Rapport n° 618 (1993-1994) de M. Jacques CHAUMONT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 22 septembre 1994

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N°618

SÉNAT

TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1993 - 1994

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 13 juillet 1994.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 septembre 1994.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur les propositions de résolution, présentées en application de l'article 73 bis du Règlement :

1°) par M. Xavier de Villepin sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1995 ( Volume 4 - Section III Commission - État des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels - Sous-section B3 - Chapitres B3 - 4303 aspects sanitaires de l'abus de drogues et B3-440 mesures pour combattre l'abus de drogues ) (n° E-263),

2°) par M. Jacques Oudin sur l 'a vant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1995 ( Volume 4, Section III Commission - État des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels - Sous-section B3

- Formation, jeunesse, culture, audiovisuel, information et autres actions sociales ) (n° E-263),

3°) par M. Jacques Oudin sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1995 ( Volume 4, Section III Commission - État des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels - Sous-section B2

- Actions structurelles, autres actions agricoles et régionales, transports et pêche ) (n° E-263),

4°) par M. Paul Masson sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1995 ( Volume 4 - Section III Commission - État

des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels - Sous-section B5 - Protection des consommateurs, marché intérieur, industrie et réseaux transeuropéens - Titre B5 - 8 - Coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures ) (n° E-263),

5°) par M. Jacques Genton sur l'avant-projet de budget général des

Communautés européennes pour l'exercice 1995 - ( Volume 4 - Section III

Commission - État des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels -Titre B7 - 01 - Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ) (n° E-263) ,

6°) par M. Jacques Oudin sur l'avant-projet de budget général des

Communautés européennes pour l'exercice 1995 - ( Volume 4 - Section III

Commission - État des dépenses - Partie B - Crédits opérationnels -Titre 7 - 6 - Chapitre 7-60 - Coopération avec les pays de l'Europe centrale et orientale ) (n° E-263),

7°) par M. Jacques Genton sur l'avant-projet de budget général des

Communautés européennes pour l'exercice 1995 - ( Volume 1 - A - État général des recettes - B - Financement du budget général ) (n° E-260) ,

Par M. Jacques CHAUMONT,

sénateur.

Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Paul Girod, Jean Clouet, Jean-Pierre Masseret, v ice-présidents ; Jacques Oudin, Louis Perrein, François Trucy, Robert Vizet, secrétaires ; Jean Arthuis, rapporteur général ; Philippe Adnot, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Maurice Blin, Camille Cabana, Ernest Cartigny, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Henri Collard, Maurice Couve de Murville, Pierre Croze, Jacques Delong, Mme Paulette Fost, MM. Henri Goetschy, Emmanuel Hamel, Alain Lambert, Tony Larue, Paul Loridant, Roland du Luart, Michel Manet, Philippe Marini, Michel Moreigne, Jacques Mossion, René Régnault, Michel Sergent, Jacques Sourdille, Henri Torre, René Trégouët, Jacques Valade.

Voir les numéros :

Sénat : 571, 572, 573, 574, 575, 576 et 604 (1993-1994).

AVANT-PROPOS

Pour la première fois en 1994, l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour l'année suivante a été présenté au Parlement français sous la forme d'une proposition d'acte communautaire (n° E 260 et E 263) avant son adoption par le Conseil.

Il s'agit d'une avancée incontestable puisque, jusqu'à présent, la Haute Assemblée n'était, au mieux, saisie des documents budgétaires qu'une fois le projet de budget adopté, et au pire, n'était pas saisie du tout.

La délégation du Sénat pour les Communautés européennes a examiné avec attention ces documents. En application de l'article 73 bis du règlement du Sénat, quatre de ses membres éminents ont présenté sept propositions de résolution, visant à une meilleure maîtrise ou un meilleur contrôle des dépenses communautaires.

Tel est l'objet des propositions suivantes : n° 571 de M. Xavier de Villepin, n° 572 et n° 573 de M. Jacques Oudin, n° 574 de M. Paul Masson, n° 575 de M. Jacques Genton, n° 576 de M. Jacques Oudin et n° 604 de M. Jacques Genton, qui portent sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1995 (n° E 260 et E 263).

Ces propositions ont été renvoyées à la commission des Finances et examinées le mercredi 21 septembre.

