II. UNE OPTIMISATION DE LA GESTION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS LOCALES MALGRÉ LES CONTRAINTES

A. UNE GÉNÉRALISATION DE LA GESTION ACTIVE DE TRÉSORERIE ?

1. La gestion active de trésorerie

La gestion de la trésorerie locale, comme l'ensemble de la gestion financière locale, est une préoccupation récente qui date du début des années 1990. Le développement des finances, des responsabilités locales, ainsi que l'évolution des conditions de financement de gestion des budgets locaux, ont fait prendre conscience aux gestionnaires des inconvénients d'une trésorerie excessive et, plus généralement, de l'utilité financière et technique d'une véritable maîtrise de la trésorerie locale.

a) Les caractéristiques de la gestion active de trésorerie

Les objectifs d'une gestion active de la trésorerie consistent en une diminution du coût d'opportunité, lié à l'impossibilité de placer des fonds disponibles. Pour cela, l'encours sur le compte au Trésor doit être le plus faible possible. Pour répondre à leurs besoins de financement, les collectivités locales font appel à des lignes de trésorerie, qu'elles mobilisent au fur et à mesure de leurs dépenses. Ainsi, la trésorerie « active », qui désigne l'ensemble des disponibilités, est associée à une trésorerie « passive », qui figure au passif du bilan de la collectivité, et correspond aux concours bancaires courants.

Une gestion active de trésorerie se caractérise par un recours important à la trésorerie passive, destinée à limiter l'encaisse dormante. Une fois mobilisée, la ligne de trésorerie alimente le compte courant au Trésor de manière à assumer les dépenses du jour. La mise en pratique d'une telle politique implique une collaboration étroite entre l'ordonnateur et le comptable public : ce dernier doit pouvoir déterminer quotidiennement, et le plus tôt possible, les encaissements et décaissements attendus pour la journée. L'ajustement entre les recettes et les dépenses est assuré par tirage ou remboursement de la ligne de trésorerie. La mise en place d'un tel plan de trésorerie, qui suppose des ressources techniques, concerne principalement les grandes collectivités, dont les masses financières en jeu incitent à une telle approche.

En l'absence de données et quotidiennes sur les opérations liées aux lignes de trésorerie (comptes 519 pour les communes et 569 pour les départements et les régions), l'impact d'une gestion active de la trésorerie ne peut être évalué que de manière partielle. Les mouvements sur le compte au Trésor étudiés ci-après renseignent sur le niveau des disponibilités mais pas sur leur nature : on ne peut évaluer notamment la part des fonds provenant de la mobilisation de lignes de trésorerie.

b) Des effets encore limité sur le volume global des encours

Sur un plan « macroéconomique », l'effet de cette gestion de trésorerie reste limité sur le compte au Trésor comme en témoigne le solde journalier moyen exprimé en jours de dépenses.

Moyenne annuelle du solde journalier du compte au Trésor des collectivités

(en millions d'euros)

 

Communes

Départements

Régions

EPCI

Total

1999

7.912

773

539

3.499

12.723

2000

8.564

1 258

766

3.800

14.388

2001

8.337

1 355

679

4.294

14.665

2002

8.237

1 479

810

4.637

15.163

Ventilation de la moyenne annuelle du solde journalier par catégorie de collectivité

(en %)

 

Communes

Départements

Régions

EPCI

Total

1999

62,2

6,1

4,2

27,5

100,0

2000

59,5

8,7

5,3

26,4

100,0

2001

56,8

9,2

4,6

29,3

100,0

2002

54,3

9,8

5,3

30,6

100,0

Solde journalier moyen exprimé en jours de dépenses

 

Communes

Départements

Régions

EPCI

Total

1999

40

7

7

15

54

2000

42

42

12

22

53

2001

39

39

12

18

55

L'analyse du solde moyen du compte au Trésor exprimé en nombre de jours de dépenses réelles 15( * ) révèle le poids de l'encours de trésorerie au regard des opérations réelles. Par exemple, les communes disposent en moyenne d'une encaisse correspondant à 39 jours de dépenses en 2001 .



