III. L'ETAT D'AVANCEMENT DES NÉGOCIATIONS PLURILATÉRALES

A. UN BILAN PLUTÔT POSITIF DE LA PREMIÈRE CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE DE L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE (OMC)

L'OMC a organisé, à Singapour les 9 et 13 décembre 1996, sa première conférence ministérielle, dont le bilan s'avère plutôt positif.

1. Les engagements de Marrakech ont été clairement réaffirmés

Alors que de fortes pressions avaient été exercées pour rouvrir prématurément les accords sur l'agriculture et les textiles, les ministres ont affirmé de nouveau très clairement que les disciplines et les calendriers agréés à Marrakech en 1994 étaient intangibles. Ont ainsi été écartées les tentatives d'origine australienne et argentine pour réouvrir le dossier agricole.

De façon plus générale, il faut souligner que les ministres ont réaffirmé la primauté du système multilatéral et l'obligation d'en respecter les règles, en particulier vis à vis des accords préférentiels régionaux.

2. Les ministres ont adopté un texte commun sur les normes sociales fondamentales

Ce texte affirme la volonté de respecter les normes sociales fondamentales, rappelle le rôle de l'Organisation internationale du travail (OIT) en la matière et écarte le recours à des mesures protectionnistes. Enfin, il invite les secrétariats de l'OMC et de l'OIT à collaborer. Politiquement, ce message est important : pour la première fois depuis la création du GATT en 1948, les ministres ont pu se mettre d'accord sur un texte relatif aux normes sociales, en dépit de l'opposition initiale de la quasi totalité des pays en développement.

Il faut cependant regretter que, contrairement à ce que la France souhaitait initialement, les ministres n'aient pas décidé la création d'un groupe de travail sur ce sujet. En dépit de l'opposition des pays en développement, la déclaration permet toutefois de poursuivre les débats à l'OMC.

3. L'OMC peut commencer à travailler sur les nouveaux sujets commerciaux

Une très grande partie des débats de la conférence a été consacrée aux nouveaux sujets : investissements, concurrence, marchés publics. Les décisions suivantes ont été prises à l'issue de discussions très difficiles opposant l'Union européenne et les Etats-Unis à certains pays en développement :

- création d'un groupe de travail sur la relation entre commerce et investissement ;

- création d'un groupe de travail sur les relations entre commerce et politique de la concurrence, le Conseil général de l'OMC devant décider s'il convient de passer à des négociations à l'issue de deux ans d'étude ;

- création d'un groupe d'étude sur la transparence en matière de marchés publics, qui pourrait éventuellement conduire à une négociation sur le sujet. Ce groupe a un champ d'étude limité, puisqu'il ne porte ni sur les voies de recours ni sur les règles de préférence nationale pourtant très nombreuses s'agissant des marchés publics ;

- enfin, des travaux auront lieu sur la " simplification " des procédures commerciales, qui pourront eux aussi déboucher sur des négociations.

Si l'Union européenne -et la France en particulier- n'ont pas réussi, comme elles le souhaitaient, à lancer dès Singapour des négociations, les décisions prises garantissent néanmoins que l'OMC élargit ses centres d'intérêt et peut démarrer des travaux susceptibles d'engendrer de nouvelles disciplines dans des domaines où nos intérêts offensifs sont prédominants.

4. Le fonctionnement de l'Union européenne s'est avéré satisfaisant

Un autre sujet de satisfaction réside dans le fait que le fonctionnement de l'Union européenne à l'occasion de la réunion de Singapour s'est révélé satisfaisant, alors que la négociation d'Uruguay avait laissé de mauvais souvenirs quant au fonctionnement des institutions communautaires, la Commission ayant eu tendance à s'écarter des directives des Etats membres : d'une part, la Commission a été dotée de mandats précis par le Conseil, l'un portant sur l'OMC et l'autre sur les nouvelles technologies de l'information ; d'autre part, pendant toute la durée de la conférence, la Commission a négocié en étroite concertation avec les Etats membres.

