B. LE PROJET DE LOI DE FINANCES PRÉVOIT ENFIN UNE CERTAINE MODÉRATION DES DÉPENSES, HORS DÉFENSE
En considérant le montant des crédits hors contributions au CAS « Pensions » et hors « Remboursements et dégrèvements », le total des crédits du budget général passerait, selon le projet de loi de finances pour 2026, de 381,1 milliards d'euros en loi de finances 2025 à 391,0 milliards d'euros en 2026, soit une augmentation de 9,9 milliards d'euros.
Par ailleurs, la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 définit le « périmètre des dépenses de l'État », sur lequel est fixé un objectif de maîtrise des dépenses : crédits du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux (hors remboursements et dégrèvements, dépenses liées à la dette et participations financières de l'État), montant cumulé des plafonds de taxes affectées à des tiers et des prélèvements sur recettes174(*). Sur ce périmètre, le montant des dépenses est de 501 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2026, en hausse de 10,5 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2025.
Dans les deux cas, le montant indiqué pour la loi de finances 2025 est calculé par le Gouvernement en retraitant les modifications affectant le périmètre respectif de l'État et des autres administrations dans le présent projet de loi de finances, dont le niveau est particulièrement important.
Les retraitements de périmètre
Les principaux changements de périmètre concernent la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales :
- débudgétisation du soutien du mécanisme de solidarité avec les zones non interconnectées ou ZNI (- 1,9 Md€)175(*) et soutien à la cogénération (- 1,1 Md€)176(*) ;
- réintégration au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des montants attribués aux régions depuis 2018 sous forme de fractions de taxe sur la valeur ajoutée (+ 5,2 Mds€).
Mesures de périmètre concernant le
budget général de l'État
dans le projet de loi de
finances pour 2026
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances, à partir du projet de loi de finances pour 2026177(*)
Toutefois, les hausses de crédits sont largement concentrées sur un petit nombre de missions qui demandent à être considérées de manière spécifique.
L'augmentation des crédits de la mission « Défense » (+ 6,7 milliards d'euros) résulte d'un choix fort. Il paraissait en effet nécessaire, compte tenu du contexte international, de renforcer les capacités de défense française, au-delà de l'accroissement de crédits déjà prévu pour l'année 2026 par la loi de programmation militaire, soit + 3,2 milliards d'euros178(*).
Évolution des crédits des missions
entre la loi de finances initiale pour 2025
et le projet de loi de finances
pour 2026
(en milliards d'euros)
Crédits hors remboursements et dégrèvements, hors contributions directes de l'État au compte d'affectation spéciale « Pensions ». Crédits de la loi de finances initiale pour 2025 au format du projet de loi de finances pour 2026.
Source : commission des finances du Sénat, à partir des réponses au questionnaire du rapporteur général
La charge de la dette179(*), pour sa part, constitue à court terme une donnée exogène, qui dépend de l'évolution de l'inflation (pour le stock de dette indexée) et des taux de marché (pour les émissions nouvelles faites chaque année, notamment en remplacement de titres arrivés à échéance).
Les crédits des ministères hors mission « Défense » et hors « charge de la dette » sont dans le présent projet de loi de finances égaux à 274,6 milliards d'euros, contre 275,7 millions d'euros en loi de finances pour 2026. Cette baisse de 1,2 milliard d'euros en euros courants, soit - 1,7 % en euros constants, témoigne d'un effort budgétaire qu'il convient de souligner sur le périmètre de l'État.
Enfin, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » évoluent principalement sous l'effet des charges prévisionnelles de soutien à la production d'énergie renouvelable, liées à l'évolution des prix de l'électricité. Ces charges, telles que mesurées par l'action 09 du programme 345 « Service public de l'énergie », seraient de 7,3 Mds€ en 2026, contre 4,4 Mds€ en loi de finances initiale 2025, soit une augmentation de 2,9 Mds€. Si l'on neutralise cette variation des coûts, qui résulte de la simple constatation de l'évolution des prix par une autorité indépendante de l'État, la Commission de régulation de l'énergie, la baisse des crédits des ministères est de 4,0 milliards d'euros, soit - 2,8 % en euros constants.
Les autres augmentations de crédits sont peu nombreuses et d'un montant bien moins important.