La relation établie entre les dépenses totales réelles des collectivités et GFP et leur encours journalier moyen conduit à limiter la portée globale de la gestion active de trésorerie. Les communes disposent de 70 % de l'encours journalier moyen des collectivités et GFP, alors qu'elles ne représentent que 53 % des dépenses totales. Ces proportions doivent être nuancées par la taille des communes puisque l'encours moyen des communes de plus de 10.000 habitants représente 11 jours de dépenses contre 73 jours pour les communes de moins de 10.000 habitants.

c) Des effets indéniables en termes de mouvements de trésorerie

Si le recours à des lignes de trésorerie se généralise, même s'il reste marquée par des inégalités entre grandes et petites collectivités 16( * ) , la gestion active de trésorerie au sens propre reste l'apanage d'un petit nombre de collectivités locales. Néanmoins, la généralisation de cette pratique commence à avoir un impact indéniable sur le compte au Trésor.

L'agence France-Trésor, dans la gestion quotidienne de la trésorerie de l'État, constate ainsi une amplitude de plus en plus forte des mouvements de trésorerie sur le compte au Trésor, preuve que un nombre grandissant de collectivités locales a une gestion de plus en plus active de ses encours et qu'elles se servent du compte au Trésor pour optimiser la gestion de leurs lignes de crédits.

Évolution infra-annuelle 1995-2002-2003 du flux des collectivités locales
sur le compte du Trésor

(en millions d'euros)

Cette optimisation, par certaines collectivités locales, de leurs dépôts sur le compte au Trésor a pu conduire à certaines pratiques particulièrement ingénieuses. Il en est ainsi de la pratique du « crédit immédiat », dont les modalités sont décrites ci-après, à laquelle le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a mis fin au 1 er octobre 2003, qui permettaient aux collectivités locales et à leurs banques de gagner de trois à quatre jours de trésorerie au détriment de l'Etat.

Le gestion active de la trésorerie des collectivités locales engendre ainsi des problèmes nouveaux pour l'Agence France Trésor, à tel point que l'article 71 du projet de loi de finances initiale pour 2004 prévoit que les collectivités locales et leurs établissements publics informent l'État avant toute opération affectant le compte du Trésor, au-delà d'un seuil qui sera défini par décret en Conseil d'Etat. Les flux non annoncés par les collectivités locales représentaient en 2002 entre 150 à 200 millions d'euros en moyenne chaque jour, l'écart maximal sur une journée atteignant 600 millions d'euros.

La pratique du « crédit immédiat »

Collectivité locale

1/La collectivité locale tire sur sa 2/ Règle du crédit immédiat :
ligne par un chèque de 100 M€ le Trésor verse 100 M€ à la
le vendredi avant 10 h collectivité le vendredi

3/ La collectivité locale rembourse
les 100 M€ le vendredi par un virement

Banque commerciale Trésor

4/ La banque commerciale n'est débitée par la banque
de France pour le compte du Trésor des 100 M€ que
le lundi (J + 1), voire le mardi (J + 2) si le chèque a
été remis par la CL au comptable du Trésor après 10 h

Bilan :

• La banque commerciale est créditée le vendredi des l00 millions d'euros et est débitée le lundi ou le mardi des l00 millions d'euros : elle gagne de 3 à 4 jours de trésorerie .

• La collectivité locale a priori ne gagne ni ne perd puisqu'elle est créditée par le Trésor le vendredi des l00 millions d'euros et débitée par la banque commerciale le vendredi par \ VGM.

• Le Trésor perd 3 à 4 jours de trésorerie puisqu'il est débité le vendredi des l00 millions d'euros et crédité seulement le lundi ou le mardi lorsque le compte de la banque commerciale est débité et le compte du Trésor crédité en Banque de France.

2. Les placements

En revanche, le volume des placements reste limité : au 31 décembre 2001, il s'élevait à 980 millions d'euros, dont 855 millions d'euros de placements budgétaires et 125 millions d'euros de placements de trésorerie.

Stock des placements des collectivités locales rapporté à la trésorerie disponible,
au 31/12 de chaque année

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