N° 295

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 27 mars 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à l' adoption,

Par M. Luc DEJOIE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ. ) : 2251, 2449 et T.A. 449

Sénat : 173 et 298 (1995-1996).

Adoption.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunies conjointement le mercredi 20 mars 1996 sous la présidence de MM. Jacques Larché et Jean-Pierre Fourcade, les commissions des Lois et des Affaires sociales ont procédé à une matinée d'auditions sur la proposition de loi n° 173 (1995-1996) relative à l'adoption dont les rapporteurs sont, au nom de la commission des Lois, M. Luc Dejoie et, pour avis, au nom de la commission des Affaires sociales, M. Lucien Neuwirth.

M. Pierre Pascal, président du groupe de réflexion sur l'accès aux origines, a rappelé les conditions dans lesquelles Mme Simone Veil avait constitué un groupe de réflexion sur le secret des origines et insisté plus particulièrement sur les principales conclusions de son rapport, notamment la nécessité de doter d'un état-civil conforme à la réalité les enfants dont les parents ont réclamé l'anonymat, le recueil systématique, lors de l'accouchement, d'informations non identifiantes relatives aux parents et à l'enfant, l'ouverture de la possibilité pour ces parents de donner des informations permettant éventuellement leur identification, enfin l'organisation d'une procédure de médiation pour rapprocher ces enfants de leurs parents lorsqu'ils en manifestent le souhait de part et d'autre.

Mme Tondi, rapporteur du groupe de réflexion a dressé un tableau des pratiques contrastées des services départementaux d'aide sociale en matière de recueil et de communication d'informations relatives aux parents ayant demandé le secret des origines de leur enfant.

M. Gérard Cornu, professeur émérite à l'Université de Paris-II Panthéon-Assas, a observé que la proposition de loi ne modifiait pas la nature des deux formes d'adoption, simple et plénière, existant en droit français. Il a toutefois exprimé des réserves à l'égard d'une réduction excessive (de trois mois à six semaines) du délai de rétractation du consentement à l'adoption, de l'abaissement de l'âge minimum de l'adoptant célibataire et de l'élargissement de l'adoption des enfants du conjoint, avant de contester la transformation en adoption « complétive » de l'adoption simple qui ajoute à la filiation d'origine mais ne la complète pas. Il a par ailleurs écarté l'éventuelle subordination du prononcé de l'adoption à l'existence d'un agrément administratif. Enfin, il ne s'est pas déclaré hostile à la consécration dans le code civil de la jurisprudence de la Cour de cassation qui permet, sous condition du consentement éclairé de ses représentants, l'adoption de l'enfant étranger dont la loi nationale, souvent inspirée du droit coranique, ignore cette pratique.

M. Jean Benet, président de la Fédération des associations d'entraide de pupilles et anciens pupilles de l'État, a précisé qu'il était favorable au maintien de l'accouchement secret sous réserve qu'il n'interdise pas aux parents et aux enfants qui le souhaitent concomitamment d'accéder à des informations les concernant. Il a estimé qu'à cet égard, la proposition de loi constituait un recul par rapport aux pratiques actuelles de certains services sociaux. Il a suggéré qu'une instance nationale s'assure, le cas échéant, de la réalité de la volonté d'anonymat des parents et favorise, si les intéressés le souhaitent, l'échange d'informations lorsque l'enfant est devenu majeur.

Évoquant par ailleurs les modifications apportées par la proposition de loi, il a souhaité que la durée minimale de mariage exigée pour adopter reste fixée à cinq ans et qu'il soit bien précisé que le consentement éclairé des parents est nécessaire pour prononcer l'adoption d'un enfant étranger dont la loi nationale ignore cette procédure. Enfin, il a suggéré que l'acte de naissance de l'enfant remis avec demande de secret de l'identité des parents ne soit modifié sur aucun élément autre que cette identité.

