EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 octobre 1997 ous la présidence de M. Christian Poncelet, président , la commission a procédé à l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports, du logement et du tourisme consacrés au transport aérien et à la météorologie et à celui du projet de budget annexe de l'aviation civile pour 1998, sur le rapport de M. Yvon Collin, rapporteur spécial.

S'agissant des crédits du transport aérien, M. Yvon Collin a indiqué qu'ils étaient stables par rapport à 1997 et ne représentaient qu'un peu plus de la moitié du montant atteint en 1995.

Ayant souligné que les crédits de transport aérien du ministère de l'équipement, hors subvention au budget annexe de l'aviation civile, étaient pour l'essentiel des crédits de soutien à la construction aéronautique civile et que leur examen pouvait être conduit, à la lumière du rapport récemment adopté par la commission sur l'aide publique à l'industrie aéronautique civile, il a rappelé les conclusions essentielles de ce rapport :

· la mise en évidence que le chiffre d'affaires prévisible du secteur aéronautique s'élèverait pour les vingt ans à venir à 1.100 milliards de dollars ;

· le constat de l'extrême concurrence sur un marché où les soutiens publics influent beaucoup sur le succès ou l'échec des compétiteurs ;

· le regret d'une certaine inadéquation de notre système d'aides, tant en volume que du fait de ses mécanismes.

Il a donc jugé que la baisse des crédits de recherche-amont, observable dans le budget 1998, paraissait injustifiable compte tenu de la nécessité de poursuivre un effort soutenu en ce domaine pour rester dans la course imposée par la concurrence.

Ayant observé que les crédits d'avances remboursables progressaient, il a considéré que leur niveau ne manifestait en rien une réelle volonté de contrer Boeing sur le terrain de sa domination commerciale du marché, à savoir son segment haut, celui des 747.

Il a alors estimé que de ce fait, le projet de budget lui paraissait décevant soulignant que les industriels dont les résultats commençaient à peine à se redresser supporteraient en 1998 des remboursements d'avances supérieurs à ce qui leur serait octroyé, le solde atteignant près de 1,6 milliard de francs au profit de l'Etat.

S'agissant des crédits de la météorologie, M. Yvon Collin a précisé qu'il s'agissait, depuis la transformation opérée en 1993, de verser des subventions à un établissement public administratif, Météo France, et que celles-ci seraient stabilisées à 1,16 milliard de francs en 1998.

Il a considéré que ce niveau de subventionnement paraissait compatible avec un maintien de l'activité et des programmes, observant que la dépense publique en faveur de Météo France s'établissait à un niveau élevé. Il a dit son intention d'en exercer un contrôle approfondi afin de vérifier que le niveau des crédits était bien justifié au regard des potentialités de développement des ressources propres de l'établissement.

Passant à l'examen du budget annexe de l'aviation civile, le rapporteur spécial a rappelé qu'il recouvrait des actions de prestations de services, en particulier dans le domaine de la navigation aérienne et des actions administratives d'ordre régalien.

Il a indiqué que le montant des crédits s'élèverait à près de 8,5 milliards de francs, en hausse de 5,9 % par rapport à 1997, que la section d'exploitation s'élèverait à 73,5 % de l'ensemble des dépenses et que les charges de personnel, d'un montant de près de 4 milliards de francs, absorberaient ainsi environ 47,1 % des dépenses totales et 64 % des seules dépenses d'exploitation.

Précisant que les effectifs s'élèveraient à 10.371 personnes en 1998, soit une croissance nette de 106 emplois par rapport à 1997, il a relevé que l'essentiel de cette augmentation provenait de la création nette de 147 emplois au bénéfice de la navigation aérienne.

Ajoutant que par rapport à 1997, l'accroissement des charges de personnel se monterait à 6 % et que la progression de la seule masse salariale serait encore plus soutenue avec une augmentation de près de 7 %, il a souligné que les trois-quarts de cet accroissement résulteraient de l'amélioration de la situation individuelle des agents, le reste venant de l'augmentation des effectifs.

Il a constaté que les dépenses en capital s'accroîtraient elles aussi fortement de + 7,4 %, la progression des dépenses d'amortissement étant particulièrement marquée avec + 17,6 %, les crédits d'études et d'équipements, s'accroissant quant à eux de 5,8 %, pour atteindre le niveau élevé de 1.904,2 millions de francs.

