B. UNE CROISSANCE DES RECETTES INFÉRIEURE À CELLE DES DÉPENSES POUR LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS »
Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » retrace les opérations relatives aux pensions et avantages accessoires gérés par l'État : pensions de retraite et d'invalidité des fonctionnaires de l'État et des ouvriers d'État, pensions de retraite des militaires, pensions militaires d'invalidité, et autres allocations assimilées.
Il est composé de trois programmes :
- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité », qui recense l'ensemble des opérations relatives au régime de retraite et d'invalidité des fonctionnaires de l'État et représente logiquement l'essentiel, soit 94,9 %, des dépenses du CAS en 2024 ;
- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » agrège les dépenses du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels d'État (FSPOEIE) et du Fonds rente accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM) ;
- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » qui retrace les dépenses et recettes consacrées aux pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et à d'autres allocations viagères.
1. La consommation des crédits ouverts en LFI
En 2024, les crédits consommés au titre du CAS Pensions se sont élevés à 67 885,3 millions d'euros, soit une sur-exécution de 301,5 millions d'euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale, qui s'élevaient à 67 583,7 millions d'euros. 100,4 % des crédits ont ainsi été exécutés par rapport à la prévision, contre 99,9 % en 2023.
L'exécution 2024 du CAS Pensions enregistre une hausse de 5,6 % par rapport à 2023 ce qui correspond à 3 581,3 millions d'euros. Cette hausse est portée principalement par la hausse des dépenses du programme 741 lié à l'effet de la revalorisation des pensions. En effet, le 1er janvier 2024, les pensions de retraite ont été revalorisées de 5,3 % et celles d'invalidité de 4,6 % le 1er avril 2024. En outre, les dépenses augmentent en lien avec un surcoût de la retraite progressive et une hausse du transfert de l'État vers la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).
Évolution de l'exécution des
crédits du CAS Pensions
entre 2023 et 2024
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Répartition des dépenses du CAS Pensions en 2024
(en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
2. La consommation des crédits disponibles
La consommation des crédits du CAS Pensions, en 2024, n'a nécessité aucune ouverture supplémentaire de crédits par rapport à l'ensemble du disponible pour l'exercice.
Mouvements intervenus en gestion sur les
crédits de la mission
« Régimes sociaux et de
retraites » en 2024
(en millions d'euros)
2024 |
|||||||
LFI |
Reports depuis 2023 |
Ouverture en cours de gestion |
Décrets d'avance, de transfert ou de virement |
Total crédits disponibles |
Exécution |
Exécution/Crédits disponibles |
|
741 - Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité |
|||||||
AE |
64 234,3 |
+ 1 188,3 |
0,0 |
0,0 |
65 422,6 |
64 451,0 |
- 971,6 |
CP |
64 234,3 |
+ 1 188,3 |
0,0 |
0,0 |
65 422,6 |
64 451,0 |
- 971,6 |
742 - Ouvriers des établissements industriels de l'État |
|||||||
AE |
2 052,2 |
+ 121,1 |
0,0 |
0,0 |
2 173,2 |
2 083,2 |
- 90,0 |
CP |
2 052,2 |
+ 121,1 |
0,0 |
0,0 |
2 173,2 |
2 083,2 |
- 90,0 |
743 - Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
|||||||
AE |
1 297,2 |
+ 69,6 |
0,0 |
0,0 |
1 366,9 |
1 351,0 |
- 15,8 |
CP |
1 297,2 |
+ 69,6 |
0,0 |
0,0 |
1 366,9 |
1 351,0 |
- 15,8 |
Total mission |
|||||||
AE |
67 583,7 |
1 379,0 |
0,0 |
0,0 |
68 962,7 |
67 885,3 |
- 1 077,4 |
CP |
67 583,7 |
1 379,0 |
0,0 |
0,0 |
68 962,7 |
67 885,3 |
- 1 077,4 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les reports en 2024 de crédits non consommés en 2023 ont mené à une sous-consommation des crédits disponibles du CAS Pensions. Cette sous-exécution s'établit à 1 077 millions d'euros.
3. L'évolution des recettes et des dépenses du CAS Pensions
Pour rappel, la quasi-totalité des dépenses du CAS correspondent à des dépenses dites de « guichet » qui ne peuvent donc pas être pilotées en cours d'exercice.
En revanche, pour permettre un fonctionnement équilibré du programme 741, et donc du CAS Pensions dans son ensemble, les recettes peuvent, quant à elles, bénéficier d'un ajustement, en fin d'année, du taux de contribution employeurs.
Cette obligation d'équilibre est commune à tous les CAS et découle de l'application de l'article 21 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF)3(*).
Pour prévenir le déséquilibre entre les dépenses et les recettes du CAS Pensions, il est possible de moduler le taux de contribution employeurs de l'État pour les fonctionnaires civils ou militaires.
