CHAPITRE V : LES SOCIÉTÉS DU SECTEUR PUBLIC DE L'AUDIOVISUEL

I. FRANCE TÉLÉVISION

A. LES DOSSIERS COMMUNS

La présidence commune et la mise en place de procédures d'harmonisation et de complémentarité des antennes ont d'ores et déjà eu un impact favorable sur l'audience du secteur public. Un renforcement des synergies demeure nécessaire et doit être entrepris dans la perspective de la construction d'un siège commun.

Le renouvellement de la convention collective -dans une large concertation, qui constituera l'enjeu majeur de l'année 1996, doit également donner l'occasion d'une modernisation et d'une adaptation du statut des personnels de l'audiovisuel public au nouveau contexte économique -passage du monopole à la concurrence- et technologique renouvellement des métiers.

1. Une présidence commune efficace

Instituée par la loi du 2 août 1989, la présidence commune de FRANCE TÉLÉVISION assure la complémentarité des programmes et détermine la stratégie commune de France 2 et France 3, impulse et coordonne l'action des deux chaînes dans un certain nombre de domaines sans empiéter sur les pouvoirs propres des directeurs généraux, mandataires sociaux.

Alors que la présidence comptait 48 personnes en 1993, elle n'en employait que 37 en 1994, deux services communs ayant été supprimés : la direction commune l'information (chaque chaîne ayant à nouveau une direction de l'information et une direction d'antenne) et la direction générale adjointe chargée de l'antenne, chaque chaîne était dotée d'une direction d'antenne conformément aux recommandations du rapport Campet.

L'effectif se montait à 40 personnes en 1995, dont 8 à la direction de la recherche et des études.

Le budget est en nette réduction en 1995 (47,7 millions de francs en 1992, 46,4 millions de francs en 1993, 50,6 millions de francs en 1994), avec 44,4 millions de francs dont :

Personnel 23,9 millions de francs

Fonctionnement 4,6 millions de francs

Immeuble (loyer + charge) 7.2 millions de francs

Études/documentation 8,7 millions de francs

Le partage de l'imputation de ce budget fait l'objet de répartitions complexes entre France 2 et France 3.

La simplification de la gestion de la présidence commune pourrait utilement être envisagée.

2. Renforcer l'identité du secteur public

a). Une gestion de moyen terme

Une meilleure gestion du secteur public de l'audiovisuel était indispensable. Elle est devenue inévitable.

Elle doit être fondée sur l a mise en oeuvre d'une stratégie de moyen terme, l'approfondissement des relations entre France 2 et France 3, et l'application à l'audiovisuel public des règles de management des entreprises du même secteur.

ï Pour affronter la concurrence et les mutations technologiques à venir, le secteur public de la communication audiovisuelle doit pouvoir se développer sans que son périmètre ne soit constamment remis en cause -sans que l'on agite les menaces de privatisation de l'une des deux grandes chaînes. Il doit également doit pouvoir développer une stratégie cohérente sur le moyen terme. A cet effet, deux instruments pourraient être utilisés :

ï La procédure des contrats d'objectifs, conclus entre les organismes du secteur public de la communication audiovisuelle et l'État, prévue par l'article 21 de la loi n°89-25 du 17 janvier 1989 devrait être « réactivée » et de tels contrats pourraient être passés avec chaque société. Ils définiraient sur le moyen terme -entre trois et cinq ans- la stratégie de chaque opérateur public en matière de diffusion, de programmation, d'adaptation aux mutations technologiques et économiques.

Le Conseil audiovisuel extérieur de la France a adopté une procédure semblable pour l'audiovisuel extérieur, lors de sa réunion du 23 novembre 1995.


• Le mandat des dirigeants des entreprises publiques du secteur la communication audiovisuelle devrait être porté à cinq ans, afin de permettre aux entreprises du secteur public de l'audiovisuel de mener une stratégie à moyen terme pour assurer leur adaptation dans un contexte marqué par une mutation technologique profonde et par un renforcement de la concurrence internationale.

Votre rapporteur avait, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1995, déposé un amendement tendant aux mêmes fins. Sur le fond, cet amendement avait recueilli l'accord du ministre du budget de l'époque, M Nicolas Sarkozy. Le ministre de la Culture, M. Philippe Douste-Blazy, s'était également déclare favorable à une telle initiative, lors d'une intervention à l'université d'été communication à Hourtin, le 1 er septembre dernier.

