N° 82

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 13 novembre 2007

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le compte d' avances aux collectivités territoriales ,

Par M. Michel MERCIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Mme Marie-France Beaufils, M. Roger Besse, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Christian Gaudin, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

I. INTRODUCTION

A. LE « MYSTÈRE » DU COMPTE D'AVANCES : UN EXCÉDENT PERMANENT DEPUIS 1996, CONTRAIREMENT AUX PRÉVISIONS

On rappelle que les relations de trésorerie entre l'Etat et les collectivités territoriales comprennent deux éléments essentiels :

- d'un côté, l'Etat, traditionnel « fermier général des collectivités territoriales » depuis plus de deux siècles, verse par douzième le montant des impositions votées pour l'année par les collectivités territoriales, tandis qu'il perçoit, avec un décalage, le produit effectif de ces impôts ;

- de l'autre, l'Etat est rémunéré par un prélèvement sur les recettes du compte d'avances, et les collectivités territoriales sont tenues de déposer leurs disponibilités au Trésor sans intérêt, sauf dérogations limitativement encadrées par une circulaire Chautemps datant de 1926 - ce qui fait de l'Etat le « caissier général » des collectivités territoriales.

La fonction de « fermier général des collectivités territoriales » est assurée par un compte spécial, couramment dénommé « compte d'avances aux collectivités territoriales », bien que cette dénomination n'ait jamais correspondu à son intitulé exact.

Les intitulés successifs du « compte d'avances aux collectivités territoriales »

Jusqu'en 2005, il s'est agi d'un compte d'avances, le compte spécial du Trésor 903-54 « Avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes ».

En application de la LOLF, l'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances initiale pour 2006 a supprimé tous les comptes de prêts et comptes d'avances existant alors, et les a remplacés par divers comptes de concours financiers, la notion de compte spécial du Trésor étant par ailleurs remplacée par celle de compte spécial. L'article 46 précité a donc supprimé le compte d'avances. Ainsi, depuis 2006, le compte d'avances a été remplacé par la seconde section du nouveau compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » (ACT) 1 ( * ) . Cette seconde section correspond au programme 833 « Avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes ».

Dans les développements ci-après, on l'appellera « compte d'avances aux collectivités territoriales », bien que cette appellation ne soit pas celle retenue par les lois de finances, ou, plus simplement, le « compte d'avances », bien qu'au sens de la LOLF, il ne s'agisse pas d'un compte d'avances (notion supprimée avec l'entrée en vigueur de la LOLF).

Conformément à sa vocation, votre commission des finances suit avec attention l'évolution des relations de trésorerie de l'Etat et des collectivités territoriales.

Ainsi, notre ancien collègue Paul Loridant, alors rapporteur spécial des crédits de ce que l'on appelait les « comptes spéciaux du Trésor » 2 ( * ) , leur a consacré deux excellents rapports d'information :

- en 1989, un rapport d'information relatif à la gestion de trésorerie des collectivités territoriales 3 ( * ) ;

- en 2003, un rapport d'information relatif au compte d'avances aux collectivités territoriales 4 ( * ) .

Dans ces conditions, on peut s'interroger sur l'opportunité de présenter un troisième rapport d'information.

Le présent rapport d'information trouve son origine dans un phénomène paradoxal : la persistance de l'excédent du compte d'avances aux collectivités territoriales, constant depuis 1996. Le gouvernement indique de manière continue depuis 1996 que le compte d'avances a vocation à être, sur longue période, en déficit structurel, car ses dépenses sont calées sur les émissions et ses recettes sur les recouvrements, nécessairement inférieurs aux émissions, et qu'il va donc prochainement renouer avec les déficits. On peut néanmoins s'interroger sur le caractère « conjoncturel » d'un excédent observé chaque année depuis dix ans.

Ce paradoxe était déjà à l'origine du rapport d'information précité présenté en 2003 par notre ancien collègue Paul Loridant. Ainsi, dans ce rapport d'information, celui-ci souligne « l'inflexion étrange du solde du compte d'avances aux collectivités locales, dont les manuels de finances publiques ont toujours décrit le caractère structurellement déficitaire, aujourd'hui régulièrement positif ». Il ajoute que « c'est pour cette raison » qu'il « s'est attaché à actualiser son rapport d'information de 1989 ».

Dans son rapport de 2003, notre ancien collègue, s'appuyant sur les données fournies par le gouvernement, estime que « les excédents du compte d'avances ne devraient pas se maintenir à moyen terme en raison d'une tension à la hausse de la fiscalité locale », considérant que « le solde du compte d'avances devrait redevenir très légèrement négatif dès 2004 ». Or, un tel phénomène ne s'est pas produit, le compte d'avances ayant été nettement excédentaire en 2004, 2005 et 2006.

Le graphique ci-après permet de mettre en évidence le décalage entre prévision et exécution, et l'excédent permanent depuis 1996.

Le solde du compte d'avances aux collectivités territoriales : prévision et exécution

(en milliards d'euros)

Source : réponse au questionnaire adressé en vue du présent contrôle budgétaire

* 1 La première section du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » est le programme 832, qui concerne les avances de l'Etat à des collectivités territoriales et à des établissements publics connaissant des difficultés de trésorerie ou ayant besoin d'emprunter. Cette section correspond à l'ancien compte d'avances 903-53 « Avances aux collectivités et établissements publics, territoires, établissements et Etats d'outre-mer ».

* 2 La LOLF ne reconnaît désormais que des « comptes spéciaux ».

* 3 Rapport d'information n° 447 (1989-1990).

* 4 Rapport d'information n° 24 (2003-2004).

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