3. Un ciblage inéquitable des aides publiques à l'hébergement

On l'a vu, près de 80 % des personnes en établissement doivent faire face à un reste à charge, alors que la dépense publique dirigée vers les Ehpad représente pourtant des sommes importantes. Ce phénomène est doublé d'un ciblage inéquitable des aides publiques à l'hébergement qui conduit à pénaliser les « classes moyennes » disposant d'un revenu situé autour du niveau médian.

On constate en particulier :

- que l'Apa n'est pratiquement pas dégressive en fonction du revenu jusqu'à 2 200 euros par mois ; elle ne l'est pas non plus du tout dans les établissements à dotation globale ;

- que les aides au logement (APL/ALS), dont le coût, pour le public dépendant, s'élève en 2007 à 568 millions d'euros, sont en revanche fortement dégressives et s'annulent à partir de 1 100/1 300 euros de revenus mensuels. Ces aides présentent en outre un caractère relativement injuste, dans la mesure où leur versement peut dépendre du statut de l'établissement, selon que celui-ci est conventionné ou non ;

- l'aide fiscale aux personnes hébergées en établissement, qui représente un coût de 120 millions d'euros pour l'Etat et dont l'effet maximum est atteint autour de 2 200/2 700 euros de revenus mensuels, ne bénéficie par définition qu'aux personnes acquittant l'impôt sur le revenu.

En définitive, cette accumulation d'aides bénéficie au haut et au bas de l'échelle des ressources 198 ( * ) , alors que le plus grand nombre de résidents dispose d'un revenu mensuel se situant en moyenne autour de 1 000/1 200 euros, c'est-à-dire au niveau où le montant total d'aides est le plus faible . Pour les personnes hébergées en Ehpad, il existe donc ce qu'il est convenu d'appeler une « courbe en U ».

4. La perspective d'une montée en valeur des patrimoines dans un contexte néanmoins d'accroissement sensible des disparités entre les personnes âgées

L'évolution des dépenses restant à la charge des familles mérite d'être appréhendée en se fondant sur trois principaux éléments d'appréciation :

- les perspectives de croissance non négligeables du patrimoine des retraités, du moins pour les classes d'âges nées jusqu'à la fin des années cinquante ;

- inversement, le faible dynamisme du niveau prévisionnel des pensions au cours des prochaines décennies. Le mode d'indexation des retraites sur l'inflation apparaît en effet beaucoup moins dynamique que celui sur les salaires précédemment utilisé ;

- ainsi que le caractère, paradoxalement antiredistributif, des dépenses fiscales existantes.

Lors de son audition 199 ( * ) , Etienne Grass a ainsi fait valoir que la question de la participation des familles au financement de la perte d'autonomie se posera dans un contexte inédit, puisque les classes d'âge issues du baby-boom bénéficient d'une situation exceptionnellement favorable. On doit constater que leur patrimoine moyen est très supérieur à celui de leurs parents et de leurs grands-parents. Ces tendances globales recouvrent certes naturellement d'importantes disparités individuelles qui auront tendance à s'accroître. Mais il peut sembler légitime pour la collectivité nationale, ne serait-ce qu'au regard du principe d'équité entre les générations, de solliciter une participation plus importante de la part des familles disposant des patrimoines les plus élevés. Parallèlement, un effort devra être consenti au bénéfice des bénéficiaires insolvables.

* 198 « Perspectives financières de la dépendance des personnes âgées à l'horizon 2025 : Prévisions et marges de choix » - Hélène Gisserot - op. cité - pages 50 et 51.

* 199 Audition conjointe avec Hélène Gisserot, le 16 janvier 2008.

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