N° 327

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SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 avril 1996

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l' approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume de Norvège portant sur le transport par gazoduc de gaz du plateau continental norvégien et d'autres secteurs vers la France ,

Par M. Maurice LOMBARD,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, vice-présidents ; Mme Danielle Bidard-Reydet, Michel Alloncle, Jacques Genton, Jean-Luc Mélenchon, secrétaires ; Nicolas About, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Mme Monique ben Guiga, MM. Daniel Bernardet, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Bertrand Delanoë, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Gérard Gaud, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Yves Guéna, Jacques Habert, Marcel Henry, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Jean-Pierre Raffarin, Michel Rocard, André Rouvière, Robert-Paul Vigouroux, Serge Vinçon.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le 27 mars 1995, un accord a été signé entre la France et la Norvège visant le transport par gazoduc du gaz du plateau continental norvégien vers la France.

Cet accord, en consacrant un partenariat de plus en plus étroit entre la Norvège et la France quant à la fourniture de gaz, s'inscrit également dans la politique de diversification de nos approvisionnements.

Par ailleurs, concrètement, l'établissement de cette liaison directe entre le producteur norvégien et le consommateur français est la garantie d'un coût optimal.

Votre rapporteur se propose d'indiquer les grandes lignes du projet technique ainsi que les principales dispositions de l'accord qui entourent sa réalisation et son exploitation.

I. L'INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU PROJET

A. UN PROJET QUI S'INSCRIT DANS LE SOUCI DE DIVERSIFICATIONS DE NOTRE APPROVISIONNEMENT ÉNERGÉTIQUE

1. Le bilan énergétique français aujourd'hui

Cet accord s'inscrit dans la politique française de diversification de sources d'énergie, engagée, tant pour des raisons de sécurité d'approvisionnement que dans une perspective de réduction des coûts.

Il faut rappeler que notre production nationale d'énergie primaire s'élevait en 1994 à 113,7 Mtep, 4,7 % provenaient du charbon (5,5 Mtep), 3 % du pétrole (3,4 Mtep), 2,6 % du gaz (2,9 Mtep) et 3,7 % des énergies renouvelables (4,2 Mtep).

L'essentiel concerne l'électricité primaire : 15,8 % soit 18 Mtep proviennent de l'électricité hydraulique et 70,2 % d'origine nucléaire (79,8 Mtep). Notre taux d'indépendance énergétique a atteint 51,6 % en 1994, soit le meilleur résultat de ces 25 dernières années, en grande partie du fait de la montée en charge du programme électronucléaire.

S'agissant plus spécifiquement du gaz, nos ressources sont assurées à 90 % par les importations (26,6 Mtep en 1994). Nos principaux fournisseurs sont les suivants :

Russie

11,9 milliards de m 3

Norvège

8,2 milliards de m 3

Algérie

7,7 milliards de m 3

Pays-Bas

5 milliards de m 3

2. La Norvège, premier fournisseur de gaz en Europe

Depuis la signature, en 1986, des "accords de Troll", la Norvège est devenue le plus important fournisseur de gaz à destination de l'Europe. En effet, la Norvège s'est engagée, par ces accords, à livrer à ses partenaires européens 45 milliards de m 3 standards par an. L'accord initial a été élargi à deux reprises : en 1994 avec les sociétés Verbundnetz Gaz (VNG), Mobil Allemagne (MEEG) et enfin Gaz de France. A cette occasion, il fut convenu d'acheter 9 milliards de m 3 standards supplémentaires, par an, à la Norvège. Enfin, en 1995, Gaz de France s'est engagé à acquérir 2 milliards de m 3 standards de plus par an.

L'ampleur des volumes à acheminer vers le continent, à compter de 1996, justifie qu'aient été étudiées des modalités complémentaires et nouvelles de transport. A ce jour, en effet, 3 gazoducs existent à partir des puits norvégiens de Troll et Sleipner : Statpipe qui aboutit à Emden (RFA), Europipe à Dornum (RFA) et Zeepipe jusqu'à Zeebrugge (Belgique). Enfin Frigg transport relie les gisements de la zone Frigg à St Fergus en Ecosse.

Il convenait donc qu'un nouveau gazoduc permette de respecter, à partir de 1998, les engagements pris.

C'est pourquoi le dernier accord conclu en 1995 avec Gaz de France a prévu la construction de ce quatrième gazoduc.