Elles reflètent en premier lieu l'accent mis, comme les années précédentes, sur les missions régaliennes de l'État, en valeur mais aussi en volume : les crédits de la mission « Sécurités » augmentent de 371 M€ (soit + 0,8 % en euros constants) et ceux de la mission « Justice » de 166 M€ (soit + 0,3 % en euros constants).
Les crédits des politiques de recherche et d'éducation sont préservés, au moins en euros courants. Les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » augmentent de 661 M€ (soit + 0,8 % en euros constants) et ceux de la mission « Enseignement scolaire » de 261 M€ (soit une diminution de - 1,0 % en euros constants).
La mission « Santé » connaît aussi une augmentation de crédits relativement importante de 193 M€ (soit + 11,6 % en euros constants), mais elle porte sur le programme 379 qui constitue un simple canal de reversement à la Sécurité sociale des financements européens relatifs au volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR).
Enfin, la hausse des crédits de la mission « Crédits non répartis », à hauteur de + 250 M€ entre la loi de finances 2025 et le présent projet de loi de finances pour 2026, n'est pas significative à ce stade de la discussion car elle porte sur la provision relative aux rémunérations publiques, qui peut être répartie sur d'autres programmes du budget entre le dépôt du projet de loi de finances et sa promulgation.
S'agissant des diminutions de crédits, ceux de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux » diminuent de 2,6 Mds€ d'euros (soit - 12,9 % en euros constants), par une diminution de l'enveloppe prévue pour les aides à l'alternance et aux demandeurs d'emploi.
Les crédits de la mission « Cohésion des territoires » diminuent de 893 M€ (soit - 5,1 % en euros constants), par une réforme des aides personnelles au logement (APL) et du financement de la rénovation des logements privés, notamment par un transfert partiel de ce financement vers le mécanisme des certificats d'économie d'énergie.
Ceux de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont réduits de 788 M€ (soit - 3,9 % en euros constants) avec une réforme de la prime d'activité et de la prime exceptionnelle de fin d'année.
Les crédits de la mission « Aide publique au développement » sont réduits de 704 M€ par rapport à 2025 (soit - 17,2 % en euros constants). Pour mémoire, les crédits de cette mission avaient connu une hausse importante dans les années passées, de sorte que, avec un niveau de 3,7 Mds€ dans le projet de loi de finances pour 2026, ils demeurent toujours supérieurs au niveau de 2019 (3,0 Mds€).
Enfin, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » sont également en baisse significative, avec une diminution de 265 M€ (soit - 19,2 % en euros constants) portant sur plusieurs dispositifs, dont le service civique (- 114 M€).
Au total, le projet de loi de finances pour 2026 confirme l'effort entrepris dans la loi de finances initiale pour 2025 : les dépenses nettes du budget général, hors charge de la dette, sont désormais passées en-dessous de la tendance d'augmentation antérieure à la crise sanitaire.
Évolution en volume des dépenses
nettes du budget général,
hors charge de la dette, en euros
constants
(en euros de 2026)
Dépenses brutes moins remboursements et dégrèvements d'État, hors programmes 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) » et 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs) », actualisés en fonction de l'indice des prix harmonisé hors tabac. Tendance calculée par interpolation linéaire des moyennes sur trois ans calculées en 2012 et en 2018.
Source : commission des finances, à partir des lois et projets de loi de finances
Cette situation ne doit pas encore être considérée comme satisfaisante, compte tenu de l'ampleur du déficit budgétaire, qui est toujours supérieur à 120 milliards d'euros. En effet, le niveau global des dépenses de l'État reste très largement supérieur à celui de 2019, actualisé en fonction de l'inflation.
* 174 Article 10 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
* 175 Effet en année pleine d'une disposition prévue par l' article 20 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.
* 176 Disposition portée par l'article 42 du présent projet de loi de finances pour une entrée en vigueur au 1er mai 2026.
* 177 Annexe 1 « Application de la charte de budgétisation de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 au projet de loi de finances pour 2025 » à l'exposé général du projet de loi de finances pour 2026.
* 178 Article 4 de la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.
* 179 La charge de la dette considérée ici correspond aux crédits des programmes 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » et 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Engagements financiers de l'État ».


