C. L'IMPACT CONTRASTÉ DU C2D ET DE L'AIDE BUDGÉTAIRE GLOBALE

Votre rapporteur spécial a examiné la convention du projet d'aide-programme PISCAD (Programme intégré de santé de la province de Cabo Delgado), mis en oeuvre dans le cadre du premier C2D pour 14,5 millions d'euros, et a constaté que les conditions de suivi des dépenses, de versement des fonds et de passation des marchés étaient plutôt rigoureuses et présentaient certaines garanties de fiabilité de la procédure 40 ( * ) . Il est toutefois regrettable que l'AFD n'ait été que membre observateur du Comité de coordination et d'orientation (chargé de veiller à la cohérence du programme avec le plan stratégique de la province), donc sans réel pouvoir de contestation.

Une évaluation externe du C2D du Mozambique, réalisée par l'IRAM, a été remise le 11 avril 2006 à la DGCID, la DGTPE et l'AFD. Parmi les points positifs relevés figurent, notamment, les synergies avec les autres interventions françaises, la prévisibilité de l'aide, la sécurisation des fonds (mais qui ne contribue pas au renforcement de la fiabilité de la chaîne locale de dépenses), la facturation toutes taxes comprises des projets entrepris, et une faible charge administrative pour le gouvernement mozambicain.

En revanche, l'évaluation souligne une complexité contre-productive du dispositif (moins souple que le processus PPTE), une grande dispersion des actions de nature à diminuer l'efficacité de l'aide française, une attention excessive portée à la rapidité des décaissements, une faible appropriation par le gouvernement mozambicain (le comité local d'orientation et de suivi n'avait ainsi pas été constitué début 2006) et par la société civile, le caractère particulier à la France de ce dispositif qui ne contribue donc pas à favoriser l'harmonisation de l'aide, et des coûts administratifs et financiers élevés pour la partie française.

En outre, deux des projets financés sur le premier C2D (appuis au secteur cocotier et au programme national routier) connaissent de réelles difficultés d'exécution (cf. infra ).

Le rapport formule dès lors un certain nombre de recommandations portant sur : la hiérarchisation des objectifs des C2D et une plus grande concentration sectorielle des actions, l'adaptation au cadre institutionnel des pays, l'adoption ex ante (par convention) de systèmes de suivi et d'évaluation des points d'affectation, la remise en cause de la durée triennale du contrat, la révision à la hausse de la rémunération de l'AFD, et la simplification des circuits financiers - le cas échéant par dérogation aux règles du memorandum of understanding qui lie les bailleurs au gouvernement mozambicain pour la mise en oeuvre de l'aide budgétaire.

Le rapport précise également qu' « il est prématuré d'évaluer l'impact du C2D sur la réduction de la pauvreté et des inégalités. [...] L'évaluation de cet impact est chimérique dans le cadre de l'aide budgétaire », ce qui donne à penser que l'innovation technique que représente le C2D n'est peut-être pas à la hauteur des enjeux de développement.

Une autre évaluation de l'aide budgétaire globale au Mozambique, qui est une modalité parmi d'autres d'application du C2D 41 ( * ) , a été conduite par 24 membres du CAD et bailleurs multilatéraux. De façon guère surprenante, elle porte un jugement favorable sur ce processus et souligne qu'il a contribué à :

- renforcer la relation entre le Mozambique et les bailleurs de fonds ;

- faire progresser l'alignement des bailleurs de fonds sur les procédures et systèmes mozambicains ;

- augmenter la part des dépenses publiques intégrées au budget et à renforcer le processus démocratique de contrôle parlementaire ;

- renforcer les systèmes mozambicains de programmation, de budgétisation et de décision ;

- stimuler l'adhésion des ministères techniques au processus de programmation et de budgétisation transversale des ressources, sous l'autorité du ministère des finances et de la planification.

Votre rapporteur spécial ne nie pas les avantages procurés par l'aide budgétaire globale en termes de simplification, de cohérence entre les procédures des bailleurs et des pays récipiendaires, et d'appropriation par ces derniers. Il reste que pour réellement contribuer au développement, et pas simplement à la satisfaction des bailleurs quant au rythme de décaissement, ce

type d'aide doit être accompagné par des indicateurs et reportings précis, des systèmes financiers fiables et une administration compétente, conditions préalables qui ne sont pas toujours réunies dans les PMA, voire les pays émergents (cf. infra le cas du Vietnam).

* 40 Figurent notamment :

- un système de deux avances annuelles successives, le versement de la seconde étant conditionné à la justification de l'utilisation de 60 % de la première ;

- un audit semestriel sur la régularité des comptes et la conformité des justificatifs et imputations (conditionnant l'avis de non-objection de l'AFD au réabondement postérieur du compte du programme) ;

- la remise à l'agence « dans les plus brefs délais » des justificatifs de l'utilisation des fonds de la dernière avance et du paiement des dépenses correspondantes ;

- des conditions et un calendrier précis pour le reversement des fonds insuffisamment justifiés ou non justifiés dans un délai de 3 mois après le versement de la dernière avance.

* 41 L'aide budgétaire globale représente le quart des versements au titre des deux C2D, mais la totalité du C2D conclu avec Madagascar.

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