UEBL
620

Cheptel de vaches allaitantes

Juin 2001

Danemark

127

Portugal

288

Irlande

1176

Finlande

27

Autriche

258

Suède

166

Italie

625

Allemagne

839

Pays-Bas

101

Grande-Bretagne

1707

Grèce

132

Espagne

1923

Source : OFIVAL d'après EUROSTAT

A lui seul, le cheptel allaitant français représente 35 % des bovins allaitants présents sur le territoire de l'Union européenne. Cette particularité française explique, en partie, les difficultés qu'éprouve la France à faire prendre en compte l'enjeu de cette activité agricole au plan européen.

c) Une implantation géographique typée, doublée d'une spécialisation fonctionnelle

? Une implantation géographique particulière

L'élevage bovin viande est présent sur l'ensemble du territoire. On distingue cependant :

- le grand bassin allaitant, qui constitue sa zone d'implantation naturelle ; il comprend la Bourgogne, l'Auvergne, le Limousin ;

- le cheptel des zones de montagne, qui recouvre pour partie le grand bassin allaitant (Auvergne, Limousin), mais également les autres massifs que sont les Alpes, les Pyrénées et le Jura, ainsi que des départements comme la Lozère, l'Aveyron, ou encore la Loire ;

- l'Ouest de la France, avec des départements comme la Vendée, le Maine-et-Loire, la Mayenne et la Basse-Normandie qui, compte tenu de la limitation du cheptel laitier, ont été incités à développer un élevage allaitant pour entretenir des zones en herbe ;

- des zones intermédiaires, comme la région Poitou-Charentes ou le Nord-Est de la France (Meurthe-et-Moselle, Ardennes).

Il n'a cependant pas la même importance socio-économique dans tous ces départements. L'élevage bovin viande représente ainsi 70 % de la dimension économique agricole d'un département comme la Creuse, 57 % pour la Corrèze, 50 % en Haute-Vienne et 41 % dans l'Allier. Sur le plateau de l'Aubrac, situé à la fois dans la Lozère, le Cantal et l'Aveyron, les producteurs de viande bovine représentent plus de 90 % de l'activité agricole.

? Doublée d'une spécialisation fonctionnelle

A mesure de son développement, le cheptel allaitant français a progressivement affirmé son orientation vers l'activité de naissage, au détriment de l'activité d'engraissement.

LES DIFFÉRENTS SYSTÈMES DE PRODUCTION EN ÉLEVAGE ALLAITANT

Les exploitations spécialisées dans le « naissage » produisent des jeunes mâles qui sont vendus vers l'âge de 10 mois, en vue d'être engraissés dans des ateliers extérieurs à l'exploitation.

Les « naisseurs-engraisseurs » élèvent et engraissent des mâles qu'ils vendent non castrés à un âge plus avancé (16 à 20 mois). Ce type d'exploitation se rencontre notamment dans la région Pays de la Loire, et des départements frontaliers comme les Deux-Sèvres.

Les « éleveurs engraisseurs » engraissent des mâles achetés à l'extérieur, mais ne détiennent pas de vaches.

Cette évolution a tout particulièrement concerné les grandes zones herbagères allaitantes, qui se sont spécialisées dans la production de bovins dits « maigres », destinés à être engraissés dans d'autres régions françaises comme le Grand Ouest, mais surtout dans les pays du Sud de l'Europe, au premier rang desquels l'Italie. Un veau mâle sur deux issu du cheptel allaitant français est ainsi commercialisé en maigre en Europe du Sud , pour laquelle le grand bassin allaitant français fait figure de véritable réservoir.

Il convient de noter que la viande issue des jeunes bovins ne dispose pas de marché en France, où les consommateurs sont plutôt habitués à la consommation de viande rouge, issue des femelles de réforme des cheptels laitier et allaitant. A cet égard, la finition des vaches de réforme est répartie de manière équilibrée sur l'ensemble du territoire.

