17. Audition de Veolia Propreté (ex-Onyx)

M. Pierre Rellet , Directeur Général France et Président de la FNADE (fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement), a tout d'abord rappelé les missions d'Onyx, rebaptisé Veolia Propreté depuis le 3 novembre 2005. Il a souligné que Veolia propreté était le second plus grand acteur au monde dans le domaine de la propreté et de la gestion des déchets, faisant état des suivants :

- 71.000 collaborateurs dans 34 pays ;

- un chiffre d'affaires de 6,2 milliards d'euros ;

- 50 millions d'habitants collectés ;

- 350.000 clients industriels et tertiaires ;

- 637 unités de traitement ;

- 52 millions de tonnes de déchets traités.

M. Pierre Rellet a ensuite détaillé les trois grands secteurs d'activités de la société :

- services de propreté et de logistique des flux de déchets (nettoyage, assainissement, collecte, regroupement et transfert) pour les collectivités territoriales et les entreprises ;

- tri, traitement et recyclage des déchets banals ou dangereux par incinération, compostage, stockage et traitement physico-chimique ;

- valorisation finale des déchets sous forme d'énergie, de matières organiques et de matières premières recyclées.

M. Pierre Rellet a insisté sur le potentiel très important de la valorisation énergétique des déchets tant en qui concerne l'incinération d'ordures ménagères que du biogaz.

Il a ainsi estimé que la production d'énergie par incinération, actuellement de 1 million de TEP pourrait doubler si les élus nationaux et locaux affichaient sur ce sujet une réelle détermination.

En effet, il existe, a-t-il expliqué, 123 incinérateurs d'ordures ménagères qui traitent plus de 11 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés, soit 44 % du tonnage global annuel en France. Or, si la grande majorité des usines d'incinération dispose de mécanismes de valorisation énergétique (93 % chez Veolia Propreté), ces procédés ne sont pas pour autant développés, et ce pour deux raisons essentielles : d'une part, il n'existe pas toujours de débouché pour la chaleur à proximité de l'unité d'incinération (réseau de chaleur ou client industriel), d'autre part Veolia Propreté estime que les tarifs de rachat de l'électricité produite à partir d'incinération d'ordures ménagères sont insuffisants pour rentabiliser les projets. M. Pierre Rellet a ainsi appelé de ses voeux le doublement du tarif de rachat (actuellement 52 euros le mégawatt heure), relèvement qui permettrait, par voie de conséquence, de baisser le coût net d'incinération des déchets tout en rentabilisant les investissements d'amélioration des rendements énergétiques.

S'agissant du biogaz, M. Pierre Rellet a démontré combien le potentiel était considérable.

En ce qui concerne la production de biogaz issue des centres de stockage de déchets, le potentiel serait important mais est limité par la réglementation qui encourage la valorisation agronomique des déchets organiques (nécessaire à la fertilité durable des sols) et impose par exemple un minimum de teneur en matière sèche pour l'acceptation des boues de stations d'épuration (lesquelles présentent un taux d'humidité de 85 % ce qui nécessite, au préalable, une déshydratation conséquente coûteuse en énergie). La part de déchets organiques admise en centres de stockage est ainsi moins importante qu'auparavant.

En revanche, M. Pierre Rellet a soutenu que la production de biogaz, par la filière méthanisation pourrait être considérable (10 % de la consommation annuelle de gaz naturel) si les collectivités territoriales s'engageaient dans cette voie comme l'ont fait de nombreux pays européens (Allemagne, Suisse, Danemark...). Il a ainsi regretté le retard pris par la France dans les unités de méthanisation, soulignant que nos voisins avaient su développer et maîtriser cette technologie simple (mais encore embryonnaire en France) grâce à la qualité des gisements de déchets fermentescibles collectés de manière séparative.

M. Pierre Rellet a déclaré que la filière biogaz de méthanisation présentait l'intérêt de conjuguer deux valorisations : énergétique à travers la valorisation du co-produit biogaz et agronomique à travers la valorisation agronomique du digestat en agriculture (après compostage), ce qui permet de répondre à l'objectif du maintien d'une fertilité durable des sols (la matière organique est indispensable au bon fonctionnement du sol : rétention de l'eau et des éléments nutritifs, ...).