Le Sénat a, le 15 novembre 1995, adopté, à l'unanimité moins une voix, une proposition de loi qui poursuit cet objectif.

b). Un nouveau siège permettant de réaliser des économies à long terme

La décision de principe de construire un siège commun à France 2 et France 3 a été prise en février 1993 pour la première et en avril 1994 pour la seconde. Après avoir hésité entre un site à Issy-les-Moulineaux et un terrain dans le XVè arrondissement de Paris, le terrain situé dans la capitale a été retenu. Le but de cette opération est triple :

réunir sous un même toit, les sièges sociaux des trois sociétés du groupe FRANCE TÉLÉVISION : France 2, France 3, France Espace 3, ainsi que leurs filiales,

regrouper en un même lieu les seize implantations parisiennes du groupe,

financer cette opération par un crédit bail dont le remboursement annuel devrait correspondre à la somme des loyers payée pour les locations actuelles, c'est-à-dire sans surcoût pour les sociétés.

Le coût total du projet s'élève à 1788,3 millions de francs répartis de la façon suivante :

charge foncière 544 millions de francs

construction 542 millions de francs

charges 133 millions de francs

aménagements 108 millions de francs

aménagements techniques 219 millions de francs

aléas 59 millions de francs

frais financiers 132 millions de francs

Quant au plan de financement, il retient trois sources de ressources :

le crédit bail immobilier à hauteur de 1 434,7 millions de francs,

les ressources propres de FRANCE TÉLÉVISION (essentiellement en dotations aux amortissements), 263,3 millions de francs,

le crédit bail mobilier ou en emprunt à court terme, 40,3 millions de francs.

Les conseils d'administration des deux chaînes ont approuvé, en avril 1995, le cadre général de l'opération de même que les autorités de tutelle, par une lettre d'approbation du 7 avril 1995.

Les travaux ont démarré en septembre 1995. Le bâtiment, réalisé par l'architecte J.P. Viguier, pourrait être temporairement utilisé lors de la Coupe du monde de football en 1998.

Ce projet a toutefois suscité de nombreuses questions.

A l'heure où la rationalisation des structures est le mot d'ordre qui préside à la recherche des économies budgétaires dans le secteur audiovisuel, on doit se féliciter du regroupement dans un site unique des différentes sociétés du groupe FRANCE TÉLÉVISION, actuellement éparpillées dans 16 sites différents. Le coût des loyers et des charges représente aujourd'hui pour le groupe une dépense annuelle de 150 millions de francs, certains bâtiments étant situés dans les quartiers les plus luxueux de Paris, comme l'Avenue Montaigne.

FRANCE TÉLÉVISION aurait-elle dû profiter de la conjoncture favorable -et de la crise de l'immobilier de bureaux- pour louer de nouveaux locaux moins onéreux ? Peut-être serait-ce oublier qu'une société de diffusion de programmes audiovisuels n'a pas uniquement besoin de mètres carrés. Il lui faut également des aménagements spéciaux, techniques, et des immeubles dits « intelligents ». Déménager dans d'autres immeubles loués à des conditions en apparence plus avantageuses aurait, en réalité, constitué une solution au moins aussi coûteuse, compte tenu des travaux nécessaires d'aménagement technique.

Le regroupement va-t-il favoriser « l'égalitarisation » des conditions salariales et, partant, le développement des revendications, notamment salariales ? Ce rattrapage est tout autant inéluctable que souhaitable. Le site commun ne manquera pas de susciter des économies de fonctionnement, notamment dans le domaine des fournitures et prestations de service, même s'il est difficile aujourd'hui de dresser un bilan des économies qui seront dégagées et des dépenses qui pourraient résulter d'un rattrapage des salaires.

Les chaînes composant FRANCE TÉLÉVISION doivent par ailleurs engager, à cette occasion, une réflexion sur leur rapprochement afin de mieux remplir l'ensemble de leurs missions.

Pour ce qui concerne les programmes, la coordination se limite à l'harmonisation des lignes éditoriales : les investissements sont planifies de manière autonome par chaque chaîne.

Il faudrait aller beaucoup plus loin et envisager le regroupement des deux chaînes pour leur programmation, en amont (mise en place d'une société financière qui investirait dans les programmes) comme en aval (société commerciale commune chargée d'exploiter les droits dérives et la commercialisation des droits de diffusion) (69 ( * ))

3. Pour une déontologie du secteur public

Le CSA a engagé, le 8 novembre 1995, une concertation avec les responsables d'antennes des chaînes nationales hertziennes sur l'éthique et la qualité des programmes, même s'il ne dispose pas d'un pouvoir de recommandation en la matière, qui ne lui est explicitement donné -en matière de pluralisme- qu'en période électorale. Le secteur public doit représenter un modèle dans cette démarche.

