CC. 2.1. DES INITIATIVES PLUTÔT POSITIVES

Alors que le projet de loi relatif à la politique de santé publique devait être examiné en première lecture par l'Assemblée nationale au début du mois d'octobre 2003, le ministre de la santé, M. Jean-François Mattei a présenté les amendements au projet originel pour concrétiser les mesures qui constituaient une réponse à la crise de la canicule, pour ce qui relevait de la sphère du ministère de la santé au sens large (InVS, y compris les systèmes de recueil de statistiques etc...). Des mesures concrètes avaient déjà été prises au niveau réglementaire sur la transmission des informations relatives aux décès.

* Les nouveaux pouvoirs confirmés du ministre de la santé sont affirmés et concrétisés dans un nouveau chapitre du code de la santé publique intitulé « menace sanitaire grave » comportant cinq articles dont le premier fixe cette nouvelle prérogative du Ministre :

« Menace sanitaire grave : art. L. 3110-1 - En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et approprié aux circonstances de temps et de lieu afin de lutter contre la propagation de maladies (...) ».

* Les missions de l'InVS ont de leur côté fait l'objet d'une définition et d'une articulation à la fois plus large et plus précise, voire exhaustive. La rédaction précédente de la loi du 1 er juillet 1998 ne laissait déjà aucun doute quant à la réalité de la mission de l'InVS dans une situation telle que celle de la canicule de 2003.

Loi du 1 er juillet 1998

Loi du 9 août 2004

« art. L. 1413-2 - Un Institut de veille sanitaire, établissement public de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, est chargé :

1°D'effectuer la surveillance et l'observation permanente de l'état de santé de la population, en s'appuyant notamment sur ces correspondants publics et privés, participant à un réseau national de santé publique, dans le but :

- de participer au recueil et au traitement des données sur l'état de santé de la population à des fins épidémiologiques ;

- de rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leurs évolutions ;

- de détecter tout événement modifiant ou susceptible d'altérer l'état de santé de la population ;

2°D'alerter les pouvoirs publics, notamment l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé mentionnée à l'article L. 5311-1, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments mentionnée à l'article L.1323-1 et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale mentionnée à l'article L.1335-3-1, en cas de menace pour la santé publique, quelle qu'en soit l'origine, et de leur recommander toute mesure ou action appropriée ;

3 °De mener à bien toute action nécessaire pour identifier les causes d'une modification de l'état de santé de la population, notamment en situation d'urgence ».

« art. L. 1413-2 - Un Institut de veille sanitaire, établissement public de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, a pour missions :

1°La surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population. A ce titre, il participe au recueil et au traitement de données sur l'état de santé de la population à des fins épidémiologiques, en s'appuyant notamment sur des correspondants publics et privés faisant partie d'un réseau national de santé publique ;

2°La veille et la vigilance sanitaires. A ce titre, l'institut est chargé :

« a) De rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leur évolution :

« b) De détecter de manière prospective les facteurs de risque susceptibles de modifier ou d'altérer la santé de la population ou de certaines de ses composantes, de manière soudaine ou diffuse ;

« c) D'étudier et de répertorier, pour chaque type de risque, les populations les plus fragiles ou menacées.

« Il peut également assurer des fonctions de veille sanitaire pour la Communauté européenne, des organisations internationales et des pays tiers, avec l'accord du ministre chargé de la santé ;

« 3°L'alerte sanitaire. L'institut informe sans délai le ministre chargé de la santé en cas de menace pour la santé de la population ou de certaines de ses composantes, quelle qu'en soit l'origine, et il lui recommande toute mesure ou action appropriée pour prévenir la réalisation ou atténuer l'impact de cette menace ;

« 4°Une contribution à la gestion des situations de crise sanitaire. A ce titre, l'institut propose aux pouvoirs publics toute mesure ou action nécessaire.

« L'institut participe, dans le cadre de ses missions, à l'action européenne et internationale de la France, et notamment à des réseaux internationaux de santé publique ».

Pour être sûr de ne rien oublier, l'article suivant, consacré aux travaux s'imposant dans le cadre des missions, dispose notamment :

« Art. L.1413-3 du CSP. En vue de l'accomplissement de ses missions, l'InVS :

1°Effectue, dans son domaine de compétence, toutes études, recherches, actions de formation ou d'information ;

2°Met en place les systèmes d'information lui permettant d'utiliser, dans les meilleurs délais, les données scientifiques, climatiques, sanitaires, démographiques et sociales, notamment en matière de morbidité et de mortalité, qui sont nécessaires à l'exercice de ses missions ;

3°Elabore des indicateurs d'alerte qui permettent aux pouvoirs publics d'engager des actions de prévention précoce en cas de menace sanitaire et des actions de gestion des crises sanitaires déclarées ; » (...)

