III. PRINCIPALES OBSERVATIONS

A. LES CREDITS DES ROUTES

Le budget des routes pour 2000 se caractérise par une diminution importante des crédits de paiements, à 6.368 millions de francs (-9,5%) mais une progression des moyens d'engagement, à 7.114 millions de francs (+ 7,1 %).

Toutefois, ces crédits sont complétés par ceux du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables.


En effet, contrairement à d'autres comptes d'affectation spéciale (le Fonds d'aménagement de l'Ile-de-France, le Fonds forestier national, le Fonds national du livre), le Fonds d'investissement dans les transports terrestres et les voies navigables (FITTVN) ne disparaît pas en l'an 2000.

Au contraire, il se renforce, puisque l'article 33 du projet de loi de finances prévoit le relèvement de la taxe sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes : les moyens du FITTVN passeront ainsi de 2,2 milliards de francs en 1999 à 2,65 milliards de francs en 2000.

Cependant, au sein du FITTVN, les crédits destinés aux routes diminueront de 3,9%, pour s'établir à 1.527 millions de francs.

Le FITTVN prend en compte certaines priorités, notamment :

- la mise en sécurité des tunnels routiers non concédés de plus de 1.000 mètres (75 millions de francs sont prévus à ce titre sur le chapitre 01 du FITTVN).

- la poursuite des deux grandes opérations de désenclavement du Massif central (réalisation de l'autoroute A 75 Clermont-Ferrand/Beziers-Montpellier ; aménagement de la RN 7 entre Nevers et Roanne) et la mise aux normes autoroutières de la RN 10 dans les Landes.

Au total, même après prise en compte des dotations du FITTVN, les crédits destinés aux routes sont en net repli pour 2000. Cependant, ce repli s'explique en parti par la transition entre l'achèvement du XIème plan et le commencement du XIIème plan. Les moyens d'engagement, qui traduisent l'engagement de programmes nouveaux pour les années à venir, sont en nette augmentation.

1. Une année de transition avec la première mise en oeuvre des nouveaux contrats de plan Etat région (2000-2004)

Le XIème plan, élaboré pour cinq années à l'origine (1994-1998) et prolongé jusqu'à fin 1999, prévoyait une enveloppe globale de 65,4 milliards de francs pour les routes dont 27,4 milliards de francs pour la part Etat, hors investissements concernant l'exploitation routière.

Au 31 décembre 1999, ce programme aura été réalisé à 82,7%.

Mise en oeuvre du XIème plan : crédits des routes

 

Montant 94-99

programmation 1999

% programmation fin 1999

Voirie nationale

22.493,75

2.524,2

81,89%

maîtrise d'ouvrage locale

556,23

31,5

82,64%

opérations de sécurité

314,77

47,12

98,62%

voiries villes nouvelles

275,00

31,7

93,80%

voirie pôles de développement

135,00

8,8

29,36%

programme d'accélération

3.686,05

466,86

87,18%

TOTAL

27.470,80

3.110,18

82,6%

Lors du comité interministériel d'aménagement du territoire (CIADT) du 23 juillet 1999 à Arles, le premier ministre a annoncé une enveloppe de 95 milliards de francs pour les contrats de plan Etat-région 2000-2006, dont 20,6 milliards de francs consacrés par l'Etat au réseau routier, y compris les investissements concernant l'exploitation routière. Cette dotation est plus faible que celle prévue dans le XIème plan (20,6 milliards de francs contre 27,4 milliards de francs). Toutefois, une seconde enveloppe devrait être prochainement décidée.

Pour la première année du XIIème plan, soit 2000, les volets routiers des contrats de plan Etat-régions seront dotés de 3,65 milliards de francs en autorisations de programme, soit une progression de 543 millions de francs par rapport à 1999 (+17,5%).

2. Une réduction du programme d'investissements pour 2000

Les opérations d'investissement seront réduites en 2000, aussi bien sur le réseau national non concédé que sur le réseau autoroutier concédé
. En 1998, 390 kilomètres de voies nouvelles avaient été ouvertes sur le réseau national non concédé, 383 kilomètres le seront en 1999 et seulement 328 kilomètres en 2000. Sur le réseau autoroutier non concédé, 159 kilomètres avaient été ouverts en 1998, 101 kilomètres en 1999 et seulement 25 kilomètres en 2000. Enfin, sur le réseau autoroutier concédé, 293 kilomètres ont été mis en service en 1998, mais seulement 143 kilomètres en 1999 et 159 kilomètres en 2000.