Suivant une procédure inspirée par la méthode du Conseil de la Radiodiffusion et Télécommunications Canadiennes -l'équivalent de notre CSA-, et qu'un précédent rapport a largement décrite (70 ( * )) le Conseil a préconise une autorégulation de la part des diffuseurs, à qui il revient, au titre de leur responsabilité éditoriale, de définir les règles déontologiques que 1'ensemble des services en charge de la diffusion doivent respecter. La transgression de ces devoirs professionnels, reconnus à l'intérieur de la profession des journalistes et animateurs, devra donner lieu à des sanctions disciplinaires.

Certains diffuseurs ont établi à l'intention de leurs collaborateurs des « codes de bonne conduite » qui sont annexés au contrat de travail règlement d'entreprise et dont le non-respect des principes peut constituer faute professionnelle. La rédaction de TF1 a rédigé, en 1992, une déontologique d'entreprise ».

Les engagements des opérateurs seraient soumis au CSA qui après les avoir approuvés, les annexerait aux autorisations des opérateurs privés ou aux cahiers des charges des chaînes publiques, et les publierait afin que les téléspectateurs en aient connaissance, et puissent, le cas échéant, saisir le Conseil pour non-respect de ces dispositions.

Toutes les chaînes publiques devraient se doter de tels « codes de bonne conduite » dont le respect devrait être rigoureux.

De nombreuses dérives pourraient ainsi être évitées...

En règle générale, dans le secteur public, les contrats de travail renvoient à la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles du 31 mars 1984, qui comprend des dispositions d'ordre déontologique. En outre, les journalistes sont couverts par une convention collective spécifique, qui comprend également des règles d'ordre déontologique spécifiques. Enfin, le cahier des charges de chaque société comprend des dispositions de même nature.

En théorie, tout collaborateur du secteur public de la communication audiovisuelle doit prendre connaissance de ces règles au moment de la signature de son contrat. En outre, les sociétés publiques devraient rappeler périodiquement ces règles à leurs collaborateurs. Pour le moment toutefois, ainsi que le relèvent les réponses aux questionnaires adressés -par votre rapporteur- aux responsables des chaînes publiques sur le respect des cahiers des charges, les pratiques sont encore très hétérogènes.

Des réflexions sont en cours, notamment à FRANCE TÉLÉVISION, pour élaborer des chartes déontologiques plus précises.

Questionnaire adressé le 25 octobre 1995 aux responsables des chaînes publiques sur le respect des cahiers des charges

« 1- Informez-vous les collaborateurs de la société, et particulièrement ceux qui sont chargés de présenter une émission, des prescriptions du cahier des charges que la société doit respecter ? « 2 - En cas de réponse positive, quelle forme prend cette information ?

Réponses reçues au 1 er décembre 1995

« 3 - Des rencontres sont-elles organisées entre vous-même, les membres de la direction, les chefs de service, les journalistes, les animateurs, les présentateurs afin de vérifier le respect, par les programmes de la société, du cahier des charges ? »


• ARTE (M. Victor Rocaries)

« L'Assemblée générale extraordinaire du 9 juillet 1993 a adopté les « Règles Pour la coopération dans le domaine des programmes » qui reprennent les Principes du Contrat de Formation en matière d'élaboration des programmes Ces règles, comme l'indique la lettre de M. Jérôme Clément du 21 juillet 1993, ont été communiquées à tous les Responsables de programmes de ARTE Deutschland TV GmbH, de la SEPT ARTE et de la Centrale de Strasbourg.

« Enfin, l'Assemblée générale extraordinaire du 29 mars 1995 a adopté les « Directives destinées à assurer la protection des enfants et des adolescents. Ces directives sont en vigueur à ARTE depuis le 1er mai 1995.

« Un certain nombre d'instances permettent, d'autre part, au Directeur des programmes ou bien à d'autres responsables de la chaîne de rappeler Principes qui régissent la production et la diffusion de nos programmes.

«D'abord, une réunion de direction est organisée a la Centrale de Strabourg, chaque semaine par le Directeur des programmes avec les Responsables d'Unités de programmes ; d'autre part, une Conférence de rédaction de 1'information réunie également,chaque semaine, a la Centrale, par le Directeur des Programmes.

