PARTIE II - ORGANISATION, ACTIVITÉ ET PARTENARIATS

Il était évidemment trop tôt, au moment de ce premier contrôle de la Cour sur DCN-SA, pour tenter de tirer un bilan de la mise en place d'une organisation et d'un encadrement partiellement nouveaux, qui n'ont commencé à être opérationnels qu'au cours de l'année 2003. Néanmoins, quelques tendances générales semblent d'ores et déjà pouvoir être dégagées :

I- ORGANISATION DE DCN-SA DEPUIS SA TRANSFORMATION EN SOCIÉTÉ COMMERCIALE

L'organisation de DCN-SA en deux pôles (Navires & Systèmes d'une part, Services et Équipements de l'autre), eux-mêmes structurés en business units (1 pour Navires & Systèmes et 6 pour Services & Équipements) responsabilisés, mise en place lors de la création de la société le 1 er juin 2003, succède à une organisation en trois branches rassemblant des établissements et projets, dotées de fonctions transverses (achats, commerce, etc.) très centralisées - le contrôle général des armées était en effet, à l'époque du SCN, consulté pour toute offre supérieure à 100 MF (15,24 M€).

Depuis 1997, puis sous le régime transitoire du « service à compétence nationale » de la direction des constructions navales instauré en 2000, puis avec l'appui de DCN-DÉVELOPPEMENT à partir de 2002, la période 1999-2003 a vu la poursuite des restructurations industrielles internes, tandis que la réflexion sur d'éventuels rapprochements ultérieurs avec d'autres industriels, et notamment THALES, a incité la nouvelle société à préciser son positionnement dans le domaine des systèmes de combat.

L'organisation adoptée à partir du 1 er juin 2003 résulte de ces diverses influences. On peut la schématiser de la façon suivante :

Ce nouvel organigramme présente clairement une structure « matricielle », avec deux axes opérationnels verticaux, et huit axes fonctionnels horizontaux :

A- directions opérationnelles : deux « pôles » et sept « business units »

pôle Navires et Systèmes

Ce pôle regroupe :

- DCN Cherbourg - sous-marins ;

- DCN Lorient - bâtiments de surface ;

- l'ingénierie, elle-même éclatée sur quatre sites : Cherbourg, Lorient, Toulon et Brest.

Le but visé était de centrer l'organisation de ce pôle sur le client : c'est cette raison qui a conduit à en faire un centre de résultat (« business unit ») unique, entraînant une forte dissymétrie par rapport à l'autre pôle de DCN-SA, Services & Équipements, éclaté par produits en six centres autonomes.

Concernant le positionnement de la direction industrielle (rattachement direct au président de DCN-SA ou au responsable d'un des deux pôles, en l'occurrence le pôle Navires & Systèmes), la problématique a été soulevée au COMEX (comité exécutif) de DCN-SA, qui a hésité sur la meilleure position à adopter, et qui a finalement estimé que les besoins de Navires & Systèmes et de Services & Équipements différaient trop pour justifier la mise en place d'une direction industrielle centrale unique. C'est ce qui expliquerait que la direction industrielle ait finalement été logée dans Navires & Systèmes.

En ce qui concerne les outils de suivi et de gestion des activités, dans le cas de Navires & Systèmes, l'organisation en trois établissements est croisée avec une vingtaine de grands projets (centres de profit) : aussi le contrôle de gestion est-il conçu de façon à refléter les deux dimensions du pôle (état des projets, santé des établissements).

Dans cette optique, les tableaux de bord actuels sont réalisés, par la direction financière, sur la base d'informations fournies par les services opérationnels. Ces tableaux sont remis au président et aux directeurs des pôles. Les responsables opérationnels n'en sont pas destinataires.

En ce qui concerne le responsable du pôle Navires & Systèmes lui-même, concrètement, trois documents sont à sa disposition : la synthèse des principaux projets en cours (avec l'indication du niveau des marges correspondant à chaque projet), le tableau de bord mensuel, et le tableau de bord décliné du pôle (document réalisé par le contrôleur de gestion rattaché à la direction des affaires financières, mais placé auprès du pôle). Cette consolidation est probablement plus aisée à réaliser à Navires & Systèmes, qui ne comporte qu'un seul centre de résultat, que dans l'autre pôle qui sera examiné ci-après, dont les activités sont éclatées (mais qui n'a peut-être pas autant besoin d'une consolidation).

