c) Le refus de certains Etats de maintenir une forte contribution nette

L'échec du Conseil européen des 16 et 17 juin 2005 provient du refus des quatre principaux contributeurs nets, à l'exception de l'Allemagne - le Royaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas -, de conserver une forte contribution nette.

On l'a vu, les quatre principaux contributeurs nets actuels sont, par ordre de contribution nette croissante, les Pays-Bas, la Suède, l'Allemagne et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni. Si les propositions de la Commission européenne avaient été adoptées, ces Etats seraient restés les principaux contributeurs nets, la suppression du « chèque » britannique ayant en outre pour effet de faire passer le Royaume-Uni parmi les Etats ayant une contribution nette supérieure à 0,4 point de RNB.

Si l'Allemagne accepte d'être un important contributeur net, tel n'est pas le cas des Pays-Bas, de la Suède et du Royaume-Uni.

Le Royaume-Uni a été le « chef de file » de l'opposition aux propositions de la Commission européenne, qui prévoyaient notamment la disparition du « chèque » britannique, souhaitée par l'ensemble des autres Etats membres.

La correction britannique a été instaurée en juin 1984 par le Conseil européen de Fontainebleau. Le mécanisme, dont les modalités de calcul sont assez complexes, vise à compenser les deux tiers du déséquilibre du Royaume-Uni vis-à-vis du budget communautaire, et revient à réduire la part du Royaume Uni dans le financement du budget.

Dans le cadre du « paquet » législatif du 14 juillet 2004, la Commission européenne a proposé de supprimer le « chèque » britannique, qui serait redistribué entre les principaux contributeurs nets, dans le cadre d'un système dit « mécanisme de correction généralisé » (MCG). En contrepartie, le Royaume-Uni bénéficierait d'un régime transitoire , se traduisant par la disparition progressive de son « chèque ».

Le remplacement du « chèque » britannique par le mécanisme de correction généralisé aurait un coût important pour le Royaume-Uni (0,21 point de RNB), un coût modeste pour l'Autriche (0,03 point de PIB), et représenterait un gain modeste, mais significatif pour chacun des contributeurs nets entre lesquels le surplus de recettes correspondant serait réparti, comme l'indique le tableau ci-après.

L'impact du « chèque » britannique :
décomposition de l'évolution du solde structurel (1) par rapport à 2003

(en points de RNB)

Evolution selon la proposition de la Commission européenne (2) (A)

Evolution sans suppression du « chèque britannique » (B)

Effet de la suppression du « chèque britannique » (A)-(B)

Royaume-Uni

-0,26

-0,05

-0,21

Autriche

-0,22

-0,19

-0,03

Espagne

-0,92

-0,94

0,02

Luxembourg

1,61

1,58

0,03

Grèce

0,01

-0,02

0,03

Portugal

-1,09

-1,12

0,03

Irlande

-0,88

-0,91

0,03

France

-0,19

-0,22

0,03

Suède

-0,06

-0,10

0,04

Italie

-0,27

-0,32

0,05

Finlande

-0,17

-0,22

0,05

Danemark

-0,13

-0,18

0,05

Allemagne

-0,09

-0,14

0,05

Belgique

0,67

0,62

0,05

Pays-Bas

-0,03

-0,09

0,06

(1) Selon l'approche dite « de la correction britannique » (prise en compte des dépenses administratives), après prise en compte de ladite correction pour l'année 2003.

(2) Mécanisme de correction généralisé avec régime transitoire.

Sources : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (pour l'année 2003), commission européenne (pour la période 2008-2013), calculs de votre commission des finances

Les trois principaux contributeurs nets actuels (Pays-Bas, Suède, Allemagne) ont donc estimé que la proposition de la Commission européenne n'allait pas assez loin , leur contribution nette n'étant pas significativement réduite (respectivement de 0,06, 0,04 et 0,05 point de RNB). En particulier, les Pays-Bas ont contribué à l'échec du Conseil européen des 16 et 17 juin 2005, en demandant une réduction substantielle 56 ( * ) de leur contribution nette, exigée par leur opinion publique après le rejet du projet de Constitution européenne.

De même, la France est certaine de voir sa contribution nette se dégrader d'environ 0,2 point de RNB, que le « chèque » britannique soit ou non maintenu, la suppression du « chèque » britannique n'améliorant son solde net que de 0,03 point de RNB .

Les principaux facteurs d'évolution de la contribution nette de la France sont en effet le plafonnement des dépenses agricoles 57 ( * ) et l'augmentation des dépenses structurelles en faveur des nouveaux Etats membres. Nos collègues Marc Laffineur, député, et Serge Vinçon, soulignent, dans leur rapport remis au Premier ministre le 24 février 2004 58 ( * ) , que « la détérioration du solde net français est inéluctable ; elle est le prix à payer pour la réunification de l'Europe. Mais encore faut-il que ce prix à payer soit équitablement partagé et que les autres pays, comme la France, prennent leur juste part de l'effort ».

La proposition de la Commission européenne de supprimer le « chèque » britannique, soutenue par la France, s'explique donc essentiellement par une considération de principe : il n'y a pas de raison que le Royaume-Uni bénéficie d'une règle particulière, qui n'est plus justifiée par sa situation économique, alors que d'autres Etats membres (Pays-Bas, Suède, Allemagne) auront, en tout état de cause, une contribution nette supérieure à la sienne.

* 56 De 1,5 milliard d'euros, contre 500 millions d'euros dans la dernière proposition de compromis de la présidence.

* 57 L'accord de Bruxelles du 25 octobre 2002, initié par la France et l'Allemagne, a prévu le plafonnement des dépenses réelles de marché à compter de 2006 et partant, un cadre stable et pérenne de financement pour les neuf prochaines années qui consacrerait la fin de la PAC comme politique budgétaire dominante.

* 58 Marc Laffineur, Serge Vinçon, « Rapport au Premier ministre sur les perspectives financières européennes 2007 - 2013 », rapport établi à la demande du Premier ministre auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, février 2004.

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