I- LES PROPOSITIONS DE RESOLUTION

Ces propositions de résolution visent à une meilleure maîtrise et un meilleur contrôle des dépenses des Communautés européennes.

La proposition de résolution n° 571 de M. Xavier de Villepin tend à renforcer les mesures pour combattre l'abus de drogue au moyen d'un transfert de charges d'un poste budgétaire d' "études" à un autre poste consacré aux actions.

Notre collègue relève en effet que si le budget "drogue" de la Communauté a beaucoup augmenté (de 5,5 Mécus en 1987 à 24 Mécus en 1994), "les plus fortes progressions portent sur les dépenses d'études et de réunion des experts."

"Ces dépenses" , note le président de Villepin, "sont à rapprocher des 3,7 Mécus dégagés par l'unité anti-drogue d'Europol". Notre collègue considère qu'il vaut mieux "lutter" contre la drogue qu' "observer la progression de sa consommation ".

La proposition de résolution, invite le Gouvernement à proposer au Conseil un "basculement" des moyens financiers, des dépenses d'études au profit des dépenses d'actions.

Notre collègue propose par conséquent une résolution pour que "le Sénat invite le Gouvernement à proposer au Conseil un renforcement des moyens financiers de lutte contre les trafics de drogues (UDE/EUROPOL), à due concurrence de la réduction de la progression des dépenses d'études, de réunions d'experts, de conférences et congrès, d'informations et de publications demandées par la Commission au titre du plan d'Action de l'Union contre la drogue".

La proposition n° 572 de M. Jacques Oudin vise à maîtriser la progression des crédits d'information de la Commission.

Notre collègue relève que la Commission a souhaité renforcer sa politique de communication en créant, en 1993, une action intitulée : "La politique d'information et de communication de la Commission : une nouvelle approche." Sans mentionner le volume global des crédits consacrés à cette action, M. Jacques Oudin note la forte progression des crédits qui s'échelonne, selon les dépenses, de 12 % (information du grand public) à 33 % (information par le biais des bureaux nationaux), ainsi qu'à l'importance des crédits consacrés aux "coopérations avec des relais" , notamment via l'organisation de colloques.

M. Jacques Oudin s'interroge sur l'opportunité de la progression demandée et propose une résolution par laquelle "le Sénat invite le Gouvernement à négocier, dans un souci de rigueur budgétaire qui doit s'appliquer aussi bien au plan communautaire que national, un meilleur contrôle, par le Conseil, tant de la base légale, que du contenu et de la progression des crédits d'information de la Commission".

La proposition de résolution n° 573 de M. Jacques Oudin a pour objet de limiter un nouveau "programme d'initiative communautaire" , proposé par la Commission, en mars 1994, concernant les zones urbaines (programme URBAN).

Ce programme, doté de 600 millions d'écus sur cinq ans, paraît "conduire à un émiettement supplémentaire des ressources du budget de l'Union (...) dans un domaine où devrait jouer totalement le principe de subsidiarité ".

"Notre collègue propose par conséquent une résolution pour que "le Sénat demande au Gouvernement de faire respecter le principe de subsidiarité sur cette ligne budgétaire qui apparaît exemplaire des dérives constatées en la matière, et de reporter les crédits correspondants sur le financement des grands travaux d'infrastructures ferroviaires intracommunautaires ".

La proposition de résolution n° 574 de M. Paul Masson vise à modifier l'imputation budgétaire des crédits destinés aux actions communes en matière de justice.

Ces crédits - 5 millions d'écus en crédits d'engagement -sont aujourd'hui inscrits au budget de la Commission ; le sénateur préconise une inscription au budget du Conseil. Il relève que le mode d'imputation budgétaire n'est pas neutre et que l'inscription au sein du budget de la Commission d'une part, "illustre la tendance de celle-ci à s'assurer la plus grande maîtrise possible, au détriment des États, de l'orientation des actions communes" , et d'autre part entraîne un pouvoir de codécision au profit du Parlement européen. Cela constituerait, aux yeux de notre collègue, une dérive, et une erreur d'interprétation des textes, d'ailleurs confirmée au Sénat, par M. Charles Pasqua, ministre d'État, ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire.

M. Paul Masson souhaite par conséquent que "le Sénat demande au Gouvernement de veiller à l'inscription au budget du Conseil, et non au budget de la Commission, des crédits nécessaires à la mise en oeuvre des actions communes de la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures" .

