B. UNE BUDGÉTISATION INITIALE INSINCÈRE, PARTICULIÈREMENT CONCERNANT LES CRÉDITS LIÉS À LA FORMATION
1. Des crédits liés à la formation très fortement sous consommés
Comme les années précédentes, la sous-consommation des dépenses liées à la formation des enseignants (action 4 du programme 140, action 10 du programme 141 et action 10 du programme 139) s'élève à 1,194 milliard d'euros. Cette sous-consommation des crédits consacrés à la formation des personnels s'est encore accentuée en 2024, en augmentant de 8 %. Il s'agit toutefois d'une tendance pérenne depuis 2018.
Évolution de la sous-exécution des dépenses liées à la formation des enseignants entre 2017 et 2024
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Comme le relève par ailleurs la Cour des comptes, les documents budgétaires ne permettent pas de distinguer entre les crédits destinés à la formation initiale des enseignants de ceux destinés à la formation continue, réduisant ainsi les capacités de suivi des moyens réellement engagés au regard des actions programmées lors de l'élaboration de la loi de finances. Dans le contexte de la réforme de la formation initiale des enseignants annoncée en avril 2024 par le Président de la République, l'absence d'une telle distinction est particulièrement préjudiciable.
De telles disparités de consommation des crédits entre les actions d'un même programme se reproduisent année après année. Elles doivent impérativement être corrigées au stade de la loi de finances pour permettre à la représentation nationale de voter sur des prévisions conformes à la réalité de l'exécution des dépenses.
2. Une budgétisation insincère globalement
L'information dont dispose la représentation parlementaire sur la ventilation des crédits pour certaines actions au sein des programmes de la mission « Enseignement scolaire » est insincère. Le Parlement n'est ainsi pas en mesure de suivre, au stade de la LFI, la répartition de dépenses s'élevant à 10,3 milliards d'euros en CP, soit près de 16 % des crédits de la mission hors contribution au « CAS Pensions ». En effet, soit les crédits sont sur-consommés, soit ils sont-consommés sur les actions concernées. Des transferts sont opérés d'une action à l'autre, ce qui limite la lisibilité de la maquette budgétaire pour les Parlementaires.
Ainsi, au niveau du programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré », la sous-consommation des crédits s'élève à seulement 193 millions d'euros. Toutefois, ce constat cache une disparité importante entre les actions composant le programme : ainsi les crédits de l'action 2 « Enseignement élémentaire » sont sur-exécutés à hauteur de 597 millions d'euros, alors que les crédits consacrés à la formation des enseignants sont sous-consommés à hauteur de 615 millions d'euros.
Différence entre la prévision en LFI 2024 et l'exécution de certains programmes de la mission « Enseignement scolaire »
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
De même, au niveau du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré », la sous-consommation des crédits s'élève à seulement 118 millions d'euros. Néanmoins, les crédits liés à l'action 2 « Enseignement général et technologique en lycée » ont été sur-exécutés de 1 737 millions d'euros et ceux liés à l'action 11 « remplacement » de 480 millions d'euros. À l'inverse, les crédits de l'action 5 « Enseignement post-baccalauréat en lycée » ont été sous-exécutés de 1,09 milliard d'euros, ceux liés à l'action 3 « Enseignement post-baccalauréat en lycée » de 916 millions d'euros et ceux liés à l'action 10 « formation des personnels enseignants et d'orientation », à hauteur de 498 millions d'euros.
Un tel niveau de disparité des niveaux de dépenses par rapport à la prévision initiale interroge d'une part sur la sincérité de la programmation budgétaire, et d'autre part sur la nécessité de telles dépenses.