CHAPITRE TROISIEME
UNE MODERNISATION DES TRANSMISSIONS À TITRE GRATUIT NÉCESSAIRE
ET ATTENDUE
Les
développements qui précèdent font apparaître la
nécessité d'une réforme du droit des transmissions
à titre gratuit. En effet, le droit positif français, dont
l'origine est aujourd'hui lointaine, présente des défauts et
incohérences. Ses mécanismes trop complexes, en ce qu'ils
comportent une multitude de barèmes et abattements et plus encore
d'exonérations très spécifiques, mériteraient
d'être simplifiés. D'une manière générale,
les droits de donation et de succession français privilégient des
tarifs élevés, corrigés partiellement par des
réductions d'assiette, exposant comme on l'a vu la France à la
concurrence fiscale de ses voisins.
En outre, l'appartenance de la France à l'Union européenne et
plus encore l'adoption de la monnaie unique sont autant de raisons pour
procéder à une réforme tendant à une meilleure
harmonisation de notre droit avec celui applicable dans l'Union
européenne.
Toutefois, il paraît préférable de se garder d'entreprendre
une réforme qui ne serait constituée que de modifications faites
par « à-coups », afin de ne pas aboutir à
l'effet inverse de ceux recherchés, à savoir la simplicité
et l'efficacité. C'est pourquoi une réforme globale devrait
être aujourd'hui privilégiée.
Toute réforme fiscale doit tendre vers deux objectifs parfois
malaisés à combiner que sont le respect de
l'égalité de traitement devant l'impôt entre tous les
contribuables et l'efficacité budgétaire, à la fois macro
et micro-économique.
S'agissant de l'égalité devant l'impôt, force est
d'admettre que c'est en simplifiant les mécanismes d'imposition que ce
principe serait le mieux respecté. Le paradoxe réside dans le
fait que l'existence de taux d'imposition élevés entraîne
généralement la multiplication des régimes spéciaux
et des cas d'exonération.
Quant aux considérations d'efficacité, que l'on se place sous
l'angle économique ou budgétaire, le résultat passe,
semble-t-il, par l'élargissement de l'assiette et par l'abaissement
concomitant des taux. A cet égard, il convient de noter que le Conseil
des impôts était arrivé à cette conclusion en 1998.
Il préconisait l'élargissement de l'assiette, notamment par la
taxation des contrats d'assurance vie, mais en contrepartie une baisse des
taux. On constate aujourd'hui que ces produits rentrent désormais dans
la base d'imposition des droits de mutation mais qu'en revanche, les taux
d'imposition n'ont pas été abaissés.
C'est pourquoi les réformes proposées ci-après nous
paraissent devoir être pensées à la lumière des
possibilités d'élargissement de l'assiette des droits de mutation
à titre gratuit envisageables, par exemple par la suppression de
l'exonération prévue en matière d'oeuvres d'art ou de
biens forestiers. En effet, la différence de traitement entre
l'héritier d'une entreprise, productrice de richesses et
génératrice d'emplois, et celui qui hérite d'une
importante collection d'oeuvres d'art exonérée de droits de
succession peut paraître critiquable.
La réforme à entreprendre serait différente selon la
politique retenue. En effet, dans une optique à court terme, la
réforme pourrait consister à réformer simplement les
barèmes d'imposition. Une telle réforme ouvrirait
néanmoins le flanc à critique, dans la mesure où par son
manque d'envergure, elle ne permettrait sans doute pas de résoudre
l'ensemble des difficultés soulevées par l'état actuel du
droit des mutations à titre gratuit français.
A l'opposé, une politique de réforme de plus vaste envergure
consisterait à refondre en profondeur le droit des donations et
successions. Une telle réforme suivrait alors trois axes principaux :
-
• Réforme ou simple revalorisation des barèmes ;
• Reconnaissance de la spécificité de l'entreprise en facilitant sa transmission ;
• Modernisation du droit au regard de l'évolution qu'a subit notre société ces dernières années.