CHAPITRE III - LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE LA COMMISSION

À l'issue de l'examen des crédits de la fonction publique et des principaux éléments de la politique du Gouvernement, votre commission entend cette année faire trois observations.

En premier lieu, il semble impossible de mener une politique volontariste des dépenses publiques sans faire un réel effort de maîtrise des dépenses induites de la fonction publique. En outre, une telle remise en cause passe nécessairement par une réforme réelle de la gestion des ressources humaines. Enfin, les efforts effectués pour améliorer les outils de gestion des effectifs doivent être poursuivis.

I. FREINER LA DYNAMIQUE DES DÉPENSES INDUITES DE LA FONCTION PUBLIQUE

Compte tenu du poids des dépenses induites de la fonction publique dans le budget de l'État (environ 40 %), il semble clair en effet qu'il ne saurait y avoir de réduction des dépenses publiques, sans remise en cause de ces dépenses induites.

De ce point de vue, la politique mise en oeuvre par le Gouvernement apparaît contrastée.

Ainsi, la décision de ne pas augmenter les traitements de la fonction publique va assurément dans le bon sens. Comme le montrent les tableaux ci-dessous, l'augmentation du pouvoir d'achat des fonctionnaires, mesurée en termes de salaires moyens nets de prélèvements a été constamment supérieure à celle des salariés du secteur privé depuis 1992. Il n'est donc pas illégitime que les fonctionnaires participent à l'effort général de redressement. De même, l'alignement sur le droit commun des durées d'activité prises en compte pour le calcul des pensions de retraite va incontestablement dans le sens de l'équité.

Au demeurant, il est inexact de parler de "gel des salaires" dans la mesure où, indépendamment des mesures d'augmentation individuelles liées à l'avancement des personnels, les mesures catégorielles de revalorisation (accords Durafour) vont évidement continuer de poursuivre leurs effets en 1996, ce qui entraînera, mécaniquement, une augmentation de la "la feuille de paie" des fonctionnaires. Plus de 17 milliards de francs supplémentaires seront ainsi consacrés en 1996 à l'amélioration des rémunérations de fonctionnaires.

Les fonctionnaires ne sont ni des "nantis", ni des "privilégiés", mais, compte tenu de l'état de nos finances publiques, une pause de l'augmentation, en niveau, de leurs rémunérations s'imposait et, sur cet aspect, votre rapporteur ne peut être qu'en accord avec le Gouvernement.

En revanche, l'accroissement du nombre total des emplois budgétaires n'est pas un bon signal.

Il est vrai que le Gouvernement se trouve confronté, de la part de nos concitoyens, à une demande croissante de fonctionnaires. Ainsi, un récent sondage de mars 1995 montrait qu'à la question : "faut-il recruter de nouveaux fonctionnaires" ', 82 % des Français, donnaient une réponse positive. Un tel accord, au-delà des appartenances partisanes, mérite d'être souligné.

Les nouveaux défis de l'État, notamment dans les banlieues difficiles, ainsi que la demande croissante de services collectifs (éducation, santé...) expliquent sans doute cette réponse.

Mais en choisissant d'augmenter le nombre des fonctionnaires, sans revoir leur répartition, le Gouvernement n'a pas fait preuve du volontarisme que l'on était en droit d'attendre de lui au lendemain de l'élection présidentielle.

Ce problème de la répartition des fonctionnaires est en effet au coeur la maîtrise des coûts de fonctionnement de l'État. À cet égard, il convient de dissiper l'assimilation abusive trop souvent faite entre le poids de l'État et le nombre de ses agents. D'après les rares comparaisons internationales chiffrées dont on peut disposer, le nombre des fonctionnaires en France n'est pas beaucoup plus important que celui des nations voisines. Le problème n'est donc pas tant dans le nombre que dans la répartition. Or, de ce point de vue, la situation française est une exception : les deux tiers des employés publics sont fonctionnaires de l'État central contre un tiers seulement dans les autres pays. Leur répartition est souvent inefficace du fait des rigidités du statut de la fonction publique, mais aussi de l'absence de volonté politique réelle visant à faire évoluer la situation.

Est-il normal en effet que les effectifs de l'État aient continué à croître sur la période 1982-1992, alors que la décentralisation a donné des compétences de plus en plus importantes aux collectivités locales et que la construction européenne à ôté à certaines administrations centrales un certain nombre de leurs prérogatives traditionnelles ?

À cet égard, il est sans doute paradoxal de constater que de 1982 à 1992, le nombre des fonctionnaires du ministère des affaires sociales a diminué de 9,3 %, alors que les effectifs du ministère de l'agriculture sont restés identiques (en dépit d'une diminution du nombre de paysans) et ceux de la Culture de 72 %. Inversement, la diminution de 20 % des effectifs du ministère des Affaires étrangères peut surprendre, alors que le nombre de nos représentations diplomatiques s'est sensiblement accru. Enfin, il conviendrait de s'interroger également sur les disparités dans la durée du travail, qui existent entre ministères.

Pour ces raisons, la réforme de l'administration doit être, plus que jamais, inscrite à l'ordre du jour et votre rapporteur approuve l'action entreprise par le Gouvernement sur ce point.

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