Mme Housset, président de la Fédération des associations départementales des foyers adoptifs « Enfance et familles d'adoption », a approuvé la proposition de loi qui lui a semblé prendre largement en compte l'intérêt de l'enfant, avant d'insister sur l'importance de l'information préalable des adoptants et de l'agrément administratif dont le juge devrait vérifier qu'il a effectivement été accordé avant de prononcer l'adoption. Elle a également appelé de ses voeux la création d'une structure nationale centralisant les informations relatives aux enfants adoptables et aux personnes souhaitant adopter. Elle a par ailleurs suggéré que l'enfant étranger pupille de l'État acquière automatiquement la nationalité française, qu'en cas de deuxième remise de l'enfant en vue d'adoption, les parents n'aient plus la possibilité de rétracter leur consentement, enfin, que l'adoption internationale soit confortée par l'introduction d'une norme de conflit de lois dans le code civil.

Évoquant l'accès aux origines, elle a estimé que l'enfant devait pouvoir avoir connaissance de son passé afin de mieux construire son avenir, grâce aux informations non nominatives qu'il pourrait obtenir auprès de ses parents adoptifs, ou bien directement, une fois majeur, auprès des services sociaux.

***

Réunie sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission a examiné le rapport de M. Luc Dejoie le mercredi 27 mars 1996.

Elle a adopté vingt-neuf amendements sur le titre premier, s'en remettant à la commission des Affaires sociales pour les titres II à V qui constituent le volet social de la proposition de loi.

Elle a tout d'abord considéré que les assouplissements apportés aux conditions de l'adoption plénière pouvaient être retenus. En revanche, elle a supprimé la différence d'âge maximum entre l'adopté et l'adoptant introduite par l'Assemblée nationale (art. 3). Elle a par ailleurs admis que le délai de rétractation de la décision d'abandon, actuellement fixé à trois mois, pouvait être réduit à deux mois mais non à six semaines comme le souhaitait l'Assemblée nationale (art. 7 et 11).

S'agissant du prononcé de l'adoption, la commission a estimé qu'il n'était pas souhaitable de lier le pouvoir d'appréciation du juge en le subordonnant à la production de l'agrément pour adopter qui est une décision administrative (art. 14).

La commission a par ailleurs souhaité valoriser l'adoption simple, d'une part en lui conservant sa dénomination actuelle plutôt que celle d'adoption « complétive » retenue par l'Assemblée nationale qui laisse à penser que cette filiation compléterait la première alors qu'elle vient s'y ajouter, d'autre part en ne prorogeant pas la faculté de prononcer une adoption plénière au-delà de la majorité (art. 4-II), en limitant strictement les cas d'adoption plénière par le conjoint afin de préserver les liens avec la famille par le sang du parent prédécédé (art. 5), en admettant qu'une adoption simple puisse être prononcée sur une adoption plénière si le juge estime que c'est l'intérêt de l'enfant (art. 5 et add. avant l'art. 16), enfin en alignant sur le droit commun les obligations alimentaires de l'adopté (art. add. après l'art. 18).

La commission a par ailleurs admis, sous réserve de l'inscrire dans le code civil, que les parents qui remettent leur enfant aux fins d'adoption ne peuvent demander à conserver l'anonymat que si l'enfant est âgé de moins d'un an.

Elle a également admis, là encore sous réserve de le préciser dans le code civil, d'assortir la demande de secret de l'accouchement ou d'anonymat des parents de la faculté, pour les intéressés, de donner des informations sur eux-mêmes et sur l'enfant, à condition qu'elles ne permettent pas de les identifier. L'enfant pourra accéder à ces informations pendant sa minorité, avec l'accord de son représentant légal et sous réserve qu'il soit âgé de plus de treize ans, ou pendant sa majorité.

S'agissant de l'adoption internationale, la commission a préféré supprimer l'article 15 afin de ne pas heurter, dans le code civil, les principes du droit international privé à la veille de la ratification de la convention de La Haye et dans la mesure où la jurisprudence de la Cour de cassation permet de résoudre les difficultés liées à l'absence de législation sur l'adoption dans le pays d'origine de l'enfant dès lors que le représentant légal de celui-ci a consenti à son adoption en pleine connaissance de ses effets au regard de la loi française.

