II. LA VARIABILITÉ DU CLIMAT

Au cours des différentes auditions, et surtout, au cours de ses diverses lectures, votre Rapporteur a noté que la situation climatique actuelle était généralement considérée comme la situation climatique normale. Or, depuis les 4,6 milliards d'années que la planète Terre existe, le climat n'a cessé de varier à sa surface et ce, souvent, dans des proportions très larges . Toute l'histoire du climat décrit l'amplitude de ces variations et leurs caractéristiques, et une immense partie de cette histoire nous est encore totalement inconnue.

L'essentiel des connaissances précises sur les climats du passé résulte de fouilles archéologiques et d'analyses de carottes glaciaires. Ces deux efforts conjugués ont permis de remonter jusqu'à 420.000 années avant notre époque, ce qui signifie que n'est actuellement connu assez précisément qu'un dix millième de l'histoire climatique de la Terre , et cela doit inciter à une très grande modestie dans l'analyse et les affirmations qui pourraient être tirées de ces analyses comme dans les tentatives de modélisation d'une évolution logique du climat.

Les recoupements opérés entre les analyses archéologiques et celles des carottes glaciaires effectuées essentiellement, pour les premières, par Mme Nicole PETITMAIRE et par M. Claude LORIUS (4 ( * )) pour les glaces, permettent de montrer que de grands changements peuvent être constatés à la suite de variations climatiques moyennes n'excédant sans doute pas 5 ° d'amplitude thermique .

Pour cette raison, le rapprochement de ces données avec les études actuellement menées par les divers scientifiques rassemblés au sein du GIEC, qui annoncent que la variation moyenne de température envisagée pour le XXI ème siècle sera de + 1 ° à + 3 ° ou de + 2 ° à + 4 °(2 ème rapport du GIEC) ou encore de + 1,4° à + 5,8° C (3 ème rapport du GIEC), malgré sa faiblesse apparente, ne constitue pas une variation anodine.

D'autant qu'en matière de climat, les moments de déclenchement des effets de seuil sont assez largement inconnus en l'état actuel de la science. Pour s'en tenir à un seul exemple lié à la circulation océanique , une augmentation de température de 4 ° dans la région du Labrador ne constituerait pas une catastrophe écologique en soi, peut-être même bien au contraire, mais si cette augmentation de température avait pour effet d'interrompre la plongée des eaux de l'océan à cet endroit, donc l'enfouissement du gaz carbonique qui en résulte et, surtout, de provoquer l'interruption de la dérive de l'Atlantique nord qui, avec le Gulf Stream, donne à l'Europe un climat tempéré, alors il faudrait réellement s'alarmer d'une telle hausse de température.

Même si l'homme refuse de prendre spontanément en considération les désagréments qui pourraient résulter d'un changement climatique, il est évident que dans le passé l'homme a dû, plusieurs fois, malgré lui, affronter des changements climatiques d'ampleur importante. Il en serait évidemment de même en cas de nouvelles variations du climat et les moyens techniques aujourd'hui disponibles ne seraient peut-être pas décisifs pour annuler ou atténuer les conséquences néfastes d'un tel changement. La différence par rapport aux périodes passées consisterait en la responsabilité de l'homme, au moins partielle, dans les changements climatiques actuellement observés. Au cours des périodes antérieures, l'homme n'avait d'autres choix que de s'adapter au climat, modifié par la fatalité. Aujourd'hui et à l'avenir, les changements climatiques pourraient peut-être émaner de l'action même de l'homme sans pour autant que l'homme soit à même de corriger les effets des changements qu'il aurait provoqués .

En effet, l'émission de vapeur d'eau, de gaz carbonique, de méthane et d'autres gaz à effet de serre peut être plus ou moins limitée par l'intervention de l'homme ; en revanche, comment l'homme pourrait-il organiser l'absorption de ces gaz pour annihiler leurs effets une fois que ceux-ci se trouvent libérés dans l'atmosphère ?

S'en remettre à la nature n'est pas davantage une solution à préconiser dans la mesure où les différents gaz à effet de serre ont des durées de vie fort variables et loin d'être négligeables.

Il ressort de ces considérations que la variabilité du climat, du fait ou non de l'homme, restera une donnée à laquelle il conviendra de s'adapter . Il ne reste qu'à étudier, selon les types de variations, selon leurs causes et selon les régions du monde, les marges de manoeuvre laissées à l'homme pour s'adapter et il est à craindre que celles-ci soient d'autant plus réduites que le rôle de l'homme dans l'émission de gaz à effet de serre aura été important.

* (4) « Glaces de l'Antarctique. Une mémoire, des passions ». Points. Editions Odile Jacob - 304 p.

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