Le directeur du pôle Navires & Systèmes estime qu'il serait utile de doter les responsables de projets et les responsables d'établissements d'outils plus fins de pilotage des projets.

Enfin, le pôle Navires & Systèmes a entrepris, dans le cadre d'un « plan performance », une démarche d'ensemble qui part du terrain et qui vise, dans un délai de trois ans, à réduire de 30 % les délais, de 30 % les coûts, et de 60 % les stocks.
800 actions devraient être mises en oeuvre à Navires & Systèmes. Le plan performance est le pendant d'un « plan de progrès » pour le pôle « services et équipements », évoqué ci-après.

Pôle Services & Équipement

L'activité du pôle Services et Équipements est répartie en six centres de résultat.

Les indicateurs de gestion de ces centres sont recueillis et consolidés par la filière contrôle de gestion et exploités par les opérationnels (directeurs de centres de résultat, directeurs de pôles, puis PDG et COMEX).

On constate qu'à quelques exceptions près (notamment l'ingénierie, « éclatée » sur plusieurs sites), les principaux centres de résultat correspondent, peu ou prou, aux établissements hérités de la DCN - même si Navires & Systèmes constitue une sorte de « super centre de résultat » regroupant en réalité deux lignes de produits assez foncièrement différents - les navires de surface et les sous-marins, qui, quant à eux, coïncident bien avec deux sites (Lorient et Cherbourg).

B- directions fonctionnelles

L'existence de directions fonctionnelles « horizontales » est ce qui, au premier abord, différencie le plus l'organisation de DCN-SA de celle qui prévalait dans le SCN-DCN, car la nouvelle entité intègre des fonctions - affaires financières et comptabilité d'entreprise, rationalisation des achats, gestion des ressources humaines et élaboration de la stratégie et du développement du groupe -, qui soit n'existaient pas, soit étaient précédemment largement centralisées en amont du SCN. Seule la fonction commerciale internationale, du fait de l'existence « concurrente » d'ARMARIS, n'a pas connu un développement aussi spectaculaire au sein de DCN-SA.

Ouverture vers l'extérieur du recrutement des cadres supérieurs de DCN-SA

Sur 120 cadres dirigeants que compte actuellement DCN-SA, 40% seraient des agents récemment recrutés à l'extérieur de l'ancienne DCN. La Cour a néanmoins pu constater qu'au niveau membres du COMEX, cette ouverture n'a porté que sur les fonctionnels, l'ouverture devant donc être plus large au niveau inférieur.

Intégration des nouvelles fonctions assumées par DCN-SA

Les divers interlocuteurs rencontrés par la Cour s'accordent en général pour considérer que :

- la fonction « ressources humaines » paraît d'ores et déjà correctement intégrée, avec un rôle fonctionnel et d'animation, semble-t-il, réel ;

- en ce qui concerne la fonction « achats » : la centralisation des achats sur la période 98/2000 avait conduit à enregistrer des retards sur certains projets, voire à la prise de mauvaises décisions dans le choix des contractants. Aujourd'hui, le système mis en place dans le cadre de DCN-SA paraît mieux équilibré, dans la mesure où les décisions sont prises par les responsables des projets, et où les actes d'achats sont préparés par des professionnels. C'est le domaine dans lequel la nouvelle organisation doit apporter le plus de gains de productivité ;

- la fonction « commerciale » est, quant à elle, plus difficile à positionner : la direction commerciale de DCN-SA n'est en effet chargée que des relations avec le « client ». Par rapport à l'ancienne organisation, elle n'a plus de rôle dans l'élaboration des offres, qui relève des pôles, et par ailleurs sa compétence demeure nécessairement limitée, à l'export, par l'existence même d'ARMARIS, avec le risque paradoxal de voir ses prospects commerciaux se limiter en fait à la Marine nationale ;

- pour la fonction « finances » et le contrôle de gestion, il s'agit de domaines largement nouveaux pour DCN-SA, puisqu' ils étaient, pour la plupart, pris en charge dans le cadre du compte de commerce par l'administration du ministère de la défense. L'une des difficultés vient du fait que le contrôle de gestion étant désormais une fonction horizontale, les opérationnels n'interviennent plus directement dans la confection des tableaux de bord destinés au pilotage du groupe. Par ailleurs, s'agissant de suivre des grands projets avec de forts aléas, la centralisation horizontale du contrôle de gestion pourrait, à terme, se révéler problématique.