Il n'en reste pas moins que cette spécialisation dans le naissage, et le recul corrélatif de l'engraissement, comportent un certain nombre d'inconvénients, notamment :

- une grande dépendance à l'égard des exportations , qui devient problématique quand les frontières se ferment, comme ce fut le cas lors de la deuxième crise de l'ESB et de la crise de la fièvre aphteuse, en 2001 ;

- une perte de valeur ajoutée, d'emploi et d'activité pour les régions spécialisées dans le naissage , dans la mesure où celui-ci ne favorise pas l'implantation d'activité en aval de la filière ;

- un risque de remise en cause par la réglementation européenne relative au bien-être animal , qui condamne le transport d'animaux vivants sur longue distance ;

- la sous-exploitation d'une production de viande finie de qualité.

A l'inverse, le rééquilibrage de l'activité du grand bassin allaitant vers l'engraissement soulève plusieurs problèmes :

- le manque de céréales produites dans cette zone peut créer une dépendance des éleveurs vis à vis des fabricants d'aliments pour animaux ;

- les jeunes bovins engraissés en France risquent de ne pas être substituables aux jeunes bovins engraissés en Italie à partir de veaux français, dès lors que les consommateurs italiens sont attachés à une viande produite chez eux , même si le « caractère national » de la production ne concerne que l'engraissement.

Un certain nombre de régions du bassin allaitant ont toutefois pris conscience de la fragilité induite par une spécialisation exclusive en « naissage » et cherchent à redécouvrir la finition des animaux, en expérimentant au besoin de nouveaux produits . C'est ce qui ressort des contributions écrites envoyées à votre rapporteur par les acteurs de l'élevage de cette zone. A titre d'exemple, la Chambre d'Agriculture de la Nièvre entend favoriser la finition des boeufs et des boeufs rajeunis.

d) Un élevage fragilisé par des crises récentes

L'élevage allaitant a été fragilisé par les deux crises de confiance liées à l'ESB de 1996 et 2000, qui ont entraîné une chute sensible de la consommation de viande bovine et une perturbation durable de l'équilibre des marchés.

En dépit du recentrage temporaire des consommateurs sur la viande issue du cheptel allaitant, qui renvoie à des pratiques d'élevage moins intensives et plus traditionnelles, c'est le secteur des races à viande qui subit le plus les conséquences de ces crises. En effet, le revenu des éleveurs allaitants dépend exclusivement des ventes de leurs animaux, alors que celles-ci ne constituent qu'un complément de revenu pour les éleveurs laitiers, dont 2/3 des recettes sont issues des ventes de lait.

L'année 2001 a ainsi été une année noire pour les éleveurs de race à viande.

2. Une orientation conditionnée par les différentes primes

a) Un système d'aides complexe

Alors que l'OCM viande bovine reposait à l'origine, de même que le régime des grandes cultures, sur une politique de soutien des prix assortie de mesures d'intervention en cas d'excédents et de restitutions à l'exportation, les deux dernières réformes de la PAC de 1992 et 1999 en ont radicalement modifié l'architecture. Elles ont, en effet, conduit à d'importantes baisses des prix de soutien, compensées par l'attribution d'aides directes.

(1) Les aides versées au titre de l'OCM viande bovine

C'est ainsi qu'a été mis en place un système complexe de primes 18 ( * ) versées directement à l'éleveur en fonction du nombre de têtes de bétail qu'il détient.

Pour limiter le caractère d'encouragement à la production intensive, le versement de ces primes compensatoires est limité à un quota de têtes primables par exploitation et subordonné au respect de « seuils de chargement », exprimés en nombre d'unités de gros bovin (UGB) par hectare.

En juin 2001, cette orientation en faveur de « l'extensification » a été encouragée par la baisse des plafonds de chargement pour être éligible aux différentes primes.

Les quatre aides directes à l'animal sont :

? La prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA)

Accordée chaque année en fonction du nombre de vaches allaitantes, dans la limite d'un plafond défini historiquement (nombre de vaches allaitantes sur l'exploitation en 1992) et d'un taux de chargement égal à 1,9 UGB par hectare de surfaces fourragères, cette prime est cofinancée par l'Union européenne et par les Etats membres.