« Ensuite, chaque mois, la Conférence des programmes, qui se réunit également à la Centrale de Strasbourg, sous la présidence du Directeur des programmes rassemble un certain nombre de Responsables de programmes de la centrale, de ARTE Deutschland TV GmbH et de La SEPT-ARTE, est le lieu privilégié où les obligations auxquelles ARTE s'est engagée en matière de programmes sont rappelées et défendues.

« Enfin, et c'est là aussi une originalité de ARTE, la chaîne s'est dotée d'un Comité Consultatif des Programmes. Cette instance se compose de seize représentants de la vie culturelle des membres fondateurs (8 Français et 8 Allemands). C'est également un lieu où les règles relatives à la production et à la diffusion de nos programmes font l'objet d'une observation attentive. »


• FRANCE 2 (M. Raphaël Hadas-Lebel)

« L'ensemble des Directeurs de France 2 est évidemment informé des obligations résultant du cahier des charges. Celui-ci leur a été distribué. Le rapport d'exécution que nous rédigeons chaque année est l'occasion de réunir les responsables et de faire le point sur les difficultés d'application de tel ou tel article.

« Lors des réunions avec les collaborateurs de l'information, de l'antenne, et tout spécialement de la production, les Directeurs responsables de ces secteurs rappellent à leurs cadres les exigences contenues dans ce cahier. A plusieurs reprises, le Directeur Juridique de France 2 a été invité à intervenir pour présenter le cahier des charges. Il l'a fait notamment de façon systématique lors de la publication du nouveau cahier.

« Enfin, il m'est arrivé à plusieurs reprises de rappeler par des notes destinées aux responsables d'unités ou aux animateurs et présentateurs telle ou telle prescription du cahier des charges sur laquelle il me paraissait essentiel d'insister. »


• FRANCE 3 (M. Xavier Gouyou-Beauchamps)

« Il est de la responsabilité de la direction générale de prendre les dispositions nécessaires pour faire connaître aux salariés les obligations qu'ils ont à respecter dans l'exercice de leur fonction.

« C'est ainsi par exemple que les règles déontologiques font l'objet de rappels par notes, ou à l'occasion des réunions organisées pour certaines catégories de personnels.

« De même, et lorsqu'elles s'appliquent à eux, ces règles sont communiquées aux collaborateurs externes et aux sociétés sous traitantes. »


RADIO FRANCE (M. Jean Maheu)

« Il n'a jamais été envisagé de formaliser, à l'intention des collaborateurs de la société, et plus spécialement de ceux de l'antenne, quelque dispositif préventif de mise en garde ou quelque guide d'instructions que ce soit : au demeurant toute démarche de cette nature exposerait, dans le monde sensible de la communication et de l'information, à un risque majeur d'incompréhension -avec les incriminations de censure que vous pouvez imaginer- tout en entravant la part de responsabilité alliée à la liberté de ton qui sont les premiers garants d'une expression de qualité.

« Reste, bien sûr, que des prises de position individuelles critiquables, ou des fautes de goût, peuvent toujours se produire, dans un réseau aussi étendu et diversifié que Test celui de Radio France.

« Il appartient alors aux responsables concernés, chacun à leur niveau de décision, et je m'y suis à diverses reprises employé, de procéder aux corrections et aux rectifications nécessaires : mais, au total, je crois être fondé à penser que dans la diversité de ses missions, Radio France s'acquitte de ses tâches dans le plus complet respect des principes de déontologie et des règles de fonctionnement qui lui ont été fixés, qu'il s'agisse en premier lieu du respect du Pluralisme ou de celui de la dignité de la personne humaine, ou de l'accomplissement de ses objectifs culturels, éducatifs ou de création.

« La référence à la loi et au cahier des missions et des charges est d'ailleurs très Présente dans la vie de la société. C'est ainsi que l'élaboration annuelle du rapport d'exécution du cahier des charges est marquée par un long examen et des échanges souvent approfondis entre la présidence direction générale de Radio France et les directions de programmes, en vue de confronter, sur les mois foulés, d'une part les missions assignées à la radio de service public et d' autre part les voies et moyens par lesquels celle-ci s'acquitte des obligations qui lui incombent.

