinéa du paragraphe III prévoit le mode de désignation des premiers représentants des salariés de France Médias. Par dérogation au 6° de l'article 47-1 précité qui renvoie aux règles d'élection des représentants des salariés prévues par la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, les premiers représentants des salariés devront être désignés parmi le personnel des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l'INA par chacune des deux organisations syndicales ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages en additionnant ceux reçus au premier tour des dernières élections professionnelles organisées par ces sociétés. Ce mécanisme doit permettre aux administrateurs représentant le personnel de participer pleinement aux opérations de mise en place du groupe.

Le dernier alinéa du paragraphe III dispose que dans un délai de trois mois à compter de la nomination des deux personnalités indépendantes choisies par le conseil d'administration lui-même, ce dernier propose au Président de la République une personne pour être désignée président-directeur général de France Médias.

Le paragraphe IV reprend pour sa part les dispositions transitoires relatives aux instances de gouvernance des sociétés du groupe France Médias prévues à l'article 80 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle.

Le premier alinéa de ce paragraphe prévoit qu'à compter de la première nomination du président-directeur général de France Médias par décret du Président de la République, les mandats des membres des conseils d'administration des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel prennent fin à l'exception de ceux des représentants du personnel.

Le deuxième alinéa dispose que jusqu'à la date mentionnée au précédent alinéa, les conseils d'administration des sociétés susmentionnées continuent à délibérer valablement dans leur composition antérieure à la présente loi et de nouveaux membres peuvent encore être nommés dans les conditions prévues par le droit actuel, c'est-à-dire par les articles 47-1, 47-2, 47-3 et 50 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée dans leur rédaction antérieure aux modifications proposées par le présent projet de loi.

Le troisième alinéa prévoit qu'à la date de nomination du premier président-directeur général de France Médias, les présidents en exercice des sociétés France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et Institut national de l'audiovisuel deviennent directeurs généraux de ces sociétés, jusqu'au 1er janvier 2025, date à laquelle de nouveaux directeurs généraux seront désignés conformément au II du nouvel article 47-3 de la loi du 30 septembre 1986, c'est-à-dire par le conseil d'administration de chaque société sur proposition de son président (le président de France Médias) à la majorité des membres qui le composent et après avis conforme de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (sauf pour le directeur général de l'INA).

Le paragraphe V reprend les dispositions de l'article 81 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle. Il prévoit l'entrée en vigueur au 1er janvier 2025 du III de l'article 54 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée qui dispose que le Parlement est informé de la répartition des ressources publiques par France Médias au sein du groupe. La société holding France Médias ne sera opérationnelle en effet qu'au cours de l'année 2024, ce qui a pour conséquence de reporter à la loi de finances pour 2025 l'entrée en vigueur de la compétence de la société France Médias concernant la répartition des moyens publics au sein du groupe.

Le paragraphe VI applique à Wallis-et-Futuna, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie l'entrée en vigueur différée de l'information du Parlement sur la répartition des ressources de France Médias prévue par le paragraphe V du présent article. Il reprend, ce faisant, les dispositions du paragraphe IX de l'article 82 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle.

Le rapporteur rappelle par ailleurs que le présent projet de loi s'applique de plein droit dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution (départements et régions d'outre-mer) qui sont régies par le principe de l'identité législative ainsi que dans les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution qui sont également soumises au principe de l'identité législative (Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon).

III. - Les modifications adoptées par la commission

La commission a adopté l'amendement du rapporteur ( COM-42) qui corrige une erreur matérielle concernant les modalités d'exercice des premières présidence et direction générale. La référence aux administrateurs indépendants désignés par les commissions parlementaires visés dans le 5° de l'article 78 du projet de loi n'a en effet plus lieu d'être puisque la proposition de loi les a remplacés par deux parlementaires. Dans ces conditions, l'amendement du rapporteur prévoit que ces premières présidence et direction générale incomberont à l'administrateur indépendant le plus âgé désigné par l'Arcom.

Le rapporteur indique que la modification des modalités de nomination du président e France Médias prévues à l'article 3 de la présente proposition devra s'accompagner d'une coordination au dixième alinéa de l'article 5 concernant la désignation du premier président-directeur général.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 9
Entrée en vigueur différée des dispositions relatives à l'audiovisuel public

Cet article vise à prévoir une entrée en vigueur des dispositions de la présente proposition de loi concernant l'audiovisuel public au 1er janvier 2024.

Le paragraphe I actualise la référence mentionnée au premier alinéa de l'article 108 de la loi du 30 septembre 1986 afin de prévoir que cette dernière sera applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, dans sa rédaction résultant de l'adoption de la présente proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle.

Par ailleurs, afin d'assurer l'applicabilité de la création de la société holding, le paragraphe II prévoit que sous réserve des dispositions transitoires mentionnées aux articles 7 et 8, les articles 1 à 6 et le I du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2024.

