B. UNE PERCEPTION ENCORE FAUSSÉE DE L'UNION EUROPÉENNE

Outre les difficultés créées par une situation économique très difficile, même si l'on constate à Tirana un certain dynamisme , le rapprochement de l'Albanie et de l'Union européenne doit s'accompagner d'un changement des mentalités .

Les élites albanaises disent leur souhait d'intégration, il existe un ministre chargé de l'intégration européenne, une toute nouvelle commission de l'intégration européenne vient d'être créée à l'Assemblée nationale, mais le peuple albanais a une vision déformée de l'Union, perçue essentiellement comme le moyen de sortir le pays de ses difficultés économiques. Les efforts liés au processus d'intégration ne sont pas forcément compris, de même qu'il serait illusoire de penser que tous les problèmes que rencontre le pays en matière d'établissement d'un État de droit pourront être résolus par l'Union européenne.

La perception de l'Union européenne en Albanie selon la Commission européenne

« L'intégration progressive du pays dans les structures de l'Union européenne apparaît comme l'une des principales aspirations politiques de l'Albanie , ce que continue de refléter le discours de l'élite politique et administrative de l'Albanie. Des contacts étroits et fréquents avec la Communauté ont permis à ces élites de développer une assez bonne compréhension des significations que revêt le processus d'intégration.

Des groupes de réflexion albanais ont continué à suivre l'évolution de la perception de l'Union européenne en Albanie. L'opinion publique envers l'Union européenne reste positive , mais la compréhension de la population en ce qui concerne les exigences de l'adhésion et de ce que l'Union européenne peut offrir à chaque étape de ce processus est limitée et doit être améliorée. Les erreurs d'appréciation sont fréquentes et les attentes et les espoirs quant à la capacité de l'Union européenne d'aider l'Albanie à résoudre ses problèmes internes, y compris politiques, sont surestimés (...)

La perception que la population a de l'Union européenne en Albanie est fortement influencée par les hommes politiques et les médias. La représentation du processus par ces deux sources d'information est donc cruciale. Un compte rendu réaliste et fidèle du processus doit donc impérativement être communiqué, faute de quoi les Albanais seront mal informés au point que « les erreurs d'appréciation d'aujourd'hui seront les frustrations de demain ». À cet égard, il est clair que les hommes politiques albanais tiennent des discours trop optimistes à la population . Le problème est que cela a pour effet de renforcer les attentes des gens à court terme, à tel point que ceux-ci se sentent trompés lorsqu'elles sont déçues. Il est donc essentiel que les hommes politiques tiennent un discours réaliste à la population. »

Un exemple illustre bien les incompréhensions entre l'Union européenne et l'Albanie : il s'agit de la polémique née de la politique européenne des visas .


La politique européenne des visas et les pays des Balkans occidentaux :
illustration d'un malentendu

Le régime des visas pour entrer dans l'espace Schengen est critiqué dans plusieurs pays des Balkans occidentaux, dont l'Albanie, pour l'importance des formalités à accomplir et des justificatifs à produire et pour son coût jugé trop élevé.

Plusieurs rapports ont été publiés par des associations et groupes de réflexions basés à Bruxelles mettant en valeur le « ressentiment » créé par un régime de délivrance des visas trop restrictif dans les pays des Balkans.

En réalité, l'Union européenne a pris des mesures en 2005 pour assouplir ce régime en direction de certaines catégories de population comme les étudiants, les scientifiques ou les hommes d'affaires. Il est en effet nécessaire que les citoyens albanais, macédoniens, bosniens, serbes, puissent se former en Europe, participer à des échanges économiques et culturels et contribuer ainsi à une intégration progressive de leurs pays dans l'espace européen. Il y a encore trop peu d'échanges universitaires et culturels.

Cependant, il ne saurait être question pour l'Union européenne de relâcher sa vigilance à l'égard des risques d'immigration illégale, surtout dans une région encore marquée par des phénomènes importants de corruption et de criminalité organisée. Le commissaire Franco Frattini, en charge de la justice et des affaires intérieures, a clairement indiqué aux responsables des pays concernés que supprimer les exigences actuelles de visas pour les pays des Balkans occidentaux serait irréaliste.

L'Union européenne pose plusieurs conditions à tout assouplissement de son régime et notamment un meilleur contrôle des frontières par les Etat concernés, une amélioration de la qualité des documents de voyage et la conclusion d'accords de réadmission. De nouvelles propositions devraient être faites prochainement par la Commission européenne pour une démarche « au cas par cas » d'amélioration du régime des visas.

L'Union est encore trop souvent vue comme un « eldorado » par certains jeunes Albanais, désespérés par la situation économique et sociale de leur pays et qui cherchent manifestement à émigrer. Le développement économique de l'Albanie reste donc une priorité majeure pour éviter que le pays ne se vide des éléments qui pourront amener le changement et la réforme.

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