2. L'émergence d'une gestion coordonnée de la situation internationale

a) Une harmonisation tardive entre les instances internationales compétentes
(1) Une divergence de points de vue à la base

Jusqu'au lancement, en mai 2005, de la Stratégie mondiale pour le contrôle progressif de la grippe aviaire par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), en collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS), et l'organisation de la conférence de Genève en novembre 2005 , consacrée à la mise au point d'une approche commune de la grippe aviaire et de la grippe pandémique humaine , réunissant conjointement l'OMS, la FAO, l'OIE et la Banque mondiale, l'absence d'harmonisation entre les positions des instances internationales compétentes était flagrante.

Ainsi, l'OMS, en 2004, avait annoncé l'imminence d'une pandémie grippale humaine, ayant pour origine la mutation du virus aviaire H5N1, sans fondement scientifique valide . D'aucuns ont pu y voir l'influence de grands groupes pharmaceutiques qui, en exerçant un lobbying appuyé auprès de l'OMS pour qu'elle exhorte les pays développés à se constituer des stocks de médicaments antiviraux, se sont assurés des résultats économiques très satisfaisants au cours de l'année 2005.

Si votre rapporteure spéciale n'est pas en mesure de valider complètement cette théorie, elle déplore la « surexposition » des thèses défendues par l'OMS, au moins jusqu'à la fin de l'année 2005, et regrette que l'analyse de l'OMS centrée sur l'anticipation d'une crise de santé humaine ait occulté la préparation de l'avènement d'une crise majeure de santé animale et concentré la mobilisation des moyens des Etats européens sur des sujets non prioritaires au départ .

Elle souscrit ainsi pleinement à l'analyse de M. Jacques Diouf, directeur général de la FAO, qui avait déclaré le 6 mars 2006 36 ( * ) , que « les pays développés se sont tellement cristallisés sur les risques de pandémie qu'ils ont dépensé des milliards pour l'achat de médicaments ou de masques, au lieu de mettre le paquet pour enrayer l'épizootie, dont le développement peut entraîner la pandémie. Mettre l'accent sur les animaux plutôt que les humains aurait permis, de surcroît, d'éviter les tentations de psychose collective que l'on voit dans les pays développés. On a le sentiment que les ministres de la Santé ont été davantage en première ligne que les ministres de l'Agriculture, cela aurait du être l'inverse ».

Tandis que la FAO et l'OIE n'avaient de cesse de préconiser la lutte contre le virus à sa source, c'est-à-dire chez les animaux, et donc le développement de l'aide internationale en faveur des pays en voie de développement touchés par l'épizootie d'influenza aviaire, notamment en Asie du Sud-est, l'OMS préconisait l'élaboration de plans nationaux de lutte contre la pandémie humaine, avec constitution de stocks de médicaments antiviraux et de masques de protection, chez les pays développés.

* 36 Interview donnée au journal Libération, parue le 6 mars 2006.

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