Il a alors jugé que la progression des crédits du budget annexe de l'aviation civile pouvait apparaître excessive dans un contexte financier de rigueur marqué par les efforts de productivité très contraignants entrepris par les usagers des services rendus par l'administration de l'aviation civile.

Observant que l'évolution de la masse salariale était de ce point de vue emblématique, il a concédé qu'elle résultait essentiellement d'un protocole triennal signé en novembre 1994 dont, à plusieurs reprises, avaient été dénoncés les excès. Remarquant que, lors de la discussion du budget en séance publique, l'année dernière, Mme le ministre chargée du transport aérien avait considéré que ce protocole avait permis de maintenir la paix sociale, il en a conclu que, dans ces conditions, nul ne s'étonnerait qu'un nouveau protocole soit en cours de négociation, que celui-ci s'accompagne de dépôts réitérés de préavis de grève de la part des contrôleurs aériens et que ses résultats, à ce jour inconnus, se traduisent par la poursuite d'une forte augmentation des charges du budget annexe. Il a alors ajouté que les crédits budgétaires pour 1998 pourraient ne pas suffire à financer ces nouvelles charges.

Il a enfin souligné que si l'effort d'investissement consenti en matière de navigation aérienne posait aux yeux de certains des problèmes de cohérence et d'efficience, celui consacré à améliorer la sûreté aéroportuaire peinait à trouver le rythme nécessaire à une action efficace en ce domaine.

Puis M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a fait remarquer que la structure de financement du budget annexe se déformait, la part des recettes d'exploitation -les redevances- se repliant alors que le produit de la fiscalité affectée au budget annexe progressait, dans un contexte où la subvention accordée à ce budget par le budget général tendait vers zéro.

Il a considéré que l'accroissement de la fiscalité affectée au budget annexe posait un vrai problème constitutionnel, car la taxe de sécurité et de sûreté, désormais deuxième ressource de ce budget annexe, ne pouvait être considérée comme une de ces recettes d'exploitation qui seules, avec les ressources spéciales affectées à la couverture des investissements, ont vocation, selon l'article 21 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, à figurer parmi les recettes d'un budget annexe.

Il a indiqué que cette difficulté était d'une ampleur toute particulière du fait de la progression considérable du produit de la taxe sous l'effet d'un accroissement continu de ses taux que le projet de loi de finances pour 1998 entendait poursuivre en son article 20.

Il a alors rappelé que pour résoudre ces difficultés, il avait suggéré, au nom de la commission, une solution alternative consistant dans la création d'un compte spécial du Trésor chargé de retracer les efforts nécessaires pour améliorer la sûreté aéroportuaire.

Il a ajouté que cette initiative aurait, au demeurant, le mérite de sanctuariser un programme de sûreté dont la réalisation souffrait du fait du détournement de ses moyens à d'autres fins.

Il a précisé que les recettes du compte proviendraient d'une taxe de sécurité et de sûreté allégée par rapport à son niveau actuel, les ressources complémentaires qui seraient nécessaires devant manifester l'attachement de la collectivité nationale à assurer un haut degré de sûreté dans un secteur où le terrorisme avait toujours su trouver des cibles privilégiées.

Il a conclu qu'ainsi le désengagement financier de l'Etat ne succéderait pas à son désengagement opérationnel qu'il fallait bien constater, et qu'à titre personnel, il déplorait.

Revenant sur le financement du budget annexe, il a formulé une observation estimant que le système des redevances de navigation aérienne était excessivement complexe et débouchait sur une impasse de financement.

La complexité des redevances, a-t-il rappelé, a débouché sur une multitude d'incompréhensions et de contentieux.

C'est pourquoi, a-t-il indiqué, la commission avait amendé avec succès le projet de loi de finances pour 1996 en demandant qu'un rapport présentant dans le détail la comptabilité analytique de la direction générale de l'aviation civile fût élaboré pour que chacun soit en mesure de distinguer le coût des prestations dont les redevances forment la contrepartie du coût des autres missions de la direction générale de l'aviation civile.