La méthanisation, a-t-il poursuivi, peut résulter de la fermentation anaérobie de nombreux déchets organiques relativement humides : déchets d'élevage, fraction biodégradable (ou part fermentescible) des déchets industriels banals (agro-alimentaire, grande-distribution, ... ) et déchets ménagers (déchets de cuisine, tontes de gazon, ...), boues des stations d'épuration des eaux usées, déchets et sous-produits agricoles et forestiers (déchets de l'agroforesterie, tels que les houppiers, écorces, paille ...), déchets de l'industrie de la transformation du bois (sciures, copeaux...), ...

En particulier, dans les régions d'élevage (Bretagne, Normandie par exemple), la méthanisation pourrait permettre, a-t-il ajouté, de valoriser les nombreux déchets ou sous-produits qui, mal gérés, peuvent être à l'origine de pollution de la ressource en eau : sous-produits animaux, lisiers de porcs, déjections bovines, fientes de volaille, farines animales... alors qu'aujourd'hui sont pratiqués l'épandage (parfois après avoir été transportés sur de très longues distances) ou la mise en décharge après opération de déshydratation.

Interrogé par MM. Claude Belot et Jean-Marc Juilhard, rapporteurs, sur l'intérêt que pourrait présenter le biogaz ainsi produit, M. Pierre Rellet a répondu qu'il pouvait recevoir plusieurs usages : production de gaz naturel pour véhicule (comme en témoigne l'expérience actuellement menée à Lille), production d'électricité revendue à EDF, production de chaleur s'il existe un débouché immédiat (réseau de chaleur ou client industriel).

Il n'a pas exclu non plus la possibilité de transporter ce biogaz (par des canalisations dédiées ou par transport terrestre) vers des chaufferies biogaz fonctionnant en cogénération et alimentant un réseau de chaleur. Une unité de méthanisation pourrait permettre de générer une puissance de 5 ou 6 mégawatts, susceptible de chauffer 600 logements.

Il a fait valoir, en outre, que selon les estimations à peine 200 000 tep avaient été valorisées en méthanisation en 2005, alors que 600 000 tep/an pourraient être produites facilement. Le potentiel « physique » de production de biogaz est estimé, en France, de 4 à 6 Mtep/an.

M. Pierre Rellet a également évoqué les synergies possibles entre les différentes activités de Veolia Propreté. Il a indiqué, par exemple, que le groupe réfléchissait à l'alimentation en GNV, produit par les sites de traitement de Veolia propreté, des bennes de collecte des déchets ménagers opérées par le Groupe.

De même, le savoir-faire des deux groupes en matière de logistique et de collecte pourrait faire de Veolia l'acteur majeur de l'approvisionnement en biomasse dans les prochaines années. Constatant l'absence d'organisation actuelle de la filière bois-énergie, M. Pierre Rellet a estimé que le groupe Veolia avait un rôle déterminant à jouer dans la structuration de ce secteur d'avenir.

Il a notamment cité l'exemple réussi de Valduc (Côte d'or), la plus grosse chaufferie de paille de France qui a intelligemment exploité les ressources locales.

M. Pierre Rellet a précisé à vos rapporteurs que son groupe envisageait de passer des contrats d'une durée de 5 à 10 ans avec des coopératives agricoles, forestières ou avec l'ONF et qu'il était conscient que l'organisation d'une véritable filière serait extrêmement bénéfique au développement local en terme de création d'emplois et de pérennisation du secteur agricole reconverti dans la production de biomasse à destination de centrales d'énergie.

M. Pierre Rellet a conclu son propos en démontrant qu'il fallait éviter d'opposer biochaleur et bioélectricité : ainsi, le développement de projets mixtes chaleur/électricité voire de projets électrogènes purs concourent à développer et à structurer l'offre en biomasse, ce qui est bénéfique y compris pour les projets « chaleur ». Il y a moins concurrence que complémentarité entre la chaleur verte et électricité renouvelable, d'autant que les nouveaux projets locaux de centrales biomasse énergie seraient alimentés en gisements non captés à ce jour.

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