Le rapporteur remarque que le choix du 1er janvier 2024 pour l'entrée en vigueur de la réforme se justifie par la date d'examen au Sénat en séance publique de la proposition de loi programmée en séance publique à compter du 12 juin 2023. Il remarque cependant que le choix définitif de cette date d'entrée en vigueur dépendra de la date de promulgation envisageable. En effet, plus cette date serait susceptible de rapprocher de la fin de l'année 2023 plus un report de la mise en oeuvre de la loi au 1er janvier 2025 mériterait d'être pris en considération. La poursuite de la navette avec l'Assemblée nationale pourrait par ailleurs permettre d'examiner l'intérêt de choisir une date plus lointaine pour mettre en oeuvre la création de la société holding, par exemple pour tenir compte de la mise en oeuvre des nouveaux COM.

La commission a adopté cet article sans modification.

Chapitre II
Préservation de notre souveraineté audiovisuelle
Article 10
Évènements sportifs d'importance majeure

Cet article vise à élargir aux plateformes le régime applicable aux chaînes de télévision en matière d'acquisition des droits de retransmission des événements d'importance majeure et à instituer une clause interdisant à un acteur extra-européen d'acquérir plus des deux-tiers des matchs d'une même compétition.

I. - Une asymétrie persistante concernant l'acquisition et l'exploitation des droits sportifs

Les grandes plateformes, après avoir réussi à se faire connaître pour leurs catalogues de films et de séries disponibles de manière illimitée et délinéarisée, ont commencé à investir le champ du sport en diffusant des compétitions en direct de la même manière que les chaînes de télévision traditionnelles. Sa puissance financière a ainsi permis à Amazon prime d'acquérir en France les droits de la Ligue 1 et ceux des matchs en soirée du tournoi de Roland Garros. Si l'arrivée des plateformes sur le marché des droits sportifs présente l'avantage d'accroître les revenus des fédérations et des ligues, il présente également l'inconvénient de pénaliser les éditeurs de programmes qui sont soumis à des contraintes réglementaires plus importantes. Le présent article 10 de la proposition de loi vise ainsi à essayer de réduire ces asymétries de concurrence pour préserver l'attractivité des éditeurs de programmes.

Le paragraphe I de cet article vise à appliquer aux plateformes numériques les contraintes imposées aux éditeurs de programmes en matière de diffusion des événements sportifs d'importance majeure (EIM).

L'article 20-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 prévoit, en effet, que les événements d'importance majeure ne peuvent être retransmis en exclusivité d'une manière qui aboutit à priver une partie importante du public de la possibilité de les suivre en direct ou en différé sur un service de télévision à accès libre. La liste de ces événements d'importance majeure est fixée par décret en Conseil d'État.

Le présent article prévoit ainsi que l'obligation de proposer à des services de télévision à accès libre la cession de droits acquis sur des événements d'importance majeure s'applique à l'ensemble des acteurs de la communication audiovisuelle et pas seulement aux chaînes de télévision. Il prévoit également que cette cession obligatoire des droits doit bénéficier aux chaînes gratuites de la TNT et non à tout service de télévision à accès libre afin de pouvoir être largement accessible.

Le paragraphe II vise à protéger l'accès du plus grand nombre à la diffusion des matchs de Ligue 1 afin d'éviter les risques liés à la défaillance d'un acteur qui aurait acquis l'entièreté des droits de diffusion. Il modifie en conséquence l'article L. 333-2 du code du sport afin de prévoir que la commercialisation des lots ne puisse avoir pour effet d'attribuer plus des deux tiers des droits de diffusion en direct de l'ensemble des événements sportifs d'une même compétition directement ou indirectement à un candidat dont le siège social est situé en dehors de l'Union européenne ou qui se trouve sous le contrôle d'une entité dont le siège social n'est pas localisé dans l'Union européenne.

II.- Une nouvelle rédaction afin de réduire les asymétries dans le respect des principes du droit européen

La rédaction de l'article 10 a permis de mettre en lumière les asymétries qui pénalisent les éditeurs de programmes français sur le marché des droits sportifs. Elle présentait cependant certaines faiblesses au regard du droit européen et du droit de la concurrence qui ont amené le rapporteur à rechercher une nouvelle rédaction qui, s'en remettre en cause les objectifs de l'article, pouvait permettre de rapprocher les points de vue.

La nouvelle rédaction de l'article 10 proposée par l'amendement COM-43 du rapporteur prévoit de garantir que l'ensemble des candidats attributaires de droits d'exploitation audiovisuelle de manifestations sportives ou de compétitions sportives, quels que soient leurs modes de commercialisation, cédés aux sociétés sportives et commercialisés par une ligue professionnelle, ou par la société commerciale créée par cette ligue, sont soumis aux mêmes règles et obligations.

L'amendement COM-43 propose ainsi de compléter les dispositions des articles L. 333-1 et l'article L. 333-2 du code du sport relatives à la commercialisation des droits d'exploitation audiovisuelle, afin d'intégrer aux dispositions encadrant la commercialisation des droits d'exploitation audiovisuelle les conditions de respect des règles relatives à la retransmission des évènements d'importance majeure ainsi que de celles encadrant la publicité et le parrainage audiovisuels.

Il reviendra à la fédération sportive, à l'organisateur de compétitions sportives, ainsi qu'à la ligue professionnelle, ou à la société commerciale qu'elle a créée, de s'assurer du respect de ces règles par les candidats attributaires de droits d'exploitation audiovisuelle.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11
Définition des services d'intérêt général et de leur visibilité appropriée

Cet article vise à insérer dans la loi du 30 septembre 1986 une définition des services d'intérêt général et à organiser la visibilité appropriée des services et de leurs programmes sur les interfaces utilisateurs.