Enfin, le conférence a été l'occasion de négocier un accord sur les technologies de l'information (ITA).

Plus généralement, depuis Singapour, les négociations ont plus ou moins avancé selon les secteurs. Il importe donc de faire un bilan de l'état d'avancement des principales d'entre elles.

B. LES DIFFÉRENTES NÉGOCIATIONS SECTORIELLES

1. L'accord sur les technologies de l'information (ITA)

Il s'agissait au départ d'une très forte demande des Etats-Unis qui recherchaient l'élimination des droits de douane européens sur l'électronique, l'informatique et les télécommunications, et qui avaient fait de cette demande leur objectif essentiel pour la conférence ministérielle de l'OMC à Singapour. La négociation s'est concentrée sur deux questions :

- les pays concernés : l'Union européenne souhaitait que le plus grand nombre de pays participent à l'exercice afin d'aboutir à un accord équilibré, ses tarifs douaniers étant plus élevés que ceux des Etats-Unis. Elle a obtenu satisfaction, puisqu'une " masse critique " correspondant à plus de 55 % de la production mondiale et incluant les pays en développement a été atteinte ;

- les produits : l'Union européenne a obtenu des Etats-Unis l'inclusion de produits pour lesquels nous avions un intérêt offensif : condensateurs et câbles optiques. Elle a évité une reprise du débat sur " l'exception culturelle " en obtenant que les compacts-disques restent en dehors de l'accord. Enfin, de façon à équilibrer les concessions douanières, l'Union européenne a obtenu des Etats-Unis une élimination complémentaire des tarifs sur les spiritueux qui devrait profiter à nos exportations.

Ce sont potentiellement 500 milliards de dollars d'échanges qui pourraient être touchés par cet accord, au bénéfice des consommateurs et des industriels européens, l'ITA permettant l'importation de plus de 50 % des importations industrielles de l'Union européenne à droit nul.

La décision adoptée à Singapour prévoit, en outre, des rencontres régulières entre les participants à l'OMC, de façon à examiner le fonctionnement et la mise en oeuvre de l'accord, ainsi qu'un élargissement possible de sa couverture.

2. L'accord sur les télécommunications

L'objectif de cet accord était de permettre :

- d'améliorer très significativement l'ouverture des marchés des pays développés et des pays émergents ;

- de parvenir à un accord global et équilibré, pleinement fondé sur le traitement de la nation la plus favorisée.

L'accord devrait faciliter le développement international de France Télécom . Il a, de plus, mis fin à une série d'échecs qui était de nature à saper la crédibilité du système commercial multilatéral et a relancé la pratique des négociations sectorielles qui n'avait pas, jusqu'à présent, fait la preuve de son efficacité.

L'entrée en vigueur de l'accord, prévue pour le 1er janvier 1998 , est conditionnée par son acceptation par l'ensemble des signataires avant le 30 novembre 1997. Il est donc impératif que la France ait ratifié l'accord avant cette date.

3. Les services financiers : une issue encore incertaine

Rappelons que, pour ce qui concerne les services financiers, un accord intérimaire, ratifié par la France le 28 juillet 1996, est entré en vigueur en septembre 1996 et vient à échéance le 31 décembre 1997. Les signataires (au nombre de 46) sont autorisés à revenir sur les offres d'engagements faites en 1995, entre le 1er novembre et le 31 décembre 1997.

Afin de renégocier ces offres et d'arriver à un accord définitif et plus complet que l'accord intérimaire, la conférence ministérielle de Singapour a décidé, en décembre 1996, la reprise des négociations sur les services financiers dès avril 1997. Celles-ci ont effectivement repris le 10 avril à Genève et doivent se conclure le 12 décembre prochain .

Cependant, seuls 13 membres de l'OMC ont remis, lors de la réunion de négociation de juillet 1997, de nouvelles offres d'engagements. Le dépôt de nouvelles propositions, qui conditionnera l'issue de la négociation, se déroule à l'heure actuelle.

