B. DES AMÉLIORATIONS POSSIBLES

Si le bilan des quarante années de fonctionnement de l'ENM est positif, certaines améliorations sont cependant envisageables, .notamment afin d'adapter la formation des magistrats aux réformes intervenues récemment dans le domaine de la justice. Toutefois, ces améliorations nécessitent un renforcement des moyens en personnel

1. L'intensification de la formation économique des magistrats

Les magistrats se trouvent de plus en plus confrontés à des situations qui nécessitent de leur part le maniement de documents comptables et financiers et des connaissances précises en droit des sociétés, droit de la concurrence, notamment en matière communautaire et droit pénal des affaires. Or, la formation initiale des auditeurs de justice, malgré les progrès réalisés depuis quelques années, reste encore insuffisante en raison même de son caractère généraliste.

Il est donc indispensable de développer la formation continue des magistrats qui sont amenés à occuper des postes dans lesquels ils sont confrontés quotidiennement aux réalités économiques.

A cet égard, il convient de rappeler que la création de pôles de lutte contre la délinquance économique et financière doit s'accompagner d'un effort de formation des magistrats qui y sont affectés, même si ces derniers sont aidés par des assistants spécialisés qui justifient d'une expérience financière.

De même, le projet de réforme des tribunaux de commerce qui envisage la coexistence de juges consulaires et de magistrats professionnels, ne constituera une réelle avancée que si les magistrats disposent des compétences requises en matière de droit des sociétés et de droit de la concurrence.

Par ailleurs, la déconcentration des moyens de fonctionnement au niveau des cours d'appel a transformé les missions des chefs de cour qui sont devenus des gestionnaires. Or, même s'ils sont assistés par les services administratifs régionaux, les compétences des chefs de cour, mais également des greffiers en chef, ne sont pas toujours adaptées à leurs nouvelles responsabilités. Il est donc nécessaire de leur offrir une formation aux techniques de gestion et d'administration.

Enfin, il est indispensable de sensibiliser chaque magistrat aux conséquences économiques de leurs actes et aux coûts induits par le fonctionnement de la justice.

2. Le développement des liens entre l'ENM et les autres écoles

Dans le cadre de la formation continue, l'ENM entretient des rapports de coopération avec les écoles du réseau public. Toutefois, jusqu'à cette année, cette coopération n'existait pas en matière de formation initiale. Or, les auditeurs de justice seront amenés, dans l'exercice de leur fonction de magistrats, à entrer en contact avec tous les intervenants de la politique pénale, à savoir les greffiers, les officiers de police judiciaires, le personnel pénitentiaire ainsi que les éducateurs. Il est donc indispensable de multiplier les liens entre l'ENM d'une part et l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire, l'Ecole nationale supérieure de police, l'Ecole nationale des greffes et le Centre national de formation des éducateurs d'autre part afin de développer une culture minimale commune.

3. Un renforcement des effectifs indispensable

Depuis 1992, l'évolution du montant de la subvention du ministère de la justice à l'ENM est contrastée. Après trois baisses consécutives en 1993, 1994 et 1995, le montant de la subvention a ensuite constamment augmenté, pour atteindre 185,1 millions de francs dans le projet de budget pour 2000.

Les créations de postes ont été comparativement moins fortes. Ainsi, ce n'est que depuis 1998 que l'Ecole a pu bénéficier de créations supplémentaires. Les effectifs restent cependant inférieurs à ceux observés en 1984, où le nombre d'emplois budgétaires s'élevait à 120.

Or, l'augmentation forte des crédits à effectifs constants entraîne des effets pervers, comme en témoignent les exemples suivants.

Ainsi, l'Ecole ne dispose pas d'un ingénieur des travaux chargé de recenser les travaux à accomplir, de les classer par ordre de priorité et d'établir un programme d'investissements pluriannuel. Or, les besoins sont nombreux. Ainsi, pour l'année 2000, 1,8 million de francs sont prévus pour les travaux de mise en sécurité de l'amphithéâtre de Bordeaux et de Paris. De même, les immeubles abritant l'école sur les deux sites ont besoin d'être rénovés.

Par ailleurs, l'Ecole ne dispose pas de responsable informatique capable de gérer le parc informatique de l'ENM et de développer une stratégie en matière d'acquisition de matériel informatique. Jusqu'à présent, il revient aux personnels de l'Ecole d'administrer ces dossier, alors même qu'ils n'ont pas la formation adéquate.

Comme il a été indiqué précédemment, l'ENM a également fortement développé ses activités internationales, notamment à travers sa participation à des programmes européens de coopération, comportant des échanges de magistrats, l'accueil en France de juges et de procureurs étranger et l'organisation avec les pays partenaires de sessions de formation.

L'ENM est également amenée à participer à des programmes d'appui à la justice, développés par de grandes institutions internationales, telles que l'Union européenne, le Conseil de l'Europe ou la Banque mondiale.

Or, le montage financier de ces projets de coopération ou encore la constitution des dossiers afin de bénéficier des aides en provenance de la Commission européenne s'accompagnent de formalités nombreuses et complexes et prennent beaucoup de temps. Pour autant, aucun poste budgétaire n'a été créé pour faire face au développement de l'activité de l'ENM dans ce secteur.

Il convient de remarquer que le ministère de la justice et des juridictions souffrent de cette même carence. En l'absence d'administrateurs civils et de personnels techniques appropriés (comme les informaticiens ou les ingénieurs par exemple), les tâches d'administration et de gestion incombent aux magistrats dont la bonne volonté ne peut pas toujours pallier l'absence de formation dans ces domaines.

En conséquence, il est important d'accompagner la hausse des crédits dont bénéficie l'Ecole nationale de la magistrature de la création de postes afin que la subvention soit utilisée de la manière la plus efficace possible.

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