III. LE CADRE LÉGISLATIF ET RÈGLEMENTAIRE FRANÇAIS ET L'INTÉGRATION DES RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES

A. LE DÉCRET DU 3 MAI 2002

Prévu par l'ordonnance n° 2001-670 du 25 juillet 2001, le décret n° 2002-775 pris en application de l'article L. 32 (12 e ) du code des postes et télécommunications et relatif aux valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radio-électriques est paru le 3 mai 2002. Il concerne la gestion de l'ensemble des risques que pourrait présenter l'exposition du public aux champs électromagnétiques. Il transcrit en droit français les limites d'exposition définies par la recommandation européenne du 12 juillet 1999.

Il prévoit notamment que lorsque plusieurs équipements ou installations radioélectriques émettent dans une même zone, les opérateurs doivent veiller à ce que les champs électromagnétiques émis globalement par l'ensemble des équipements et installations concernés soient conformes aux niveaux de référence.

Les opérateurs doivent communiquer aux administrations ou autorités affectataires de leurs fréquences un dossier relatif à chaque installation contenant soit une déclaration selon laquelle l'antenne est conforme aux normes, ou spécifications pertinentes dont les références sont publiées au Journal Officiel français ou européen, soit des documents justifiant le respect des niveaux de référence (notamment en utilisant un protocole officiel de mesure in situ ).

Ce dossier doit préciser également les actions engagées pour assurer qu'au sein des établissements scolaires, crèches ou établissements de soins qui sont situés dans un rayon de cent mètres de l'équipement ou de l'installation, l'exposition du public au champ électromagnétique émis par l'équipement ou l'installation est aussi faible que possible tout en préservant la qualité du service rendu (cette disposition ne figurait pas dans la recommandation européenne mais était suggérée par le rapport Zmirou qui recommandait que les bâtiments sensibles situés à moins de 100 m d'une station de base macro cellulaire ne soient pas atteints directement par le faisceau de l'antenne). Il est communiqué à l'Agence nationale des fréquences lorsqu'elle procède à des contrôles.

B. LES DISPOSITIONS ANTÉRIEURES

Ces dispositions couvraient des domaines divers : réseaux de télécommunications et santé ; réseaux de télécommunications et environnement ; contrôle des obligations des opérateurs ; structures de concertation. Elles découlaient de textes se situant à des niveaux différents dans la hiérarchie des normes juridiques.

1. Réseaux de télécommunication et santé

§ L' ordonnance n° 2001-670 du 25 juillet 2001 portant sur la transposition de la directive RTTE 1999/5/CE concernant les équipements hertziens et terminaux de télécommunication a modifié le Code des postes et télécommunications, afin d'introduire la protection de la santé au titre des exigences essentielles pour les équipements de télécommunication.

§ La première conséquence de l'introduction de cette notion d'exigence essentielle de protection de la santé a été la modification, par un arrêté du 15 novembre 2001, du cahier des charges des opérateurs relatif à l'établissement et à l'exploitation des réseaux de téléphonie mobile afin que soient prises en compte les dispositions relatives à la protection de la santé publique. Dans ce cahier des charges, une référence aux valeurs limites d'exposition figurant dans la recommandation du 12 juillet 1999 a été introduite.

Il appartient donc aux opérateurs et installateurs de prendre les dispositions nécessaires pour que ces niveaux soient respectés en tout lieu où le public est amené à séjourner.

§ La deuxième mesure prise pour faire en sorte que les équipements de télécommunication satisfassent à l'exigence de protection de la santé l'a été par une circulaire interministérielle du 16 octobre 2001 (circulaire DGS/7D - UHC/QC/ - D4E - DIGITIP, relative à l'implantation des antennes relais de radiotéléphonie mobile) et concerne les périmètres de sécurité.

Sur la base des valeurs fixées par la recommandation européenne, le Centre scientifique et technique du bâtiment a établi des règles pratiques d'installation des stations de base, visant à délimiter les périmètres de sécurité autour des antennes relais.

