II. PRINCIPALES OBSERVATIONS
Votre rapporteur spécial estime que l'augmentation du budget de la culture dont le présent gouvernement avait fait une de ses priorités, ne peut tenir lieu de politique . Il voudrait, en cette année de fin de législature, manifester quelques réserves sur la façon dont a été atteint cet objectif.
A. 1 % ET APRÈS ?
Enfin, la France consacre 1 % du budget de l'État à la culture ; c'est un beau résultat. Mais pour quoi faire ? Conscient du caractère provocateur de la question, votre rapporteur spécial y voit, non la remise en cause de l'utilité de faire plus et surtout mieux pour la culture, mais la nécessité de connaître aussi précisément que possible ce qui est fait sur le terrain et de s'efforcer d'évaluer les résultats obtenus.
1. Une transparence des coûts toujours à l'état de promesse
En
matière culturelle comme dans d'autres domaines, pour prendre la bonne
décision, il faut savoir « combien ça
coûte » et c'est pour cette raison que votre rapporteur
spécial insiste sur l'importance de la compatibilité analytique
et la mesure des performances.
Nul doute que la nouvelle loi organique qui prévoit pour 2006 la
définition de missions associées à des indicateurs de
résultats - qui fait déjà l'objet de réflexion au
sein du ministère de la Culture -, devrait accélérer le
mouvement vers la prise en compte de la nécessité de
gérer, même l'action culturelle.
Malgré certaines avancées, les progrès sont lents dans la
mise en place les instruments de gestion indispensables à
l'efficacité de l'action administrative comme au contrôle de
l'emploi des fonds publics par le Parlement.
La mise en place des outils de
comptabilité analytique
reste
laborieuse : si la Comédie française reste exemplaire
à cet égard, on est en retard dans d'autres établissements
comme le Louvre ou la Bibliothèque nationale de France.
Des outils comptables, plus ou moins sophistiqués, existent mais ils
sont inégalement performants. Ainsi, la Réunion des musées
nationaux a un logiciel comptable JADE auquel devrait se substituer en 2002 un
nouveau système comptable plus adapté.
Votre rapporteur spécial signale qu'il n'est pas parvenu à
obtenir, pour l'instant, de la Réunion des musées Nationaux un
tableau de bord sommaire des résultats de chacune des expositions
qu'elle organise - précisant le coût prévisionnel, le
nombre de visiteurs et les recettes attendues pour les comparer aux
réalisations. Il reviendra dans son rapport écrit sur la
situation d'un organisme qui doit faire face à des difficultés
structurelles, et sur l'organisation et le statut duquel il s'interroge.
En revanche, les dépenses de personnel commencent à être
prises en compte et vous trouverez dans le rapport écrit un tableau
donnant la valorisation des rémunérations des personnels de
l'État affectés aux établissements publics
rattachés au ministère de la culture.
On peut signaler que celui-ci va mettre en place un
observatoire du
spectacle vivant
, ce qui est une façon de répondre aux
observations de la Cour des comptes qui avait fait remarquer que
«
l'administration ne dispose ni d'une synthèse des comptes
des compagnies, ni des données nécessaires pour en suivre
régulièrement la programmation et la
fréquentation
», citant parmi les données
intéressantes le nombre de spectateurs payants par
représentations.
Par ailleurs, la poursuite du processus de déconcentration n'est pas
favorable à l'exercice du contrôle parlementaire, ni même
d'ailleurs à la connaissance par l'administration de l'action du
ministère. Le logiciel informatique, « Quadrille», dont
la mise en place est en phase de test, devrait être opérationnel
en 2002 : ainsi saura-t-on enfin en temps réel ce que font les DRAC
des crédits déconcentrés, pas plus qu'on n'est en mesure
d'avoir une vision consolidée au niveau national de ce que tel ou tel
prestataire peut obtenir comme contrats ou comme subventions.
2. Le rééquilibrage Paris province contrecoup du préfinancement des grands travaux parisiens
Contrairement à l'année dernière, les
dotations
budgétaires consacrées aux équipements culturels locaux,
excèdent à nouveau celles consacrées aux grands
équipements culturels parisiens.