La Communauté européenne a été la première à déposer une nouvelle offre, début juillet, jugée par l'ensemble des partenaires comme étant particulièrement satisfaisante. L'Union européenne est ainsi reconnue comme un des moteurs de la négociation en cours.

4. Peu d'avancées concernant les règles en matière de services

S'agissant des mesures de sauvegarde d'urgence -c'est-à-dire des mesures qui peuvent être prises par un membre afin de suspendre, en totalité ou en partie, ses engagements, lorsque surviennent des circonstances imprévues menaçant de causer un dommage grave au producteurs nationaux-, compte tenu du faible degré d'avancement des négociations et de l'attentisme des Etats-Unis et du Japon , l'échéance fixée pour la négociation au 1er janvier 1998 ne sera vraisemblablement pas respectée et devra être prolongée .

S'agissant des subventions en matière de services , les Etats-Unis ont remis une nouvelle offre en juillet dernier, fondée sur le principe de la nation la plus favorisée (NPF), clause essentielle dont Washington s'était affranchi lors de la négociation de 1995. Ceci constitue un signe encourageant pour la suite des négociations.

Cependant, l'issue de ces dernières dépendra surtout de l'attitude des principaux pays émergents, notamment ceux d'Asie (Inde, Malaisie, Thaïlande, Indonésie). Ces marchés prioritaires restent, en effet, relativement fermés aux entreprises étrangères et les niveaux de libéralisation et d'ouverture reflétés dans les offres d'engagements déposées en 1995 ne sont pas satisfaisants.

Deuxième exportateur mondial de services, la France a un intérêt majeur à l'ouverture des marchés internationaux en ce domaine .

Pour ce qui concerne les marchés publics de services, rappelons que certains d'entre eux sont déjà couverts par l'Accord plurilatéral sur les marchés publics ( AMP ) conclu à Marrakech en avril 1994. Cependant, cet accord ne comporte qu'un nombre limité de signataire (24) et ne couvre que très partiellement le secteur des services.

Des négociations sont en cours, en vue de conclure un accord multilatéral (fondé sur les principes de l'accès au marché, du traitement national et de la clause de la nation la plus favorisée) pour les marchés publics de services. Cependant, aucune échéance n'est fixée pour la conclusion des négociations .

La négociation sur les marchés publics se déroule également à deux autres niveaux.

5. Les marchés publics : la poursuite des négociations

Ces deux niveaux sont les suivants :

- d'une part, l'accord plurilatéral conclu sous l'égide de l'OMC en 1994 est entré en vigueur le 1er janvier 1996 et doit faire l'objet d'une transposition dans les directives communautaires. Un projet de texte adopté par le Conseil en 1995 a été rejeté par le Parlement européen et la Commission européenne doit présenter un nouveau texte de conciliation dans les prochains mois. La France doit veiller à ce que ce texte se limite à transposer les règles de l'OMC sans créer de contrainte supplémentaire et à ce qu'il préserve l'égalité de traitement entre opérateurs privés et publics, acquis important du marché unique ;

- d'autre part, à la suite de la conférence de Singapour, un groupe de travail a été créé en vue d'améliorer la transparence dans les procédures de passation des marchés publics . Ces discussions pourraient déboucher à terme sur la négociation d'un accord multilatéral, de portée plus limitée que l'accord plurilatéral existant, mais de participation plus large car associant les pays en développement. La France et l'Union européenne ont intérêt à une telle discussion qui est soutenue par les Etats-Unis. Aucune décision n'a cependant pas été prise à ce stade, car les pays en développement restent réservés.

6. L'investissement : la négociation d'un accord multilatéral

Outre la décision prise à Singapour en décembre 1996 de créer un groupe de travail sur le commerce et l'investissement, les négociations concernant un accord multilatéral sur l'investissement (AMI) se poursuivent au sein de l'OCDE.

