B. UNE RÉELLE AUTONOMIE FINANCIÈRE EN DROIT ET EN FAIT

1. L'autonomie du CSA est garantie en droit

Autorité administrative indépendante, le CSA dispose d'une autonomie financière dont le principe est défini par les troisième et quatrième alinéas de l'article 7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel propose, lors de l'élaboration du projet de loi de finances de l'année, les crédits nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ceux-ci sont inscrits au budget général de l'Etat. Les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne sont pas applicables à leur gestion ».

« Le président du Conseil supérieur est ordonnateur des dépenses. Il présente les comptes du Conseil au contrôle de la Cour des comptes ».

Le non-contrôle des dépenses engagées se traduit par l'absence de contrôleur financier, le contrôle de la Cour des Comptes intervenant a posteriori . A ce titre, la Cour des Comptes a procédé en 2001 au contrôle des crédits du CSA pour les exercices 1994 à 1999, dans un rapport confidentiel transmis à votre rapporteur spécial.

Dans ses propositions sur le projet de nomenclature budgétaire prévue dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF 7 ( * ) , votre commission des finances avait d'ailleurs proposé de conforter l'autonomie financière des AAI en regroupant leurs crédits au sein d'un même programme « Autorités administratives indépendances » au sein d'une nouvelle mission « Transparence et régulation de l'action publiqu e », qui aurait également comporté les crédits relatifs aux juridictions financières. Votre commission des finances avait observé que cette proposition permettrait de dissocier les crédits des régulateurs et des personnes contrôlées, afin que la fongibilité des crédits ne s'opère pas au détriment des premiers et au profit des seconds.

Votre rapporteur spécial a pu observer que, dans le cadre de cette autonomie financière du CSA, le contrôle interne des dépenses est effectué dans de bonnes conditions grâce à la rigueur de sa direction administrative et financière.

L'individualisation des crédits du CSA au sein du budget de l'Etat apparaît comme le corollaire de cette autonomie financière. Les crédits du CSA sont toutefois éclatés entre les chapitres suivants du budget des services du Premier ministre :

- chapitre 31-08 (article 10) : crédits de rémunérations (7,16 millions d'euros dans le budget exécuté 2003, soit 22 % des dépenses totales du CSA) ;

- chapitre 31-09 (article 10) : indemnités et allocations (1,69 million d'euros dans le budget exécuté 2003, soit 9,2 % des dépenses totales du CSA) ;

- chapitre 33-90 (article 38) : cotisations sociales, part de l'Etat (2,04 millions d'euros dans le budget exécuté 2003, soit 6,3 % des dépenses totales du CSA) ;

- chapitre 33-91 (article 38) : prestations sociales versées par l'Etat (0,11 million d'euros dans le budget exécuté 2003, soit 0,3 % des dépenses totales du CSA) ;

- chapitre 37-12 (article 10) : dépenses de fonctionnement (21,48 millions d'euros dans le budget exécuté 2003), soit 66,1 % des dépenses totales du CSA.

Cet éclatement des crédits entre plusieurs chapitres limite en pratique la liberté dont dispose le gestionnaire. Les crédits de la plupart des autres AAI sont inscrits sur un seul chapitre budgétaire 8 ( * ) . A cet égard, votre rapporteur spécial souhaite que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF, l'ensemble des crédits du CSA soient regroupés, de manière à lui procurer une souplesse accrue conforme au principe de fongibilité asymétrique des crédits consacré par la LOLF.

Ce souhait est d'autant plus fortement exprimé par votre rapporteur spécial que l'éclatement des crédits du CSA entre plusieurs chapitres budgétaires n'est pas justifié par une présentation plus fine des dépenses qui serait de nature à renforcer l'information du Parlement. Conformément au principe de fongibilité asymétrique des crédits à l'intérieur d'un chapitre, des écarts sont en effet constatés entre les prévisions et les exécutions des différents paragraphes du chapitre 37-12, où sont inscrits les deux tiers des crédits du CSA.

Proposition n° 4 : dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF, regrouper l'ensemble des crédits relatifs au CSA.

2. La pratique conforte l'autonomie financière du CSA

Bien qu'autonome financièrement, le CSA, à l'instar des ministères, négocie le niveau de ses crédits en conférence budgétaire avec la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Une partie des dotations peuvent également faire l'objet d'une mise en réserve (3,1 millions d'euros en 2003) et d'annulations (380.000 euros en 2003).

La discussion budgétaire se déroule en deux étapes.

Dans une première étape, une conférence technique a lieu entre le CSA et le chef du bureau de la sous-direction du budget en charge du CSA (Bureau 3A). Cette conférence se tient entre fin février et début mars de l'année n-1.

Au cours de cette réunion sont abordés l'exécution de l'exercice précédent et les faits marquants, les prévisions d'exécution de l'exercice en cours, les mesures d'ajustement nécessaires au fonctionnement courant des services et les mesures nouvelles à envisager dans le cadre du projet de loi de finances de l'année n.

Au cours d'une seconde étape, la conférence budgétaire de première phase se tient au niveau du sous-directeur entre fin avril et début mai de l'année n-1. Les différents points évoqués lors de la première étape font l'objet d'un examen plus rapide, l'essentiel de la réunion portant sur l'ouverture éventuelle de crédits.

Les besoins nouveaux sont examinés plus précisément et peuvent faire l'objet d'un débat et d'un arbitrage.