« En outre chaque semaine, la « conférence de direction », réunie autour et sous la présidence du président directeur général, est l'occasion pour les principaux responsables de Radio France -direction générale, directions de chaîne, chefs des services administratifs, commerciaux, techniques, juridiques, financiers et de ressources humaines- de débattre des questions de droit et de déontologie que tel projet de programme ou d'opération pourrait éventuellement poser au regard de notre statut et de nos missions. Je peux porter témoignage du scrupule avec lequel les débats de cette nature sont menés. »


RFO (M. Gérard Bélorgey)

« J'informe régulièrement, lors des réunions du comité de direction, mes collaborateurs des prescriptions du cahier des charges.

« En ce qui concerne les stations régionales, sur des points délicats notamment la date de transmission à la presse des programmes, j'appelle régulièrement l'attention des directeurs régionaux et des chefs de bureau artistique sur les règles fixées par ledit cahier. Il est vrai que cette information largement orale devrait être plus formalisée. Je m'engage à l'avenir à leur faire tenir une note.

« Par ailleurs, je rencontre régulièrement les chefs de service, les journalistes, les animateurs et les présentateurs et je ne manque pas d'appeler leur attention sur leurs obligations. »


• LA CINQUIÈME (M. Jean-Marie Cavada)

« Premièrement, les collaborateurs internes (éditeurs, présentateurs placés sous la responsabilité des premiers et Chargés de Production) sont informés régulièrement et entretenus dans la vigilance du respect de nos missions.

« En second lieu, une réunion hebdomadaire placée sous l'autorité du Directeur de l'Antenne accepte ou rejette les projets extérieurs en fonction de nos besoins, et dans le respect du Cahier des Charges.

« De la même manière, le Président de la Société tient personnellement une conférence avec les responsables des programmes, les Éditeurs de programmes et les Chargés de Production pour assumer cette vigilance.

« Enfin, notre ligne éditoriale étant fabriquée sous la responsabilité des Éditeurs de programmes, par plus de 45 producteurs extérieurs, le Président de la Chaîne réunit ces producteurs une fois par trimestre afin de faire le bilan et corriger le cap dans cet état d'esprit. C'est d'ailleurs la seule société de télévision, aux dires des producteurs, qui entretienne au plus haut niveau de la Chaîne, de tels rapports avec eux. »

4. Un statut du personnel qui doit évoluer

La grève des 22-29 juin 1995 permit de déceler un malaise : social, fondé principalement sur les revendications salariales, en raison notamment des écarts de rémunération existant entre le secteur public et le secteur privé de la communication audiovisuelle.

Pourtant, les progressions salariales ont été, en 1994 et supérieures dans 1'audiovisuel à l'ensemble des entreprises publiques.

Davantage que les différences de rémunérations, au demeurant parfaitement explicables entre les secteurs public et prive, c'est la situation des animateurs-producteurs du secteur public qui pourrait jouer un rôle profondément malsain dans l'évolution du climat social, d'autant plus que pèseront sur ce dernier les négociations sur l'adaptation -concertée- de la con vention collective. Cette convention, aurait dû expirer cet automne a été le 28 Septembre 1995 reconduite par les parties signataires jusqu'au 31 mars 1996.

a). Des progressions salariales satisfaisantes

La masse salariale du secteur public de audiovisuel représente en 1995 5 078,5 milliards de francs et devrait peser 5 335,9 milliards francs en 1996, soit une progression légèrement supérieure à 5%,pour un montant de 31,7 % du budget total des organismes publics.

Sur la période 1990-1994, alors que les lettres de cadrage limitaient la progression annuelle en masse à 4 % (3,8 % en 1994), l'évolution moyenne du secteur audiovisuel, pour les personnels techniques et administratifs de 4,9 % et celle du secteur public dans son ensemble de 5 %, poids des grandes entreprises monopolistiques à statut.

Évolutions salariales au sein de l'audiovisuel public depuis 1993

(En pourcentage)

Personnel technique et administratif

Y compris les effets de l'accord de fin de conflit du 29 juin et, pour les journalistes, de l'accord Servat.

Rappel du cadrage Premier ministre, pour l'ensemble du secteur public.

Pour le secteur audiovisuel : 3,5 (autorisation de la Tutelle).

Évolutions salariales en masse depuis 1993

(En pourcentage)

Journalistes

Y compris les effets de l'accord de fin de conflit du 29 juin et, pour les journalistes, de l'accord Servat.

Rappel du cadrage Premier ministre, pour l'ensemble du secteur public.