I. - Une disposition indispensable pour préserver la visibilité des médias télévisés sur les interfaces utilisateurs

L'article 7 bis de la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 « services de médias audiovisuels », introduit par la directive 2018/1808/UE du 14 novembre 2018, prévoit que « les États membres peuvent prendre des mesures afin d'assurer une visibilité appropriée pour les services de médias audiovisuels d'intérêt général ».

À la suite de l'habilitation accordée par le Parlement au Gouvernement par la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, ce dernier a adopté l'ordonnance n° 2020-1642 du 21 décembre 2020 portant transposition de la directive (UE) 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels, compte tenu de l'évolution des réalités du marché, et modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le code du cinéma et de l'image animée, ainsi que les délais relatifs à l'exploitation des oeuvres cinématographiques.

L'article 10 de l'ordonnance du 21 décembre 2020 a ainsi créé un article 20-7 nouveau dans la loi du 30 septembre 1986 qui prévoit l'obligation pour les opérateurs qui déterminent les modalités de présentation des services sur les interfaces utilisateurs, dont le nombre d'utilisateurs ou d'unités commercialisées sur le territoire français dépasse un seuil fixé par décret, d'assurer la visibilité appropriée de tout ou partie des services d'intérêt général et l'identification des éditeurs de ces services, selon des conditions précisées par l'Arcom.

L'article 20-7 de la loi propose de manière non exhaustive des modalités de mise en avant : visibilité sur l'écran d'accueil, dans les recommandations aux utilisateurs et les résultats de recherche de l'utilisateur, ainsi que sur les dispositifs de pilotage à distance. La loi donne pouvoir à l'Arcom d'étendre au-delà du service public de la communication audiovisuelle les services d'intérêt général (SIG) pour lesquels cette visibilité devra être assurée.

Le décret n° 2022-1541 du 7 décembre 2022 a fixé les seuils d'assujettissement des interfaces utilisateurs mentionnées respectivement aux 1° et 2° puis 3° et 4° du I de l'article 20-7 à 150 000 interfaces utilisateurs commercialisées, mises à disposition dans le cadre d'un contrat d'abonnement ou louées, ou 3 millions de visiteurs uniques par mois, sur le territoire français et sur la base de la dernière année civile.

Par ailleurs, conformément au deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 20-7, l'Arcom a lancé en mars 2023 une consultation afin de recueillir les observations des parties intéressées relatives à un projet de délibération relatif aux mesures de visibilité appropriée visant les interfaces utilisateurs.

L'application des dispositions prévues par l'article 20-7 s'inscrit dans un horizon temporel assez long puisque seule la visibilité appropriée des programmes et services proposés par le service public est prévue d'ici la fin de l'année 2023 tandis qu'une évaluation devrait intervenir au terme de cette mise en oeuvre avant un élargissement de l'application de cette visibilité appropriée. Les chaînes privées pourraient donc avoir à attendre 2025 au mieux avant de pouvoir bénéficier de cette disposition pour autant qu'elles auront pu être intégrées au périmètre des SIG.

II. - La nécessité de garantir dans les meilleurs délais une visibilité appropriée aux chaînes de la TNT

Le présent article 11 vise d'une part à préciser directement dans la loi la définition des services d'intérêt général (SIG) et d'autre part à confier au régulateur le soin de déterminer l'ordre d'affichage des services et des programmes d'intérêt général.

Le 1° supprime l'application du paragraphe II à compter du 1er janvier 2022 qui n'a plus lieu d'être tandis que le 2° supprime la référence à l'Arcom pour définir les modalités de mise en oeuvre de cette visibilité appropriée. La nouvelle rédaction proposée prévoit d'élargir la définition des SIG à l'ensemble des chaînes de la TNT.

Le 3° réécrit le dernier alinéa du paragraphe II de l'article 20-7 afin de prévoir que le nombre d'actions nécessaires que doit accomplir l'utilisateur pour accéder aux services et programmes d'intérêt général ne doit pas être supérieur au nombre d'actions nécessaires pour accéder aux services et programmes les mieux exposés sur l'interface utilisateur. Cette disposition a pour objectif de placer les chaînes de la TNT au même niveau de visibilité sur les interfaces utilisateurs que les plateformes de vidéo à la demande par abonnement.

L'alinéa 7 complète la précédente rédaction en prévoyant que l'Arcom détermine l'ordre d'affichage des services et des programmes d'intérêt général en tenant compte de trois critères :

- la numérotation logique des chaînes de la TNT de 1 à 27 ;

- les audiences des services diffusés par voie hertzienne terrestre ;

- la nécessité de favoriser l'accès à une offre de programmes culturels et éducatifs de qualité.

Enfin l'alinéa 8 complète le dispositif en prévoyant que la présentation des services et des programmes retenue devra garantir l'identification de l'éditeur du service ou du programme mis en avant.