La proposition de résolution n° 575 de M. Jacques Genton vise, comme la précédente, à modifier l'imputation budgétaire de certains crédits.

Les dépenses visées sont les "dépenses opérationnelles de politique étrangère et de sécurité commune" , soit 50 millions d'écus, aujourd'hui inscrites sur le budget de la Commission. Notre éminent collègue préconise leur inscription au budget du Conseil. Il relève que "l'option de financement sur la section "Commission" du budget aurait pour conséquence, s'agissant des dépenses non obligatoires, de remettre la décision finale au Parlement européen ".

Le Président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne propose, par conséquent, que " le Sénat demande au Gouvernement le rétablissement, dans le projet de budget de l'Union européenne pour 1995, du financement des dépenses opérationnelles de la PESC dans le cadre du budget du Conseil et non de la Commission ".

La proposition de résolution n° 576 de M. Jacques Oudin vise à améliorer la gestion des crédits du programme PHARE, notamment en renforçant la coordination avec les aides nationales.

Le volume de crédits affecté aux pays de l'Europe centrale et orientale, en forte hausse, n'est nullement contesté, et paraît même "inférieur aux besoins", au regard des difficultés économiques rencontrées dans certains pays : les dépenses fixées dans l'avant-projet de budget pour 1995 sont de 1.106 millions d'écus en crédits d'engagement et 885 millions d'écus en crédits de paiement, soit une hausse de 12,3 % et 49,5 % par rapport à 1994.

En revanche, notre collègue est très critique sur la gestion de ces dépenses. Ses développements, étayés par les rapports annuels de la Cour des comptes des Communautés européennes concernent une gestion trop solitaire, qui ne s'est pas assez appuyé sur l'administration des États membres, une gestion pas assez rigoureuse, évoquant trop facilement des prétendues situations d'urgence, et enfin "le coût excessif et l'efficacité aléatoire des expertises."

Notre collègue, qui souhaite des "garanties de meilleure utilisation des crédits" , propose, en conséquence, que "le Sénat invite le Gouvernement à demander, lors de l'examen des crédits du chapitre 7-60 :

- "une meilleure coordination du programme PHARE avec les aides des États membres de l'Union ainsi qu'avec les actions de la BEI et de la BERD ;

- "une association plus étroite des pays bénéficiaires à la préparation et à l'exécution des programmes ;

- "le recentrage de l'assistance technique vers des projets d'une utilité indiscutable, une meilleure maîtrise des coûts de cette assistance et un contrôle de sa qualité et de son efficacité ;

- "une plus grande transparence dans l'attribution des contrats et une plus large diffusion de l'information sur les projets, notamment auprès des administrations des États membres ;

- une réorientation de l'aide vers le soutien à la modernisation des infrastructures et le développement du secteur privé, en liaison notamment avec les activités de la BERD".

La proposition de résolution n° 604 de M. Jacques Genton vise à contenir la progression des ressources propres dans la limite de 1,2 % du PNB communautaire.

Cette limite est fixée par les perspectives financières pluriannuelles de 1988. De nouvelles perspectives ont été définies par le Conseil européen d'Edimbourg, pour la période 1995-1999 : le plafond des ressources propres devrait atteindre 1,21 % en 1995 et 1,27 % en 1999. Or, notre excellent collègue relève très justement que l'engagement, politique, parfaitement clair, n'a pas encore été traduit formellement par une décision du Conseil, prise sur proposition de la Commission.

Il estime par conséquent qu'en l'absence de décision "le respect de l'ancien plafond de ressources s'impose à la fois pour le Conseil et pour le Parlement européen "...

M. Jacques Genton propose donc que "le Sénat demande au Gouvernement d'agir en sorte que le budget communautaire pour 1995 respecte ce plafond" (de 1,20 %).

II - OBSERVATIONS

A. SUR LE FOND

1. Appréciation sur les propositions de résolution

Les propositions de résolution formulées par les membres de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sont parfaitement fondées, et reposent sur une analyse précise des mécanismes et des dépenses budgétaires. Votre rapporteur relève notamment que les sénateurs ont su apprécier toutes les conséquences de l'imputation budgétaire de tel ou tel crédit, non seulement en termes financiers, mais aussi en termes politiques, avec un glissement imprévu des pouvoirs en faveur du Parlement européen.

