CONCLUSION DU RAPPORTEUR

Le traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la France et la Géorgie s'inscrit dans le contexte des relations privilégiées qu'entretient la France avec ses partenaires de Transcaucasie. Ce traité vise non seulement à renforcer la présence française dans un pays où le développement économique offre à nos investisseurs des perspectives prometteuses, mais aussi à contribuer à la difficile transition post-soviétique.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a examiné le présent rapport au cours de sa réunion du 27 mai 1998.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, est revenu sur les conséquences potentielles d'une éventuelle sécession abkhaze, compte tenu de la reprise des affrontements récemment observée dans cette région.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée la ratification du traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la République de Géorgie, signé à Paris le 21 janvier 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi 9( * ) .

ANNEXE -
etude d'IMPACT 10( * )

1. Etat de droit et situation de fait existants et leurs insuffisances.

Le Traité d'entente, d'amitié et de coopération est le premier accord signé avec la Géorgie, jeune Etat né en 1991, soumis à ratification.

Il est à noter que ce pays est désireux de négocier et de conclure avec ses partenaires des accords intergouvernementaux dans tous les domaines afin de remplacer les textes hérités de l'Union Soviétique.

II. Bénéfices escomptés, en particulier sur les plans économique et de l'emploi en France.

Si les régions de Géorgie bénéficient d'une large autonomie, appuyée sur des identités particularistes fortes, l'administration centrale est en revanche très centralisée ; en dépit de réformes économiques vigoureuses, l'initiative privée reste marginale. Les grands contrats, en particulier, ont un caractère politique et font l'objet d'interventions étatiques, qui remontent souvent au chef de l'Etat lui-même.

La ratification du Traité d'entente, d'amitié et de coopération sera appréciée par la partie géorgienne comme un geste politique de nature à favoriser le développement des relations bilatérales y compris sur le plan économique.

Nous en attendons donc un impact stimulant pour nos relations commerciales avec la Géorgie, et un bénéfice direct pour nos entreprises compte tenu des données suivantes :

1. La Géorgie, grâce à sa situation géographique et ses ports sur la mer Noire, devrait devenir l'une des voies principales du transit des produits de la mer Caspienne et de l'Asie centrale dès le début du siècle prochain :

- Depuis la signature, en 1994, du "contrat du siècle" portant sur des gisements pétroliers au large de Bakou, la mer Caspienne est devenue un pôle d'intérêt majeur pour l'industrie mondiale des hydrocarbures. L'Azerbaïdjan et le Kazakhstan pourraient devenir à brève échéance des acteurs importants de la scène pétrolière, avec une production de près de 100 millions de tonnes/an d'ici à 2005, et plus encore dans les années suivantes.

- En outre, le Caucase et l'Asie centrale espèrent exporter en grandes quantités vers l'Europe leur production de gaz, de coton, de minerais rares ...

- Trois voies d'exportation des produits de la région Asie centrale/Caucase, vers les marchés européens, coexistent : Russie, Iran et Géorgie.

Si, pour le gaz, la Russie et l'Iran paraissent devoir constituer les principales voies d'évacuation (le Turkménistan, principal exportateur potentiel, dépendant étroitement de ces deux voisins), pour les autres produits et en particulier pour le pétrole , la Géorgie est quasi certaine de compter parmi les principales routes d'exportation. Elle possède pour cela plusieurs atouts majeurs :

- en dépit du conflit abkhaze, actuellement gelé, elle offre sur la mer Noire plusieurs débouchés sûrs et géographiquement proches : port de Poti (terminal pétrolier en construction de Supsa ) et port de Batoumi (déjà bien connu pour son rôle dans l'exportation du pétrole de Bakou au XIXe siècle).

. Tbilissi espère entamer la réhabilitation de son système de transport grâce au programme TRACECA de l'Union européenne, qui soutient l'idée de la construction d'un "corridor" de transport de marchandises Asie Centrale-Caucase-Europe.

. La Géorgie a clairement fait siens les principes de l'économie ouverte et cherche manifestement à se tourner politiquement et commercialement vers l'Europe.

2. La Géorgie a en outre entrepris avec détermination des réformes courageuses qui contribuent à créer un environnement favorable aux investissements :

- la croissance, reprise depuis deux ans, est la plus forte enregistrée dans la région : 10 % en 96 et 12 % attendus en 97. Elle est tirée par le secteur agricole et par celui des services, l'industrie redémarrant plus lentement.

