b) Les rapports des juges : de l'utilité des commissions d'enquête
La
commission d'enquête du Sénat avait notamment pour mission de
s'assurer de l'effectivité du contrôle exercé par les
autorités judiciaires et administratives sur les établissements
pénitentiaires. Elle a donc souhaité disposer d'informations sur
l'élaboration des rapports prévus par le code de procédure
pénale et les suites qui leur sont données.
Devant la commission d'enquête, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la
justice, a évoqué en ces termes les rapports prévus par le
code de procédure pénale : "
Avant que le rapport
Canivet ne comporte des développements sur ces sujets, j'avais
demandé que l'on regarde comment le code était appliqué.
Les juges de l'application des peines vont dans les prisons
régulièrement et font des rapports : c'est leur
métier (...). En outre, il y a peu de rapports en dehors de ceux des
juges de l'application des peines.
"
Au cours de cette audition, qui s'est déroulée le 15 mars
2000, la commission d'enquête a demandé à disposer des
rapports adressés au Garde des sceaux pour l'année 1999, d'une
part par les juges de l'application des peines au titre de
l'article D. 176 du code de procédure pénale, d'autre
part par les premiers présidents de cours d'appel et procureurs
généraux au titre de l'article D. 179 du code de
procédure pénale.
Le 6 juin dernier, la direction des affaires criminelles et des
grâces du ministère de la justice a adressé au
secrétariat de la commission d'enquête les rapports dont elle
disposait.
Plusieurs réflexions peuvent être formulées.
Tout
d'abord, il est intéressant de noter que la plupart des rapports
transmis l'ont été après l'audition du Garde des sceaux
par la commission d'enquête ; toutes les dépêches de
transmission comportent une référence à une
dépêche de la chancellerie du 27 mars, ce qui laisse à
penser que ces rapports ne sont transmis que s'ils sont demandés.
Cette impression est confirmée par le nombre de rapports transmis et
certaines considérations figurant dans les rapports.
Alors qu'il
existe trente-cinq cours d'appel sur le territoire français, cinq
rapports ont été transmis par des chefs de cour au Garde des
sceaux au titre de l'article D. 179 du code de procédure
pénale.
Encore faut-il noter que l'un de ces rapports comporte deux
paragraphes.
Trente-six rapports de juges de l'application des peines ont
été transmis au Garde des sceaux, sans que l'ensemble des
ressorts de cours d'appel soient représentés.
Il semble en fait que la demande de la commission d'enquête du
Sénat ait permis la relance d'une pratique tombée en
désuétude. Ainsi, un rapport de chefs de cour comporte la mention
suivante : "
Nous avons l'honneur de vous faire parvenir notre
rapport sur le fonctionnement des établissements pénitentiaires.
Pour ce qui concerne notre cour, ce rapport n'avait pas été
rédigé depuis plusieurs années, son intérêt
paraissant assez formel et les événements affectant tel ou tel
établissement vous étant systématiquement signalés
dès qu'il y avait lieu de le faire
. " D'autres chefs de cours
ont formulé l'observation suivante dans une dépêche
à la chancellerie : "
S'agissant du rapport de
l'article D. 179 du code de procédure pénale auquel
nous sommes tenus, force est d'admettre qu'il n'a pas été
établi par nous-mêmes, comme par nos prédécesseurs,
depuis de nombreuses années. Si vous deviez estimer nécessaire et
opportun qu'il soit dès maintenant établi, nous ne manquerions
pas d'agir en ce sens.
"
Il ressort très clairement de ces éléments que les
rapports des chefs de cour ne sont plus élaborés depuis de
nombreuses années et que seule la demande de notre commission
d'enquête a conduit à l'élaboration de quelques rapports.
Les rapports sur l'application des peines sont quant à eux
établis de manière fort variable. Si trente-six d'entre eux ont
été adressés au Garde des sceaux après la demande
de la commission d'enquête, il est difficile de savoir combien ont
été élaborés pour les années
précédentes.