Cette situation de chute des nouvelles mises en service s'explique par une réduction des moyens, mais également par le fait, comme cela a été vu, que l'année 2000 est une année charnière entre la fin du XIème plan et le début du XIIème plan, dont les modalités exactes ne seront arrêtées qu'en fin d'année.

Il s'agit également d'une période de transition, avec le changement de mode de financement du système autoroutier concédé et l'attente des résultats de la négociation menée par le gouvernement français avec la Commission européenne pour obtenir un allongement de la durée des concessions.

Le programme d'investissement, d'exploitation et d'entretien sur le réseau routier national s'élèvera donc à 27.454 millions de francs pour 2000, dont 15.559 millions de francs pour le réseau des autoroutes concédées et 11.895 millions de francs pour le réseau routier national non concédé.

Concernant les autoroutes concédées, les recettes des péages s'élèveront à 15.559 millions de francs, affectées à raison de 12.151 millions de francs pour l'investissement (78%) et 3.408 millions de francs pour l'entretien et l'exploitation (22%). A ces sommes s'ajouteront les recettes de Cofiroute, réparties en 3.130 millions de francs pour l'investissement et 870 millions de francs pour l'entretien et l'exploitation.

Concernant le réseau routier national non concédé, le budget des routes financera 2.943 millions de francs d'investissements et 3.425 millions de francs d'entretien, tandis que le FITTVN consacrera 1.527 millions de francs supplémentaires à l'investissement. Par la voie de fonds de concours, les collectivités locales apporteront 4 milliards de francs supplémentaires.

3. Les dotations à l'entretien du réseau routier national sont encore insuffisantes

Le problème de l'entretien du réseau routier national est devenu crucial.
La faiblesse des crédits budgétaires accordés à l'entretien des routes est génératrice de surcoûts supplémentaires, liés aux nécessaires opérations de réhabilitation. Le ministère de l'équipement, des transports et du logement note lui-même que " compte tenu du niveau des dotations d'entretien qui permettent de satisfaire un entretien préventif sur les deux-tiers du réseau, des besoins de plus en plus importants apparaissent au titre des programmes de réhabilitation-renforcement ".

Des études ont été menées sur le réseau national et les ouvrages d'art, qui ont permis de conclure que 11% des voies nécessitaient des interventions lourdes, les travaux les plus importants étant à réaliser sur le réseau autoroutier non concédé. Il apparaît que la structure de 18% des ouvrages d'art est atteinte, dont 5% gravement, ce qui nécessite des travaux d'urgence. Au total, un programme complet de réhabilitation coûterait 15 milliards de francs.

Paradoxalement, malgré toutes les études, les moyens d'entretien pour 2000 sont en très légère réduction, à 2.585 millions de francs (- 0,3%) et les moyens de réhabilitation et renforcement sont stables à 433 millions de francs.

Seules les dotations à la rénovation des ouvrages d'art progressent de manière sensible en autorisations de programme (362 millions de francs, soit +28%), mais cela en raison d'une seule opération significative : la mise en oeuvre des travaux de rénovation du pont d'Aquitaine sur la Garonne à Bordeaux.

Votre rapporteur estime que le renforcement des crédits d'entretien au secteur routier est un objectif prioritaire, dans la mesure où la faiblesse des dotations conduit immanquablement à une dégradation du patrimoine routier, dont le coût à terme pour l'Etat sera bien plus élevé.

4. La situation des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes

La situation des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA) reste préoccupante
.

L'endettement des SEMCA atteint 154 milliards de francs au 31 décembre 1998. Il apparaît que l'endettement progressera jusqu'en 2004, en raison du lancement des sections prévues dans les conventions de concessions actuelles, pour se résorber ensuite. D'ici à 2004, en raison de la charge de l'emprunt et de la fiscalité pesant sur les sociétés (18,7% des recettes de péages), et malgré la progression des recettes de péages (estimée à 30%), la situation financière des sociétés d'autoroutes devrait donc se dégrader.

Selon le ministère de l'équipement, des transports et du logement, les études financières à long terme montrent que les sociétés d'autoroutes pourront rembourser leur dette avant la fin de la concession (soit 170 milliards de francs sur 15 ans) à l'exception de deux sociétés, la société française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF) et la société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN). Des solutions devront donc être trouvée, notamment la reprise de la dette non apurée par la société des autoroutes du Nord et de l'Est de la France (SANEF) pour la SAPN, la recapitalisation et l'allongement de la concession et/ou l'adossement à une autre société pour la SFTRF.

