2. La culture de l'anticipation : une économie tournée vers l'avenir

a) Un recyclage économique perpétuel

Comme cela a déjà été évoqué dans les développements précédents, les pouvoirs publics singapouriens sont perpétuellement désireux de développer de nouveaux secteurs à fort potentiel et à valeur ajoutée élevée .

Un " recyclage " permanent de l'économie s'opère ainsi sous leur influence, alimentant le phénomène (accéléré par la rareté de l'espace et des ressources humaines) de destruction créatrice qui caractérise le progrès. Ainsi l'activité des chantiers navals devrait-elle disparaître prochainement pour être remplacée par des industries à plus forte valeur ajoutée.

Après l'électronique, la chimie et les services, les secteurs actuellement favorisés sont :

- les technologies de l'information ;

- les sciences de la vie.

Pour la mise en oeuvre de cette stratégie d'anticipation, l'Etat singapourien non seulement investit, comme cela vient d'être détaillé, mais prend également des risques.

Ainsi, depuis 1985, EDB a engagé une activité de capital risque destinée, d'une part, à développer ce secteur et, d'autre part, à servir ses propres objectifs (développement de certains secteurs industriels, émergence de sociétés leader à Singapour, accompagnement de la projection régionale des sociétés implantées dans l'île, promotion de l'investissement et de la recherche).

Le premier fonds le capital risque lancé par l'EDB en 1986, " Transtech " dans le secteur des technologies de l'information , fut suivi de nombreux autres fonds spécialisés, notamment dans le capital d'amorçage , dans le secteur de la communication et des médias , dans les sciences de la vie , dans le " m-commerce " (c'est-à-dire les applications mobiles du commerce électronique).

Dans les biotechnologies , par exemple, deux fonds gouvernementaux, portés par l'EDB, existent :

- l'un, destiné au co-investissement (capital-risque) dans les jeunes pousses du secteur, est doté d'un milliard de dollars singapouriens (4,2 milliards de francs) ;

- l'autre, destiné à promouvoir la recherche dans ce secteur, est également doté d'une enveloppe d'un milliard de dollars singapouriens.

L'évolution de l'enveloppe des fonds de capital-risque portés par l'EDB ces quinze dernières années est particulièrement impressionnante :

MONTANT DES FONDS DE CAPITAL-RISQUE GOUVERNEMENTAUX

Source : EDB's Yearbook 1999/2000

La délégation a d'ailleurs pu se rendre compte de l'efficacité de cet apport -par définition temporaire- en fonds propres aux entreprises à fort potentiel, afin de faciliter leur implantation à Singapour, au travers de l'étude d' un exemple concret : celui de la société française GEMPLUS.

LE RÔLE D'EDB POUR L'IMPLANTATION DE GEMPLUS À SINGAPOUR

Dans les années 1980, les autorités singapouriennes cherchent à développer le secteur électronique. A la suite d'une rencontre en 1988 entre le Président-fondateur de Gemplus et un responsable d'EDB, et à l'initiative d'EDB, la société vient s'installer dans la Cité-Etat.

Les aides apportées par le Gouvernement singapourien ont été multiformes :

- participation au capital via un fonds de capital-risque détenu par l'Etat (l'entreprise publique Singapore Technologies) ;

- allégements fiscaux (liés au fait qu'il s'agissait d'une société en démarrage dans un secteur prioritaire, ayant choisi Singapour comme siège régional) ;

- financement des activités de recherche par un fonds public singapourien ;

- financements publics pour la formation du personnel.

Singapour a en contrepartie bénéficié de la forte croissance des résultats de Gemplus

Le groupe, qui comprend 6.000 personnes dont 400 à Singapour , est le leader mondial de l'industrie de la carte à puce, avec une part de marché de 37 %.

La Cité-Etat accueille le siège Asie-Pacifique du groupe, ainsi qu'un centre de production qui a produit plus de 100 millions de cartes depuis son ouverture en septembre 1998.

Son activité régionale est principalement portée par la technologie GSM (téléphonie mobile), la banque mobile et les transports. A Singapour, la société participe au projet ERP ( Electronic Road Pricing ) qui est un système de péage électronique ayant pour but la régulation de la circulation dans la " City " aux heures de pointe. Gemplus travaille encore sur de nombreux projets comme une carte d'identification pour l'immigration singapourienne ou la carte de fidélité de Malaysian Airlines.

L'Asie est une région particulièrement dynamique pour Gemplus , qui y réalise 18,5 % de son chiffre d'affaires. Après la crise de 1998 qui a secoué la région, le marché de la carte à puce en Asie Pacifique connaît à nouveau une véritable explosion. Le marché a cru de 35 % l'année dernière et représente 300 millions des 1,4 milliards de cartes vendues dans le monde, soit plus de 21 %.

En 1999, sur les 5 milliards de francs de chiffre d'affaires enregistrés par la société, 937 millions étaient réalisés en Asie. La croissance des ventes sur cette zone par rapport à l'année précédente (49 %), est plus importante que la croissance générale de Gemplus sur la même année qui atteignait 38 %. En 2000, la croissance pourrait même atteindre les 60 %, tirée par le développement des applications mobiles et du commerce électronique.

GEMPLUS : EVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRES

Source : Gemplus.

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