C. LA JURISPRUDENCE A PROGRESSIVEMENT DÉFINI UNE OBLIGATION DE SINCÉRITÉ APPLIQUÉE AUX COMPTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

Les exigences comptables de la comptabilité privée et de la comptabilité publique ont conduit à faire entrer progressivement, par le biais de la jurisprudence, le principe de sincérité dans la sphère publique. Le respect de ce principe de sincérité constitue désormais une exigence rappelée par les jurisprudences du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel. L'appréciation de la sincérité des comptes est prévue pour les budgets de certains établissements publics, et des collectivités territoriales. Son respect est vérifié par le juge administratif et les chambres régionales des comptes.

Depuis 1993, le Conseil constitutionnel répond au grief de l'insincérité des lois de finances qui lui sont déférées, sans pour autant l'avoir jamais estimé fondé. Les décisions du Conseil constitutionnel contribuent cependant à définir progressivement l'application dudit principe de sincérité au budget et aux comptes de l'Etat.

Il en ressort que ce principe conforte essentiellement les principes classiques du droit budgétaire que sont l'unité et l'universalité . Les non-budgétisations et les débudgétisations de recettes et de dépenses constituent des motifs fréquemment avancés par les requérants comme portant atteinte à l'unité, à l'universalité et à la sincérité budgétaire. Votre commission considère notamment que les débudgétisations constituent une entorse majeure au principe de sincérité, qui suppose l'exhaustivité et l'absence de dissimulation d'éléments participant à la construction du solde budgétaire.

Les artifices comportant dissimulation visent notamment à minorer les dépenses, à majorer les recettes, ou à faire les deux à la fois. Ils comprennent notamment : les débudgétisations systématiques, permettant de sous-estimer les dépenses et de réduire ainsi artificiellement les déficits ; le recours abusif aux opérations de trésorerie ; les surestimations de recettes. La sincérité implique donc que l'évaluation des ressources, des charges et de l'équilibre, soit réalisée avec bonne foi et aussi correctement que possible, afin d'éviter que la minoration des dépenses ou la majoration des recettes conduisent le gouvernement à afficher un solde budgétaire artificiel et fictif.

Le Conseil constitutionnel considère que le principe de sincérité n'est pas respecté lorsque des montages financiers complexes visent à rendre peu lisibles les opérations financières de l'Etat . La sincérité implique notamment une certaine cohérence entre les différents documents financiers et projets de loi soumis au Parlement : dans sa décision n° 97-395 du 30 décembre 1997, le Conseil rappelle que " le législateur organique a entendu mettre le Parlement en mesure de tenir compte, au cours de l'examen du projet de loi de finances, des incidences économiques et fiscales des mesures figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale ". Une loi de finances qui n'intégrerait pas les éventuelles conséquences de la loi de financement de la sécurité sociale préalablement adoptée pour le même exercice violerait donc le principe de sincérité.

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