c) La question du personnel

Quel est le sort du personnel en cas de changement d'opérateur ?

Sur le plan juridique, la question soulevée est celle du transfert du contrat de travail. En cas de reprise de l'activité par un nouvel opérateur, la règle fixée par le Code du travail (art. L1224-1 et L1224-2) est le transfert de plein droit des personnels et des contrats de travail au nouvel employeur. Si à l'expiration d'une concession, un réseau de transport de bus, concédé à une société X, est attribué à une société Y, cette dernière doit reprendre le personnel de la société X.

En pratique, de très nombreuses questions vont se poser.

- la question de l'identification des personnels. Dans la situation actuelle, les personnels assurent une exploitation nationale, à cheval sur plusieurs régions. Dans l'hypothèse où une partie du trafic régional sera confiée à un autre opérateur que la SNCF, comment identifier le personnel « régional » ?

- la question du transfert des droits. La règle fixée par le Code du travail est le transfert de plein droit des personnels et des contrats de travail au nouvel employeur. Ce transfert concerne également les avantages issus d'un accord collectif ainsi qu'il est prévu à l'article L 2261-10 dudit code. Le statut pourrait-il être assimilé à un accord collectif dans certaines de ses composantes ?

- la question de la gestion des personnels en interne. Les questions antérieures envisagent le cas où le passage à un opérateur privé s'accompagne d'un transfert de personnel. Mais il faut envisager aussi le cas où le transfert ne se fait pas, pour des raisons juridiques ou autres. La difficulté n'est plus juridique mais économique : la perte éventuelle d'un marché régional - par hypothèse concédé à une société privée - conduirait donc la SNCF à gérer un surplus de personnel rendu disponible par la perte dudit marché.

L'éventuel passage de l'opérateur historique à un opérateur privé laisse donc entier le problème du personnel SNCF affecté au réseau régional. Quelques difficultés ont été identifiées mais sur ce sujet sensible, les obstacles apparaîtront au fur et à mesure de l'application. La liste n'est pas exhaustive.

Il y a évidemment là une difficulté majeure à laquelle, à ma connaissance, ni la SNCF ni l'État ne se sont préparés.

d) La question des gares

La répartition du patrimoine ferroviaire a toujours été un point de friction entre la SNCF et RFF qu'il s'agisse de la voirie, des équipements, des quais et, surtout, des immeubles et des gares. Ces difficultés vont être évidemment accrues avec la percée progressive de la concurrence ferroviaire, notamment sur le trafic régional.

L'ouverture à la concurrence dans les régions est d'abord un enjeu technique, ferroviaire : de quels services le repreneur éventuel aura-t-il besoin ? Comment facturer les arrêts...? Mais cela fait longtemps que la gare est plus qu'un enjeu ferroviaire pour être aussi un enjeu de développement local. Une gare est c'est aussi un des premiers éléments structurants d'une ville, un lieu de vie et de vibration culturelle... La gare contemporaine est à l'aube de nouveaux bouleversements caractérisés par l'augmentation des trafics, la diversification de l'offre de transport mêlant plusieurs modes de transport urbain, et l'animation : la gare, lieu de passage, devient aussi un lieu de vie, de commerces. Toutes les gares suivent cette évolution, et certains anticipent déjà la fin des hyper surfaces commerciales à l'extérieur des villes, au profit de grandes surfaces à l'intérieur des gares...

Qu'il s'agisse de l'accueil des voyageurs, de la vente des billets, de l'information, voire même de la présence de commerces, ce sont autant d'éléments d'une offre de service qui, quel que soit demain le gestionnaire de la gare, devra être transparente et non discriminatoire.

Toutes ces questions, ici à peine entrevues, mais cruciales pour le transport ferroviaire, le sont tout autant pour les collectivités locales. La concurrence favorisera l'émergence de nouveaux modes d'exploitation des espaces ferroviaires dans lequel les autorités locales devront prendre une responsabilité déterminante. Le 7 octobre 2008, le Premier ministre a eu la sagesse de confier à Fabienne Keller, sénatrice du Bas-Rhin, une mission de réflexion sur le concept de gare contemporaine (23 ( * )) . Les conclusions de ce rapport sont attendues pour mars 2009.

* (23) Mme Fabienne Keller, sénateur (UMP, Bas-Rhin), ancien maire de Strasbourg, a été nommée parlementaire en mission auprès de M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire et de Mme Christine Lagarde, ministre de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi. Mme Fabienne Keller est chargée d'une mission temporaire sur le « concept de gare contemporaine ». Elle devra formuler, notamment, des propositions axées autour de trois thèmes génériques : le développement de l'écomobilité, le développement des services et les transformations économiques des quartiers ».
Source : Sénat - Carrefour local - 7 octobre 2008

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