? La prime spéciale aux bovins mâles (PSBM)

Cette prime est attribuée pour la détention de tout bovin mâle de plus de neuf mois dans la limite d'un plafond par exploitation et d'un taux de chargement fixé, depuis 2002, à 1,8 UGB par hectare.

? La prime à l'abattage

Cette prime est octroyée à l'éleveur lors de l'abattage ou de l'exportation vers un pays tiers de tout animal de l'espèce bovine, issu du cheptel laitier ou allaitant. Elle vise plutôt à favoriser l'engraissement.

? La prime complémentaire à l'extensification dite « complément extensif »

Cette prime complète la PMTVA et la PSBM pour les exploitations dont le chargement est inférieur à 1,4 UGB par hectare. Elle varie selon l'importance du chargement.

Ses conditions d'attribution ont été rendues plus restrictives en 1999 et 2002. D'une part, tous les animaux présents sur l'exploitation doivent désormais être pris en compte dans le calcul du taux de chargement. D'autre part, les cultures de maïs ne peuvent plus être comptées dans les surfaces fourragères, lesquelles doivent essentiellement être constituées d'herbe.

En outre, le règlement communautaire de 1999 portant OCM viande bovine a prévu d'allouer chaque année aux Etats membres une enveloppe financière dite « enveloppe de flexibilité » , leur permettant de soutenir certaines catégories de bovins ou d'abonder d'autres primes. Pour l'ensemble des Etats membres, cette enveloppe financière s'est élevée à 493 millions d'euros en 2002. La France a perçu à ce titre 93,4 millions d'euros en 2002, qu'elle a choisi d'utiliser en complément des primes à l'abattage pour les femelles.

Le tableau figurant en annexe 1 restitue les principales conditions d'attribution de ces différentes aides.

(2) Les autres aides contribuant au soutien de l'élevage bovin

? La prime au maintien des systèmes d'élevage extensif en France (PMSEE)

Première aide attachée à la surface dans le secteur de l'élevage , elle s'adresse spécifiquement aux élevages extensifs. Mesure agri-environnementale d'origine nationale qui bénéficie, pour l'essentiel, aux éleveurs des zones de montagne, elle a vu sa légitimité contestée par la Commission européenne au motif d'un impact positif insuffisant sur la protection de l'environnement.

La modification de la législation européenne par un règlement du 17 mai 1999 met un terme à ce dispositif, qui disparaîtra le 30 avril 2003.

Le précédent Gouvernement avait prévu une mesure de substitution restrictive, car conditionnée à la souscription d'un contrat territorial d'exploitation (CTE), faisant l'objet d'un cofinancement communautaire.

L'actuel ministre de l'agriculture a annoncé une mesure de plsu grande envergure pour 2003: a création d'une prime herbagère, agri-environnementale (PHAE). Selon les informations données par le ministre, son montant moyen sera de 68 euros à l'hectare, contre 40 euros en moyenne pour la PMSEE.

? Les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN)

Réservée aux zones défavorisées, en particulier aux zones de montagne, cette aide, qui était auparavant versée en fonction du nombre d'animaux, est depuis 2001 une aide à l'hectare basée sur la surface fourragère. Elle varie, en outre, selon la zone où est située l'exploitation et selon le taux de chargement de cette dernière. Elle concerne aussi bien les élevages de bovins que d'ovins.

Les changements de réglementation intervenus en 2001, dont l'objectif était de recentrer les aides sur les élevages situés en zone de montagne, ont été très mal vécus par les éleveurs , dont une partie ont vu leurs indemnités réduites. C'est notamment le cas des éleveurs ovins de l'Aveyron qui en ont témoigné auprès des membres de la mission d'information qui se sont rendus dans ce département.

b) Un système d'aides globalement peu pertinent

Outre la complexité des démarches administratives qu'il induit, ce dispositif d'aides apparaît aujourd'hui contestable, tant du point de vue de son manque de cohérence interne, qu'en raison des effets pervers qu'il génère.