La commission des Finances du Sénat partage totalement les positions défendues par nos collègues. Les rapporteurs successifs de la commission des Finances, depuis cinq ans, ont régulièrement exprimé le souhait d'améliorer l'efficacité de la dépense communautaire, M. René Trégouët, évoquait déjà en 1992 (PLF 1993) "l e risque de la dispersion, de l'éparpillement de la dépense, avec la multiplication de lignes budgétaires trop modestes pour avoir un quelconque effet d'impulsion" . La part prise par les dépenses d'études, de recherche, d'expertises, d'observations, d'analyses, paraît également contestable aux yeux de tout observateur. Enfin, le principe de subsidiarité, concept fondateur de la construction européenne de l'après Maastricht, paraît difficilement conciliable avec celui d'additionalité et de complémentarité qui sous-tendent pourtant la quasi totalité des interventions structurelles de la Communauté.

Les observations des membres de la délégation sont donc parfaitement conformes aux analyses, reprises dans les rapports successifs de la commission des Finances. On peut d'ailleurs relever que certains sénateurs parmi les plus actifs appartiennent à la fois à la commission et à la délégation : la voix ne peut donc être que la même. Cela ne saurait surprendre tant il est vrai que le Sénat a toujours fait preuve d'une grande vigilance à l'égard des Communautés européennes, en général, et des aspects budgétaires de la construction européenne en particulier.

2. Appréciation sur la procédure suivie par le Gouvernement

Votre rapporteur rappelle toute l'importance qu'il faut attacher à une transmission au Parlement français, dans les délais, des documents budgétaires préparatoires à l'adoption d'un budget général des Communautés européennes, tant pour assurer un véritable contrôle démocratique que pour des raisons financières. La participation de la France au budget des Communautés européennes est aujourd'hui de 90 milliards de francs en 1995 : elle approchera 100 milliards de francs en 1996. Ainsi que l'ont noté à plusieurs reprises le président de la commission des Finances et le rapporteur général du budget, "pour être réellement efficace et donner à ce contrôle une véritable signification, l'intervention du Parlement national doit intervenir entre l'adoption de l'avant-projet de budget par la Commission et l'adoption de ce projet de budget par le Conseil. Le Parlement doit intervenir sur ce point avant la fin de la seconde session ordinaire".

Votre rapporteur relève que l'année dernière, compte tenu des délais de transmission des documents budgétaires, la proposition de résolution sur le budget 1994 déposée par M. Jacques Genton n'avait pu être valablement examinée par notre commission des Finances, qui avait noté qu'il aurait été "inutile de laisser se poursuivre un processus qui ne pouvait se conclure par l'adoption d'une résolution privée de tout effet puisque postérieure à la décision du Conseil" .

La commission des Finances avait d'ailleurs "appelé l'attention du Gouvernement sur l'impérieuse nécessité de transmettre dorénavant au Parlement l'avant-projet de budget et non plus le seul budget".

La commission des Finances a été entendue. Quelques imperfections demeurent, mais l'avancée réalisée est si grande qu'elles ne sauraient la ternir.

On pourrait ainsi relever que cet avant-projet de budget pour 1995 est certainement très hypothétique, dans la mesure où interviendra l'élargissement de l'Union européenne à quatre nouveaux États (Autriche, Finlande, Norvège, Suède). Le budget 1995 (et a fortiori l'avant-projet de budget) sera complété par un budget supplémentaire, réalisé à l'aune d'un cadrage financier lui aussi révisé.

Sur le plan de la procédure, on pourra aussi noter que la transmission de documents est incomplète, comme le montre le tableau ci-après.

Liste des documents budgétaires

Avant-projet de budget

Volume 0 Introduction générale Transmis

Volume 1 État général des recettes Transmis

Volume 2 Parlement européen Transmis*

Volume 3 Conseil Non transmis

Volume 4 Commission Transmis

Volume 5 Cour de justice Transmis

Volume 6 Cour des comptes Transmis

Volume 7 Comité de région et comité Non transmis

économique et social

Projet de budget

Volume 8 Exposé des motifs Transmis à

titre officieux

* Le 20 septembre 1994

Néanmoins, la présentation au Sénat de l'avant-projet de budget pour 1995, dès le 13 juin 1994, a permis, pour la première fois, aux sénateurs d'être éclairés, en temps utile, des perspectives budgétaires européennes les plus probables. Certes le document présenté n'est que l'avant-projet de budget préparé par la Commission ; mais l'expérience montre que, malgré les navettes successives entre les deux véritables autorités budgétaires que sont le Conseil et le Parlement européen, cet avant-projet est bien souvent extrêmement proche du budget définitif, et sert en réalité, de ligne médiane aux positions opposées du Conseil et du Parlement européen.