Se félicitant que, grâce à cette initiative, les parties en présence disposent désormais d'un outil de référence à partir duquel peut s'engager un dialogue fructueux, il a jugé qu'une fois la clarification faite sur le système des redevances, un problème substantiel demeurait : l'insuffisance de leur produit pour couvrir les crédits budgétés de navigation aérienne.

Il en a déduit qu'il fallait donc, pour financer ceux-ci, recourir à l'emprunt, ce qui était de nature à obérer l'équilibre du budget annexe et rendait nécessaire l'alourdissement de la fiscalité affectée à lui afin de financer les autres missions de la direction générale de l'aviation civile.

Il a conclu que deux écueils découlaient de cette situation :

· d'une part, l'apparition d'une dynamique dangereuse des charges financières supportées par le budget annexe qui, à terme, pèseraient très lourdement sur les usagers ;

· et, d'autre part, l'apparition d'une véritable fracture, et non plus d'une entorse, au principe de non affectation des recettes fiscales.

Il a alors estimé qu'il n'y avait guère d'autres moyens d'apporter une solution à ces problèmes que d'envisager une profonde réforme des conditions de tarification des prestations de navigation aérienne, jugeant que celle-ci supposerait sans doute une réforme institutionnelle.

Un large débat s'est alors ouvert.

Mme Maryse Bergé-Lavigne a salué le travail du rapporteur spécial tout en indiquant toutefois que le niveau des crédits de soutien à la construction aéronautique lui paraissait traduire une politique suffisamment volontariste de la part de l'Etat.

Concédant que le développement de l'A3XX était nécessaire, elle a mis en lumière l'ampleur des coûts du projet et jugé que sa réalisation supposait la transformation d'Airbus en une société de plein exercice à même d'emprunter pour mener à leur terme des projets de cette envergure.

Ajoutant que l'ampleur des remboursements des industriels en 1998 était le reflet des avances accordées à eux dans le passé, elle s'est interrogée sur l'adaptation du système des avances remboursables à la française dans un contexte où nos concurrents s'affranchissent de ses rigueurs.

M. René Régnault s'est voulu l'interprète des usagers du transports aérien en déplorant la constance des retards subis par eux et a souhaité obtenir des explications de la part des responsables.

M. François Trucy a confirmé l'irritation des usagers et s'est inquiété de la dérive constatée sur le poste endettement du budget annexe.

En réponse aux intervenants, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a, tout d'abord, indiqué que le coût de l'A 3 XX était estimé à quelque 50 milliards de francs par le GIE Airbus et que, compte tenu de la part des droits d'Aérospatiale dans Airbus, les coûts de l'A 3 XX pour Aérospatiale seraient de l'ordre de 20 milliards de francs .

Il a alors rappelé que comme l'Etat ne pouvait apporter un soutien de plus du tiers du coût du programme, le coût supporté par lui pour l'A 3 XX ne dépasserait pas 6,5 milliards de francs

Il en a conclu que si le programme se réalisait sur quatre ans, cela représenterait 1,6 milliard par an et observé que la somme que verserait Aérospatiale en 1998 à l'Etat du fait du remboursement d'avances antérieures s'élèverait à 2 milliards de francs.

Il a jugé que compte tenu des enjeux du développement d'un concurrent au 747, 25 % du marché et un élément de concurrence par les prix sur le reste du marché, il fallait lancer l'A3 XX et qu'il s'agirait là d'un investissement public pertinent.

Il a enfin indiqué que les retards nuisaient beaucoup à l'image du transport aérien surtout dans le cas des vols court-courrier. Il a rappelé qu'une infinité de causes pouvait être isolées et souhaité que chacun contribue à résorber celles qui lui sont imputables.

La commission a alors décidé de réserver son vote sur les crédits du transport aérien et de la météorologie, ainsi que sur le budget annexe de l'aviation civile jusqu'après l'audition du ministre de l'équipement, des transports et du logement, prévue pour le 6 novembre 1997.

Réunie le mercredi 12 novembre 1997 sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission, ayant, sur proposition de M. Alain Lambert, rapporteur général, adopté deux amendements de réduction des crédits respectivement de la section 4 et de la section 5 du budget du ministère de l'équipement, des transports, du logement et du tourisme, a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits desdites sections et du budget annexe de l'aviation civile pour 1998.

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