En règle générale le budget du CSA pour l'année suivante est arrêté à l'issue de la conférence de première phase et ne fait pas l'objet d'autres arbitrages en conférence budgétaire de deuxième phase .

Cette situation peu conflictuelle - que peut justifier la relative faiblesse des enjeux financiers (32,7 millions d'euros inscrits en loi de finances 2004 pour le budget de l'Etat) au regard du budget de l'Etat - se fonde sur une relation de confiance réciproque décrite comme suit, tant par le CSA que par la direction du budget.

Le CSA ferait ainsi preuve de transparence en reconnaissant que l'ensemble des crédits de l'année précédente n'ont pas été consommés, une partie du financement provenant du report de crédits non consommés de l'année précédente. Pour l'exercice 2003, ces reports de crédits non consommés de l'exercice 2002 ont atteint 7,16 millions d'euros , soit environ un cinquième de l'ensemble des crédits du CSA.

Ces crédits reportés ne font pas l'objet, en principe, de mesures de régulation en cours d'exécution budgétaire. Pour l'essentiel, ces reports proviennent du retard pris dans la conduite de certaines missions du CSA, en particulier la mise en place de la Télévision Numérique Terrestre (TNT), sans que cette situation ne soit imputable au CSA ( cf. graphique et encadré ci-dessous ).

Le niveau des reports de crédits du CSA (exercices 1998 à 2002)

(en euros)

Source : CSA

Les origines des reports de crédits du CSA (1998 - 2002)

(en euros)

Année n

Montant report année n+1

Justifications

1998

1.058.495 F
(soit 161.367 €)

Montant correspondant aux dépenses engagées et non payées au 31/12/1998.

1999

14.342.277 F
(soit 2.183.722 €)

Montant correspondant aux crédits ouverts - dépenses ordonnancées de l'exercice 1999 et qui comprenait d'une part les dépenses engagées et non payées au 31/12/1999 (2,3 MF) et d'autre part les crédits ouverts en LFR 1999 pour la mise en place de la Télévision numérique terrestre (8 MF) et l'acquisition d'un outil de planification des fréquences (1,5 MF) à utiliser en 2000.

2000

28.810.786 F
(soit 4.392.176 €)

Report de la totalité des crédits inscrits à l'état H qui correspond au montant des crédits ouverts - dépenses ordonnancées de l'exercice et qui comprenait d'une part les dépenses engagées et non payées au 31/12/2000 (8 MF) et d'autre part les crédits relatifs à la mise en place de la Télévision numérique terrestre non engagés au 31/12/2000 (5,6 MF) et l'acquisition d'un outil de planification des fréquences non réalisé en 2000.

2001

5.856.939 €

Report de la totalité des crédits inscrits à l'état H qui correspond au montant des crédits ouverts - dépenses ordonnancées de l'exercice et qui comprenait d'une part les dépenses engagées et non payées au 31/12/2001 (1,68 M€) et d'autre part les crédits relatifs à la mise en place de la Télévision numérique terrestre non engagés au 31/12/2001 (0,4 M€) à l'acquisition d'un outil de planification des fréquences non réalisé en 2001 (0,625 M€) et à la modernisation de la cabine d'enregistrement des programmes radiophoniques et télévisés (1 M€).

2002

7.162.787 €

Report de la totalité des crédits inscrits à l'état H qui correspond au montant des crédits ouverts - dépenses ordonnancées de l'exercice et qui comprenait d'une part les dépenses engagées et non payées au 31/12/2002 (1,4 M€), les crédits relatifs à la mise en place de la Télévision numérique terrestre non engagés au 31/12/2002 (0,6 M€) et à l'acquisition d'un outil de planification des fréquences non réalisé en 2002 (0,625 M€). Pour le solde, le report de crédits doit permettre de financer les opérations de déménagement et de réinstallation des services du CSA en raison des opérations de désamiantage qui doivent être effectuées dans la Tour Mirabeau. Les crédits nécessaires à ces opérations n'ont pas été ouverts en LFI 2003.

Source : CSA

Votre rapporteur spécial reconnaît le bien-fondé de la relation budgétaire entre le CSA et la direction du budget , mutuellement avantageuse pour l'un et l'autre partenaires, tout en observant que la transparence du CSA doit également l'amener à mettre en place une comptabilité analytique et à définir des indicateurs et des objectifs de performance, dans le cadre de la mise en place de la LOLF ( cf. infra ).

Il n'en demeure pas moins que la sous-consommation chronique des crédits n'est pas satisfaisante . Cette situation est révélée par les décalages entre les budgets votés en loi de finances initiale et les budgets exécutés : l'écart, inférieur à 1 million d'euros en 1998 et 1999, a atteint 2,4 millions d'euros en 2000 ; 1,8 million d'euros en 2001 ; 1,69 million d'euros en 2002 et 2,8 millions d'euros en 2003.

Faute enfin de réel contrôle en opportunité de la direction du budget sur les crédits alloués au CSA, votre rapporteur spécial a souhaité procéder à une étude des différents postes de dépenses du CSA dans le cadre de l'analyse de son budget.

* 7 Sénat, rapport d'information n° 292 (2003-2004).

* 8 Tel est en particulier le cas du Médiateur de la République, du Conseil de la Concurrence, de l'Autorité de Régulation des Télécommunications, de la Commission Nationale de Contrôle des Interceptions de Sécurité ou de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité. En revanche, les crédits de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés sont éclatés entre deux chapitres correspondant à la distinction entre crédits de fonctionnement et d'investissement.

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