Enfin, elle a modifié les missions de l'autorité centrale pour l'adoption instituée par l'article 51 pour les étendre à l'adoption interne.

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner une proposition de loi relative à l'adoption examinée, en première lecture, par l'Assemblée nationale les 17 et 18 janvier 1996, à l'initiative de M. Jean-François Mattéi qui en fut l'initiateur, à l'issue de la remise au Premier ministre, en janvier 1995, de son rapport sur l'adoption 1 ( * ) , et le rapporteur au nom de la commission spéciale constituée aux fins de son examen.

Cette proposition de loi, qui tient compte de la prochaine ratification par la France de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, signée à La Haye le 29 mai 1993, modifie les codes civil, de la famille et de l'aide sociale, de la sécurité sociale et du travail afin, précise son auteur, « de rendre les conditions et les procédures d'adoption plus simples, plus sûres et plus justes ».

Votre commission des Lois, saisie au fond, a estimé préférable de déléguer à la commission des Affaires sociales, saisie pour avis, l'examen des dispositions du volet social de la proposition de loi :

- le titre II, relatif à la procédure administrative d'agrément des adoptants et au statut des organismes servant d'intermédiaires pour l'adoption,

- le titre III, qui détermine les prestations sociales et les aides susceptibles d'être accordées aux familles adoptantes,

- le titre IV, qui fixe les modalités d'application du congé parental en cas d'adoption et du congé d'adoption,

- et le titre V qui regroupe diverses dispositions.

Elle s'en remet donc, pour ces titres, aux propositions de la commission des Affaires sociales, sous réserve, bien entendu, qu'elles ne soient pas en contradiction avec les règles modifiées dans le code civil.

Votre commission des Lois se réserve toutefois d'examiner les articles 30 et 31 qui organisent le recueil, la conservation et la communication d'informations non-identifiantes relatives aux parents par le sang d'enfants adoptés avec demande de secret de l'accouchement ou de leur état civil.

De même, elle a souhaité examiner l'article 51 qui institue, en application de la convention de La Haye, une autorité centrale pour l'adoption.

I. LE RÉGIME JURIDIQUE DE L'ADOPTION

L'adoption est une institution qui n'existe que par la loi. Elle établit un lien juridique de filiation dans l'intérêt de l'enfant, le juge s'assurant qu'elle est effectivement conforme à cet intérêt (art. 353, al. 1 et art. 361 du code civil).

L'adoption est un acte privé soumis au contrôle juridictionnel du tribunal de grande instance, autrement dit il s'agit d'un acte de juridiction gracieuse mais à l'occasion duquel le juge exerce un contrôle de légalité et d'opportunité.

Après la première guerre mondiale, la législation française, qui connaissait cette institution de longue date, est intervenue à de nombreuses reprises (loi du 19 juin 1923, décret-loi du 29 juillet 1935, loi du 8 août 1941 instituant la légitimation adoptive, ordonnance du 23 décembre 1958), avant d'être stabilisée sous sa forme actuelle par la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 modifiée par la loi n° 76-1179 du 22 décembre 1976.

L'ensemble de la matière figure aujourd'hui dans le code civil (art. 343 à 370-2) qui distingue deux formes de filiation adoptive :

- l'adoption plénière, héritée de la légitimation adoptive introduite en 1941, qui est irrévocable et supprime tout lien entre l'adopté et sa famille par le sang ; ainsi que le précise l'article 358 du code civil : « l'adopté a, dans la famille de l'adoptant, les mêmes droits et les mêmes obligations qu'un enfant légitime. »

- l'adoption simple qui maintient ces liens et peut être rapportée pour « motifs graves ».

La loi met avant tout l'accent sur l'adoption plénière mais il convient de rappeler que celle-ci répond avant tout à la situation des jeunes enfants remis aux fins d'adoption, et qu'elle doit être écartée dès lors qu'il est dans l'intérêt de l'enfant de conserver des liens avec sa famille par le sang.