L'accent mis fortement sur les sytèmes d'information, les différentes catégories de données et leur transmission immédiate au ministre vise sans ambages à empêcher la réédition d'une crise du type de celle de 2003.

Ce nouvel ancrage législatif ne pourra pas nuire à l'InVS pas plus qu'aux prérogatives du ministre qui sont ainsi pour tous les deux fixées dans le code en parfaite clarté.

* La situation est beaucoup moins nette pour ce qui concerne la fusion du CSHPF (Conseil supérieur d'hygiène publique) de France et du Haut Conseil de la santé (loi du 4 mars 2002) pour former le Haut conseil de santé publique (loi du 9 août 2004).

L'histoire et le rôle de chacune des deux instances « fusionnées » ayant été évoqués précédemment, on se limitera à indiquer l'intérêt éventuel de cette mesure mais aussi les questions qu'elle soulève.

La fusion de ces deux instances a pour objectif une dynamique résultant de ce regroupement entre un CSHPF qui avait nécessairement perdu une partie de ses attributions avec la création des agences sanitaires en 1998 et un Haut conseil de la santé au parcours et à l'apport incertains. Or les deux instances ont un rôle assez différent et pas nécessairement complémentaire pour autant. La rédaction finale retenue par l'Assemblée nationale en deuxième lecture suite aux remarques du Sénat sur le texte initial du gouvernement a permis d'éviter une confusion certaine. En effet, le transfert intégral des compétences du CSHPF au nouveau Haut Conseil de la santé publique risquait de conférer à celui-ci une hétérogénéité fâcheuse et notamment une interpénétration de ses compétences et celles des agences sanitaires.

Le nouveau Haut conseil de la santé publique a donc pour mission (art. L.1411-4 du CSP) :

« 1° De contribuer à la définition des objectifs pluriannuels de santé publique, notamment en établissant le rapport mentionné à l'article L. 1411-2, d'évaluer la réalisation des objectifs nationaux de santé publique et de contribuer au suivi annuel de la mise en oeuvre de la loi prévue à l'article L. 1411-2 .

« 2° De fournir aux pouvoirs publics, en liaison avec les agences sanitaires, l'expertise nécessaire à la gestion des risques sanitaires ainsi qu'à la conception et à l'évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire ;

« 3° De fournir aux pouvoirs publics des réflexions prospectives et des conseils sur les questions de santé publique ».

(...)

On note que tout risque d'interpénétration avec les tâches des agences n'est pas vraiment écarté même si le rapporteur du projet à l'Assemblée nationale a précisé que les missions de ce Haut conseil portent « plutôt sur la conception et la gestion des politiques que sur l'évaluation et la gestion des risques, cette dernière expertise étant plutôt du ressort des agences ». Par ailleurs, le transfert des pouvoirs hérités du CSHPF à ce nouveau Haut Conseil comporte bien des pouvoirs consultatifs en matière de règles générales d'hygiène (44 ( * )) .

A ces modifications, dont l'objectif est celui d'une clarification et d'une unification, s'en ajoute d'autres dont le principe est moins clair, mais la perplexité qu'elles inspirent est nettement plus forte.

* 44 Art L.1311-1 du CSP : Sans préjudice de l'application de législations spéciales et des pouvoirs reconnus aux autorités locales, des décrets en Conseil d'Etat, pris après consultation du Haut Conseil de la santé publique et, le cas échéant, du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels, fixent les règles générales d'hygiène et toutes autres mesures propres à préserver la santé de l'homme, notamment en matière :

- de prévention des maladies transmissibles ;

- de salubrité des habitations, des agglomérations et de tous les milieux de vie de l'homme ;

- d'alimentation en eau destinée à la consommation humaine ;

- d'exercice d'activités non soumises à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

- d'évacuation, de traitement, d'élimination et d'utilisation des eaux usées et des déchets ;

- de lutte contre les bruits de voisinage et la pollution atmosphérique d'origine domestique ;

- de préparation, de distribution, de transport et de conservation des denrées alimentaires.

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