Il convient, enfin, de rappeler que l'Assemblée nationale a adopté deux résolutions sur l'avant-projet de budget pour 1995, le 13 juillet 1994, soit le dernier jour de la session extraordinaire qui suivit la seconde session ordinaire.

Au regard des pratiques antérieures, les progrès réalisés dans le sens d'une information plus précoce et complète du Parlement français sont donc considérables

B. SUR LAPROCÉDURE SUIVIE AU SÉNAT

L'Assemblée nationale a adopté deux résolutions sur l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour 1995, le 13 juillet 1993, soit le dernier jour de la session extraordinaire. Il s'agit de l'étape finale d'une procédure engagée dès le 31 mai, date à laquelle M. Bernard Carayon, rapporteur de la délégation de l'Assemblée nationale pour les Communautés européennes, déposa une proposition de résolution.

Les propositions de résolution présentées par nos collègues ont été déposées les 1, 4 et 13 juillet et distribuées le 6 juillet pour les six premières, et le 20 juillet pour la septième, soit à des dates qui rendaient impossible ou inefficace leur examen par la commission des Finances.

Il convient en effet de rappeler tant les règles de procédure relatives à l'adoption de résolution que la chronologie des faits et des initiatives.

1. Les procédures

La procédure budgétaire européenne suit différentes étapes décrites ci-dessous.

Calendrier budgétaire de la C.E.E.

Chronologie

Étapes

Calendrier officiel

(art. 203 du Traité de Rome)

Calendrier constaté

1ère étape :

Avant projet de budget

A.P.B. de la Commission

"Avant le 1er septembre"

mai ou juin

Étape

intermédiaire :

Comité budgétaire

(attachés financiers)

Travaux préparatoires au Conseil

COREPER

(Ambassadeurs)

2ème étape-

1ère lecture

CONSEIL

"Avant le 5 octobre"

juillet

3ème étape :

1ère lecture

PARLEMENT

"45 jours après communication du projet de budget"

octobre

Délai maxi

45 jours

4ème étape :

2ème lecture

CONSEIL

"15 jours après communication du projet de budget" (établi par le P.E.)"

Fin octobre/ fin novembre

Délai maxi

15 jours

Fixation

des DO

5ème étape :

2ème lecture

PARLEMENT

"15 jours après» communication" (de la position du Conseil)

Fin novembre/ mi - décembre

Délai maxi

15 jours

Fixation

des DNO

6ème-étape :

Codécision

Étape facultative

DO : dépensés obligatoires

DNO : dépenses non obligatoires

Le contrôle des projets d'actes communautaires, prévu à l'article 73 bis du Règlement du Sénat, suit également une procédure extrêmement complexe rappelée ci-après.

1. Proposition d'acte communautaire (enregistrée au Sénat) ;

2. Proposition de résolution sur une proposition d'acte communautaire ; renvoi à la Commission compétente ;

3. Désignation d'un rapporteur de la Commission ;

4. Examen en commission de la proposition d'adoption d'une proposition de résolution fixant un délai limite pour le dépôt d'amendement ;

5. Examen des amendements et adoption de la résolution de la Commission, lors d'une seconde réunion ;

6. Distribution de la résolution ;

7. Une demande d'examen par le Sénat peut être présentée pendant 10 jours à compter de la distribution ;

8. Dans les 20 jours qui suivent cette demande, la conférence des présidents peut proposer l'inscription à l'ordre du jour ;

9. La résolution devient définitive soit après l'examen par le Sénat, soit si aucune demande d'examen par le Sénat n'a été formulée (10 jours à compter de la distribution de la résolution), soit si la conférence des présidents ne propose pas l'inscription de la résolution à l'ordre du jour (20 jours à compter de la demande d'examen en séance publique).

Ces rappels permettent de comprendre qu'il est impératif d'intervenir très en amont, le plus tôt possible, afin de permettre un examen des propositions de résolution dans des délais compatibles tant avec la procédure de l'article 73 bis du Règlement du Sénat qu'avec le calendrier de la procédure budgétaire européenne.