Obs. 10 Au total, en matière d'organisation de DCN-SA, la Cour relève que :

Obs. 11 - la mise en place d'une organisation matricielle est rendue difficile par le handicap d'une mise en place récente, rompant avec la culture d'activités traditionnellement organisées en régie et le fait que ces nouvelles directions aient été pourvues par de nouveaux cadres de haut niveau, en provenance de l'industrie, tandis que les pôles opérationnels, demeuraient encadrés, du moins à l'échelon supérieur, par des responsables formés dans la tradition des arsenaux ;

Obs. 12 - dans la pratique, les divers établissements de DCN-SA, anciens arsenaux de la Marine, continuent, avec leur personnalité propre, à constituer l'ossature réelle de l'entreprise, comme la Cour a pu le constater lors de ses visites sur place. Cette caractéristique n'est pas de nature à faciliter la mise en place d'une organisation authentiquement matricielle, qui supposerait l'instauration progressive d'un certain degré de centralisation et d'homogénéisation des méthodes et des circuits de décision et de contrôle, et sans doute à terme plus lointain, une plus grande mobilité des ressources humaines entre les établissements ;

Obs. 13 - néanmoins, la Cour considère que la « bonne » façon de résoudre ces difficultés dépendra très largement de l'avenir industriel de DCN-SA, selon qu'elle choisira de rester une société isolée ou qu'elle parviendra à s'intégrer dans un groupe industriel plus vaste .

II- PLAN DE CHARGE DE DCN-SA

Le contrat d'entreprise entre l'État et DCN-SA (2003/2008), repose sur des perspectives de commandes d'un montant de près de 9 milliards d'euros, qui inclut les commandes fermes (de l'ordre de 5 milliards) ainsi que les commandes récurrentes liées au maintien en condition opérationnelle (MCO) pour un montant équivalent sur la période du contrat d'entreprise.

(en M€)

Programme

Début contrat

Fin contrat

Plan de charge prévisionnel

fin 2003

fin 2004

fin 2005

fin 2006

Bâtiments de surface

1 445

1 097

1 585

3 572

France

1 029

887

1 350

2 758

BPC

Août 2001

Mars 2007

353

231

46

-

Horizon

Oct 2000

Mars 2008

670

536

391

236

FREMM

2004

-

6

120

877

839

PORTE-AVIONS

2005

-

-

-

35

1 683

Export

416

210

235

813

SAWARI II

Avril 1997

Février 2006

70

9

-

-

DELTA

Mars 2000

Janvier 2009

297

173

70

7

Autres

NA

NA

49

28

165

806

Sous-marins

1 903

2 218

1 737

1 853

France

1 391

1 508

1 173

1 460

Vigilant

Déc 1993

Déc 2004

257

-

-

-

Terrible

Déc 1993

Avril 2010

1 033

1 407

1 004

690

Barracuda

2003

-

101

101

168

770

Export

511

709

564

392

Agosta Pakistan

Janvier 1995

Déc 2007

64

62

54

16

Scorpene Chili

Avril 1998

Mars 2005

36

1

-

-

Scorpene Malaisie

Oct 2002

Oct 2008

411

321

249

181

Autres

NA

NA

-

326

261

196

CESAD M-51

2001

2007

210

131

84

42

MCO

NA

NA

742

552

523

474

Sylver

Avril 1997

Avril 2010

74

110

121

132

France

Avril 1997

Avril 2010

29

44

48

53

Export

Avril 1997

Avril 2010

45

66

73

80

CMS

NA

NA

106

165

177

161

France

NA

NA

45

70

75

68

Export

NA

NA

61

96

102

93

Armes Sous-marines

175

175

261

366

France

59

78

132

208

Torpilles M90

Janvier 1998

Janvier 2011

46

36

38

41

Torpilles lourdes

2003

-

13

42

94

167

Export

89

72

99

121

Torpilles M90

Janvier 1998

Janvier 2011

89

72

76

79

Torpilles lourde

2004

-

-

-

23

42

Autres

NA

NA

96

191

147

136

TOTAL DCN-SA

NA

NA

4 751

4 641

4 636

6 736

Ce Plan de charge prévisionnel permet de constater que les cycles des grands secteurs d'activité (bâtiments de surface, sous-marins, MCO, système de gestion de combat (CMS), armements et équipements), qui présentent souvent des variations sensibles d'une année à l'autre pris séparément, tendent, au moins au niveau des prévisions, à se compenser pour assurer une certaine stabilité du plan de charge dans le temps, ce qui peut être interprété comme le signe d'une certaine diversification au sein même de la spécialisation dans les constructions navales militaires ; mais il fait également ressortir la relative volatilité, d'une année à l'autre, des perspectives de chiffre d'affaires à l'export, qui traduit a contrario la forte dépendance de DCN-SA des lois de programmation militaires françaises en particulier les programmes FREMM, PA2 et Barracuda, dont la Cour relève par ailleurs que le financement n'est toujours pas assuré à ce jour.