III.- Les modifications adoptées par la commission

Si la nécessité d'assurer la visibilité appropriée des éditeurs de programmes apparaît nécessaire, les modalités de la mise en oeuvre de cet objectif demeurent complexes puisque cela revient en particulier à imposer des obligations aux fabricants de téléviseurs connectés qui ont une stratégie mondiale et dont le modèle économique repose aussi sur le fait de négocier la mise en avant des services des plateformes et des chaînes. La rédaction de l'article 11 constitue à cet égard une avancée par rapport au droit en vigueur qui laissait une grande marge d'appréciation à l'Arcom pour la définition du périmètre des SIG et nécessitait beaucoup de temps pour mettre en oeuvre cette visibilité appropriée pour l'ensemble des acteurs.

La commission a adopté trois amendements à l'article 11.

Le premier amendement COM-44 rerédige l'alinéa 4 de l'article 11 afin en particulier d'inclure les services de communication audiovisuelle des éditeurs de programmes dans la définition des SIG.

Le deuxième amendement COM-45 apporte une précision au sixième alinéa en prévoyant que le nombre d'actions que doit accomplir l'utilisateur ne doit pas être supérieur de plus d'une action au nombre d'actions nécessaires pour accéder aux services et programmes les mieux exposés sur l'interface utilisateur. Cela signifie en particulier que les chaînes de la TNT devront être visibles au travers d'un bouton ou d'une tuile unique au niveau des plateformes. Le niveau 2 pourrait permettre de présenter les services et programmes par groupes afin de faciliter la recherche et l'identification de l'éditeur de service.

Le troisième amendement COM-46 complète la rédaction du septième alinéa de l'article 11 afin d'inviter l'Arcom à prendre en compte le caractère francophone des programmes dans la détermination de l'ordre d'affichage des services et programmes d'intérêt général. Cet ajout vise en particulier à permettre au régulateur de l'audiovisuel d'assurer la visibilité appropriée de la chaîne francophone internationale TV5 Monde.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11 bis (nouveau)
Moderniser la plateforme TNT en expérimentant l'ultra haute définition

Cet article additionnel adopté par la commission sur proposition de Catherine Morin-Desailly vise à porter de trois à cinq ans le délai prévu par l'article 30-1-1 de la loi du 30 septembre 1986 pour permettre au régulateur de délivrer des autorisations d'émettre en UHD à des chaînes déjà autorisées et de porter à sept ans la durée de ces autorisations temporaires.

L'article 12 de la loi n° 2021-1382 du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles à l'ère numérique a introduit un nouvel article 30-1-1 dans la loi du 30 septembre 1986 qui prévoit que l'Arcom peut, sans être tenue de recourir à l'appel aux candidatures prévu à l'article 30-1, autoriser l'usage de ressources radioélectriques par voie hertzienne terrestre pour la diffusion, dans des formats d'image améliorés comme l'ultra haute définition, de programmes de services de télévision préalablement autorisés par voie hertzienne terrestre.

Ce même article prévoit que les autorisations sont accordées au regard de l'intérêt général et qu'il revient à l'autorité de modifier en conséquence les conventions préalablement conclues avec les titulaires d'autorisations délivrées.

Le même article 30-1-1 prévoit que ces autorisations peuvent être délivrées pendant une durée de trois ans à compter de la publication de la loi n° 2021-1382 du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles à l'ère numérique et que leur durée ne peut être supérieure à cinq ans.

La commission a adopté l'amendement COM-18 de Catherine Morin-Desailly qui porte à cinq ans la durée pendant laquelle peuvent être délivrées des autorisations à compter du 25 octobre 2021. Cet amendement porte, par ailleurs, leur durée à sept ans au plus.

Le rapporteur estime qu'une telle modification était devenue indispensable puisque les dispositions de l'article 30-1-1 devaient initialement expirer en octobre 2024, ce qui aurait empêché l'Arcom de pouvoir attribuer des autorisations en UHD en 2025 pour remplacer celles de la TNT payante qui devraient devenir disponibles à cette échéance. Par ailleurs, la durée de cinq ans apparaît trop limitée pour permettre l'amortissement des investissements nécessaires pour conduire ces projets de chaînes en UHD.

L'amendement COM-18 modifie également la rédaction de l'avant-dernier alinéa de l'article 25 de la loi du 30 septembre 1986 afin de mieux distinguer les pouvoirs du régulateur relatifs à la modernisation de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre de ceux permettant de regrouper les éditeurs sur un même multiplex.

Le rapporteur estime que cet amendement est particulièrement utile afin de donner des perspectives à l'UHD au-delà de l'expérimentation qui devrait être menée par France Télévisions à l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Le non-renouvellement probable des autorisations des cinq chaînes de la TNT payante (Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport, Planète, Paris Première) dont les autorisations expirent en 2025 constitue une opportunité pour favoriser l'adoption d'un nouveau standard permettant de préserver dans la durée l'attractivité de la TNT.

La commission a adopté cet article additionnel.