Tel ne semble pas avoir été le cas car les dates auxquelles les propositions de résolution de nos collègues ont été mises en distribution, soit les 6 et 20 juillet, n'ont pas permis un examen utile par notre commission des Finances (par comparaison, la première proposition de résolution à l'Assemblée nationale a été déposée le 31 mai).

Le rappel de la chronologie précise des faits permet de comprendre les difficultés rencontrées.

2. La chronologie

Chronologie

- 19 avril 1994

CEE - présentation publique de l'avant-projet de budget pour 1995 (APB) par la Commission des Communautés européennes.

- 30 mai

Assemblée nationale - transmission de l'"aperçu général" sur l'APB à la délégation de l'Assemblée nationale pour les Communautés européennes.

- 31 mai

Assemblée nationale - publication du rapport d'information sur l'APB 1995 déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour les Communautés européennes (n° 1292).

- 31 mai

Assemblée nationale - proposition de résolution sur l'APB présentée par M. Bernard Carayon, rapporteur de la délégation de l'Assemblée nationale pour les Communautés européennes (n° 1295).

- 10/13 juin

Assemblée nationale/Sénat - transmission au Parlement de l'APB, sous forme de proposition d'acte communautaire (n° E 260 et E 263) - reçu à la présidence de l'Assemblée nationale le 10 juin, annexé au procès-verbal de la séance du 13 juin au Sénat.

- 15 juin

CEE - transmission de l'APB au Conseil.

- 22 juin

Première réunion interministérielle au SGCI.

- 1er juillet

Assemblée nationale/Sénat - ouverture de la première session extraordinaire.

-1er juillet

Sénat - proposition de résolution sur l'APB présentée par M. Xavier de Villepin (n° 572-573), M. Paul Masson (n° 574) et M. Jacques Oudin (n° 575), annexée au procès verbal de la séance du 1er juillet 1994.

- 4 juillet

Assemblée nationale - proposition de résolution sur l'APB présentée par M. René Carpentier, député (n° 1457).

- 4 juillet

Sénat - proposition de résolution sur l'APB présentée par M. Jacques Oudin (n° 576).

-6 juillet

Sénat - distribution des six propositions de résolution.

- 7 juillet

CEE - trilogue informel sur le budget entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission des Communautés.

-7 juillet

Assemblée nationale - examen en commission des Finances du rapport de M. Philippe Auberger, rapporteur général à l'Assemblée nationale, sur les propositions de résolution n° 1295 et n° 1457.

- 13 juillet

Assemblée nationale - débat en séance publique et adoption des deux résolutions sur l'APB.

- 13 juillet

Assemblée nationale/Sénat - clôture de la session extraordinaire.

- 13-16 juillet

Sénat - proposition de résolution sur l'APB présentée par M. Jacques Genton (n° 684) rattachée par ordre au procès-verbal de la séance du 13 juillet 1994, enregistrée à la présidence du Sénat le 16 juillet 1994.

- 20 juillet

Sénat - distribution de la proposition de résolution n°684.

- 21 juillet

CEE - dernière réunion interministérielle sur l'APB 1995 au SGCI.

- 25 juillet

CEE - adoption du projet de budget (PB) par le Conseil.

Programme prévisionnel

26-30 octobre

CEE - première lecture du projet de budget par le Parlement européen.

1-15 novembre

CEE - deuxième lecture par le Conseil du projet de budget adopté par le Parlement européen.

CONCLUSION

En novembre 1993, la commission des Finances avait dû se résigner à ne pas donner suite à une proposition de résolution européenne dans la mesure où il ne lui semblait pas utile "de poursuivre un processus qui ne pouvait se conclure que par l'adoption d'une résolution privée de tout effet puisque postérieure à la décision du Conseil".

La commission des Finances est contrainte, cette fois encore, d'adopter la même attitude de sagesse, dans la mesure où les propositions de résolution portent sur l'avant-projet de budget, alors que le projet de budget est d'ores et déjà adopté.

Les règles de procédure sont telles que les propositions de résolution doivent être présentées au plus tôt. Indépendamment même des règles de procédure, la commission des Finances aurait dû être saisie, même de façon informelle, très en amont. Délai de réaction et bonne coordination paraissent constituer deux éléments essentiels à la parfaite réussite du contrôle parlementaire national sur les affaires européennes.