Rappelons que le Conseil de l'OCDE avait autorisé, en mai 1995, l'ouverture de négociations en vue de parvenir à la conclusion d'un accord au plus tard en mai 1997. Bien qu'un groupe de négociation ait commencé ses travaux à un rythme soutenu en septembre 1995, le Conseil ministériel de l'OCDE n'a pas été en mesure d'entériner l'AMI en mai 1997, plusieurs problèmes politiques et techniques n'ayant pu être négociés à temps de façon satisfaisante. La conclusion de l'accord est donc reportée à la réunion ministérielle de mai 1998 .

L'AMI représente un accord ambitieux, dont les principales caractéristiques sont les suivantes :

- son champ d'application est large et englobe toutes les formes d'investissement, notamment les investissements de portefeuille et les actifs immatériels ;

- les règles envisagées s'étendent à des domaines encore peu explorés, englobant des mesures traditionnelles (comme le respect des clauses de la nation la plus favorisée, de traitement national ou de transparence, mais aussi des mesures spécifiques de libéralisation, telles que des disciplines relatives au secteur public, ...) et établissant des dispositions de protection des investissements internationaux (interdiction des expropriations abusives, protection contre les troubles internes, ...) ;

- surtout, le mécanisme de règlement des différends sera très contraignant. Il pourra, en effet, être actionné non seulement par un Etat partie, mais également, par tout ressortissant d'un Etat partie, particulier ou entreprise.

La France a adopté des positions offensives sur plusieurs points : limiter le nombre et la portée des mécanismes généraux d'autorisation des investissements étrangers (une dizaine de pays de l'OCDE) ; s'assurer que les engagements pris au titre de l'accord ne soient pas réduits à néant par des réserves trop larges (Etats-Unis, Canada, Mexique) ; obtenir que les Etats fédérés des fédérations parties à l'accord soient liés par celui-ci (Etats-Unis, Canada, Australie) ; limiter l'exception générale à l'accord au titre de la sécurité nationale, en l'encadrant par une procédure anti-abus (Etats-Unis) ; obtenir l'interdiction des législations à portée extraterritoriale (Etats-Unis) introduire des disciplines sur les discriminations de fait (Japon) ; obtenir des disciplines de transparence en matière d'octroi de concessions (Etats-Unis, Allemagne).

Notre pays assure également la promotion des normes sociales et environnementales internationales en demandant l'inclusion de références explicites dans l'AMI.

La France conserve toutefois plusieurs objectifs défensifs à fort contenu politique . Il s'agit en priorité de la demande d'inscription dans l'accord d'une exception générale pour le secteur de la culture , mais aussi d'une volonté d'exclure les droits de propriété littéraire et artistique du champ de l'AMI, ainsi que de la volonté de préserver les particularités de traitement du secteur public (noyaux durs, modalités de démonopolisation, etc). Sur ces sujets, la France est confrontée à une forte opposition, tant de la part des autres Etats membres de l'Union européenne que de l'ensemble de nos partenaires de l'OCDE.

On le voit, les négociations concernant l'AMI ne sont pas sans liens avec les contentieux qui opposent l'Union européenne et les Etats-Unis.

C. LE PROBLÈME SPÉCIFIQUE DES NÉGOCIATIONS AVEC LES ETATS-UNIS

L'actualité récente fournit l'occasion de faire le point des problèmes posés par les relations commerciales entre l'Union européenne et les Etats-Unis.

Dans son 13e rapport annuel sur les obstacles au commerce et aux investissements, la Commission européenne a recensé les principales mesures et pratiques américaines jugées contraires aux règles de l'OMC. Parmi celles-ci, on citera notamment :

La propension des autorités américaines à recourir à l'unilatéralisme et aux sanctions commerciales (section 301), fragilisant le mécanisme de règlement des différends de l'OMC. La Commission met à cet égard en cause l'application extraterritoriale de législations restrictives aux échanges et aux investissements avec les pays soumis à embargo américain : loi Helms-Burton qui vise les échanges des pays tiers avec Cuba ; loi d'Amato-Kennedy qui étend l'embargo commercial aux investissements réalisés par des sociétés non américaines dans le domaine des hydrocarbures avec l'Iran et la Libye. Rappelons que l'Union européenne a adopté un règlement " anti-embargo " en novembre 1996 pour protéger les opérateurs européens contre les effets extraterritoriaux de ces législations.