Article 12
Durée minimale de deux ans pour la détention d'une autorisation de l'Arcom pour l'édition d'un service de télévision

Cet article vise à permettre un changement de contrôle du capital d'une chaîne deux années après l'obtention de la fréquence au lieu de cinq années comme c'est le cas depuis l'adoption de l'article 15 de la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

I. - Une disposition devenue préjudiciable à l'avenir du secteur audiovisuel

Au cours de l'examen de la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, le gouvernement avait souhaité compléter le caractère dissuasif des dispositifs législatifs et fiscaux initiés par le Parlement depuis 2013, afin de mieux prévenir la spéculation portant sur les fréquences de la TNT en interdisant la revente de chaînes nouvellement autorisées.

Le premier alinéa de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 a ainsi été complété afin de prévoir que le régulateur de l'audiovisuel ne puisse agréer une modification du contrôle direct ou indirect de la société titulaire d'une autorisation intervenant dans un délai de cinq ans à` compter de cette délivrance, sauf en cas de difficultés économiques.

Dans son rapport établi en 2016 au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, notre collègue Catherine Morin-Desailly s'était interrogée « sur la nécessite' d'adopter une disposition générale qui pourrait avoir pour conséquence de bloquer les décisions économiques qui ne relèvent pas de démarches spéculatives ».

Afin de prévenir ce risque, notre commission avait à l'été 2021 introduit un article 13 ter nouveau dans le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles à l'ère numérique qui visait à modifier la rédaction du premier alinéa de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 afin d'exclure explicitement du dispositif les sociétés qui auraient déjà exploité des autorisations d'émettre en application de l'article 30-1 pour un même service que celui nouvellement autorisé.

Cet article additionnel n'ayant pas été retenu par la commission mixte paritaire, le délai de cinq ans perdure aujourd'hui et constitue un frein pour les investisseurs qui souhaiteraient procéder à des opérations industrielles visant à faire émerger des groupes plus solides afin de mieux résister aux plateformes internationales.

Le présent article, en réduisant de cinq à deux ans la durée pendant laquelle il n'est pas possible de céder une société bénéficiant d'une autorisation de l'Arcom pour l'édition d'un service de télévision, vise à « débloquer » les opérations industrielles. Cette disposition apparaît nécessaire afin de renforcer les acteurs historiques face aux plateformes, conformément à l'objectif de la proposition de loi de renforcement de notre souveraineté audiovisuelle.

II. - Un article à compléter afin d'autoriser la cession d'un groupe et non plus seulement celle d'une simple chaîne de télévision

La plupart des chaînes de télévision appartiennent à des groupes qui en possèdent plusieurs et dont les autorisations d'émettre n'ont pas été accordées en même temps. Le délai de cinq ans étant apprécié au niveau de la chaîne concernée et non au niveau du groupe propriétaire, cette disposition a pour effet de rendre impossible la cession du groupe considéré jusqu'au terme du délai de cinq ans qui court pour l'autorisation accordée le plus récemment.

Dans les faits et compte tenu des renouvellements qui doivent intervenir en 2025 et 2027, cela revient à considérer qu'aucun changement de contrôle ne sera possible pour les groupes TF1, M6, Altice et NRJ avant 2032. Cette vitrification du secteur des chaînes gratuites pendant les neuf prochaines années ne répond en rien à l'objectif du législateur de 2016. Il constitue la conséquence inattendue et particulièrement néfaste d'une décision de circonstance mal préparée dont les effets n'avaient pas été anticipés.

La rédaction de l'article 12 permet certes de réduire de cinq à deux ans le délai pendant lequel l'autorisation ne peut être cédée, ce qui peut être utile pour un groupe qui ne possèderait qu'une seule chaîne, mais le problème demeure pour les groupes qui, du fait des renouvellements à venir, connaîtraient une impossibilité de procéder à un changement de contrôle jusqu'en 2029.

Le rapporteur considère qu'il est impossible de bloquer l'évolution d'un secteur aussi stratégique que l'audiovisuel au moment précis où les plateformes pourraient également engager des rapprochements pour grossir davantage. L'objectif de la proposition de loi étant précisément de concourir à l'émergence de quelques grands groupes français publics et privés, il a proposé au travers d'un amendement COM-47 de compléter la seconde phrase du premier alinéa de l'article 42-3 afin de prévoir que le délai de deux ans ne s'applique pas si l'Arcom estime que la modification de contrôle ne porte pas atteinte à l'impératif fondamental de pluralisme et à l'intérêt du public et qu'elle n'a pas un objectif manifestement spéculatif.

Le rapporteur a par ailleurs proposé à la commission d'adopter un amendement COM-48 qui vise à autoriser l'Arcom à modifier les conventions des chaînes en cours d'exécution afin de tenir compte de l'évolution très rapide de leur écosystème. Il considère en effet cette souplesse comme indispensable pour préserver l'attractivité du média télévision face à la concurrence des plateformes.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 13
Exclusion des mandats de commercialisation
de la définition de la production indépendante

Cet article vise à exclure les mandats de commercialisation de la définition de la production indépendante afin de favoriser la négociation entre les parties sur l'attribution de ces mandats.

La question de la répartition des droits attachés à la production audiovisuelle entre les éditeurs de chaînes qui financent l'essentiel de ces investissements et les producteurs qui apportent leur créativité et leur savoir-faire continue à diviser les acteurs du secteur des médias.