Il faut une fois de plus souligner l'excellence du système d'adossement et la forte contribution des sociétés concessionnaires d'autoroutes aux recettes budgétaires de l'Etat . Entre 1994 et 1998, les transferts financiers fiscaux et non fiscaux (remboursement anticipé des avances de l'Etat, fonds de concours...) du secteur autoroutier vers l'Etat ont représenté plus de 34 milliards de francs.

Il est à craindre que dans l'avenir, l'abandon du système de l'adossement ne conduise l'Etat à débourser des sommes importantes pour subventionner les nouvelles opérations autoroutières, ce qui ne pourra qu'avoir un effet de freinage du programme autoroutier français. Pourtant, ce programme comporte encore de nombreux investissements à réaliser, notamment dans l'ouest de la France, où le maillage autoroutier est très faible et les besoins importants.

Le ministre de l'équipement, des transports et du logement a annoncé le dépôt, avant la fin de l'année, d'un projet de loi réformant les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

B. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

1. De nouveaux moyens


Les crédits consacrés à la sécurité routière progresseront de 17% pour 2000, pour s'établir à 534 millions de francs.

L'augmentation des dotations a pour objectif de traduire les priorités du comité interministériel pour la sécurité routière du 2 avril 1999 qui a déclaré la sécurité routière grande cause nationale en 2000.

Le budget affiche donc deux priorités : la communication et l'action locale d'une part, la formation des conducteurs d'autre part.

Les moyens affectés à la communication nationale (presse, relations publiques, campagnes publicitaires) sont renforcés afin de pouvoir lancer des campagnes nationales importantes. Les moyens affectés à la politique locale de sécurité routière et aux actions déconcentrées auront pour but de mobiliser les collectivités locales et un nombre plus important d'associations. En matière de formation, les moyens de la formation des conducteurs seront accrus

En matière d'exploitation de la route, l'année 2000 sera marquée par la mise aux normes des carrefours à feux et la mise en oeuvre du schéma directeur d'exploitation de la route. Les crédits consacrés à ce poste s'élèveront à 318 millions de francs (+4%) c'est-à-dire le niveau atteint en 1997.

Votre rapporteur se félicite de l'accent mis, en 2000, sur la sécurité routière. Il l'estime d'autant plus nécessaire que les résultats de la France en matière de sécurité routière sont déplorables. Il souhaite toutefois que les moyens nouveaux, essentiellement des moyens de communication, fassent l'objet d'une étude d'impact précise, et que la politique de sécurité routière française tire profit des exemples étrangers, afin de répondre au plus près aux besoins en matière de sécurité routière.

Les seuls moyens d'information et de communication ne suffisant pas, l'année 2000 devrait être également l'occasion d'accentuer le dispositif de sanctions en matière d'infraction à la sécurité routière.

2. Le renforcement de l'arsenal répressif


Les résultats de la France en matière de sécurité routière ont été catastrophiques en 1998. La France se situe en effet à la troisième place dans l'Union européenne pour le nombre d'accidents corporels (124.387), derrière l'Allemagne et la Grande-Bretagne, mais au premier rang pour le nombre de tués (8.918). La France a été en 1998, le pays qui a connu la plus forte hausse du nombre de tués (+6%), alors même que la plupart des autres pays européens enregistraient des diminutions, comme l'Autriche (-14%), l'Allemagne (-9%), la Finlande (-8%) et le Danemark (-7%) à l'exception de l'Espagne et de la Grèce (+1%).

L'année 1999 a donc été l'occasion d'une prise de conscience des efforts à réaliser .

La loi n°99-505 du 18 juin 1999 portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents a introduit une nouvelle série de dispositions destinées à améliorer les comportements sur les routes.

Elle a instauré une responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule en cas d'excès de vitesse ou de franchissement irrégulier du feu rouge ou du stop.

Elle a créé une sanction pour récidive de grand excès de vitesse (3 mois d'emprisonnement et 25.000 francs d'amende).

D'autres dispositions concernent l'instauration d'un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel, l'obligation pour les conducteurs novices auteurs d'une infraction grave de suivre un stage de formation, et l'encadrement des conditions d'accès aux professions d'auto-écoles.