Entre 2006 et 2014, les taux civils ont progressé de 3,05 points par an en moyenne et les taux militaires de 3,26 points.
Entre 2014 et 2024 pour les pensions civiles, aucune évolution n'a eu lieu sur le taux. Néanmoins, les prévisions de recettes du CAS Pensions pour la loi de finances pour 2025 ont pris en compte un relèvement du taux de contribution employeurs de l'État de 4 points pour les pensions civiles, effectif depuis le décret du 22 janvier 20254(*).
La contribution de l'État pour les pensions militaires n'a, en revanche, pas évolué depuis 2012.
Cette évolution des taux a permis d'accroître les recettes du CAS Pensions et de maintenir son solde cumulé à un niveau positif depuis sa création.
Évolution du taux de cotisation employeur de l'État depuis 2006
Année |
Taux de cotisation employeur de l'État |
||
Pension de retraite - civils |
Pensions militaires |
Allocation temporaire d'invalidité - civils |
|
2006 |
49,90 % |
100,00 % |
0,30 % |
2007 |
50,74 % |
101,05 % |
0,31 % |
2008 |
55,71 % |
103,50 % |
0,31 % |
2009 |
60,14 % |
108,39 % |
0,32 % |
2010 |
62,14 % |
108,63 % |
0,33 % |
2011 |
65,39 % |
114,14 % |
0,33 % |
2012 |
68,59 % |
121,55 % |
0,33 % |
2013 |
71,78 % |
126,07 % |
0,32 % |
2014-2024 |
74,28 % |
126,07 % |
0,32 % |
2025 |
78,28 % |
126,07 % |
0,32 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Il en résulte que les recettes du CAS Pensions ont atteint 64 689 millions d'euros en 2024. Ce montant est en hausse de 1,53 milliard d'euros par rapport à 2023. La quasi-totalité des recettes provient du programme 741 : on y retrouve les cotisations salariales et les contributions employeurs des personnels civils et militaires.
Répartition des recettes perçues par le CAS Pensions en 2024
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les recettes sont néanmoins inférieures à la prévision inscrite en LFI 2024 de 411 millions d'euros, soit 0,63 %. Cette sous-exécution des recettes est liée au programme 741 - dont les recettes sont 467 millions d'euros moins élevées que prévu - en raison des difficultés de prévoir avec exactitude les modalités de réalisation, par les employeurs, de leurs schémas d'emplois.
Par exemple, les recettes encaissées au titre des cotisations salariales et contributions employeur de La Poste sont inférieures de 71,6 millions d'euros aux montants inscrits en LFI pour 2024, soit 21,4 % d'écart. La différence s'explique principalement par la sous-exécution des contributions employeurs, de 65,3 millions d'euros.
Recettes du CAS « Pensions » par programme en 2023 et 2024
(en millions d'euros)
Programme |
Recettes prévues en LFI 2023 |
Recettes perçues en 2023 |
Recettes prévues en LFI 2024 |
Recettes perçues en 2024 |
Exécution 2024/2023 |
Exécution 2024/LFI 2024 |
741 - Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité |
60 210,4 |
59 779,6 |
61 694,6 |
61 228,2 |
+ 2,4 % |
- 0,8 % |
742 - Ouvriers des établissements industriels de l'État |
1 998,1 |
2 029,1 |
2 109,0 |
2 112,0 |
+ 4,1 % |
+ 0,1 % |
743 - Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions |
1 331,3 |
1 352,3 |
1 297,2 |
1 349,3 |
- 0,2 % |
+ 4,0 % |
Total |
63 539,8 |
63 161,0 |
65 100,9 |
64 689,5 |
+ 2,4 % |
- 0,6 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Ce niveau de recettes 2024 est inférieur à celui des dépenses avec une différence de 3,20 milliards d'euros contre une différence de 551 millions d'euros en 2022 et de 1,14 milliard d'euros en 2023. On constate ainsi un doublement du déficit chaque année depuis 2022.
Évolution des recettes, des
dépenses, du solde et du solde cumulé
du CAS Pensions depuis
2013
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Ces déficits annuels croissant sont la cause de la dégradation, pour la troisième année consécutive, du solde cumulé du CAS « Pensions » qui passe de 7,8 milliards d'euros en 2023 à 4,6 milliards d'euros en 2024. L'obligation organique d'équilibre du CAS Pensions demeure cependant respectée, cette dernière portant uniquement sur le solde cumulé du compte depuis sa création.
Cet excédent technique ne constitue cependant pas des réserves et est reversé au budget de l'État.
* 3 Loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.
* 4 Décret n° 2025-61 du 22 janvier 2025 relevant le taux de la contribution employeur due au compte d'affectation spéciale « Pensions » au titre des fonctionnaires civils de l'État et des magistrats.