CONCLUSION

L'opportunité de renforcer les liens entre la France et l'OIM

Membre fondateur du Comité intergouvernemental pour les migrations européennes en 1951, la France s'en est retirée en décembre 1966 . Notre pays estimait en effet, d'une part, que le mandat initial de ce comité destiné à faciliter les mouvements de population d'après-guerre se trouvait épuisé et, d'autre part, que l'influence exercée par les Etats-Unis au sein de l'OIM apparaissait excessive.

Confronté à la fin des années 70 au problème des réfugiés fuyant la péninsule indochinoise sur des bateaux de fortune (les " boat-people "), notre pays a été conduit à réviser sa position sur l'OIM dont la capacité en matière de transport des personnes déplacées était démontrée. Ainsi notre pays a réintégré l'OIM en plusieurs étapes : en 1981, il rejoint l'organisation en qualité de simple observateur ; en mai 1982 sa demande d'adhésion est acceptée par le Conseil de l'OIM ; enfin, en mai 1994, la procédure interne de ratification du texte constitutif de l'OIM est conduite à son terme.

La position de la France vis-à-vis de l'OIM appelle trois observations.

. Première observation : l'OIM présente pour la France un intérêt indéniable.

La position française à l'égard de l'OIM a longtemps été inspirée par une certaine réserve : la politique migratoire, prérogative de la Nation souveraine ne pouvait être abordée dans une enceinte multinationale. Qu'il s'agisse, dans les années soixante, de favoriser l'entrée de travailleurs immigrés en France ou, dans la décennie suivante, d'inverser cette orientation, notre pays a toujours compté sur ses propres moyens. Les pouvoirs publics ont ainsi créé l'Office des migrations internationales (OMI) dont l'activité a d'abord été centrée sur la gestion des flux migratoires, l'accueil des étrangers et de leur famille avant de se tourner, au milieu des années soixante-dix, vers l'accompagnement du retour des étrangers au pays d'origine.

Dès lors, la France a eu recours à l'OIM dans les seules situations d'urgence -elle a d'ailleurs pu se féliciter dans ces circonstances, souvent difficiles, de l'efficacité du concours apporté par cette organisation. La contribution française au budget opérationnel de l'OIM apparaît par ailleurs plutôt modeste : 7,71 millions de francs en 1999 (pour les transferts des Albanais du Kosovo accueillis dans notre pays).

La position plutôt restrictive de notre pays pourrait toutefois évoluer dans les prochaines années sous l'effet de plusieurs facteurs.

En premier lieu, l'approche multilatérale des questions liées à l'immigration tend à se généraliser . Elle s'impose même à l'échelle de l'Union européenne. En effet, la mise en place d'un espace de libre circulation des personnes entre les pays signataires de la convention d'application des accords de Schengen (1990) et, surtout, l'extension des compétences communautaires à l'immigration dont le principe a été arrêté par le traité d'Amsterdam (1997), conduisent progressivement les Quinze à renforcer leur coopération dans ce domaine.

De plus en plus, les Etats membres de l'Union européenne seront ainsi appelés à définir de concert leur position vis-à-vis des pays originaires de l'immigration. Dans cette perspective, ils auront intérêt à nouer le dialogue non pas pays par pays, mais plutôt avec des ensembles régionaux. L'OIM qui, rappelons-le, réunit pays d'origine, de transit et de destination, peut, de ce point de vue, constituer un forum propice aux échanges.

L'OIM peut, en second lieu, fournir des services utiles à notre pays dans le cadre de sa politique migratoire, en particulier pour la mise en oeuvre -aujourd'hui embryonnaire- de l'objectif de codéveloppement. En effet, dans les pays africains où l'Office des migrations internationales ne possède pas de représentation, l'OIM pourrait apporter son concours pour favoriser la réinstallation d'immigrés sur place et s'assurer, sur une période de quelques années, de la pérennité de leur réintégration. A la demande de l'Office des migrations internationales, des négociations avaient du reste été engagées à ce sujet avec l'OIM, sans connaître toutefois d'aboutissement. Il y a là un domaine où la coopération avec l'OIM pourrait également se révéler efficace.

. Deuxième observation : une organisation plus ouverte sur la France et la francophonie.

Un renforcement des liens entre la France et l'OIM apparaîtrait d'autant plus opportun que cette organisation elle-même a donné des manifestations récentes d'ouverture sur le monde de la francophonie.

Si le poste de directeur général échoit traditionnellement à un Américain -M. Brunson McKinly depuis le 1 er octobre 1998-, les fonctions de directeur général adjoint ont été confiées pour la première fois à une personnalité francophone , Mme Ndioro Ndiaye, de nationalité sénégalaise. L'élection de Mme Ndiaye à ce mandat représente un indéniable succès pour la France et la francophonie. Elle s'inscrit également dans un mouvement de rééquilibrage vers les pays du sud d'une organisation longtemps dominée par l'influence anglo-saxonne.

Il faut également relever la présence de cinq de nos ressortissants au siège genevois dans des postes d'encadrement (trois chefs de bureau -relations publiques, publications, statistiques- et deux chargés de mission -service d'audit et division des nouvelles technologies) et de cinq autres en poste dans des bureaux régionaux ou des missions locales. Par ailleurs, votre rapporteur a pu constater que l'essentiel de la documentation de l'OIM, en particulier le budget et les programmes d'action, étaient disponibles en français.

. Troisième observation : la nécessité d'aboutir sur la négociation à un accord de siège pour la représentation de l'OIM à Paris.

L'OIM dispose d'une représentation en France. Celle-ci ne dispose toutefois pas d'un statut officiel en l'absence d'un accord de siège entre l'OIM et la France. Les négociations engagées de longue date ont rencontré du côté français quelques difficultés, liées à des raisons techniques plutôt qu'à des considérations de fond. L'OIM pourrait se voir accorder un statut comparable à celui reconnu aux institutions spécialisées des Nations unies. La récente ratification par la France de la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, signée en 1947, favoriserait une telle solution. La signature d'un accord de siège pourrait accompagner la ratification des présents amendements et permettrait de marquer aussi, de la manière la plus explicite, la reconnaissance par la France de l'indéniable intérêt de cette organisation.

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Au bénéfice de ces observations, votre commission vous invite à donner un avis favorable au présent projet de loi.

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