La nouvelle définition adoptée par la loi n°2021-1382 du 25 octobre 2021 aurait dû permettre de moderniser cette réglementation mais le décret qui en a découlé n'a aucunement permis de rééquilibrer les droits respectifs des éditeurs et des producteurs sur les programmes.

L'ensemble des éditeurs de programmes privés et publics, gratuits et payants, considèrent que cette situation les pénalise gravement dans la concurrence qui les oppose aux plateformes et appellent à revenir sur la définition de la production indépendante afin de privilégier les deux critères des liens capitalistiques entre l'éditeur et le producteur et de la nature et de l'étendue de la responsabilité de l'éditeur de services dans la production de l'oeuvre.

Comme l'a indiqué au rapporteur la direction d'un grand groupe public audiovisuel, il conviendrait de « répartir la valeur ajoutée d'une oeuvre entre producteurs et éditeurs selon des modalités comparables au régime pratiqué pour les oeuvres cinématographiques ».

Le présent article ne procède pas à une telle redéfinition de la production indépendante puisqu'il se contente de proposer de ne plus tenir compte dans la définition de la production indépendante de la détention, directe ou indirecte, de mandats de commercialisation par l'éditeur de services.

Cet ajustement limité permettrait néanmoins de favoriser la patrimonialisation des productions audiovisuelles nationales en faisant relever la question de la détention des mandats de commercialisation de la négociation avec les organisations professionnelles ou de la convention avec le régulateur de l'audiovisuel.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 13 bis (nouveau)
Autorisation d'une troisième coupure publicitaire pour la diffusion
des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles de longue durée

Cet article additionnel, adopté par la commission à l'initiative du rapporteur, vise à autoriser l'introduction d'une troisième coupure publicitaire pendant la diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles dont la durée excède deux heures et à permettre la diffusion de bandes annonces pour les programmes pendant les coupures publicitaires.

I.- Un régime de la publicité dans les films devenu trop contraignant

L'article 73 de la loi du 30 septembre 1986 précitée encadre les interruptions publicitaires susceptibles d'intervenir au sein des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles afin de privilégier l'insertion, par les chaînes de télévision, des publicités entre les programmes, et non en leur sein.

S'agissant des chaînes publiques et des chaînes de cinéma, l'interdiction est stricte : les oeuvres cinématographiques ne peuvent faire l'objet d'aucune coupure publicitaire. C'est également le cas, pour toutes les chaînes, des films diffusés dans le cadre d'émissions de ciné-club. De la même façon, le sous-titrage publicitaire d'oeuvres cinématographiques est strictement interdit pour l'ensemble des chaînes, quelle que soit la catégorie à laquelle elles appartiennent.

Les chaînes privées n'appartenant pas à la catégorie des chaînes de cinéma bénéficient d'un régime plus souple. Elles peuvent interrompre la diffusion des oeuvres audiovisuelles et cinématographiques par des publicités, sous deux limites cumulatives :

- le nombre maximal d'interruptions est limité à deux ;

- pour les oeuvres cinématographiques, les téléfilms et les programmes destinés à la jeunesse, le nombre maximal d'interruptions est égal au nombre de tranches programmées de trente minutes que compte le programme.

Deux coupures publicitaires sont ainsi possibles pour les films, les téléfilms unitaires et les programmes pour enfants de plus de soixante minutes tandis que les séries, les feuilletons et les documentaires peuvent comporter deux coupures publicitaires même s'ils sont de courte durée.

II. - Les modifications adoptées par la commission

Le régime de la publicité pour les films n'apparaît plus adapté aujourd'hui compte tenu en particulier de la multiplication des films, souvent américains, de plus de deux heures qui ne peuvent être diffusés dans des conditions économiques satisfaisantes par les chaînes privées de la TNT diffusant gratuitement et dont l'unique source de revenus est constituée par la publicité.

Afin d'assouplir les règles applicables, l'amendement COM-49 présenté par le rapporteur reprend les termes de l'article 10 du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et la souveraineté culturelle. Il prévoit l'introduction d'une dérogation au nombre maximal d'interruptions publicitaires pour les chaînes privées ne relevant pas de la catégorie des chaînes de cinéma, soit l'ensemble des chaînes privées gratuites mais également les chaînes privées payantes qui ne sont pas consacrées au cinéma. Ainsi, les oeuvres cinématographiques et audiovisuelles de plus de deux heures diffusées par ces chaînes pourront comporter trois interruptions publicitaires conformément aux dispositions prévues par l'article 20 de la directive dite « Service de médias audiovisuels » (SMA).

Par ailleurs, le dernier alinéa de l'amendement COM-49 prévoit une dérogation générale aux règles posées par l'article 73 de la loi du 30 septembre 1986 précitée s'agissant des messages d'information sur les programmes, qui pourront ainsi être insérés au sein des programmes dans des conditions fixées par l'Arcom. Cette disposition doit permettre aux chaînes de télévision de mieux valoriser leurs propres programmes. Le fait d'adopter une nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l'article 73 de la loi du 30 septembre 1986 a pour effet de supprimer la rédaction actuelle qui prévoit que l'interruption publicitaire ne peut contenir que des messages publicitaires à l'exclusion de tout autre document, donnée ou message de toute nature, notamment bande-annonce, bandes d'auto-promotion.