En fait, la décrue des crédits affectés au musée
des arts premiers permet au deux plateaux de la balance de s'équilibrer,
même si l'on ne trouve pas du tout le même type d'équipement
de part et d'autres : d'un côté, on trouve de grands
équipements lourds, de l'autre, des équipements de
proximité, manifestement divers, comme en témoigne l'appellation
«
Lieux de diffusion de musique et de danse, aménagements de
lieux de théâtre et de spectacles, publics ou privés,
orgues d'églises
», poste qui, avec 27,5 M€,
pèse plus lourd que la dernière tranche du musée des arts
premiers. Peu nombreuses sont les opérations qui, telles le centre d'art
contemporain des abattoirs de Toulouse aujourd'hui achevé, ou le futur
Musée des civilisations de l'Europe et de la
Méditerranéenne de Marseille, sont comparables aux projets
parisiens.
3. L'impossibilité de dépenser les crédits d'investissement : une fatalité dont on s'accommode
Si la
tempête
de décembre 1999
a constitué le
révélateur du mauvais entretien de nos monuments historiques,
elle l'est aussi de nos carences administratives
.
L'État éprouve les plus grandes difficultés à
consommer les 242 MF de crédits sur le chapitre 56-20 et
195 MF sur le chapitre 66-20 ouverts par le collectif budgétaire du
13 juillet 2000 en autorisations de programme comme en crédits de
paiement.
Or, en dépit des besoins résultant d'un état sanitaire
alarmant selon la Cour des comptes, l'État continue de s'accommoder
d'une situation où
l'administration du patrimoine n'arrive pas
à absorber plus d'un certain quantum de crédits
.
S'agissant des autorisations de programme, le tableau, qui figurera dans le
rapport écrit, retrace, région par région, le montant des
reliquats non encore affectés à la fin de l'exercice 2000, sur
chacune des lignes budgétaires d'investissement consacrées
à la restauration du patrimoine.
L'administration fait état d'un ensemble de facteurs qui tiennent
à la succession des étapes techniques, scientifiques et
administratives, de nature à expliquer cette fatalité des
reliquats
6(
*
)
.
Certes, si l'on neutralise l'incidence des crédits tempête de la
loi de finances rectificative
7(
*
)
sur les reliquats d'autorisations de programme non affectés, on constate
que le montant de ces reliquats au 31 décembre 2000 est tout à
fait comparable à celui constaté les années
précédentes.
Par ailleurs, s'agissant des crédits du chapitre 66-20, une autre raison
conjoncturelle doit être avancée pour expliquer l'augmentation du
montant des reliquats constatés. Les nouvelles règles
posées par le décret du 16 décembre 1999 relatif aux
subventions d'investissement de l'État, et l'arrêté du 30
mai 2000 ont en effet entraîné en 2000 un accroissement sensible
des délais de constitution des dossiers. Votre rapporteur spécial
note avec intérêt qu'
un
groupe de travail associant ses
services centraux et les services régionaux vient d'être
constitué afin d'analyser les causes de retard de la consommation des
crédits
et de proposer des solutions susceptibles d'améliorer
nettement la situation actuelle.
On n'est guère étonné de constater que les accents
triomphalistes des tableaux du dossier de presse retraçant les
crédits inscrits en loi de finances, sont contredits par les
réalités budgétaires des lois de règlement. Ainsi
voit-on qu'
en
termes de budgets exécutés, on est, en
2000
,
à 500 millions en dessous des dépenses effectives de
l'exercice 1997
. Un tel constat se passe de commentaires.
En revanche, en ce qui concerne les
dépenses ordinaires
, les
dotations
ont augmenté de plus d'un milliard de francs passant de
10,337 milliards de francs en 1997 à 11,368 milliards de francs
en 2000
. Compte tenu des dotations prévues par les projets de loi
de finances pour 2000et 2001, on a toutes les raisons de penser que ce
gonflement des dépenses de fonctionnement de l'État n'est pas
achevé.