III. UNE POLITIQUE DE L'EMPLOI EN FAVEUR DES QUARTIERS EN DIFFICULTÉ QUI PORTE SES FRUITS

L'emploi constitue assurément la question la plus importante pour l'avenir des quartiers en difficulté. En effet, si la rénovation urbaine permet de mieux vivre, si la maîtrise de l'immigration permet de stabiliser la composition sociologique d'un quartier, si la politique de sécurité permet de redonner de la confiance, c'est l'emploi qui permet à chacun d'aller de l'avant, de bénéficier d'un niveau de vie acceptable et de pouvoir faire des projets. Cet avis est partagé par les élus qui ont répondu au questionnaire de la mission 78 ( * ) , ils estiment que l'emploi et l'éducation sont les deux priorités pour éviter que les événements de novembre 2005 ne se reproduisent. Ils insistent, en particulier, sur la nécessité d'améliorer la formation, notamment, aux métiers manuels pour éviter les « parcours sans issue ».

Une politique de l'emploi dans ces quartiers qui cumulent les handicaps ne saurait reposer sur les seules aides sociales et les emplois aidés. Dans des quartiers construits souvent sans souci de l'emploi et de l'entreprise, face au mouvement de fuite des classes moyennes, de fermeture des commerces et des services publics, il était devenu indispensable d'imaginer des outils puissants de développement économique qui permettent d'inverser la tendance, de (re)faire venir des entreprises et de construire des dynamiques positives autour des initiatives lancées par les élus locaux.

L'outil le plus intéressant imaginé a, sans conteste, été celui des zones franches urbaines (ZFU), créées en 1997, relancées en 2003 et complétées en 2005. Les dernières statistiques disponibles montrent une hausse des embauches de 40 % en 2004 dans les ZFU qui profite, en particulier, aux résidents. Les élus interrogés par la mission 79 ( * ) confirment l'intérêt de ces zones pour participer à la « redynamisation économique » des quartiers. Cependant, derrière ces signes encourageants, demeure une réalité faite de faible qualification d'une partie la population de ces quartiers en difficulté qui trouve son origine dans l'échec scolaire et qui peine à trouver des réponses appropriées dans le temps.

La situation de l'emploi dans les quartiers apparaît donc comme duale. Alors qu'une dynamique positive est engagée et illustre l'engagement de tous les acteurs de terrain pour changer la donne et reconstruire la ville, une partie de la population, peu intégrée, acculturée, désoeuvrée apparaît de plus en plus marginalisée et, donc, prompte à vivre d'expédients divers, au risque de menacer le travail réalisé par ailleurs en faveur du développement économique des quartiers.

Dans ces conditions, le « plan jeunes » lancé en 2005, et renforcé en 2006, a permis d'apporter une réponse dans l'urgence à destination des publics les plus fragilisés. Les premiers résultats semblent particulièrement encourageants. Pour autant, votre mission d'information estime que de nombreuses mesures nouvelles pourraient être mises en oeuvre dans un avenir proche afin de pérenniser le développement économique de ces quartiers au bénéfice de tous.

A. UNE SITUATION DE L'EMPLOI DIFFICILE DANS LES ZUS

1. Une situation du chômage particulièrement dégradée dans les ZUS

Selon les données fournies à la mission par l'ANPE, il apparaît que la population qui vit en zone urbaine sensible et que l'on estime à environ 5 millions de personnes se caractérise par sa jeunesse, ses faibles formation et qualification ainsi que par une sur-représentation de personnes d'origine étrangère et en particulier d'origine extra-européenne. Compte tenu de ces caractéristiques socio-démographiques, les personnes qui résident en ZUS sont donc plus exposées au risque de chômage.

Ainsi, l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) estimait en 2005 à 22 % le taux de chômage dans ces quartiers, soit le double de la moyenne nationale. Plus précisément, au 31 décembre 2004, 12 % des demandeurs inscrits en catégorie 1, 2, 3, 6, 7 et 8 résident en ZUS, soit 451.000 demandeurs d'emploi en fin de mois (DEFM). Les demandeurs d'emploi en ZUS sont plus souvent des hommes, des jeunes et des personnes de nationalité étrangère 80 ( * ) , comparativement aux demandeurs de France métropolitaine. Ils sont, par ailleurs, 33 % à bénéficier du RMI, contre 20 % au niveau national.

Sur le plan des qualifications, on peut observer que les niveaux de formation et de qualification des demandeurs d'emploi en ZUS sont inférieurs à ceux de l'ensemble des demandeurs en France. Ainsi, en décembre 2004, 24 % des chômeurs de ZUS avaient un niveau « études primaires courtes » contre 14 % au niveau national. A l'autre extrémité, 14 % des chômeurs de ZUS ont un niveau de formation « bac + 2 ou plus » contre 22 % pour l'ensemble des chômeurs de France métropolitaine.

En 2004, 52 % des demandeurs qui résident en ZUS sont ouvriers et employés non qualifiés contre 40 % en France métropolitaine. Les cadres représentent seulement 3 % des chômeurs en ZUS contre 8 % en France métropolitaine, ce qui s'explique par la structure des ménages, ceux d'ouvriers et d'employés étant sur-représentés. Par ailleurs, les demandeurs d'emploi en ZUS sont plus nombreux que les autres à posséder des diplômes d'un niveau inférieur au BEP-CAP.

Concernant les métiers recherchés, ils sont en rapport direct avec les niveaux de formation et de qualification. Près de la moitié des hommes qui résident en ZUS recherchent un emploi dans le BTP, le transport et la logistique, et la mécanique. Plus de la moitié des femmes sont inscrites dans un métier de « services aux personnes et aux collectivités » et de « services administratifs et commerciaux ».

Bien qu'ils possèdent des niveaux de formation et de qualification inférieurs à ceux des autres demandeurs d'emploi, l'ancienneté dans le chômage des demandeurs d'emploi en ZUS n'est pas différente. On observe, en revanche, une récurrence au chômage plus élevée dans ces zones que dans le reste du territoire. L'entrée au chômage des demandeurs d'emploi en ZUS est dans 24 % des cas due à une fin de contrat de travail. Par ailleurs, les inscriptions suite à un licenciement sont un peu moins importantes dans ces zones (18 % contre 22 % en moyenne nationale).

Concernant les chômeurs de longue durée, on observe qu'ils sont encore moins diplômés que les demandeurs d'emploi en ZUS et qu'ils recherchent davantage un emploi en activité réduite. La répartition par âge indique que 65 % des demandeurs inscrits en continu entre 2002 et 2004 ont plus de 40 ans, contre 35 % dans l'ensemble des ZUS. Par ailleurs, leur entrée au chômage se produit le plus souvent à la suite d'une fin de contrat (26 % contre 24 % dans l'ensemble des ZUS).

* 78 Voir annexe n°4 « synthèse du questionnaire adressé aux élus locaux ».

* 79 Idem.

* 80 En 2004, 74 % des chômeurs de ZUS étaient de nationalité française contre 89 % en moyenne nationale métropolitaine.

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