La commission a adopté cet article additionnel.

Article 14
Développement des services interactifs sur la TNT

Cet article vise à poursuivre la modernisation de la TNT en obligeant les distributeurs à rendre disponibles les services interactifs fournis par les chaînes au moyen du protocole HbbTV.

Afin de poursuivre la modernisation de la TNT, il convient d'enrichir l'offre de services accessible à tous ses téléspectateurs. Pour ce faire, le présent article prévoit que les services interactifs fournis par les chaînes de la TNT (guide de programmes pour les personnes malvoyantes ou non voyantes, informations sur l'émission que l'on regarde, retour en arrière pour reprendre depuis le début la lecture d'un programme...) soient obligatoirement proposés par les distributeurs.

L'article 14 prévoit ainsi de rétablir l'article 96-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 afin d'adopter une obligation dans les six mois qui suivront la promulgation de la loi pour les équipements terminaux permettant la réception des services de communication audiovisuelle par voie hertzienne terrestre ainsi que l'accès à des services de communication au public en ligne d'assurer la réception des services interactifs fournis par les éditeurs de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre.

Le paragraphe II de ce nouvel article 96-2 prévoit que la réception des services interactifs fournis par les éditeurs de services de communication audiovisuelle devra être activée sur ces équipements avant leur mise sur le marché et qu'elle ne pourra être désactivée sans l'intervention explicite de l'utilisateur. Cette mesure vise à empêcher que les dispositifs techniques installés sur les téléviseurs soient bloqués par les industriels concernés dans notre pays comme cela a déjà pu se produire.

Enfin, le paragraphe III de l'article 96-2 établit que les services interactifs ne pourront être modifiés ou supprimés sans l'accord explicite de leurs éditeurs, l'Arcom étant chargée de contrôler les exceptions à ce principe.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 14 bis (nouveau)
Développement de l'ultra haute définition (UHD)

Cet article impose progressivement la compatibilité des nouveaux téléviseurs avec l'ultra haute définition dès lors que 20 % de la population française aura accès à la diffusion de programmes de télévision en UHD.

I. - La nécessaire transition vers l'UHD pour préserver l'attractivité de la TNT

Le développement de l'ultra haute définition constitue une condition du maintien de la compétitivité de la plateforme TNT d'autant plus qu'un nombre croissant de téléviseurs est déjà compatible avec cette norme. Le passage à l'UHD constitue néanmoins une charge supplémentaire pour les éditeurs de programmes ce qui justifie de s'assurer de la généralisation de cette norme avant qu'ils n'aient à engager des investissements techniques et commander davantage de programmes livrés dans ce standard.

Si les récepteurs de télévision haut de gamme sont déjà tous compatibles avec l'UHD, il demeure encore des récepteurs sur le marché qui ne sont pas compatibles avec cette norme, ce qui ralentit sa diffusion.

Afin de permettre la généralisation de cette norme, le Sénat avait adopté une disposition similaire à celle qui figure dans le présent article additionnel à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles à l'ère numérique débattu à l'été 2021.

Le paragraphe II introduit6(*) à l'article 10 bis A du projet de loi précité prévoyait déjà en effet l'obligation de la compatibilité des récepteurs de télévision à l'UHD dès lors qu'au moins 20 % de la population française bénéficierait de la diffusion de programmes en UHD. Cette compatibilité devait alors être effective dans les douze mois pour les téléviseurs de plus de 110 cm de diagonale et dans les dix-huit mois pour les autres. Cet article avait été censuré par le Conseil constitutionnel pour des raisons de procédure.

Le rapporteur considère que la reprise de ces dispositions dans cet article additionnel proposé par l'amendement COM-17 de Catherine Morin-Desailly constitue un complément indispensable aux dispositions relatives à l'expérimentation de l'UHD prévues par l'article 30-1-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui fait l'objet de modifications prévues par l'article 11 bis de la présente proposition de loi.

La commission a adopté cet article additionnel.

Article 15
Développement de la radio numérique terrestre

Cet article vise à favoriser le développement de la radio numérique terrestre en généralisant la réception de la norme DAB+ dans tous les équipements de radio vendus en France et à obliger les constructeurs de voitures à équiper leurs véhicules afin qu'ils puissent recevoir la radio analogique et numérique.

I. - Le nécessaire soutien au développement de l'usage du DAB+

La table ronde organisée par la commission de la culture7(*) le 25 janvier 2023 sur l'avenir de la radio à l'heure du DAB+ a mis en évidence la nécessité de définir une véritable politique publique en faveur du développement de la radio numérique terrestre. Alors que cette technologie est appelée à succéder à plus ou moins long terme à la diffusion en modulation de fréquence (FM), le déploiement de la radio numérique terrestre ne couvre à l'heure actuelle que 42% de la population tandis que seuls 14% des foyers sont équipés d'un récepteur DAB+.

Le président de l'Arcom a annoncé le 25 janvier dernier au Sénat l'intention du régulateur de réaliser dans les prochains mois un livre blanc sur la radio qui devrait notamment traiter la question de l'avenir de la radio numérique terrestre et du déploiement des autorisations d'émettre. Cependant, les investissements des éditeurs de programmes radio ne pourront être engagés véritablement tant que les usages n'auront pas évolué, ce qui passe par une augmentation drastique du taux d'équipement des foyers.

