B. LA PRÉSENCE DES OPÉRATEURS ÉCONOMIQUES FRANÇAIS

La France et Madagascar sont très liés pour des raisons historiques, géographiques (proximité de Mayotte et de la Réunion), culturelles (francophonie) et humaines (la France accueille la plus importante diaspora malgache). Le différend sur les nationalisations (de la période de « malgachisation » de 1975-78) et les spoliations des particuliers a été soldé en 1998-2001. Le président Ravalomanana, issu du secteur privé et tardivement reconnu par notre pays (en juillet 2002, après les Etats-Unis), tranchait avec ses prédécesseurs par une attitude initialement assez méfiante à l'égard de la France ; les relations se sont depuis normalisées.

La présence économique de la France demeure déterminante. On compte près de 600 entreprises à capitaux français, souvent établies de longue date 5 ( * ) et employant environ 100.000 salariés, en particulier dans les zones franches et les secteurs de la banque et de l'industrie. La France est le premier partenaire commercial (20 % des importations et 33 % des exportations en 2004) et le premier investisseur du pays. Madagascar cherche également à développer ses relations avec la Réunion.

Votre rapporteur spécial a rencontré de nombreux responsables économiques français, qui lui ont en particulier formulé les remarques suivantes :

- la corruption est fréquente, quoique apparemment moins qu'à la fin de l'ère Ratsiraka. Le gouvernement, dominé par la personnalité de M. Ravalomanana, est jugé assez dynamique mais les capacités de l'administration sont faibles ;

- l'arbitrage est théoriquement reconnu par le droit local mais est onéreux, tend à rejuger l'affaire sur le fond et se heurte à des difficultés d'homologation pour rendre exécutoire la sentence arbitrale ;

- l'augmentation du budget de la justice, qui constituait une condition pour l'éligibilité au X e FED, était bloquée mi-2006 par un conseiller de la présidence ;

- les grandes entreprises sont relativement ciblées par les contrôles fiscaux, sans pour autant qu'il y'ait acharnement. L'impression d'arbitraire et l'absence de motivation des décisions administratives ou juridictionnelles ne sont cependant pas rares ;

- Madagascar dispose d'un grand potentiel de création de richesses mais son PIB est équivalent au bénéfice net annuel d'une grande banque française... Le potentiel touristique est manifestement sous-exploité (seulement 150.000 touristes par an) ;

- compte tenu de ses difficultés budgétaires , l'Etat s'acquitte aléatoirement de ses dettes à l'égard des entreprises , en particulier sur le remboursement de la TVA. L'ambassadeur de France a toutefois plaidé avec le FMI pour la mise en place d'un compte spécial du Trésor, plutôt que la fongibilité actuelle avec les crédits budgétaires. Votre rapporteur spécial s'est également demandé si le paiement de ces créances ne devait pas être inscrit dans le C2D, en dépit de son caractère non affecté ;

- les banques se montrent encore frileuses à l'égard des entreprises , préférant placer leurs dépôts dans des bons du Trésor à un mois rémunérés à plus de 23 % (en 2006) ;

- l'Assemblée des Français de l'étranger a également souligné la paupérisation de la moitié des Français immatriculés et qu'avec 128 euros , le montant mensuel de l'allocation de solidarité fixé par la commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger est le plus faible au monde. Il semblerait également que le nombre de bénéficiaires des allocations sociales (solidarité ou handicapé), 516 personnes au 1 er mars 2006, soit très inférieur aux besoins réels.

* 5 Le président de la chambre de commerce franco-malgache considère qu'il est difficile, malgré l'abondance des contacts, de faire venir de nouveaux investisseurs, qui arguent de l'instabilité juridique, monétaire, foncière et fiscale, voire (à tort) politique.

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