Votre rapporteur se permet de conseiller aux auteurs des propositions de résolution d'en déposer de nouvelles en étroite collaboration avec la commission des Finances, si leurs inquiétudes n'étaient pas dissipées par l'adoption du projet de budget par le Conseil. A cet égard, il serait indispensable que le Gouvernement transmette au Parlement, dans les meilleurs délais, le projet de budget tel qu'il a été adopté le 25 juillet dernier.

Enfin, votre commission des Finances souhaite lancer un appel solennel au Gouvernement afin qu'il prolonge l'effort très appréciable qu'il a fait cette année en transmettant au Parlement français l'avant-projet de budget. Il apparaît nécessaire de réduire, de façon significative, le délai encore trop long qui sépare l'adoption de l'avant-projet de budget de sa transmission au Parlement.

Le contrôle parlementaire des institutions européennes suppose un effort partagé. C'est un test pour la démocratie, c'est un test pour l'avenir de l'Europe.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 21 septembre 1994 sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé à l'examen des sept propositions de résolution, sur le rapport de M. Jacques Chaumont.

Le rapporteur a tout d'abord observé que ces propositions visent à une meilleure maîtrise et à un plus grand contrôle des dépenses des Communautés européennes. Il a rappelé que les rapporteurs successifs de la commission des Finances sur le prélèvement communautaire avaient régulièrement exprimé le même souhait, et que sur le fond, il lui semblait que la commission ne pouvait qu'adhérer pleinement tant aux objections formulées à l'encontre de la dérive des dépenses communautaires qu'aux propositions présentées.

M. Jacques Chaumont a également relevé que la transmission au Sénat, pour la première fois, de l'avant-projet de budget européen, constituait une avancée décisive dans la voie de l'information et du contrôle parlementaire. Il a rappelé que jusqu'alors, le Gouvernement se contentait, au mieux, de communiquer le projet de budget déjà adopté ou sur le point de l'être, ce qui ne permettait pas un véritable contrôle.

Il a noté que les délais de transmission de la part du Gouvernement et de réaction de la part de la délégation s'étaient considérablement améliorés par rapport à l'année dernière.

Le rapporteur a cependant relevé que les dates de mise en distribution des propositions de résolutions le 6 juillet, pour les six premières et le 20 juillet pour la septième, n'avaient pas permis à la commission des Finances d'en délibérer, dans la mesure où la session extraordinaire a été close le 13 juillet. Le projet de budget a été adopté par le Conseil le 25 juillet, après que la position française ait été définie le 21 juillet.

M. Jacques Chaumont a observé que l'avant-projet de budget avait été présente par la Commission des Communautés le 19 mai, ce qui avait permis à un membre de la délégation de l'assemblée nationale de déposer une proposition de résolution dès le 31 mai, soit avant la transmission officielle du document.

Le rapporteur a exprimé le souhait de parvenir à raccourcir les délais de réaction et d'assurer une meilleure synchronisation entre la délégation et la commission des Finances.

Il a conclu en rappelant que ces propositions de résolution portaient sur l'avant-projet de budget, alors que le projet de budget était d'ores et déjà adopté, et qu'en conséquence, il lui paraissait inutile de laisser se poursuivre un processus qui ne pouvait se conclure que par l'adoption d'une résolution privée de tout effet.

M. Michel Charasse a considéré qu'il était impératif de caler le contrôle parlementaire national sur le calendrier de la procédure budgétaire européenne. Il a noté que rien n'interdisait au Sénat d'adopter de nouvelles résolutions avant la deuxième lecture, en novembre, du budget par le Conseil.

M. Jacques Oudin a observé qu'il serait souhaitable d'établir un "compte à rebours", afin d'éviter d'engager une procédure inopérante parce que hors délais.

M. Jacques Chaumont a rappelé les dates de présentation et de transmission de l'avant-projet de budget ; il a noté que l'Assemblée nationale avait pu réagir dès la publication de l'avant-projet sans attendre sa transmission. Il a suggéré de reprendre l'initiative et de réaffirmer la volonté d'exercer un contrôle parlementaire à l'occasion de la seconde lecture du projet de budget.

La commission a alors décidé de ne pas donner suite aux propositions de résolution n° 571, 572, 573, 574, 575, 576 et 604.

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