Le présent article prévoit ainsi de modifier l'article 19 de la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur dans deux directions complémentaires : il insère d'une part un nouveau paragraphe IV bis prévoyant la généralisation de la réception du DAB+ dans tous les équipements radio vendus en France et prévoit d'autre part une nouvelle rédaction du paragraphe V visant à généraliser la réception de la FM et du DAB+ dans tous les véhicules à un moment où certains constructeurs sont tentés de supprimer les équipements radio dans les nouveaux véhicules.

Le premier alinéa du nouveau paragraphe IV bis inséré dans l'article 19 précité vise dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente proposition de loi à imposer que les équipements de radio vendus par les industriels aux distributeurs d'équipement électronique grand public sur le territoire national permettent la réception des services de radio numérique terrestre. Le second alinéa de ce nouveau paragraphe prévoit que dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente proposition de loi, les récepteurs de radio vendus aux consommateurs sur le territoire national devront permettre la réception des services de la radio numérique terrestre. Cette double obligation doit permettre de généraliser la diffusion des récepteurs DAB+ qui constituent un préalable à l'évolution des usages, les équipements d'entrée de gamme vendus aujourd'hui se contentant de proposer une réception de la radio en modulation de fréquence (FM).

La nouvelle rédaction du paragraphe V vise à prévoir l'obligation pour les constructeurs automobiles d'équiper leurs véhicules de terminaux de réception de services de radio permettant la réception de services de radio par voie hertzienne terrestre en mode analogique en modulation de fréquences et en mode numérique. Une telle insertion législative est devenue nécessaire pour éviter que des constructeurs automobiles décident de supprimer la radio des équipements fournis avec le véhicule au bénéfice par exemple des programmes diffusés par internet (IP).

II. - Un besoin d'accompagnement pour réussir la transition vers la radio numérique terrestre

Alors que la FM n'offre pas une qualité de réception optimale en tout point du territoire, notamment sur les routes, et que la répartition des fréquences apparaît peu harmonieuse, la radio numérique terrestre permet, tout en maintenant la diffusion d'un signal broadcast respectueux des données personnelles et peu consommateur en énergie, d'améliorer sensiblement la qualité de réception et de répartir plus équitablement les fréquences. Pour toutes ces raisons, la plupart des pays d'Europe ont entrepris de développer la radio numérique terrestre avec pour horizon un basculement qui ne pourra intervenir que dans un temps suffisamment long pour que les foyers se soient appropriés cette technologie. La France est plutôt en retard dans le développement du DAB+ et elle est donc particulièrement exposée au risque que les services disponibles sur internet prennent la place de la radio avec pour conséquence le passage d'un modèle gratuit à un modèle fondé sur l'exploitation des données personnelles et une perte de souveraineté technologique et culturelle. C'est pourquoi le rapporteur est très attaché à cet article qui vise à accompagner le développement de la radio numérique terrestre.

III. - Les modifications adoptées par la commission

La transition de la FM au DAB+ nécessite la mise en place d'une véritable politique publique afin de répartir harmonieusement les fréquences numériques, de favoriser l'équipement des foyers et d'aider les sociétés éditrices de programmes radio à absorber le coût de la double diffusion FM/DAB+ tout en la limitant dans le temps dès lors que l'ensemble des services auront basculé dans une diffusion numérique.

Concernant l'équipement des foyers, le rapporteur estime nécessaire que les pouvoirs publics s'emploient à inciter les industriels et les distributeurs d'équipements électroniques à proposer des récepteurs de radio compatibles avec le DAB+ à un prix le plus proche possible des récepteurs qui ne reçoivent que la FM.

La couverture des axes routiers principaux et des agglomérations par le DAB+ devrait très significativement progresser d'ici la fin de l'année 2023 et des campagnes d'information sont prévues dans les prochains mois pour sensibiliser les Français à l'intérêt d'adopter cette nouvelle technologie.

Dans ces conditions, il apparaît justifié de laisser plus de temps aux industriels et aux distributeurs pour adapter leur offre de produits afin qu'elle réponde à une demande qui devrait d'ici là croître significativement. L'amendement COM-50 du rapporteur porte ainsi de 9 à 18 mois le délai pour que les industriels ne proposent plus que des récepteurs compatibles avec le DAB+ tandis que les distributeurs disposeraient de 24 mois au lieu de 12 pour ne vendre que des postes compatibles avec la nouvelle norme de diffusion.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

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La commission de la culture, de l'éducation et de la communication
a adopté la proposition de loi ainsi modifiée
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* 2 https://www.senat.fr/rap/r14-709/r14-709.html

* 3 https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl14-656.html

* 4 Six ministres de la culture se sont succédés au cours des dix dernières années alors que les dirigeants des entreprises de l'audiovisuel public sont nommés pour cinq ans et ont tous été renouvelés dans leurs fonctions.

* 5 https://www.senat.fr/rap/r20-309/r20-309.html

* 6 https://www.senat.fr/leg/tas20-111.html

* 7 https://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20230123/cult.html#toc7

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