2. Les modalités de la privatisation

Il convient, ici aussi, de rappeler le droit applicable avant d'examiner la procédure suivie.

a) Le droit applicable

En application de l'article 4 de la loi du 6 août 1986 précitée 5 ( * ) , il existe deux sortes de privatisation :

- la privatisation par recours au marché qui peut être effectuée soit directement, par voie d'offre publique de vente sur le marché boursier, soit par l'intermédiaire d'un syndicat bancaire chargé de placer les titres auprès du public ;

- la privatisation de gré à gré 6 ( * ) .

On notera, accessoirement, que le gouvernement a parfois utilisé ces deux procédures de façon simultanée afin de s'assurer de la constitution de groupes d'actionnaires stables dans le cas de sociétés privatisées essentiellement selon la procédure de marché 7 ( * ) .

On notera également que, dans tous les cas, la Commission de la privatisation est amenée à déterminer la valeur de l'entreprise (article 3 1° de la loi du 6 août 1986 précitée).

La procédure applicable aux privatisations de gré à gré a été précisée par l'article premier du décret n° 93-1041 du 3 septembre 1993, (modifié par le décret n° 95-947 du 25 août 1995) qui prévoit deux cas de figure :

- les cessions de participations minoritaires d'entreprises publiques, dans le cadre d'un accord de coopération industrielle, commerciale ou financière 8 ( * ) .

- les "autres cas", c'est à dire les cessions de participations majoritaires ou de la totalité du capital.

Le second alinéa du 2° de l'article premier du décret du 3 septembre 1993 précité prévoit alors que le choix du ou des acquéreurs, en fonction des offres et des garanties apportées, et les conditions de la cession sont fixés sur avis conforme de la Commission de privatisation.

La décision de vente ou d'échange de gré à gré des titres ou droits des entreprises publiques fait l'objet d'une publicité assurée par une insertion dans le Journal officiel.

Jusqu'en 1995, le décret d'application ne prévoyait, en dehors du cas particulier des accords industriels, qu'une seule procédure comportant un appel d'offres. Le décret du 25 août 1995 a utilisé la possibilité ouverte par la loi de prévoir une procédure sans appel d'offres. Il existe donc désormais deux procédures :

(1) La procédure avec cahier des charges

C'est la procédure dite avec "appel d'offres". Celui-ci est publié sous forme d'avis au Journal officiel et indique, en même temps que la décision de procéder à la vente de gré à gré, le lieu où les acquéreurs pourront retirer le cahier des charges (généralement le ministère de l'économie et des finances) et le délai dont ils disposent (au minimum quinze jours) pour déposer leurs offres d'achat. Le contenu de ce cahier des charges n'est donc pas rendu public et même s'il peut être retiré par tout intéressé, le grand public n'en a pas connaissance.

Aucun texte ne fixe ce que doit contenir un tel cahier des charges ; il peut donc soit comporter des conditions précises, soit se borner à demander aux candidats de répondre à différentes questions.

Cette procédure a été utilisée pour la constitution des groupes d'actionnaires stables et pour un certain nombre de privatisations de pur gré à gré comme celles de la Compagnie Générale Maritime, la Banque Laydernier ou le CIC.

(2) La procédure sans cahier des charges

Dans ce cas, il n'y a pas publication de l'appel d'offres, ce qui ne signifie nullement qu'il n'y a pas mise en concurrence. Le ministre chargé de l'économie "désigne une personnalité indépendante dont le nom est rendu public et qui établit un rapport portant sur les conditions et le déroulement de l'opération ; ce rapport est remis au ministre et à la commission de la privatisation." (article premier du décret du 3 septembre 1993 précité).

Comme dans le cas précédent, la décision doit être publiée au Journal officiel sous forme d'avis, mais cet avis ne fait qu'indiquer le nom de la personnalité indépendante retenue pour établir le rapport sur les conditions et le déroulement de l'opération.

Cette procédure a été utilisée à trois reprises, dans le cas de la Banque française du commerce extérieur (B.F.C.E.) (décret n° 95-1280 du 12 décembre 1995, avis relatif à la privatisation de gré à gré du 13 décembre 1995, avis de la Commission de la privatisation du 23 janvier 1996 et arrêté du 25 janvier 1996 autorisant la cession), la Société française de production et de création audiovisuelle (S.F.P.) (décret n° 96-637 du 16 juillet 1996) et la Compagnie française de navigation rhénane (C.F.N.R.) (décret n° 96-657 du 24 juillet 1996, avis relatif à la privatisation de gré à gré du 25 juillet 1996, avis de la Commission de la privatisation du 5 novembre 1996 et arrêté du 8 novembre 1996). Pour l'instant, seule la privatisation de la SFP n'a pas été achevée.

Les étapes juridiques d'une opération de privatisation de gré à gré sans cahier des charges sont les suivantes :

- décret de privatisation ;

- avis du Gouvernement relatif à la privatisation de gré à gré publié au Journal officiel indiquant le nom de la personnalité indépendante chargée d'établir un rapport ;

- avis de la Commission de la privatisation, cet avis doit être conforme au choix du gouvernement concernant l'acquéreur et à la valeur retenue pour la cession, à défaut la procédure s'interrompt ;

- arrêté fixant les modalités du transfert.

Les cessions de participations de gré à gré

1. Les cessions de participations minoritaires dans le cadre d'un accord de coopération industrielle, commerciale ou financière.

2. La privatisation par appel d'offres avec cahier des charges.

3. La privatisation sans cahier des charges.

* 5 Cet article dispose que :

"Les cessions ou échanges de titres, les ventes de droits préférentiels ou les renonciations à de tels droits sont réalisés suivant les procédures du marché financier.

"Toutefois, le ministre chargé de l'économie peut décider de faire appel à des acquéreurs hors marché (opérations de gré à gré). Le choix du ou des acquéreurs et les conditions de cession sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie, sur avis conforme de la commission de la privatisation. Un décret en Conseil d'Etat fixe notamment les règles de publicité auxquelles sont subordonnées ces décisions et les cas dans lesquels il est recouru à un appel d'offres."

* 6 Sur les privatisations de gré à gré, voir l'article de Philippe Rousseau dans "L'AGEFI" du 13 novembre 1996.

* 7 Relèvent de cette catégorie la privatisation d'Usinor-Sacilor (arrêté du 26 juin 1996) ou celle de la Société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (arrêté du 6 février 1995).

* 8 L'avis conforme de la Commission de la privatisation est alors exigé sur le choix du ou des acquéreurs et sur les conditions de la cession. Les objectifs de l'accord et l'identité du ou des nouveaux actionnaires font l'objet d'une publication au Journal officiel et l'approbation ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de cette publication. C'est la procédure qui a été utilisée pour l'entrée de Volvo dans le capital de Renault.

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