Reprochant ce droit autoproclamé par Washington d'imposer un boycottage aux entreprises autres qu'américaines, la Commission européenne avait saisi l'OMC contre la loi Helms-Burton.

En avril 1997, elle avait cependant décidé de suspendre cette plainte et d'entamer avec l'administration américaine des pourparlers sur deux séries de problèmes :

- d'une part, la définition de " disciplines " à respecter en matière d'investissement à l'étranger dans le cas de biens expropriés, comme à cuba en particulier ;

- d'autre part, la recherche d'une solution au casse-tête juridique de l'extraterritorialité des lois.

Ces consultations, menées à la fois au sein de l'OCDE et de manière directe, auraient dû permettre d'aboutir à un accord bilatéral le 15 octobre dernier. Le résultat en a cependant été décevant.

Les deux parties continuent à préférer le statu quo à l'affrontement. C'est pourquoi les Etats-Unis ont jusqu'ici choisi de ne pas appliquer la loi d'Amato-Kennedy à l'encontre de Total qui a, rappelons-le, engagé -aux côtés de compagnies russes et malaisiennes- un important investissement en Iran.

Il serait évidemment préférable qu'Européens et Américains aboutissent à un accord. Si tel n'était pas le cas, votre commission estime que l'Union européenne devrait ne pas hésiter à activer l'instance d'arbitrage de l'OMC.

Est également dénoncée la tendance des autorités locales (municipalités, Etats fédérés) à édicter des lois qui limitent l'accès des entreprises non américaines aux marchés publics de ces entités, au nom de la défense des droits de l'homme (exemple du Massachussetts et de la ville de New-York qui ferment les marchés publics à toute entreprise ayant des relations d'affaires avec la Birmanie).

la Commission critique l'utilisation abusive de la notion de " sécurité nationale " pour justifier certaines restrictions , en particulier dans le domaine des investissements et des marchés publics. A cet égard, il faut s'opposer aux dispositions de la législation " Buy American " qui limitent l'accès des fournisseurs étrangers à certains marchés passés par des entités fédérales ou locales.

En ce qui concerne les échanges portant sur les biens, il faut noter la persistance de " pics tarifaires " sur certains secteurs (notamment textile et matières plastiques). Mais les principales difficultés proviennent désormais de l'existence d'obstacles administratifs ou techniques aux échanges sous forme de procédures douanières, de normes et de règles d'origine.

On peut évoquer en particulier le cas de nouvelles règles d'origine en matière textile introduites en juillet 1996, qui pénalisent les exportations communautaires. Par ailleurs, dans la plupart des secteurs (tant agro-alimentaires qu'industriels), les normes représentent des barrières aux échanges avec les États-Unis, en raison de réglementations multiples et hétérogènes dans les Etats fédérés, de la non utilisation des standards internationaux et de la pratique des certifications obligatoires par des organismes agréés, là où l'Union européenne a développé le principe de l'auto-certification. A cet égard, l'accord de reconnaissance mutuelle des procédures d'essai et de certification (ARM) prend toute son importance et il apparaît nécessaire de développer une coopération réglementaire en vue de parvenir à l'élaboration de réglementations compatibles.

On peut également reprocher à l'administration américaine de tarder à transposer ses obligations résultant de l'accord multilatéral sur la protection de la propriété intellectuelle , en particulier sur les brevets. Par ailleurs, l'insuffisance de protection des appellations d'origine de vins et spiritueux pose des problèmes aux producteurs européens.

