B. UNE AMÉLIORATION SEULEMENT RELATIVE DU SOLDE STRUCTUREL

1. La réduction du besoin de financement public a, pour beaucoup, reposé sur une composante conjoncturelle toujours réversible

La croissance a exercé un impact très favorable sur l'évolution du besoin de financement des administrations publiques. En effet, en plus que de créer un environnement propice à une maîtrise comptable du ratio dette publique/PIB, l'écart de croissance a exercé un impact financier important, d'autant qu'il s'est combiné avec une élasticité exceptionnelle des recettes publiques.

L'analyse économique des soldes publics suppose de séparer leur composante structurelle, c'est-à-dire le niveau du solde public qui serait observé si l'économie se situait sur son sentier de croissance naturelle ou encore le solde public qui serait atteint s'il n'y avait pas de fluctuations conjoncturelles, et leur composante conjoncturelle.

A cet effet, plusieurs méthodes sont disponibles (voir l'annexe n° 4), qui débouchent sur des résultats différents. Toutefois, leur application aux soldes publics dégagés en France entre 1996 et 2000 apporte des résultats qui, pour être nuancés, livrent un enseignement peu ambigu.

La composante conjoncturelle du solde public a nettement contribué à la réduction du besoin de financement des administrations publiques entre 1996 et 2000 et la France connaissait, à cette dernière échéance, un déficit structurel élevé relativement à ses partenaires européens.

Différentes méthodes d'estimation de la composante conjoncturelle des soldes publics coexistent (voir l'annexe n° 4).

Elles produisent des résultats contrastés, comme en témoigne le graphique ci-dessous :

Soldes budgétaires conjoncturels (1991 - 2000)
FRANCE

(en points de PIB)

Source : SEBC

Ainsi, pour la période 1991-2000, les estimations de l'OCDE et du FMI accordent aux variations négatives de la conjoncture, à partir de 1992, un effet plus marqué sur le creusement du solde des finances publiques que celui évalué par la Commission européenne ou les travaux du système européen de banques centrales (SEBC). Par la suite, ces écarts de diagnostic initial se retrouvent dans l'appréciation du niveau absolu de la composante conjoncturelle des soldes publics. Celle-ci est toujours plus élevée dans les estimations de l'OCDE et du FMI que dans celles de la Commission et du SEBC

Toutefois, en tendance, les différentes méthodes donnent, grosso modo , des résultats semblables. La composante conjoncturelle du redressement des soldes publics s'affirme à partir de 1997.

Au cours de la période 1996 à 2000, le besoin de financement public a été réduit de 2,8 points de PIB. Selon les estimations de la Commission européenne, la composante structurelle du besoin de financement des administrations publiques s'élèverait à 1,3 point de PIB en 2000 contre 3,3 points en 1996 et le déficit structurel aurait ainsi été réduit de 2 points de PIB contre une contribution de la croissance à la diminution du besoin de financement de 0,8 point de PIB.

VARIATIONS DU SOLDE PUBLIC

ET DE SES COMPOSANTES (1996-2000)

(MÉTHODE COMMISSION EUROPÉENNE)

(en points de PIB)

1996

1997

1998

1999

2000

Déficit total

- 4,1

- 3

- 2,7

- 1,6

- 1,3

Déficit structurel

- 3,3

- 2,2

- 2,2

- 1,3

- 1,3

Déficit conjoncturel

- 0,8

- 0,8

- 0,5

- 0,3

0

Il faut souligner que dans cette évaluation, la totalité de la réduction du poids des intérêts dans le PIB est attribuée à l'effort d'amélioration du solde structurel.

Compte tenu de l'impact de la croissance - voir supra - sur la variation des charges d'intérêt, une autre vision est possible consistant à les imputer à la composante conjoncturelle des soldes publics. Dans cette dernière approche, la réduction de la composante structurelle du déficit public n'aurait atteint que 1,4 point de PIB entre 1996 et 2000, l'autre moitié de l'amélioration du besoin de financement public étant due à la réduction de la composante conjoncturelle des déficits publics.

Sans privilégier une approche plutôt que l'autre, il faut insister sur le caractère largement exogène des taux d'intérêt pour un pays comme la France et relever qu'à taux d'intérêt donné, il aurait fallu réduire le poids de la dette dans le PIB de près de 10 points pour enclencher une baisse du poids des charges d'intérêt semblable à celle qui est intervenue depuis 1996.

On peut retrouver la trace de cette approche dans les estimations diffusées par le précédent gouvernement dans son rapport remis au Parlement pour le débat d'orientation budgétaire pour 2002 22 ( * ) .

Source : Rapport du gouvernement préparatoire au débat d'orientation budgétaire pour 2002

Selon ces estimations, la composante structurelle du besoin de financement public aurait été réduite de 1,4 point de PIB, l'autre moitié de la réduction du besoin de financement public venant de la diminution de sa composante conjoncturelle.

Etant observé qu'une partie des écarts entre les estimations citées vient des difficultés de traitement du versement de la soulte France-Télécom, on soulignera que, sur longue période, l'état très dégradé des finances publiques en 1992 et 1993, issu de la combinaison d'une dégradation de la composante conjoncturelle du solde mais aussi d'une politique délibérée de creusement du déficit structurel, a appelé des efforts de redressement d'autant plus indispensables qu'ils conditionnaient l'adoption de l'euro.

Ces efforts ont connu un maximum d'intensité entre 1995 et 1996, le solde structurel se redressant de 1,9 point de PIB, soit davantage que sur l'ensemble de la période 1996-2000.

Quoi qu'il en soit, l'écart de croissance positif continu observé depuis 1997 ayant ainsi conduit à la suppression de la composante conjoncturelle des déficits publics, la totalité du besoin de financement des administrations publiques observé en 2000 était imputable à des facteurs structurels.

On peut estimer, toutes choses égales par ailleurs, les déficits qui se seraient produits sans la réduction de la composante conjoncturelle du solde public engendré par l'écart de croissance.

BESOINS DE FINANCEMENT

HORS REDUCTION DE LEUR COMPOSANTE CONJONCTURELLE

(en points de PIB)

1997

1998

1999

2000

A - Besoin de financement observé

- 3

- 2,7

- 1,6

- 1,3

B - Besoin de financement à composante conjoncturelle inchangé

- 3

- 3

- 2,1

- 2,1

Ecart (B - A)

0

+ 0,3

+ 0,5

+ 0,8

On observe qu'alors les besoins de financement auraient excédé le niveau requis pour stabiliser la dette publique à croissance égale à la croissance potentielle.

Quoi qu'il en soit, la performance réalisée par la France serait sensiblement inférieure à celle observée dans les pays comparables, selon les estimations réalisées par l'OCDE.

VARIATION DU SOLDE STRUCTUREL DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
ENTRE 1996 ET 2000

(en points de PIB potentiel)

États-Unis

- 3,8

Allemagne

- 1,9

France

- 1,4

Italie

- 5,5

Royaume-Uni

- 5,4

Zone Euro

- 2,4

Source : OCDE

En conclusion, il importe de souligner qu'en dépit d'une amélioration structurelle du solde public, le niveau des déficits structurels restait important fin 2000. Cette situation était la manifestation du maintien d'un état des comptes publics vulnérable à un retournement de conjoncture, toujours envisageable, et susceptible d'ajouter à la composante structurelle du déficit public une composante conjoncturelle venant l'aggraver.

* 22 Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et des finances publiques. Mai 2001.

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