- les autorités gèrent les affaires économiques avec une remarquable rigueur : stabilité monétaire, inflation inférieure à 10 % l'an, progression strictement contrôlée des salaires.

- surtout, elles continuent de mettre en place les réformes nécessaires à la transformation de l'économie : mise en place d'un système de trésorerie centralisée, réforme radicale du système bancaire, privatisation (achevée à 95 % pour les PME, et bien en cours pour les grandes entreprises).

- ces efforts ont acquis à la Géorgie la sympathie des institutions financières multilatérales, qui apportent une aide considérable à la Géorgie. Depuis 1991, notamment grâce à l'audience dont jouit à travers le monde le Président Chevarnadzé, la Géorgie figure parmi les grands bénéficiaires de l'aide internationale en termes d'enveloppe par habitant. Les enveloppes financières délivrées pour 97 se montent à 60 MUSD pour la Banque Mondiale, 30 MUSD pour la BERD, 10 MUSD pour TACIS (Union européenne), 10 MUSD pour le PNUD. Ces organismes ont en outre identifié 27 projets prioritaires pour lesquels ils ont prévu un dotation de 60 MUSD.

3/ La Géorgie peut donc devenir un marché important de la CEI pour la France , surtout si nous parvenons à augmenter notre part de marché, qui n'est pas négligeable : entre 2,5 et 3,5 %, en nette augmentation.

Les deux dernières années ont vu croître de façon très encourageante :

. nos exportations vers la Géorgie, qui ont plus que doublé (195 MF en 96, contre 31 MF en 95), notamment grâce au secteur agroalimentaire. Cette augmentation est, en valeur relative, la plus forte progression enregistrée dans l'espace CEI.

. nos investissements sur place : nous devrions être, en 1997, le premier investisseur étranger en Géorgie.

Pour l'avenir, la France est engagée dans plusieurs projets économiques importants :

- la réalisation des équipements nécessaires à la construction de la route de transit Caspienne-mer Noire pour l'évacuation des hydrocarbures de la Caspienne : nos équipementiers sont très présents dans tous les secteurs du para-pétrolier en Azerbaïdjan (7 % des parts du marché) ; DUMEZ-GTM a remporté un des appels d'offre du consortium AIOC (le plus important de ceux formés pour l'exploitation de la Caspienne) visant à la préparation du futur terminal pétrolier de SUPSA (construction de 4 réservoirs).

- la rénovation de quatre secteurs stratégiques de l'économie géorgienne :

. l'industrie d'équipement électronique (réhabilitation des anciennes unités du complexe militaro-industriel de l'URSS implantées en Géorgie) : un important contrat pour THOMSON (800 MF) portant sur une série de projets (électronique de surveillance, contrôle aérien, voire équipements d'avions) est en voie de finalisation.

. les chemins de fer, avec d'une part les études en vue d'une réhabilitation du réseau, et d'autre part la vente de matériel, surtout en matière de maintenance (traverses par exemple). Nos entreprises -TSO, Pouget, Geismar, SYSTRA- sont très présentes sur ce secteur, dans le cadre du programme TRACECA de l'Union européenne (construction d'un "corridor ferroviaire" liant l'Asie Centrale à l'Europe via le Caucase).

. l'industrie agroalimentaire : l'agriculture reste à l'origine de 45 % du PNB géorgien, autour de trois projets : CASTEL souhaite développer une activité de viticulture ; SucDen Kerry projette de construire une raffinerie de sucre. ACTINI vient d'obtenir le soutien du Trésor, sous forme de protocole, pour développer sur place la production de lait de soja.

. le secteur énergétique, autour de trois opérations : la vente de matériel électrique (LEGRAND S.A.), les projets de construction de petites centrales électriques, pour lesquels le ministère de l'économie de Géorgie nous a sollicités, et qui pourraient obtenir le soutien du trésor et de la Coface ; et à terme, la remise en état du barrage de l'Inguri (projet EDF ; le barrage, l'un des plus grands de la CEI, se trouve sur la "frontière" de fait avec l'Abkhasie).

Conclusion : le Traité d'entente, d'amitié et de coopération soumis à ratification ne se contente donc pas de sanctionner le dialogue politique bilatéral établi entre nos deux pays ; il peut avoir une réelle incidence sur nos investissements dans ce pays. Ceux-ci, à leur tour, peuvent engendrer un courant d'échanges qui impliquera nos entreprises de travaux publics, ainsi que nos petites et moyennes entreprises, avec des retombées positives pour l'emploi en France.

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