2. Des réformes encore contrecarrées par l'absence de prise en compte des transferts sociaux locaux

S'il est incontestable que les réformes entreprises depuis 2000 ont permis de réduire significativement les désincitations financières à la reprise d'activité, les gains monétaires du retour à l'emploi pour les bénéficiaires de minima sociaux mesurés par l'ensemble des analyses précitées demeurent imprécis, dans la mesure où il n'est jamais tenu compte des conséquences de la reprise d'activité en matière de transferts sociaux locaux.

A ce jour, une seule étude aborde la question de l'impact des transferts sociaux locaux sur le retour à l'emploi 28 ( * ) . Il convient d'ailleurs de souligner qu'elle ne s'appuie pas sur la notion de gains monétaires à l'emploi mais sur celle de « durée de réservation », c'est à dire la durée de travail minimale, sur la base du SMIC horaire, pour que l'emploi apporte un gain monétaire à celui qui l'occupe par rapport aux ressources dont il bénéficierait en tant qu'inactif.

Selon cette approche, les transferts nationaux entraînent, pour un couple bénéficiaire du RMI avec deux enfants, une durée de réservation de 26 h 30. D'une façon générale, pour compenser la perte de transferts nationaux, un travail à mi-temps n'est suffisant que pour les seuls célibataires, la durée de réservation restant toutefois inférieure au temps complet pour toutes les autres configurations familiales.

Si l'on ajoute aux transferts nationaux l'ensemble des aides locales, la durée de réservation est sensiblement allongée : elle devient supérieure au mi-temps pour tous et elle est même supérieure au temps complet pour tous les ménages avec enfants. Au total, sur la base d'un emploi rémunéré au SMIC, il est nécessaire de travailler en moyenne treize heures de plus par semaine pour compenser la perte des aides locales liées à la sortie du minimum social.

Durée de réservation, en fonction de la configuration familiale

Source : Denis Anne et Yannick L'Horty, Économie et Statistique, article précité

Il convient de préciser que la générosité des prestations locales n'est pas nécessairement la cause de cet effet désincitatif à l'emploi : s'il s'agit de prestations uniformes et sans condition de ressources, elles n'ont aucun impact sur la durée de réservation, quand bien même elles seraient d'un montant très important.

C'est donc plus leurs conditions d'attribution que leur générosité qui sont en cause. En effet, bien qu'elles ne représentent, en moyenne, que 26,4 % des transferts nationaux pour les ménages sans revenu d'activité, elles conduisent à une hausse de 53 % de la durée de réservation : elles ont ainsi deux fois plus d'effets sur la durée de réservation que sur le montant des transferts perçus.

Les résultats de cette étude unique en son genre doivent toutefois être nuancés : établissant un recensement de l'ensemble des aides locales ouvertes aux bénéficiaires de minima sociaux, elle semble supposer que chaque demandeur peut cumuler l'ensemble des aides disponibles. S'agissant de prestations facultatives d'actions sociales et non d'allocations d'aide sociale constituant un droit, il est permis d'en douter. Il serait en fait utile de compléter cette analyse par une mesure de la fréquence de la distribution effective des différentes aides, ainsi que par une étude des cas de non-recours.

* 28 « Transferts sociaux locaux et retour à l'emploi », Denis Anne et Yannick L'Horty, Économie et Statistique n° 357-358, 2002.

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