A. L'ADOPTION PLÉNIÈRE

1. Trois séries de conditions

a) Conditions tenant aux adoptants


Les adoptants doivent être soit deux époux, mariés depuis cinq ans au moins ou âgés de plus de trente ans, et non séparés de corps (art. 343), soit une seule personne, âgée de plus de trente ans, célibataire ou ayant l'accord de son conjoint (art. 343-1). La condition d'âge n'est pas exigée s'il s'agit de l'enfant du conjoint (art. 343-2).


• Le ou les adoptants doivent avoir quinze ans de plus que l'adopté (dix ans, voire moins sur dispense judiciaire, en cas d'adoption des enfants du conjoint (art. 344)).

b) Conditions tenant à l'adopté

L'enfant doit être âgé de moins de quinze ans. L'adoption plénière reste toutefois possible au-delà de cet âge lorsqu'il a été accueilli avant d'avoir atteint cet âge par des personnes ne remplissant pas alors les conditions légales pour adopter ou s'il a fait l'objet d'une adoption simple. S'il a plus de treize ans, l'enfant doit consentir à son adoption (art. 345).

L'adoption ne peut être prononcée que si l'enfant est accueilli au foyer des adoptants depuis au moins six mois (art. 345).

ï Enfin ne sont adoptables plénière ment que (art. 347) :

- les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont valablement consenti à leur adoption ;

- les pupilles de l'État, c'est-à-dire les enfants immatriculés comme tels par décision préfectorale après avoir été confiés au service de l'aide sociale à l'enfance ; il s'agit :

- des enfants trouvés, à l'égard desquels aucune filiation n'est légalement établie (accouchement anonyme) ou connue, et qui, depuis plus de trois mois, ont été recueillis par l'aide sociale,

- des enfants abandonnés, dont la filiation est connue et établie mais qui ont été abandonnés expressément au service de l'aide sociale depuis plus de trois mois par la personne ayant qualité pour consentir à leur adoption,

- des orphelins de père et de mère qui, n'ayant pas d'ascendant auquel on puisse recourir, n'ont aucun moyen d'existence,

- des enfants dont les parents ont été déchus de l'autorité parentale ;

- les enfants judiciairement déclarés abandonnés, recueillis par un particulier, une oeuvre privée ou un service d'aide sociale, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon.

2. L'acte d'adoption

L'adoption plénière emporte une rupture d'avec la famille par le sang, suivie d'une étape intermédiaire de placement en vue de l'adoption qui s'achève par un jugement d'adoption.

a) Rupture d'avec la famille d'origine

Mis à part le cas des pupilles de l'État, le code civil prévoit deux modes de rupture :


La rupture volontaire

Elle résulte du consentement des parents à l'adoption (et de l'accord de l'enfant s'il est âgé de plus de 13 ans) donné par acte authentique devant un notaire, au greffe du tribunal d'instance ou au service de l'aide sociale à l'enfance (art. 348-3 et s.).

Ce consentement est en principe donné en faveur d'un adoptant mais la loi permet aujourd'hui aux parents de laisser le choix de l'adoptant au service de l'aide sociale (art. 348-4).

QUELQUES CHIFFRES SUR L'ADOPTION

L'effectif des pupilles de l'État continue de décroître rapidement, mais, malgré cette décroissance, le nombre d'enfants placés en vue de l'adoption est stable.

Parmi les pupilles pour lesquels il n'existe pas de projet d'adoption, on constate que 3 % d'entre eux ont encore des liens familiaux, 31 % sont bien insérés dans leur famille d'accueil, 3 % n'ont encore le statut de pupille qu'à titre provisoire, 34 % ont des problèmes de santé ou un handicap, 6 % ont un âge trop avancé et 7 % une situation de fratrie.

S'agissant des enfants adoptés à l'étranger, les seules informations statistiques disponibles concernent le nombre de visas d'établissement définitif délivrés par le ministère des affaires étrangères pour ces enfants.

Par ailleurs, au 1er janvier 1993, 13 500 familles avaient effectué toutes les démarches et obtenu l'agrément nécessaire à l'adoption d'un enfant.

