B. DES ENJEUX DIFFÉRENTS SELON LES ACTEURS

1. Une différence d'approche remontant à la première OCM

L'OCM vitivinicole actuelle est très largement le reflet de traditions et pratiques oenologiques diverses à travers l'Europe du vin. L'accord politique à la base de l'OCM fut donc élaboré sur un équilibre délicat entre les diverses exigences des principaux Etats producteurs.

Ainsi, les Français souhaitaient une reconnaissance communautaire des principes à la base de leur organisation nationale, structurée par la différenciation entre les « vins de qualité » et les « vins de table », tandis que l'Allemagne s'opposait à ce que l'on restreigne ses productions trouvant facilement des débouchés sur les marchés. Cette dernière, de son côté, était fermement attachée à la pratique dite de la chaptalisation, consistant à enrichir le vin en y ajoutant du sucre, pratique étrangère à d'autres pays et que l'Italie interdisait même. Celle-ci, quant à elle, réclamait la liberté de plantation en misant sur la capacité de sa viticulture à rester compétitive sur le marché international.

Dès lors, l'accord de 1999 était un compromis prévoyant simultanément la distinction entre « vins de qualité » et « vins de table » le maintien des pratiques traditionnelles dans les régions concernées ; une distinction entre « vins de qualité » et « vins de table » avec une grande marge de manoeuvre à l'échelle nationale pour classifier les vins ; et enfin une liberté de plantation, avec toutefois un traitement spécifique des « vins de qualité ».

2. Un jeu subtil entre pays producteurs, pays consommateurs et Commission

Aujourd'hui, alors qu'est discuté un nouveau projet de réforme de l'OCM vitivinicole, réapparaissent ces types de clivages, intégrés dans des dissensions plus larges entre trois grands types d'acteurs dont la nature et l'homogénéité divergent.

Les pays producteurs, dont le nombre a augmenté avec les dernières vagues d'adhésion à l'Union européenne, apparaissent très divisés, et ce, du fait qu'ils n'utilisent pas de la même façon et selon la même intensité les instruments mis à disposition par l'actuelle OCM.

Ainsi, l'Espagne, plus grand bénéficiaire de cette dernière et de ses crédits, utilise ceux-ci pour financer la restructuration de ses opérateurs, tout comme le Portugal. En Italie, les crédits sont utilisés de façon relativement égale entre la restructuration, la distillation, les prestations viniques et l'aide à l'utilisation de moûts. En France, les prestations viniques concentrent une majeure partie des crédits.

De leur côté, les pays consommateurs affichent un front relativement uni, plaidant pour une diminution des dépenses communautaires consacrées à l'OCM -dont ils ne profitent bien évidemment pas, du moins directement- et s'opposant à une politique de promotion développée.

Enfin, dernier acteur, la Commission européenne, joue des oppositions entre ces deux catégories d'Etats membres, ainsi que des divergences internes aux deux catégories, pour tenter d'avancer un projet de règlement conforme à sa philosophie, déjà plusieurs fois éprouvée dans le secteur agricole : rationalisation, simplification, déréglementation et économies budgétaires.

Il ressort de cette multiplicité de positionnements que la réforme dont fera l'objet l'OCM vitivinicole ne sera pas monolithique, mais un modus vivendi entre des prétentions parfois fort éloignées, voire opposées. Il importera, dès lors, que la France fasse preuve de cohésion et s'exprime d'une voix harmonieuse pour peser utilement dans les négociations. C'est pourquoi, votre rapporteur a pris soin de procéder à un nombre important d'auditions et de n'avancer que des propositions ayant l'assentiment d'une majorité d'acteurs, voire l'unanimité.

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