Le contenu même de ces divers programmes peut être précisé comme suit dans le cadre des deux pôles et des sept centres de résultat de DCN-SA :

A- pôle navires et systèmes

Bâtiments de surface

BPC

La construction de deux nouveaux bâtiments de projection et de commandement (« BPC ») est prévue pour la Marine nationale. Le premier BPC, baptisé MISTRAL, sera livré en 2005 ; le second, TONNERRE, sera livré en 2006.

Frégates

Quatorze unités ont été produites par DCN, dont trois pour la marine saoudienne (programme SAWARI II). Pour ce dernier client, la première frégate a été livrée en 2002 ; la livraison du dernier bâtiment est prévue en 2004. Leur construction met en synergie différents établissements de DCN-SA. C'est DCN-I qui assure la gestion globale du contrat.

Une nouvelle commande de six frégates (programme DELTA) a été passée par Singapour, en mars 2000. Parallèlement, le contrat prévoit une co-traitance avec des industriels singapouriens, impliquant un transfert de technologies. Leur mise en service est prévue entre 2005 et 2009.

Les marines française et italienne ont commandé chacune deux exemplaires des frégates HORIZON qui seront admises au service actif entre 2006 et 2009. Ce programme est une première mondiale dans le domaine de la coopération navale militaire, l'Italie (FINCANTIERI et FINMECCANICA) et la France (DCN-SA et THALES) développant et produisant ensemble au travers d'un maître d'oeuvre commun, HORIZON SAS, pour leurs flottes respectives, un navire très sophistiqué.

Les frégates multi-missions (FREMM) - projet en développement, serait confié au consortium « ARMARIS-ORIZONTE » : un accord de coopération est intervenu, le 7 Novembre 2002, entre la France et l'Italie, pour la définition, le développement et la construction de 27 frégates multi-missions - 17 pour la France et 10 pour l'Italie. Le lancement du programme a récemment été confirmé par la ministre de la Défense, en octobre 2004, à l'occasion du salon Euronaval.

Selon les estimations de la DCN-SA, d'autres perspectives s'annoncent au niveau européen, d'autres pays ayant manifesté un intérêt pour ce produit (Grèce, Belgique, Allemagne, Espagne, Pays-Bas). Le potentiel du marché européen serait évalué à une soixantaine de frégates dans les années 2005/2020.

Deuxième porte-avions

Compte tenu de la date de la décision de principe en faveur de sa réalisation, le deuxième porte-avions n'est pas prévu dans la loi de programmation militaire (contrairement à ce qu'affirme le contrat d'entreprise, p. 12), mais il est néanmoins inscrit au plan à moyen terme de DCN-SA pour 2005 (phase de définition) et 2006-2007 (phases de développement et de réalisation), avec une part DCN-SA qui dépendra du scénario d'acquisition (national ou en coopération) et de la définition du navire (tonnage, propulsion, etc.).

Sous-marins

sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération  (SNLE-NG)

Deux sous-marins sont actuellement en cours de réalisation pour la Marine nationale : LE VIGILANT (livraison 2004) et LE TERRIBLE (livraison 2010).

sous-marins d'attaque (SNA)

La marine pakistanaise a commandé trois exemplaires de l'AGOSTA 90 B, deux en transfert de technologie à Karachi, le premier de la série étant construit à Cherbourg. La livraison du dernier est prévue en 2007, les deux premiers étant déjà en service.

Deux sous-marins SCORPENE sont en cours de construction pour la marine chilienne. La livraison du premier est prévue pour 2005. Deux autres SCORPENE ont été commandés par la Malaisie, et seront opérationnels en 2007 et 2012.