Ces règles s'appliquent aux installations nouvelles sans délai et aux antennes existantes dans un délai maximum de 6 mois. L'annexe 1 de la circulaire qui fixe ces règles en fonction de chaque type d'antenne et de chaque type de localisation comporte en outre d'intéressantes précisions :

Ø «Dans la mesure où ces périmètres ont été établis pour les stations de base actuellement utilisées et pour les configurations les plus fréquemment rencontrées sur les réseaux GSM 900 MHz et DCS 1800 MHz, ils devront être adaptés au cas par cas par les opérateurs, en fonction des possibles évolutions du matériel utilisé et de l'éventuelle complexité de la configuration de l'installation (cohabitation de plusieurs antennes notamment). Par ailleurs, les réseaux de radiotéléphonie sont appelés à évoluer au cours des prochaines années, avec l'apparition ou le développement de nouvelles normes (réseaux TETRA, BLR, UMTS), correspondant dans chaque cas à des fréquences différentes et donc à des niveaux de référence différents. La présente annexe sera donc complétée ultérieurement afin d'intégrer les règles techniques applicables à ces nouvelles normes.

Ø En tout état de cause, ce sont bien les niveaux de référence définis dans la recommandation européenne qu'il importe de respecter. Il appartient donc aux opérateurs exploitants de réseaux de mettre en place les mesures nécessaires pour éviter toute exposition prolongée des personnes dépassant les niveaux de référence. L'opérateur exploitant est notamment tenu de matérialiser le périmètre de sécurité, après s'être assuré de sa pertinence au regard de la densité de puissance de l'antenne, d'afficher l'interdiction de pénétrer dans ce périmètre et le numéro de téléphone permettant de le joindre pour demander la coupure d'émission de l'antenne à l'occasion d'une intervention sur le site. Cette dernière devra être planifiée à l'avance.

Ø Le rayonnement émis par une station de base de radiotéléphonie est susceptible à courte distance d'entraîner un dysfonctionnement des prothèses implantables actives (pacemakers par exemple). Comme en atteste le rapport du groupe d'experts présidé par le Dr ZMIROU, ces dysfonctionnements ne sont jamais observés en dehors des périmètres de sécurité préconisés dans la présente annexe. Des panneaux d'information pour les personnes concernées devront être installés à proximité des antennes et appareils.

Ø Par ailleurs la présence d'une paroi dans les périmètres ainsi définis conduit à une atténuation de l'intensité du champ magnétique qui peut justifier une diminution des distances préconisées par la présente circulaire. A titre d'exemple, un voile de béton armé atténue le faisceau de l'antenne d'un facteur 30 environ et une cloison de plâtre d'un facteur 5. »

2. Réseaux de télécommunications et urbanisme/environnement

§ Une charte nationale de recommandations environnementales entre l'État et les opérateurs de radiotéléphonie mobile, du 12 juillet 1999, engage, d'une part, les opérateurs à orienter les choix d'implantation et de conception de leurs équipements dans le respect des contraintes environnementales liées à la qualité et à la fragilité des milieux naturels et, d'autre part, les services de l'État à fournir tous les éléments susceptibles de les aider à respecter cet engagement ; un guide méthodologique pour une meilleure insertion des équipements de radiotéléphonie dans le paysage a été édité afin d'orienter les choix d'implantation des équipements dans le respect des contraintes environnementales.

§ Par ailleurs, le Code des postes et télécommunications et le code de l'urbanisme contiennent des dispositions relatives à la protection de l'environnement lors de l'installation des antennes de stations de base.

