2. La congestion du trafic

La congestion du trafic, on l'a vu, ne constitue pas une externalité pour les non usagers puisqu'elle concerne les seuls automobilistes.

Elle représente cependant une nuisance, qu'il peut être utile d'évaluer afin de permettre sa prise en compte dans la décision publique.

• L'approche retenue par les différentes études consiste à comparer le temps effectivement passé à se déplacer avec celui que l'on passerait si la voie était vide, et à multiplier cette différence par une valeur du temps.

Selon M. le professeur Rémy PRUD'HOMME, il ne serait pas pertinent de choisir une route vide comme situation de référence :

« Les routes ne sont pas faites pour être vides. Supposons que je mette un quart d'heure pour aller à mon bureau en automobile sur une route vide; deux quarts d'heure pour y aller en fait, sur la route encombrée; trois quarts d'heure pour y aller en métro; cinq quarts d'heures pour y aller en bicyclette --ce qui est à peu près la moyenne dans l'agglomération parisienne. Pourquoi dire que je "perds" un quart d'heure ? Par rapport au temps que je mettrais en bicyclette, je gagne au contraire trois quarts d'heures. À ce compte-là, les usagers du métro "perdent" deux quarts d'heures tous les matins, et le coût social des transports en commun en Ile de France s'élève à près de 200 milliards de francs par an ! --conclusion évidemment absurde » 44 ( * ) .

La Délégation estime nécessaire de garder à l'esprit ces considérations, afin de ne pas commettre l'erreur fréquente d'assimiler les nuisances de la congestion à des nuisances du transport routier en tant que tel.

• Selon certaines études, le coût social de la congestion serait particulièrement important. Ainsi, selon un livre vert de la Commission européenne sur les transports (1995), les encombrements routiers seraient la principale nuisance occasionnée par le système actuel de transports (la Commission y voit même, nous semble-t-il à tort, une « externalité ») dans l'Union européenne, comme l'indique le tableau ci-après :

Les nuisances des transports routiers dans l'Union européenne,

selon la Commission européenne

En % du PIB, pour l'Union européenne

Nuisance

Evaluation monétaire

Encombrements routiers

2,0

Accidents

1,5

Pollution atmosphérique

0,4

Bruit

0,2

Source : Commission européenne, Vers une tarification équitable et efficace dans les transports - Options en matière d'internalisation des coûts externes des transports dans l'Union européenne , Livre vert, 1995.

Afin de donner un ordre de grandeur, 2 % du PIB correspondraient, dans le cas de la France, à environ 180 milliards de francs.

• Cependant, selon les principales études concernant la France, le coût de la congestion serait de l'ordre de seulement 30 milliards de francs (soit moins de 0,5 point de PIB), dont 20 pour les voitures particulières , comme l'indique le tableau ci-après. La Commission européenne n'indiquant pas sa méthode d'évaluation, la Délégation estime que ce sont ces ordres de grandeur qui doivent être retenus.

La perte de bien-être suscitée par la congestion

En milliards de francs

INRETS (1)

CGPC - coût marginal (2)

CNTV (3)

CCFA (4)

INFRAS/IWW (5)

Année prise en compte

1997

1997

1998

1989-1999

1995

Perte de bien-être (en milliards de francs)

Total

15 à 29

38,7

-

15 à 29

34,0

Voitures

9,8 à 18,8 (a)

22,5

-

-

21,6

Ces études reposent sur une méthode analogue, expliquant la similitude des résultats : comparaison du temps passé à se déplacer avec celui que l'on passerait si la route était vide, et multiplication de cette différence par une valeur du temps.

(a) Deux-roues et voitures.

(1) Jean-Pierre ORFEUIL, Les coûts externes de la circulation routière , Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, 1997.

(2) Christian BROSSIER, André LEUXE, Imputation des charges d'infrastructures routières pour l'année 1997 , Conseil général des ponts et chaussées, 1999.

(3) Christian MORY, Les coûts externes ou la difficulté d'estimer équitablement ce que représente l'automobile pour la collectivité , Comité des constructeurs français d'automobiles, 2000.

(4) Fabien DUPREZ, Les coûts externes du transport de voyageurs, selon les recommandations du rapport Boiteux de 2001, CERTU, 2001. Cette étude s'appuie sur les résultats du Compte national du transport de voyageurs 1998 (2001).

(5) INFRAS/IWW, External Costs of Transport (accident, environmental and congestion costs) in Western Europe , 2000. L'INFRAS est un organisme suisse d'étude des politiques publiques, l'IWW (Institut für Wirtschaftspolitik und Wirtschaftsforschung) un organisme allemand. Étude réalisée pour l'Union internationale des chemins de fer.

* 44 Rémy PRUD'HOMME, « L'outil tarifaire dans la politique des transports », note publiée dans Les Cahiers du CGPC , n° 2 (Avril 2001).

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