Le comité interministériel de la sécurité routière qui s'est tenu le 2 avril 1999 sous la présidence du premier ministre a également préconisé le renforcement des contrôles routiers et des sanctions . Parmi ces contrôles figurent notamment les dépistages d'alcoolémie. Il faut remarquer, à cet égard, que le nombre de dépistages préventifs d'alcoolémie a augmenté en 1998 (+3,5%) et surtout le nombre de dépistages positifs (+12,4%). Le nombre de dépistages pratiqués en cas d'accidents a légèrement diminué en 1998, mais le nombre de dépistages positifs a aussi augmenté (+7,3%). Quel que soit le type de dépistage, la proportion de dépistages positifs augmente donc de façon sensible. On observe le même phénomène sur les trois premiers mois de 1999.

Les effectifs des unités spécialisées de gendarmerie nationale affectés à la sécurité routière sont accrus de 250 militaires afin de répondre à l'objectif d'accroître de 10 % le temps aux contrôles routiers (missions de surveillance du trafic et nombre de dépistages d'alcoolémie). Les unités polyvalentes de la police nationale seront aussi mobilisées. Au total, 160 millions de francs seront consacrés à un plan d'équipement des forces de l'ordre en moyens modernes de contrôle. Enfin, des plans départementaux de contrôle seront élaborés sous l'autorité des préfets.

Il faut noter qu'au delà du renforcement de l'appareil répressif, le comité interministériel sur la sécurité routière a souhaité faire des efforts sur la formation . Des protocoles avec des assureurs devraient permettre de mener des rendez-vous d'évaluation pour les conducteurs novices et des plans de prévention des risques routiers seront mis en oeuvre dans les entreprises et les services de l'Etat.

3. L'accent mis sur la sécurité des infrastructures après l'accident du tunnel du Mont-Blanc

Suite à l'accident du tunnel du Mont-Blanc le 24 mars 1999, une circulaire interministérielle (ministères de l'Intérieur, de l'Equipement, des transports et du logement) en date du 9 avril 1999 a prescrit aux préfets de procéder à un diagnostic de sécurité des tunnels routiers du réseau routier national d'une longueur supérieure à 1 kilomètre.

Sur la base de ces diagnostics, un comité d'évaluation a remis un rapport le 20 juillet 1999, contenant des propositions sur les mesures générales à prendre et les mesures spécifiques à mettre en oeuvre sur chaque tunnel. Les préfets de département ont du établir pour le 15 septembre 1999 un inventaire général des actions à prendre pour chaque tunnel avec une estimation et un échéancier des réalisations. Concrètement, les actions à réaliser à court ou moyen terme sont relatives à la coordination des intervenants, à la qualification des personnels et à la réglementation de l'usage des tunnels (limitations de vitesse, matières dangereuses), aux actions d'information et de contrôle des usagers, enfin aux actions sur les équipements et le génie civil.

Concernant le tunnel du Frejus, des mesures de renforcement de la sécurité ont été mises en place dès avril 1999, notamment la réglementation de l'usage du tunnel (limitation de vitesse, signalisation, information des usagers, convoyage sous escorte des véhicules transportant des matières dangereuses).

S'agissant de la remise en service du tunnel du Mont-Blanc , après la remise du rapport commun des missions administratives d'enquête technique française et italienne, les ministres de l'équipement, des transport et du logement français et des travaux publics italien ont annoncé le 8 juillet 1999 les mesures à mettre en oeuvre pour la réouverture du tunnel. Ces mesures ont été suivies de décisions de la commission intergouvernementale de contrôle du tunnel du Mont-Blanc lors de sa réunion du 23 juillet 1999. Le coût des travaux préalables à la réouverture du tunnel s'élève à 1,3 milliard de francs. Le financement de ces travaux et la répartition de leur prise en charge fera l'objet d'un protocole entre les deux sociétés concessionnaires d'autoroutes française et italienne.

Il faut noter que 75 millions de francs sont prévus au FITTVN pour la mise en sécurité des tunnels routiers de plus d'un kilomètre : il importe que ces efforts soient poursuivis, avec la dotation nécessaire, pour les autres tunnels routiers.

Par ailleurs, le comité interministériel à la sécurité routière a annoncé la mise en oeuvre d'actions visant à l'amélioration des infrastructures , sans que l'on connaisse les projets de financement. Le critère de la sécurité routière sera prioritairement pris en compte dans la sélection des projets entrant dans le cadre des contrats de plan Etat-région et des programmes d'actions cofinancés.

Votre rapporteur rappelle, à cet égard, que les efforts en faveur de l'entretien des structures routières sont essentiels pour garantir la sécurité des usagers. Il importe donc, qu'au delà des actions sur les comportements (campagnes de communication, informations, répression), des actions déterminées soient menées sur la sécurité des structures.

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