(1) Source JO Questions Sénat - 18 mai 1995. p. 1130

Dans tous les cas, le consentement peut être rétracté dans les trois mois, voire au-delà si l'enfant n'a pas fait l'objet d'un placement.

Les parents ne disposent pas du pouvoir absolu de refuser leur consentement. Le juge peut en effet estimer qu'un tel refus est abusif lorsque les parents se sont désintéressés de l'enfant au risque de compromettre sa santé et sa moralité (art. 348-6).


La déclaration judiciaire d'abandon

La décision judiciaire rend adoptable un enfant dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon (art. 347).

b) Placement en vue de l'adoption

L'enfant est remis aux futurs adoptants à l'issue du délai de rétractation (art. 351). Ce placement met obstacle à toute restitution de l'enfant à sa famille d'origine (art. 352). Il tient en échec toute reconnaissance ou toute déclaration de filiation (sauf si le tribunal refuse de prononcer l'adoption).

c) Jugement d'adoption

Le TGI contrôle la légalité de l'adoption et apprécie son opportunité au regard de l'intérêt de l'enfant. La demande est formée par requête ; l'affaire est instruite et débattue en chambre du conseil et le ministère public consulté.

Le jugement n'est pas motivé. Il est susceptible d'appel par le ministère public. La tierce opposition n'est recevable qu'en cas de dol ou de fraude imputable aux adoptants (art. 353-1).

À la requête du ministère public, la décision prononçant l'adoption plénière est transcrite sur les registres de l'état civil du lieu de naissance de l'adopté. Cette transcription tient lieu d'acte de naissance à l'intéressé mais elle ne contient aucune indication relative à sa filiation réelle (art. 354).

3. Les effets de l'adoption plénière

L'adoption plénière confère à l'enfant une filiation qui se substitue à sa filiation d'origine à compter de la date de dépôt de la requête en adoption (art. 356).

Elle est irrévocable. Les vices qui auraient entaché le consentement sont purgés par le jugement d'adoption qui, bien qu'étant un acte de juridiction gracieuse, a autorité de chose jugée sur tous les points que la loi soumet à son contrôle.

a) Statut familial de l'adopté


La rupture des liens avec la famille par le sang

L'enfant perd tous ses droits à l'égard de sa famille d'origine et se trouve affranchi de toute obligation à son égard, tant dans l'ordre des rapports personnels que des rapports pécuniaires. Entre sa famille d'origine et lui, ne subsistent ni vocation successorale ni vocation alimentaire.

Au lien qui tient au sang demeurent seulement attachés l'interdit de l'inceste ainsi que l'empêchement de parenté et d'alliance qui fait obstacle au mariage (art. 356).


L'intégration à la famille adoptive

L'enfant adoptif est pleinement assimilé à un enfant légitime. Il acquiert, dans la famille de l'adoptant, les mêmes droits et les mêmes obligations qu'un enfant légitime.

L'assimilation est absolue dans les rapports patrimoniaux comme dans les rapports extrapatrimoniaux : obligation parentale d'entretien, vocation successorale et alimentaire réciproque.

L'enfant bénéficie d'une intégration familiale dans toutes ses ramifications de parenté. De là naissent entre l'enfant et les ascendants de l'adopté la vocation alimentaire et la vocation successorale réservataire.

b) État-civil de l'adopté

L'adoption confère à l'enfant le nom de l'adoptant (du mari en cas d'adoption par deux époux).

À la demande de l'adoptant, le tribunal peut modifier les prénoms de l'enfant (art. 357).

L'acte de naissance originaire est annulé après avoir été revêtu, à la diligence du procureur de la République, de la mention « adoption » (art. 354). Un nouvel acte de naissance est établi par transcription du jugement d'adoption sur les registres de l'état civil. Les extraits sont délivrés à partir de cette transcription : jour, heure et lieu de naissance, sexe et prénoms résultant du jugement, nom et prénoms des adoptants. La transcription ne contient aucune indication relative à la filiation biologique de l'enfant.

* 1 Enfant d'ici, enfant d'ailleurs - L'adoption sans frontière - La Documentation française, 1995.

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