En outre, les Etats-Unis ne font pas une application générale du principe du traitement national dans le domaine des investissements.

On ne peut également que regretter la segmentation du marché financier aux Etats-Unis, alors que le marché européen est en voie d'unification, ce qui introduit immanquablement un déséquilibre entre opérateurs européens sur le marché américain et opérateurs américains en Europe.

En matière agricole, les contentieux s'accumulent . Les questions tarifaires ne représentant plus la principale source de tension, les problèmes liés aux réglementations vétérinaires, sanitaires et phytosanitaires occupant désormais le devant de la scène. De nouveaux contentieux sont apparus à l'initiative des Etats-Unis : organismes génétiquement modifiés, dossiers " hormones " et OCM bananes.

L'Union européenne est en situation difficile devant l'OMC, s'agissant de ces deux derniers dossiers. En effet, l'organe de règlement des différends de l'organisation a :

- enregistré la procédure d'appel engagée par l'Union reconnue coupable de violation des règles commerciales internationales dans l'affaire de la viande traitée aux hormones ;

- officiellement entériné le rapport de condamnation de la politique communautaire de la banane qui consiste, rappelons-le, à accorder -au titre des accords de Lomé- un régime privilégié d'importations aux productions des pays ACP et à contingenter les livraisons des autres régions où opèrent essentiellement de grandes multinationales américaines.

Dans les deux cas, les Etats-membres devront mettre leurs pratiques en conformité avec les accords de l'OMC ou offrir à leurs partenaires d'importantes compensations commerciales.

Par ailleurs, on ne peut pas ne pas évoquer les querelles ayant trait à la mise en oeuvre de l'accord intervenu à l'OMC sur les services de télécommunications, notamment, le commerce électronique.

Les grandes lignes de la politique américaine dans le domaine du commerce électronique ont fait l'objet du " rapport Magaziner ", rendu public le 1er juillet 1997, qui préconise une action vigoureuse de l'administration américaine en vue d'établir, dans les plus brefs délais, un " cadre favorable " au développement du commerce électronique au niveau mondial.

L'objectif des Etats-Unis est d'exploiter et de pérenniser dans d'autres secteurs d'activité leur avantage technologique et économique dans le domaine des réseaux d'information. Dans cette optique, le rapport de M. Magaziner propose une approche extrêmement libérale du commerce électronique, articulée autour de cinq grands principes :

- admettre la prééminence du secteur privé ;

- éviter les réglementations contraignantes ou inutiles ;

- minimiser les procédures administratives ;

- reconnaître la singularité d'Internet par rapport aux services audiovisuels et de télécommunications ;

- harmoniser en les simplifiant les cadres juridiques nationaux.

Suite à la publication de ce rapport, les Etats-Unis ont fait du commerce électronique une de leurs principales priorités commerciales pour les mois à venir, avec notamment pour objectif de faire d'Internet une zone de libre échange.

Votre commission souhaite que le Gouvernement et l'Union européenne s'assurent que le développement du commerce électronique ne se fera pas aux prix d'un abaissement des protections dont bénéficient les consommateurs .

Enfin, il conviendrait d'élaborer des règles internationales spécifiques sur les aides à la construction aéronautique à travers l'adoption d'un nouvel accord sur les aéronefs civils.

Au total, face aux pratiques américaines jugées contraires aux règles multilatérales, votre commission souhaite que l'Union européenne n'hésite pas à recourir au mécanisme de règlement des différends de l'OMC.

Les entreprises et les fédérations professionnelles elles-mêmes se doivent d'utiliser activement le règlement sur les obstacles au commerce qui permet à la Commission européenne d'engager des négociations pour trouver une solution acceptable ou, en l'absence de résultat satisfaisant, de porter l'affaire devant l'OMC. Cette procédure a permis notamment de faire prendre des engagements aux Etats-Unis en vue de modifier leurs règles d'origine sur les exportations de textile.

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