DEUXIÈME PARTIE :


LES RESSORTS DE LA DETTE PUBLIQUE :

LE PASSÉ ET LE FUTUR

Les liens entre croissance et trajectoire de la dette publique dans le PIB sont à la fois étroits et complexes.

Tout d'abord, la trajectoire de la dette publique dans le PIB dépend, mécaniquement, dans un contexte donné de croissance, de l'accumulation des besoins de financement des administrations publiques 15 ( * ) .

C'est un constat simple que d'établir qu'il existe, à taux de croissance donné, un besoin de financement qui permet de stabiliser le poids de la dette publique dans le PIB.

Ce besoin de financement est celui qui fait varier la dette publique à un rythme strictement parallèle au rythme de croissance.


EXEMPLE SIMPLIFIÉ DU BESOIN DE FINANCEMENT
DES ADMINISTATIONS PUBLIQUES PERMETTANT DE STABILISER
LE POIDS DE LA DETTE PUBLIQUE DANS LE PIB

Soit un niveau du ratio dette publique/PIB égal à 50 % et une croissance nominale de 3 %, le besoin de financement permettant de stabiliser le poids de la dette publique dans le PIB est celui qui ne fait pas varier le niveau de la dette publique de plus de 3 %. Il est donc égal, en ce cas, à 1,5 point de PIB.

Le besoin de financement établissant la dette publique une année n est égal au ratio dette publique n - 1 / PIB n - le ratio dette publique n - 1 / PIB n - 1.

1. On peut en tirer une première conclusion : plus la croissance est élevée, plus il est aisé de stabiliser le poids de la dette publique dans le PIB, parce que, à besoin de financement donné, l'augmentation de la croissance provoque, en elle-même, une inflexion du ratio dette publique/PIB.

Cette donnée mécanique est confortée et amplifiée par des phénomènes de nature économique, puisque la croissance influence le niveau des besoins de financement publics.

Toutes choses égales par ailleurs, une croissance qui accélère favorise, en effet, la réduction du besoin de financement des administrations publiques à travers deux enchaînements.

Tout d'abord, elle réduit (s'il s'agit d'un déficit) ou augmente (s'il s'agit d'un excédent) le solde public à travers ses effets sur les recettes 16 ( * ) .

Ensuite, comme elle diminue l'écart entre le coût de la dette et le niveau de la croissance, elle provoque en elle-même, une réduction du poids des intérêts exprimés en points de PIB 17 ( * ) . En cela, elle pèse sur l'évolution spontanée du poids des dépenses publiques dans le PIB. Cet effet est crucial car il permet de desserrer la contrainte pesant sur les autres dépenses publiques. On observe alors que l'atténuation de « l'effet boule de neige » de la dette réduit les exigences concernant le solde primaire (soit l'écart entre les recettes publiques et les dépenses publiques hors dépenses d'intérêt) - voir infra .

2. Une deuxième conclusion s'impose : par ses effets sur le solde, mais aussi par ses effets sur l'évolution spontanée des dépenses d'intérêt, une croissance qui accélère est favorable à l'obtention d'un besoin de financement public compatible avec la maîtrise du ratio dette publique/PIB.

En bref, une accélération de la croissance, en même temps qu'elle réduit les exigences à satisfaire pour infléchir le poids de la dette publique, exerce des effets favorisant leur réalisation.

Ces effets cumulatifs favorables se muent en effets cumulatifs défavorables lorsque la croissance décélère.

Or, la période de 1996 à 2000 a été marquée par une accélération de la croissance. Il convient donc de déterminer dans quelle mesure cette accélération a exercé un impact sur la trajectoire de la dette publique. Plusieurs questions doivent être envisagées :

1°) Quel a été l'impact mécanique de la croissance sur la trajectoire du ratio dette publique/PIB, à besoins de financement donnés ?

2°) Quel a été l'impact de la croissance sur l'évolution des besoins de financement, ce qui revient à déterminer, par différence, l'évolution du solde public attribuable à des décisions relevant de la politique des finances publiques ?

3°) Dans quelle mesure l'atténuation de l'effet « boule de neige » de la dette a-t-elle simplifié les arbitrages sur les dépenses publiques qu'implique nécessairement un objectif de solde donné ?

Il est nécessaire de répondre à ces différentes questions pour appréhender exactement l'état des grands équilibres des finances publiques. Cependant, on ne peut se contenter de raisonner à partir des seules performances réalisées en matière de croissance. Il faut compléter l'analyse pour déterminer si, au cours d'une période donnée, l'équilibre des comptes publics a pu tirer parti, ou être handicapé, par un régime de croissance exceptionnel, non soutenable.

L'expérience et les approches économétriques montrent en effet que si la croissance est fluctuante, il existe, sur le moyen terme, une espérance raisonnable de croissance. Autrement dit, les phases hautes d'un cycle sont suivies de phases basses (et vice versa ) qui ramènent l'activité sur une tendance de moyen terme.

C'est en raison des effets de l'activité sur les équilibres des comptes publics qu'il est indispensable de dépasser la seule considération de ces équilibres à un instant donné. Il convient de les envisager en fonction de leur contexte économique, afin de déterminer ce que ces équilibres doivent à une croissance « excédentaire » (ou « déficitaire ») et d'isoler leur situation structurelle. Ce travail d'analyse s'appuie sur des méthodes présentées en annexe (voir l'annexe n° 4) dont l'objet est d'appréhender la situation réelle des finances publiques.

Les analyses portant sur la période de 1996 à 2000 montrent que, si la situation réelle des finances publiques a été améliorée, la trajectoire du ratio dette publique/PIB a également bénéficié d'un environnement économique dont tous les éléments ont été favorables et se sont renforcés les uns les autres.

Malgré ces évaluations, l'équilibre des comptes publics en fin de période pouvait être jugé comme encore vulnérable et semblait n'offrir la perspective d'étapes supplémentaires de réduction du poids de la dette publique qu'à de strictes conditions.

La projection présentée ici confirme ce diagnostic. Elle comporte une actualisation des projections à moyen terme disponibles, dont aucune n'avait jusqu'alors intégré l'impact du ralentissement économique en cours.

* 15 Aux acquisitions nettes de créances près.

* 16 Et plus marginalement, sur les dépenses publiques primaires.

* 17 Cet effet est démultiplié lorsqu'une réduction des taux d'intérêt intervient, comme cela s'est produit au cours de la période sous revue.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page