2. La législation communautaire visant à l'instauration d'un marché unique des services financiers

Au sein de l'Union européenne, la COB et le CMF, et à leur suite l'AMF, ont activement participé, en vue notamment d'instaurer un marché unique de services financiers, à la mise en oeuvre du plan d'action pour les services financiers (PASF) . La définition en 1999 du PASF a fait suite à la communication de la Commission européenne du 28 octobre 1998 intitulée « Services financiers: élaborer un cadre d'action » , parallèlement à la mise en place de la monnaie unique. A la date du 2 juin 2004, 39 des 42 mesures du PASF avaient été adoptées au niveau communautaire , sans que l'ensemble des directives n'aient toutefois été transposées dans les droits nationaux. Un certain nombre de directives exerceront en particulier un impact majeur sur notre législation (cf. infra ), et devront être transposées dans les deux prochaines années.

3. Les autres chantiers concernant les services financiers

Une réflexion a été engagée au niveau communautaire sur certains champs d'action extérieurs au PASF, en particulier le gouvernement d'entreprise à l'échelle européenne et les agences de notation. Le renforcement du gouvernement d'entreprise et la modernisation du droit des sociétés ont fait l'objet d'un plan d'action spécifique, suite à une communication de la Commission européenne au Conseil et au Parlement européen le 21 mai 2003.

a) Le gouvernement d'entreprise

La Commission européenne a engagé le 21 mai 2003 une consultation publique sur la modernisation du droit des sociétés et le renforcement du gouvernement d'entreprise . Une communication de la Commission européenne a été publiée le 28 avril 2004.

Votre rapporteur général observe que les principes ainsi définis témoignent du rôle précurseur de la loi de sécurité financière et, plus largement, du droit français des sociétés s'agissant de l'obligation envisagée de déclaration annuelle du gouvernement d'entreprise (proche du rapport annuel du président sur le fonctionnement du conseil d'administration et les procédures de contrôle interne, prévu par la loi de sécurité financière), de la responsabilité collective des émetteurs sur les états financiers et les principaux documents non financiers, ainsi que de l'usage du droit de vote par voie électronique, lequel est prévu, tout en étant encadré, dans le droit français de la concurrence.

La Commission européenne envisage également une recommandation pour préciser et renforcer le statut des administrateurs indépendants.

b) Les agences de notation

Le Parlement européen a adopté le 10 février 2004 une résolution sur le rôle et les méthodes des agences de notation de crédit .

L'objet de cette résolution - non contraignante - est que les émetteurs faisant évaluer leur dette fournissent en permanence toutes les informations nécessaires pour les agences de notation, lesquelles doivent en retour se soumettre à des obligations de transparence sur les méthodes qu'elles utilisent et sur la nature de leurs relations contractuelles avec les émetteurs.

La Commission européenne a par ailleurs été invitée par le Parlement européen, dans sa résolution précitée, à « prendre toutes les dispositions nécessaires, notamment la réalisation d'une étude coûts-avantages des effets sur les marchés financiers, pour établir s'il est nécessaire d'instaurer, sous les auspices du Comité européen des régulateurs en valeurs mobilières, un système européen pour l'enregistrement en Europe des agences de notation , effectué sur la base de critères précis et rendus publics ». Cette initiative du Parlement européen fait ainsi ressurgir un débat qui avait été en réalité engagé par le Conseil Ecofin en avril 2002, dans le cadre d'un projet de plan « post-Enron », puis avait été en partie éludé. Les perspectives de réelle appropriation du débat par la Commission européenne au cours des mois et années à venir demeurent cependant encore incertaines : les autres thèmes de travail ne manquent pas et les opinions et sensibilités sont partagées au sein de la direction « marché intérieur ».

Le sujet est en effet délicat dans la mesure où le marché est oligopolistique et dominé par les Etats-Unis : deux des trois plus grandes agences de notation sont américaines , et agréées par la seule SEC, qui délivre le statut de NRSRO ( Nationally recognized statistical rating organization 161 ( * ) ). Le débat porte donc sur les risques et opportunités de mise en place d'une procédure d'enregistrement européenne, concurrente de celle américaine, qui pourrait in fine aboutir à une reconnaissance mutuelle, sur le modèle de l'agrément des auditeurs 162 ( * ) .

Le caractère oligopolistique (stabilisation des parts de marché et consolidation des barrières à l'entrée) des agences de notation conduit à des pratiques susceptibles de décrédibiliser le système de notation , dont l'utilité est pourtant incontestable : notations « sauvages » non sollicitées par l'émetteur et assorties par la suite de pressions sur ce dernier pour les rémunérer, recours au « notching » (refus de noter ou sous-notation d'un instrument financier, à moins de noter l'ensemble du « pool » auquel il appartient), conditionnement de la notation d'un client à son achat de prestations de conseil annexes. En outre le nombre restreint des acteurs induit un risque d'appauvrissement des analyses, un frein à l'impartialité et à l'innovation, une influence mutuelle renforcée et finalement un risque d'alignement et de convergence des notes.

Mettre fin à cet oligopole n'est cependant pas chose aisée : la création de nouvelles agences compétitives ne se décrète pas. La mise en place d'une procédure d'enregistrement européenne pourrait constituer une voie détournée pour améliorer les conditions de concurrence du secteur. En outre, si la compétence des analystes de ces agences est reconnue, l'indépendance des notateurs est parfois remise en question. Le CESR ayant travaillé sur les conflits d'intérêts au sein de la profession d'analyste financier, votre rapporteur général se demande s'il ne serait pas possible de transposer cette approche aux agences de notation .

Cette double problématique de l'oligopole et de l'indépendance illustre de fait la nature hybride des agences de notation , dont les caractéristiques ressortissent à la fois aux cabinets d'audit et aux analystes financiers.

* 161 Outre les trois agences Standard & Poors, Moody's et Fitch Rating, seule la Dominion Bond Rating Service Limited a été reconnue comme NRSRO.

* 162 Ainsi qu'il a été souligné en introduction, le caractère extraterritorial de l'agrément délivré par le PCAOB a dans un premier temps été mal perçu en Europe, avant que les discussions transatlantiques ne progressent pour qu'apparaisse clairement la perspective d'accords bilatéraux de réciprocité.

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