3. La crédibilité de l'arsenal des sanctions

S'agissant de la crédibilité de l'arsenal de sanctions prévu dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, une première observation peut être formulée.

L'exclusion du système de sanctions des Etats membres n'ayant pas adopté d'euro peut être contestée . Elle obéit à une certaine logique si l'on considère que la "discipline budgétaire" ne doit être renforcée qu'entre les participants à la monnaie unique pour des motifs propres à la cohérence de la nouvelle zone monétaire. Elle entre dans la logique propre au traité qui n'a prévu d'entrée en vigueur de ces nouvelles disciplines qu'au stade de la troisième phase, c'est-à-dire après l'adoption de l'euro.

Une autre solution aurait pu être décidée. Appliquer ces disciplines à tous dès l'adoption de la monnaie unique aurait pu être délicat pour les pays dont la situation de déficit excessif aurait justifié qu'ils soient exclus de la monnaie unique. Le risque aurait été alors grand que ces pays soient quasi automatiquement sanctionnés. On doit toutefois remarquer que les délais prévus par la procédure sur les déficits excessifs leur aurait ménagé du temps pour corriger leur déficit. Le traité aurait d'ailleurs pu n'exempter que pour un temps les Etats membres "hors euro" du renforcement des disciplines de l'article 104 C.

Cette difficulté renvoie fondamentalement au statut de la future monnaie unique. On sait qu'elle n'est pas un objectif de politique économique de l'Union mais qu'elle en est un instrument qu'on peut qualifier d'essentiel. Dans cette perspective, il aurait été logique d'intensifier au fil du temps les pressions pour que tous les Etats du grand marché adoptent la monnaie unique et donc que tous soient astreints au renforcement des règles de discipline budgétaire.

Cette solution aurait d'autant moins manqué de logique qu'elle aurait entouré le fonctionnement du "SME bis" qui devrait constituer une zone monétaire par défaut des garanties supplémentaires qu'exige un tel mécanisme.

Il est cependant à souligner que la constitution d'une zone euro à onze Etats fait un peu perdre de son intérêt à une critique dont la pertinence aurait été plus grande si le nombre des Etats qualifiés avait été moindre.

Une seconde difficulté avait pu être justement mise en évidence. Elle concernait l' affectation du produit (capital et intérêts) des amendes et des dépôts qui posait un problème de principe. La proposition de résolution n° 71 présentée par M. Xavier de Villepin le 7 novembre 1996 sur une version initiale de la proposition de la Commission avait très justement demandé au gouvernement :

" de veiller à ce que le produit des amendes prévues par la procédure concernant les déficits excessifs ne puisse bénéficier aux pays qui ne sont pas astreints aux règles du pacte de stabilité budgétaire ".

On rappelle en effet que l'article 109 K paragraphe 3 du Traité prévoit que les Etats faisant l'objet d'une dérogation, en clair les Etats n'ayant pas adopté la monnaie unique, sont exemptés des règles posées par les paragraphes 9 et 11 du traité si bien qu'en particulier ils échappent aux sanctions ci-dessus décrites.

Echappant au dispositif destiné à renforcer la discipline budgétaire, il aurait été choquant qu'ils bénéficient de la mise en oeuvre des règles répressives imposées aux Etats qui y auraient été astreints.

Le dispositif de l'article 16 a été corrigé sur ce point. Il prévoit certes que les intérêts sur les dépôts et les amendes infligées par le Conseil font partie des ressources du budget des Communautés européennes. Mais les Etats faisant l'objet d'une dérogation sont exclus du bénéfice de ces ressources. Il reste à veiller à ce que soient précisées les modalités de leur répartition entre les seuls Etats participants respectant la discipline budgétaire.

Mais, l'essentiel est sans doute ailleurs.

Le Conseil européen d'Amsterdam a demandé au Conseil de sanctionner systématiquement les Etats dont le déficit apparaîtrait excessif.

Une telle fermeté s'impose compte tenu de la logique de la construction européenne. Mais, il est naturel de s'interroger sur l'usage d'un dispositif qui est essentiellement dissuasif. Il pourrait être malaisé d'appliquer des sanctions financières à un Etat qui, par définition, connaîtrait des difficultés.

La vertu dissuasive de l'appareil de sanctions en sort-elle vraiment affaiblie ? Probablement pas car un Etat qui serait en infraction risquerait au fond bien plus que les sanctions prévues. Ne risquerait-il pas en effet d'être conduit à renoncer à l'euro ?

En tout état de cause, cette perspective n'interviendrait qu'au terme d'un processus de riposte graduée permettant aux instances européennes de vérifier l'indiscipline caractérisée d'un Etat membre.

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