Le programme BARRACUDA porte sur 6 sous-marins nucléaires d'attaque ; le contrat d'études a été passé en 2002 ; le contrat pour la production pourrait intervenir fin 2005, avec deux premières commandes sur la période 2003-2008. Il est majeur pour DCN-SA, en termes financiers (son volume global estimé est de 4,5 milliards d'euros), ainsi qu'en termes de technicité, de plan de charge et de durée. Le projet est aujourd'hui en fin d'étude de faisabilité ; le premier sous-marin pourrait être livré à la Marine nationale en 2012, les cinq autres devaient suivre jusqu'en 2020. Le CEA et la DGA constitueront une seule co-maîtrise d'ouvrage pour piloter le projet. DCN-SA se voit confier la maîtrise d'oeuvre de l'ensemble du projet et de la plate-forme, une co-maîtrise d'oeuvre étant confiée à DCN-SA et TECHNICATOME pour la partie « énergie- propulsion».

Moyens d'essais rattachés au pôle navires et systèmes

- CÉTACÉ : il s'agit d'un engin expérimental qui assure la validation d'un concept d'éjection et de chasse pour le programme missiles M-51 et dont la livraison a eu lieu en octobre 2002.

- Dans le cadre du programme M-51, DCN-SA réalise pour la DGA l'adaptation des SNLE-NG au nouveau missile MSBS. Le système d'armes de dissuasion M-51 doit être opérationnel en 2010 sur le TERRIBLE. Il équipera, ensuite, à leur refonte, les trois premiers sous-marins de la même série.

B- pôle service et équipements

Equipements

Parmi les équipements, on notera :

- le SENIT (système de traitement de l'information, plus généralement désigné par son appellation anglo-saxonne CMS, pour « combat management system »),

- la conception et le développement d'une famille de lanceurs de missiles verticaux SYLVER,

- la torpille MU 90, dans le domaine des armes sous-marines.

Maintien en conditions opérationnelles (MCO)

Chacun des deux centres de résultat (Brest et Toulon) spécialisés dans le MCO de la Marine nationale apporte un C.A annuel compris entre 250 et 350 M€. Industriellement, l'objectif prioritaire est d'améliorer le service rendu à la Marine, notamment en terme de réduction des délais et d'augmentation de la disponibilité des navires. Commercialement, l'objectif est de faire évoluer l'offre DCN-SA vers des contrats globaux de maintenance donnant à l'utilisateur une garantie de disponibilité des navires (avec rémunération en fonction des indicateurs de disponibilité retenus contractuellement), et englobant non seulement les opérations de maintenance programmes ou d'entretien courant, mais aussi l'entretien des infrastructures, le contrôle de configuration, etc.

Cette évolution serait par ailleurs de nature à simplifier considérablement le mode de contractualisation (réduction du nombre de contrats par un facteur dix), et à conforter le rôle naturel de DCN-SA de maître d'oeuvre d'ensemble de ces opérations. Enfin DCN-SA souhaite développer son offre de services à la Marine dans des activités connexes que cette dernière pourrait avoir intérêt à externaliser.

Obs. 14 L'examen du plan de charge et du catalogue de produits de DCN-SA, ainsi que les informations réunies par ailleurs par la Cour sur la loi de programmation militaire, montre que les moyens et les besoins propres de la Marine nationale constituent, à l'heure actuelle, le principal moteur de l'activité de DCN-SA, mais qu'ils peuvent difficilement, à eux seuls, garantir l'avenir de DCN-SA.

III- « CONVERGENCE » ENTRE DCN-SA ET THALES

A- rappel des analyses passées de la cour sur l'avenir des relations DCN-SA/THALES

Comme indiqué en introduction, dans le cadre du rappel des précédents contrôles de la Cour concernant d'une part, la DCN dans ses anciennes structures, et d'autre part la société holding THOMSON SA, disposant d'un important bloc de titres dans THOMSON CSF devenu THALES, la Cour avait été conduite à procéder à une analyse concernant la préparation d'un éventuel rapprochement entre les deux groupes industriels DCN et THALES.

