B. L'EXÉCUTIF EST FRÉQUEMMENT CRITIQUÉ POUR SES MANQUEMENTS AU RESPECT DU PRINCIPE DE SINCÉRITÉ

Suite à l'épisode de la " cagnotte fiscale " à la fin de l'année 1999, votre commission a été dotée des prérogatives d'une commission d'enquête, afin de recueillir des informations sur le fonctionnement des services de l'Etat, en particulier ceux du ministère de l'économie et des finances, dans l'élaboration des projets de loi de finances et dans l'exécution des lois de finances. Le rapport issu de ces travaux dresse le constat que " la sincérité des données à partir desquelles sont élaborées les projets de loi de finances n'apparaît pas comme l'une des premières préoccupations du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, que ce soit des services mais également des ministres ".

Le principe de sincérité peut être apprécié a priori (la loi de finances initiale) ou a posteriori (la sincérité des comptes budgétaires exécutés et de la comptabilité de l'Etat). L'appréciation de la sincérité de la loi de finances initiale pose un certain nombre de difficultés. La Cour des comptes souligne que, dans ce cas, " il faudrait préciser le champ de la sincérité. Comprendrait-il la construction même du budget (périmètre et architecture de la loi de finances) l'adéquation des moyens, c'est-à-dire des crédits et des effectifs, aux missions, les hypothèses économiques, financières, fiscales et sociales du gouvernement, qui visent notamment les recettes ? La liste n'est pas exhaustive ".

Lors de son audition par la commission, M. Christophe Blanchard-Dignac, alors directeur du budget, a rappelé que " la sincérité du projet de loi de finances initiale, qui n'est d'ailleurs pas un principe de l'ordonnance organique, mais une construction jurisprudentielle, est une obligation de moyens, mais cela ne peut pas être une obligation de résultat à ce stade de l'année. Les comptes sont une obligation de résultats ".

Votre commission reconnaît que le principe de sincérité ne peut être apprécié de la même manière au stade de l'élaboration des projets de loi de finances et de la reddition des comptes. Dans le premier cas, il ne peut être sanctionné qu'au regard de la mauvaise foi du gouvernement. Cela supposerait de pouvoir vérifier que le gouvernement a exprimé de bonne foi ce qu'il savait au moment de l'élaboration du budget, compte tenu des règles en vigueur et des interprétations possibles de la situation nationale. La reddition des comptes est, quant à elle, l'occasion d'une pleine application du principe de sincérité.

Le rapport de votre commission sur l'élaboration des projets de loi de finances et l'exécution des lois de finances note également que les modifications intervenues dans la présentation des comptes de l'Etat portent préjudice au principe de sincérité. Il indique que " le gouvernement a procédé, en 1999, à plusieurs modifications dans la présentation des comptes publics afin de respecter son objectif d'une progression des dépenses limitée à 1 % en volume. Ces modifications, évidemment préjudiciables à la sincérité du budget de l'Etat, ont été mises en exergue par la Cour des comptes dans son rapport relatif à l'exécution des lois de finances pour 1999, estimant que les dépenses avaient progressé en réalité de 2,8 % en volume ".

Votre commission déplore donc que la sincérité ne constitue pas un objectif central, une exigence absolue du gouvernement. L'édiction d'une obligation de sincérité devrait permettre de contraindre l'exécutif à davantage de transparence, et ce, à l'occasion de l'élaboration comme de l'exécution du budget. L'objectif éminemment politique de solde budgétaire que propose le gouvernement à l'occasion de la discussion des lois de finances ne doit en effet aucunement affecter, lors de l'exécution budgétaire, le respect du principe de sincérité. Par ailleurs, l'objectif de solde ne saurait soustraire le gouvernement à l'obligation impérative de sincérité quant aux moyens de l'atteindre.

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