Pour le secteur audiovisuel : 3,5 (autorisation de la Tutelle).

b). Le nécessaire adaptation concertée de la convention collective

Depuis la signature, en 1984, de la convention collective des personnels techniques et administratifs, qui, renouvelée a trois reprises, régit les rapports des salariés et des directions des organismes de l'audiovisuel public adhérents à l'association des employeurs du service public de l'audiovisuel, le paysage audiovisuel s'est profondément modifié.

La convention a été en effet conclue à une époque où les entreprises publiques du secteur audiovisuel jouissaient d'une position dominante, d'un monopole de fait, dans la plupart des activités du secteur.

La création de nouvelles entreprises et les privations ont entraîné un développement de la concurrence. Par ailleurs, les évolutions technologiques et des modes de production ont profondément changé l'environnement et l'économie même de la convention collective.

Des correctifs apportés sous forme d'avenants n'ont pu que Partiellement traduire ces évolutions.

Applicable aux personnels techniques et administratifs les journalistes étant régis par la convention collective nationale des journalistes complétée par un avenant spécifique, elle est moins un convention collective qu'un statut social commun à l'ensemble des entreprises issues de l'ex-ORTF. Nombre de ses dispositions sont d'ailleurs directement inspirées des règles en vigueur dans la fonction publique.

Les évolutions importantes intervenues dans l'audiovisuel au cours de ces dix dernières années en font actuellement un texte largement i nadapté aux exigences d'une concurrence sans merci. La convention semble soulever quatre reproches majeurs :

- elle impose une grille unique d'emplois et de salaires assortie d'une obligation d'augmenter chaque année la valeur du point de manière uniforme. Contrairement aux pratiques observées dans les autres branches, les salaires ainsi déterminés ne constituent pas des minima, mais des salaires effectifs, ce qui revient à vider de sa substance la ,négociation différentes chaque entreprise. Cette contrainte méconnaît les spécificités des différentes entreprises confrontées à des situations économiques diverses, inégalement exposées à la concurrence et exerçant des métiers différents. Cette contradiction entre des spécificités irréductibles et un corset social qui les nie est à l'origine de tensions permanentes et de conflits à répétition détaillée la classification générale des emplois est, par souci d'exhaustivité détaillée à l'extrême. Parmi les 241 professions recensées, on relève de nombreux métiers artisanaux et des professions qui ne doivent pas compter des dizaines d'individus comme « planton », « garçon d'orchestre, spécialisé », « implanteur perruquier » (distingué du « coiffeur perruquier ») etc.. Cette classification se révèle complètement illusoire et génératrice de rigidités, en rendant plus difficile les adaptations nécessaires.

elle garantit au personnel une progression salariale à l'ancienneté. Cette mesure coûte cher (plus d'un point de masse salariale par an). De surcroît, elle contribue à figer l'organisation du travail.

elle ne permet pas de faire évoluer l'aménagement du temps de travail (pour des raisons juridiques imputables au caractère hors norme de la convention). L'importance des questions d'aménagement du temps de travail dans l'organisation des entreprises rend cette situation d'autant plus critiquable que de nombreuses dispositions de la convention sont en ce domaine en contradiction avec le code du travail.

elle ne joue en aucune manière la fonction de régulation économique et sociale normalement exercée au sein d'un secteur d'activité par une convention collective de branche. Le développement d'entreprises privées de production et de diffusion rend pourtant nécessaire l'exercice d'une telle fonction dans l'ensemble de l'audiovisuel : un dossier aussi fondamental pour l'avenir de toutes les entreprises que, par exemple, celui de l'intermittence ne peut être utilement abordé qu'au niveau du secteur tout entier.

Les constats qui précèdent soulignent à quel point une évolution concertée- en profondeur de la convention est devenue nécessaire et conditionne la modernisation des organisations du travail et des rapports sociaux dans les entreprises de l'audiovisuel public. Pour de nombreuses raisons, cette évolution est inséparable du problème plus vaste de l'organisation de la couverture conventionnelle dans l'ensemble de l'audiovisuel.

Cette évolution devra, bien entendu, s'effectuer en étroite concertation avec les personnels concernés et leurs organisations syndicales.

* 69 La création de France Télévision Distribution correspond a cet objectif, mais la société ne se chargera des deux chaînes qu'à compter du 1er janvier 1995.

* 70 « L'audiovisuel au Canada : quels enseignements pour la France ? », rapport n° 301,24 mai 1995.

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