B. LES CARACTÉRISTIQUES DU PROJET

1. Le tracé du nouveau gazoduc

Le nouvel ouvrage partira de la plate-forme 16/11 E ou de la zone « Sleipner » et aboutira, 860 km plus loin, à Dunkerque. Il traversera successivement les espaces maritimes norvégiens (sur 271 km), danois (22 km), allemand (18 km), néerlandais (467 km), belge (53 km) et français (29 km). Sa durée d'existence est prévue pour 70 ans.

Sur un plan plus technique, il convient de préciser que ce gazoduc sous-marin sera une conduite d'acier, protégée d'abord par un revêtement anticorrosif, et enrobée ensuite d'une gaine de béton de 80 à 100 mm d'épaisseur. La pose de l'ouvrage sera opérée à partir de barges spécialisées, et son itinéraire lui fera croiser deux oléoducs existants et 13 câbles. La capacité annuelle en sera de 12 milliards de m 3 standards.

2. Les installations d'atterrage à Dunkerque

Le gazoduc arrivera dans la zone industrielle du port autonome de Dunkerque, sur la commune de Loon-Plage. A l'extrémité du gazoduc sera d'abord construite une "station d'atterrage" équipée de dispositifs d'isolement ; puis une canalisation aboutira à la station de réception du gaz proprement dite.

Conçue sur le même modèle que la station déjà existante à Zeebrugge, sa capacité sera de 40 millions de m 3 standards par 24 heures, extensible à 60 millions de m 3 si nécessaire. Elle comportera une station de comptage fiscal, destinée à vérifier les quantités et la qualité du gaz. Cette station sera contrôlée et gérée en coopération avec Gaz de France.

C. LE MONTAGE JURIDIQUE ET FINANCIER

1. Le gazoduc Norfra

Le gazoduc Norfra sera la propriété de onze sociétés, toutes norvégiennes, réunies par un contrat de partenariat (joint ventures).

2. Le terminal de régulation et de réception

Située sur le territoire de la commune de Loon-Plage, cette station sera détenue par la société de droit norvégien Dunkerque terminal (DTDA), propriétaire du terminal et chargée de sa construction et de son exploitation, au sein de laquelle Gaz de France détiendra 35% du capital.

Le tableau suivant détaille la répartition des participations pour le gazoduc, d'une part, et le terminal de réception, d'autre part.

A terme, les participations des sociétés présentes au capital DTDA et NORFRA pourraient être revues par l'opérateur norvégien, afin de créer un joint-venture unique pour la gestion des quatre gazoducs vers l'Europe Statpipe, Europipe, Zeepipe et Norfra.

D. CALENDRIER ET COÛT DES TRAVAUX

1. Le gazoduc Norfra

Le coût total des travaux est estimé à 7,2 milliards de francs, dont 0,9 milliard pour la partie française.

Le calendrier prévisionnel des travaux est le suivant :

- avril 1996-février 1997 : obtention des décisions administratives.

- mai 1997-septembre 1997 : préparation du fond marin -dont déminage- et du site d'atterrage.

- septembre 1997-juin 1998 : travaux de construction du site d'atterrage.

- mars 1997-novembre 1997, puis mars 1998-juin 1998 : pose de la canalisation terrestre.

Mise en service : juin 1998.

2. Terminal de réception

Le coût prévisionnel est estimé à 400 MF

Décembre 1995-septembre 1996 : obtention des autorisations administratives.

Mars 1996-septembre 1996 : préparation de la plate-forme

Septembre 1996-juin 1998 : travaux de construction du terminal.

Mise en service : juin 1998.

3. La construction connexe d'une conduite en territoire français

Pour recevoir et acheminer le gaz transporté par Norfra, il a été nécessaire de réaliser une interconnexion avec le réseau national de transport de gaz, par une liaison directe avec l'Artère du Nord, exploitée par Gaz de France, au niveau du stockage souterrain de Gournay sur Aronde, sur le territoire de la commune de Cuvilly (Oise).

Le dossier est en cours d'instruction. Il prévoit la construction et l'exploitation d'une canalisation reliant Loon-Plage à Cuvilly, dénommée Artère des Hauts de France . D'une longueur de 185 km et d'un diamètre de 1 100 mm, sa réalisation a fait l'objet d'une enquête publique menée pendant un mois (16 octobre-17 novembre 1995- dans les quatre départements traversés (Nord, Pas-de-Calais, Somme et Oise). La publication de l'arrêté ministériel portant déclaration d'utilité publique est prévue pour le mois de juin prochain.

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