À ce titre elle avait relevé le fait que la mise en place d'une société commune, ARMARIS, détenue à 50/50 par les deux groupes, et destinée à servir de réceptacle pour les contrats navals militaires à l'export et certains contrats en coopération, relevait davantage d'une logique rétrospective - celle qui avait conduit, quelques années plus tôt, à créer DCN-I, puis à instituer DCN en service à compétence nationale, alors que la décision de transformer DCN en société commerciale et industrielle de plein exercice paraissait inaccessible -, que d'une logique prospective, - celle qui aurait consisté, dès que la loi permettait d'envisager la transformation de DCN en entreprise publique, à préparer les conditions d'une « convergence » plus globale entre les deux groupes destinée à servir de noyau à des rapprochements internationaux ultérieurs, sans pour autant perdre de vue les intérêts patrimoniaux de l'actionnaire public.

Cette analyse l'avait conduite à exprimer deux conclusions principales, à savoir que :

a) la structure ARMARIS ne répondait pas à l'objectif, par ailleurs généralement reconnu comme souhaitable par tous, d'un rapprochement plus approfondi des industriels français, puis européens, de l'armement naval, et qu'il convenait clairement de ne pas la considérer comme un aboutissement, mais au mieux, comme une étape transitoire en vue d'un rapprochement plus ample. À l'issue de l'audition des diverses parties intéressées, elle avait toutefois, dans son référé du 20 janvier 2003, noté que la création d'ARMARIS pouvait constituer un « réel progrès, dont il conviendrait en toute hypothèse d'exploiter toutes les potentialités » ;

b) elle avait parallèlement suggéré la mise à l'étude d'un schéma plus ambitieux, ne préjugeant pas d'éventuelles négociations patrimoniales, mais de nature à créer un cadre capitalistique de départ plus lisible, étant relevé que sa mise en oeuvre aurait, en toute hypothèse, exigé une habilitation législative préalable. À ses yeux, la formule esquissée (regroupement des participations étatiques dans DCN-SA et dans THALES au sein d'une même société holding, en l'occurrence THOMSON SA, avec un repositionnement d'ARMARIS), aurait pu instaurer une dynamique de convergence que la seule mise en place d'ARMARIS risquait au contraire de rendre plus compliquée à mettre en oeuvre.

Les réponses des ministères concernés (économie, finances et industrie d'une part, et défense de l'autre) ont très clairement montré que ces analyses n'étaient, en aucune façon, partagées à l'époque par l'actionnaire public.

B- État actuel du dossier « convergence »

La Cour a eu accès aux divers documents communs élaborés conjointement par DCN-SA et THALES sous l'égide des Pouvoirs Publics. Dans le cadre de la procédure contradictoire, elle a fait part aux diverses parties intéressées des questions qui lui semblaient continuer à se poser pour permettre à la négociation, dont l'objet demeure de promouvoir, en passant par une étape préalable « franco-française », un rapprochement des industries navales militaires européennes, notamment en direction des partenaires allemands.

A l'issue de la contradiction :

1) la plupart de ces question avaient trouvé une réponse dans un projet de « déclaration commune d'intention ». Ce document, bien que « non juridiquement contraignant » pour les trois parties intéressées (État, DCN-SA et THALES), n'avait pas, au moment de la clôture du contrôle, reçu leur signature ;

2) un consensus existait pour dégager DCN-SA et THALES de la structure ARMARIS, quelle que soit la suite donnée à leur projet de rapprochement, sans préjudice pour les contrats acquis pendant la période de fonctionnement effectif de cette structure ;

3) une incertitude demeurait, tant que ne serait pas signée la déclaration commune d'intention, sur la position finale qu'adopteraient d'une par l'État, et d'autre part les actionnaires industriels de THALES (à savoir, les groupes ALCATEL et DASSAULT).

Au stade actuel des discussions, la Cour n'est pas en mesure d'émettre un avis définitif sur le projet de Convergence. En revanche, compte tenu de l'ensemble des éléments dont elle a eu connaissance, elle considère que le rapprochement des activités navales de défense entre DCN-SA et THALES dans une entité commune, en vue de favoriser les chances d'un éventuel regroupement ultérieur avec d'autres industriels étrangers du secteur, constitue la seule perspective de nature à préserver l'acquis technique et industriel de DCN-SA, et d'optimiser la position de l'ensemble de l'industrie française dans ce secteur difficile. Même si, sur certains aspects, cette intégration verticale entre une entreprise publique et une entreprise privée peut soulever des difficultés de divers ordres, et si son aboutissement dépend largement de la position adoptée par un certain nombre de partenaires privés (ALCATEL, DASSAULT, voire EADS, le groupe THYSSEN, etc.), la Cour constate qu'il n'existe, pour l'avenir de DCN-SA, aucune alternative crédible.

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