2. Vers une fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG ?

L'imposition des revenus résulte de la sédimentation de diverses initiatives qui en ont affecté la lisibilité et donc la légitimité.

Une façon de réconcilier les Français avec l'impôt direct serait de mettre un terme à certaines incohérences et notamment d'articuler pour les fusionner ensuite l'impôt sur le revenu et l'ensemble CSG/CRDS.

a) Une question de cohérence politique

L'assiette de l'impôt proportionnel devrait être aussi large que possible, à l'égal de ce qu'elle est aujourd'hui pour l'ensemble CSG-CRDS, et peut-être même, à la marge, plus large pour englober un certain nombre de revenus, actuellement exonérés.

L'objectif est d'aboutir à un impôt vraiment « général », susceptible de faire l'objet d'un seul et même avertissement, ce qui devrait renforcer la conscience fiscale des Français. Cette idée fait du chemin même dans l'opposition, puisque l'on a vu récemment notre collègue député Didier Migaud, ancien rapporteur général du budget, souhaiter cette fusion :

« La fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu, avec, en corollaire, la retenue à la source, doit figurer au premier plan de notre réflexion. Cette réforme peut mettre fin à la fiction qui sépare les Français en deux : imposables et non imposables. Chaque Français, aussi modeste soit-il, paie un impôt. Cette réforme doit améliorer l'efficacité de notre système de prélèvement et la justice, en permettant de mettre fin à l'existence de nombreuses niches fiscales injustifiées et de pratiquer la vérité et la transparence des taux » 25( * ) .

Il convient en effet de dissiper l'illusion selon laquelle l'impôt n'est pas payé par tout le monde. Le fait que 50 % des foyers fiscaux puissent avoir le sentiment qu'ils ne paient pas d'impôt n'est pas dépourvu d'effet pervers. Quel que soit leur revenu, tous les Français paient la CSG et la TVA. Faute d'avoir conscience de payer l'impôt, nombre d'eux sont en fait incités à réclamer plus de prestations publiques. C'est une des raisons du « toujours plus », qui fait que, parfois même au sein des assemblées, un bon budget est un budget qui augmente.

En tout état de cause, il ne serait pas question, dans le schéma d'une éventuelle fusion, de revenir sur les différences de mode de perception de la CSG et de l'impôt sur le revenu, et en particulier sur le prélèvement à la source de la CSG.

Il ne serait pas question non plus de modifier l'affectation de la CSG à la sécurité sociale, car la configuration actuelle d'affectation d'un impôt à fort rendement au secteur le plus dynamique d'évolution des dépenses publiques présente une cohérence certaine, même s'il convient de ne pas céder à la facilité que constitue une augmentation de la CSG pour repousser les efforts de maîtrise des coûts. Dans cette perspective, la hausse de la CSG doit être plutôt une résultante, un complément de financement, qu'un remède miracle apparemment indolore.

A l'inverse, l'extension à l'impôt sur le revenu de la méthode indolore du prélèvement à la source n'est pas forcément une bonne chose au regard de la prise de conscience par tous les Français de la nécessité d'une maîtrise de la croissance des prélèvements obligatoires.

b) Des mesures d'ajustement réciproque nécessaires

La fusion de l'ensemble CSG-CRDS avec l'impôt sur le revenu soulève à la fois de faux problèmes de principe et de vraies difficultés techniques.

Ainsi le problème de la non-déductibilité partielle de la CSG au regard de l'impôt sur le revenu devrait trouver une solution naturelle dans l'unification à terme du barème. On ne peut imposer deux fois le même revenu mais dans le cadre d'un impôt unique, il ne pourrait bien sûr plus y avoir déductibilité.

L'autre question de principe est plus générale et a trait à la façon dont on va mettre en bout à bout deux impôts qui jusqu'à présent procèdent d'une philosophie différente. D'un côté, la CSG est un impôt simple à assiette large, relativement peu différencié selon la nature des revenus ; au contraire, l'impôt sur le revenu est un impôt à assiette étroite, très concentré, très différencié selon la nature des revenus et comportant un nombre considérable d'exceptions. En outre, on va devoir articuler un impôt éminemment « familialisé » par le jeu des quotients conjugal et familial avec un impôt qui ne prend pas en compte les caractéristiques du foyer fiscal.

Il ne faut pas se dissimuler le risque de voir la CSG « contaminée » par ce phénomène de personnalisation excessive qui a affecté le rendement et la cohérence de l'impôt sur le revenu. Mais il faut aussi compter sur la volonté politique qui sous-tendrait une telle réforme fiscale pour en prolonger l'esprit en remettant en cause un certain nombre de « niches » fiscales injustifiées.

Cette volonté d'unification de l'imposition des personnes rejoint tout à fait la volonté des fondateurs de la V ème République lorsque par la loi du 28 décembre 1959, ils ont créé un impôt annuel unique sur le revenu des personnes physiques.

Sur le plan technique, on retrouverait l'architecture à deux étages voulue à la Libération par les réformateurs de la IV ème République, puisque l'on aurait, au moins dans un premier temps, un impôt sur le revenu des personnes physiques qui se diviserait en deux branches : une taxe proportionnelle et une surtaxe progressive .

Il ne faut pas se dissimuler les difficultés techniques à résoudre pour parvenir à un système unifié d'imposition des personnes. IR et CSG n'ont ni la même assiette ni le même mode de recouvrement. D'un côté, on impose le revenu net, de l'autre le revenu brut, tandis que l'un est recouvré par la comptabilité publique et l'autre l'est par les URSSAF.

En raison des problèmes rencontrés, cette réforme fiscale, nécessaire dans son principe, doit à présent être étudiée en détail. Cela justifie que votre commission des finances soit favorable, comme cela a été le cas à l'Assemblée nationale, à ce que soit examinées avec les services du ministère de l'économie et des finances les modalités de la fusion entre la CSG et l'impôt sur le revenu.

En tout état de cause, l'affichage sur les avis d'imposition à l'impôt sur le revenu du montant acquitté au titre de la CSG, quand bien même cet impôt relèverait de la loi de financement de la sécurité sociale tandis que les dispositions relatives à l'impôt sur le revenu figurent chaque année en tête de la loi de finances, procurerait à nos concitoyens une vision consolidée de l'imposition de leurs revenus, dans le même esprit que celui qui préside à l'organisation du présent débat sur l'évolution des prélèvements obligatoires.

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