3. Le Code des postes et télécommunications

La loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications modifiée par l'ordonnance du 25 juillet 2001 introduit notamment des dispositions pour la protection de l'environnement et la prise en compte des contraintes d'urbanisme et d'aménagement du territoire mais aussi des dispositions relatives à la santé.

a) L'article L.33-1 du Code des postes et télécommunications prévoit notamment que l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public sont autorisés par le ministre chargé des télécommunications. L'autorisation est soumise, selon le même article, à l'application des règles contenues dans un cahier des charges et portant, entre autres, sur les prescriptions exigées par la protection de l'environnement et par les objectifs d'aménagement du territoire et d'urbanisme comportant le cas échéant les conditions d'occupation du domaine public et les modalités de partage des infrastructures. Suite à la publication de l'ordonnance du 25 juillet 2001 relative à la transposition de la directive 1999/5/CE, le cahier des charges doit prendre également en compte, en tant que de besoin, la protection de la santé .

b) Selon les dispositions de l'article L.36-7- (1° et 3°) du Code des postes et télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) créée par la loi du 26 juillet 1996 précitée, instruit pour le compte du ministre chargé des télécommunications les demandes d'autorisation. Elle contrôle le respect par les opérateurs des obligations résultant des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables en vertu de ce code et des autorisations dont ils bénéficient et elle sanctionne les manquements constatés.

c) Lors de l'installation d'équipements de réseaux radiotéléphoniques, les opérateurs doivent respecter les exigences essentielles définies à l'article L. 32 (12°) du code précité (complété par l'ordonnance du 25 juillet 2001), parmi lesquelles figurent la protection de la santé et la sécurité des personnes, la protection de l'environnement et la prise en compte des contraintes d'urbanisme et d'aménagement du territoire . Dans ce même article, il est ajouté que les valeurs limites que ne doivent pas dépasser les champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations mentionnées à l'article L. 33-3 du Code des postes et télécommunications, lorsque le public y est exposé sont définies par décret.

d) L'article L. 45-1 du Code des postes et télécommunications dispose notamment que l'installation des infrastructures et des équipements doit être réalisée dans le respect de l'environnement et de la qualité esthétique des lieux et dans les conditions les moins dommageables pour les propriétés privées et le domaine public.

4. Le code de l'urbanisme et autres dispositions réglementaires

Selon ce code, les opérateurs de réseaux ouverts au public doivent s'assurer que leurs projets respectent les règles d'urbanisme ainsi que les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol. Les installations concernées doivent se conformer aux dispositions des documents d'urbanisme opposables, telles que les plans locaux d'urbanisme, en particulier celles relatives à la constructibilité, à l'implantation, aux distances ou à la hauteur des constructions.

Ce code soumet (art. R. 422-2) à la procédure de déclaration de travaux les ouvrages techniques dont la surface hors oeuvre brute ne dépasse pas 10 m², les poteaux et pylônes de plus de 12 mètres au-dessus du sol et les installations qu'ils supportent.

Le permis de construire n'est exigé que dans les cas particuliers où l'installation comporte un ouvrage technique de plus de 100 m² de surface hors oeuvre brute, une construction autre que technique ayant pour effet de créer une surface hors oeuvre brute sur un terrain non bâti ou, sur un terrain bâti, une surface hors oeuvre brut supérieure à 20 m 2 (article R 422-2, « m » du code de l'urbanisme), ou un dispositif d'antenne entrant dans son champ d'application et fixé sur un immeuble inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques (article R 422-2 du code de l'urbanisme).

En revanche, aucun contrôle n'est exercé au titre de code de l'urbanisme pour les poteaux ou pylônes d'une hauteur n'excédant pas 12 mètres au-dessus du sol et pour les antennes d'émission ou de réception de signaux radioélectriques dont aucune dimension n'excède 4 mètres.

Dans le cas d'une implantation d'antenne sur un terrain communal, le maire suscite une délibération du conseil municipal. Si l'implantation est approuvée, l'autorisation est ensuite transmise au préfet. La décision doit faire l'objet d'un affichage sur les panneaux en mairie, près des comptes rendus des conseils municipaux.

En ce cas, un recours devant le tribunal administratif est possible dans les deux mois suivant l'affichage de la délibération contestée.