? Une architecture globale qui manque de cohérence

Alors que la nature et l'orientation des aides retenues en 1999 voulaient privilégier le soutien des zones vouées à l'herbe, des décisions allant dans un sens contraire ont été prises dans le même temps.

Ainsi, l'alignement de l'aide au fourrage-maïs sur l'aide aux céréales favorise l'élevage intensif des zones de plaine, au détriment des zones traditionnelles d'élevage allaitant.

De même, la mise en cause de la légitimité de la PMSEE par la Commission européenne, au motif d'un insuffisant impact positif sur l'environnement, a conduit à restreindre l'attribution d'une aide tout à fait favorable à l'élevage extensif des zones de montagne.

? Un échec à assurer une maîtrise de la production

En dépit du contingentement des primes sur la base de références historiques, le système actuel des aides directes n'a pas permis une régulation satisfaisante de l'offre.

Il convient, tout d'abord, de noter que les références individuelles prises en compte pour le contingentement se rapportant à une année -1992-marquée par une rétention importante d'animaux sur les exploitations, n'ont, de ce fait, pas été très contraignantes.

Ensuite, la portée régulatrice des limites de chargement a été affaiblie par la reconnaissance d'exemptions de contraintes de chargement aux petits éleveurs, d'une part, et, jusqu'en 2001, pour certaines catégories d'animaux comme les génisses, d'autre part.

Surtout, une production de vaches s'est développée en dehors du contingent de primes , dans la mesure où il reste avantageux de détenir des vaches mêmes non primées. En effet, outre les veaux qu'elle produit et la production de viande qu'elle représente à terme, une vache nourrice non primée induit indirectement des primes à l'abattage et au jeune bovin mâle.

Enfin, la régulation inhérente au système des primes a été quelque peu contournée par une tendance à l'augmentation du poids moyen des carcasses.

? Des effets pervers non négligeables

Surtout, les primes bovines induisent, dans leur forme actuelle, des effets pervers conséquents.

L'abaissement des seuils de chargements a entraîné une course à l'agrandissement, qui pèse, dans certaines régions, sur le prix du foncier et freine les installations .

Une autre conséquence de cet abaissement a été l'abandon de l'activité d'engraissement dans les zones traditionnelles d'élevage allaitant , dans la mesure où celui-ci implique, en permanence, un plus gros effectif de bovins sur l'exploitation. Dès lors que la séparation des activités de naissage et d'engraissement permet de maximiser le montant des aides touchées, une division géographique des fonctions de l'élevage bovin s'est progressivement instaurée : production de jeunes bovins maigres dans le grand bassin allaitant, finition intensive en Europe du Sud et dans les zones laitières. Plusieurs régions réalisent aujourd'hui les fragilités auxquelles cette situation les expose.

D'autre part, en favorisant les comportements d'optimisation des éleveurs, les primes orientent les choix de production dans un sens qui ne correspond pas toujours aux attentes du marché. A titre d'exemple, l'attribution, à compter de 2000, du complément abattage aux génisses éligibles à la PMTVA a conduit à mettre massivement sur le marché de nombreuses génisses qui ne correspondent pas aux attentes des consommateurs.

Enfin, ces distorsions sont renforcées par l'importance des effets de seuils . Ainsi, les éleveurs naisseurs gardent généralement les jeunes bovins jusqu'à l'âge de neuf mois, pour pouvoir toucher la prime spéciale au bovin mâle (PSBM), alors que les engraisseurs italiens souhaiteraient pourvoir commencer la finition sur des animaux plus jeunes.

* 18 Règlement n° 2342/99 du 28 octobre 1999 relatif au régime des primes, pris en application du règlement n° 1254/99 du 17 mai 1999 portant organisation commune de marché de la viande bovine

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