X. DES PERSPECTIVES INCERTAINES AU NIVEAU EUROPÉEN

1. La fragilité du fonctionnement actuel

a) Les interrogations sur les mécanismes d'AMM

* Le fonctionnement relativement satisfaisant atteint actuellement par l'Agence européenne et le réseau des agences nationales n'est pas un gage de réussite pour l'avenir, même proche.

Tout d'abord, certains épisodes ont montré les faiblesses et surtout les lenteurs de réaction de l'EAMA de Londres. Ce qui était perceptible avec l'affaire de la cérivastatine (Cholstat et Staltor) l'est encore bien davantage avec celle du Vioxx. Saisie en 2002 par l'AFSSAPS, l'EAMA n'a pas procédé à la méta analyse que l'équipe de chercheurs de l'Université de Berne a réalisé avec des moyens dont on peut penser qu'ils ne sont pas supérieurs. L'EAMA a demandé aux principales agences nationales de participer à la réévaluation du Vioxx et celle-ci ne s'est pas révélée décisive. De même, sa réactivité à la suite du retrait intervenu le 30 septembre 2004 ne paraît pas à la hauteur des enjeux.

-- Les délais maxima imposés par les procédures d'AMM (210 jours pour la centralisée et la nationale) ont pu être maintenus à un niveau satisfaisant pour la qualité de l'expertise scientifique lors de l'élaboration de la Directive 2004/27/CE et au Règlement CE n° 726/2004, mais on a pu remarquer des pressions pour raccourcir ces délais du côté des fabricants comme de la Commission elle-même, qui proposait 150 jours pour la procédure nationale. Une exception a été consentie pour la procédure centralisée à 150 jours dans le cas « d'un médicament présentant un intérêt majeur du point de vue de la santé publique et notamment du point de vue de l'innovation thérapeutique ». Il en a été de même pour la réévaluation de l'AMM au terme d'un délai de cinq ans qui a été maintenu, mais dont la Commission proposait la suppression, au profit d'une AMM illimitée.

-- La procédure de l'AMM par reconnaissance mutuelle qui avait été conçue pour avoir un caractère transitoire en attendant la montée en puissance de la procédure d'AMM centralisée a été en fait pérennisée ; or, contrairement à celle-ci, elle est moins transparente.

-- Plus inquiétant est le fait que les fabricants ont le pouvoir de choisir en fait le « pays rapporteur » donc l'agence qui examinera sa demande. Ils sont naturellement tentés de choisir celle qui l'examinera le plus vite et qui manifestera un niveau d'exigence moins élevé. Si l'on garde à l'esprit que les ressources des agences nationales proviennent pour l'essentiel des redevances versées par les fabricants lors du départ de leurs demandes, la pression sur les agences pour un examen rapide et compréhensif n'en est que plus forte. Or, la disparité des conditions d'examen et des capacités d'expertise n'est pas niable. Ce qui pouvait être un problème limité à Quinze a toutes les chances de devenir préoccupant à Vingt-cinq, sachant qu'on ne saurait reprocher aux nouveaux Etats-membres de ne pas disposer de l'expertise et de l'expérience qui ne pouvait par définition être la leur avant 1989. Certes, dans le cadre de procédure de « pré adhésion », les agences nationales ont été amenées à développer une coopération systématique avec les instances homologues des pays alors candidats pour leur permettre d'atteindre un niveau opérationnel dès l'adhésion (Grande-Bretagne avec République Tchèque, France avec Pologne, etc ...). Il serait toutefois logique de s'assurer que les objectifs ont été atteints.

A ce sujet, il doit être rappelé que dans les instances de l'EAMA où l'on est amené à prendre des décisions collectives, les représentants de chaque Etat-membre disposent de la même voix, quelle que soit sa population et sa production pharmaceutique.

-- L'environnement organisationnel est également devenu « concurrentiel » pour le contrôle des vaccins. En effet, dans le cadre de la procédure européenne de libération des lots pour les produits immunologiques, le fabricant peut choisir le laboratoire de contrôle qu'il souhaite parmi tous les laboratoires officiels européens.

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