Si un opérateur fait une demande d'installation sur un immeuble collectif, les copropriétaires sont invités à se prononcer en assemblée générale, extraordinaire ou pas. Mise à l'ordre du jour par le syndic ou par un copropriétaire, l'installation d'une antenne relais doit être proposée au vote. Les copropriétaires doivent se prononcer à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, soit une majorité renforcée (deux tiers des voix et au moins 50 % de participation).

Ce vote peut être contesté dans un délai de deux mois.

5. Le contrôle des obligations des opérateurs

La circulaire interministérielle du 16 octobre 2001, adressée notamment aux préfets départementaux et régionaux, précise :

« Compte tenu des missions que la loi a confiées à l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), vous pouvez saisir celle-ci de tout manquement aux obligations en matière de protection de l'environnement et de la santé prévues par le Code des postes et télécommunications que vous pourriez constater de la part des opérateurs.

Dans le cas où des contrôles seraient réalisés à la demande des usagers ou des collectivités, pour vérifier le respect des limites d'exposition au public, vous demanderez aux organismes de contrôle technique de faire usage du protocole de mesures et du formulaire de présentation des résultats définis par l'ANFR. Ces organismes de contrôle technique communiqueront le formulaire complété à l'ANFR afin de permettre la publication des résultats ».

Par ailleurs, le respect des valeurs limites d'exposition est systématiquement vérifié par l'ANFR dans le cadre de la procédure d'autorisation des installations de téléphonie mobile.

On peut noter cependant qu'aucune sanction n'est aujourd'hui prévue à l'encontre des opérateurs ne respectant pas les valeurs limites d'expositions du public. C'est dans le décret en Conseil d'Etat prévu par l'ordonnance du 25 juillet 2001 que figureront les sanctions pénales et administratives encourues par les opérateurs.

6. Les structures de concertation

La circulaire du 16 octobre 2001 prévoit l'élargissement au domaine sanitaire du domaine d'intervention et de la composition des instances de concertation initialement envisagées dans la circulaire du 31 juillet 1998 :

« Dans un contexte de forte expansion, l'absence de concertation sur la prise en compte de la protection de l'environnement a conduit parfois à des incohérences dans les choix d'implantation. Ce constat vous avait amené, conformément aux instructions contenues dans la circulaire du 31 juillet 1998, à créer des instances de concertation constituées de représentants des services déconcentrés de l'État, des collectivités locales, des services locaux de l'ANFR et des opérateurs de télécommunications concernés Depuis, les inquiétudes du public vis-à-vis d'éventuels effets sanitaires des champs générés par les stations de base se sont accrues notamment en milieu urbain.

Aussi, afin de prendre en compte ces préoccupations, ces instances de concertation doivent être maintenues, mais leur domaine d'intervention et leur composition doivent être élargis au domaine sanitaire. Ainsi, elles devront traiter des questions suivantes :

1- Continuer à examiner les projets d'équipement et les confronter à la sensibilité des sites envisagés en vue d'une meilleure insertion dans l'environnement. Ces initiatives prises à l'échelon régional ou départemental présentent un double avantage ; d'une part, établir le dialogue en amont avec les opérateurs pour favoriser une meilleure insertion des équipements dans le paysage, et d'autre part faciliter l'instruction des dossiers. L'insertion des stations de base dans le paysage urbain constitue un axe de réflexion particulièrement sensible ;

2- Organiser l'information des collectivités locales afin de les aider à répondre aux questions du public, notamment en ce qui concerne l'exposition aux champs électromagnétiques et de faciliter la gestion des éventuels conflits de voisinage provoqués par l'implantation des antennes.

Outre la DDASS, vous pourrez adjoindre à ces instances des représentants des associations ou organismes intéressés (riverains, parents d'élèves, etc.) pour définir avec eux les actions d'information à mettre en place.

Vous noterez que l'ANFR, chargée d'assurer la coordination technique de l'implantation des stations radioélectriques, peut être à même de fournir, sur demande, les informations pertinentes aux services déconcentrés de l'État pour qu'ils aient connaissance des sites d'implantation ».

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