(i) La multiplication d'initiatives ponctuelles au cours des derniers mois

La Réunion a été le département précurseur : des relevés de prix sont en effet organisés depuis octobre 2008 mensuellement par les agents de la DDCCRF, sous l'égide de la préfecture. Ils portent sur un « chariot-type » défini par l'observatoire des prix et des revenus : 50 produits dans 14 grandes surfaces, soit 700 prix. Ces données sont consultables par les consommateurs sur le site Internet de la préfecture.

Ce site souligne que « le chariot-type opérationnel depuis 6 mois enregistre des signes positifs encourageant à poursuivre dans le sens de la transparence : l'outil a fait l'objet d'une appropriation tant par les consommateurs et les organisations de consommateurs (...) que par les acteurs de la grande distribution elle-même, dont l'intérêt pour cet exercice mensuel ne se dément pas et se consolide de mois en mois ».

Cette initiative, gage de transparence, a exercé une pression à la baisse sur les prix de la grande distribution, puisque les quatre relevés entre mars et juin 2009 ont montré une baisse constante du coût moyen du chariot type.

L'idée d'un chariot type servant de repère pour suivre l'évolution du prix des produits de grande consommation a été reprise dans les autres DOM dans le cadre des accords intervenant à la suite du long conflit social du début de l'année 2009. Les relevés, réalisés par la DDCCRF, visaient notamment à vérifier le respect de ses engagements par la grande distribution. Des relevés sont également effectués en matière de prestations bancaires.

(ii) La mise en place d'un véritable service de la transparence

Au-delà de la pérennisation des dispositifs de surveillance des prix institués dans les DOM au cours des derniers mois, plusieurs initiatives doivent permettre d'instituer un véritable service de la transparence dans ces départements.

? La nécessaire coordination entre les services de l'État compétents en la matière

Au-delà du contrôle du respect des règles de la concurrence, la transparence doit être au coeur de l'action de l'État en matière de prix dans les DOM. Celle-ci ne peut être établie que si les services de l'État, observateurs privilégiés de la chaîne de formation des prix communiquent entre eux et travaillent en étroite collaboration . Les membres de la mission sénatoriale ont pu constater, lors de ses déplacements dans les différents DOM, le manque de coordination et le cloisonnement de ces différents services (DDCCRF, Douanes, INSEE).

Il apparaît donc impératif qu'une réelle coordination s'instaure entre eux, sous l'égide du préfet.

? Le renforcement des missions de la DGCCRF

Par ailleurs, il convient de confier à la DGCCRF les moyens nécessaires à un renforcement de son action en matière de prix .

En effet, depuis l'ordonnance du 1 er décembre 1986 et la libéralisation des prix 98 ( * ) , la DGCCRF n'a plus aucune mission de surveillance des prix, ses missions étant limitées à :

- la régulation concurrentielle des marchés (essentiellement la surveillance du respect des règles de concurrence) ;

- la protection économique des consommateurs (contrôle des règles protectrices des intérêts économiques des consommateurs, contrôle de la loyauté et de la conformité des produits et services mis sur le marché) ;

- la sécurité des consommateurs.

Au vu de la situation de la concurrence dans les DOM et dans une optique de pérennisation des dispositifs de surveillance des prix mis en place au cours des derniers mois, il paraît indispensable de réintroduire la surveillance des prix parmi les missions de la DGCCRF outre-mer.

Corrélativement à l'élargissement de leurs missions, les services de la concurrence doivent être dotés des moyens humains supplémentaires . On peut d'ailleurs souligner que la mission de relevés de prix confiée à la DGCCRF à la suite des accords de sortie de crise a conduit à une augmentation des effectifs locaux. Ainsi en Guadeloupe, l'État s'est engagé à augmenter les effectifs de 15 %, soit 5 postes supplémentaires.

En réponse à un courrier de votre rapporteur, la DDCCRF de La Réunion a indiqué que sa mobilisation en vue d'enquêtes sur le mécanisme de formation des prix n'est pas possible aujourd'hui : « la réalisation de telles enquêtes nécessite une mobilisation importante pour laquelle la DDCCRF n'est pas armée en terme de moyens et d'effectifs, sauf à cesser toute intervention concernant les autres missions qui relèvent de sa compétence (...). Si la DDCCRF devait être chargée d'une mission permanente d'observation des prix, des marges et des coûts à La Réunion, ses moyens devraient être considérablement renforcés, sauf à réaliser un travail partiel sans valeur et sans intérêt ».

Il est donc nécessaire aujourd'hui d'élargir les missions de la DGCCRF dans les DOM au suivi des prix et, en conséquence, d'augmenter les moyens humains des directions départementales afin de leur permettre de remplir correctement cette mission.

? Le renforcement des observatoires des prix et des revenus

L'article 75 de la loi d'orientation pour l'outre-mer (LOOM) du 13 décembre 2000 prévoyait la création par décret d'un observatoire des prix et des revenus dans chaque département et région d'outre-mer.

Le décret d'application a particulièrement tardé, ce que la mission déplore.

Le décret n'est en effet intervenu que le 2 mai 2007 99 ( * ) et les observatoires ont été mis en place :

- à La Réunion le 13 juillet 2007 ;

- en Guyane en août 2007 ;

- en Guadeloupe le 18 octobre 2007 ;

- en Martinique le 17 décembre 2007.

L'article 1 er de ce décret définit la mission de ces observatoires : il s'agit « d'analyser le niveau et la structure des prix et des revenus et de fournir aux pouvoirs publics une information régulière sur leur évolution ».

Présidé par le préfet et composé de divers acteurs locaux (représentants de l'État, élus, représentants de l'administration, des organisations socioprofessionnelles, des syndicats, des chambres consulaires), l'observatoire est un lieu d'échange et de dialogue, permettant de disposer d'une information établie de façon contradictoire sur la question de la détermination du pouvoir d'achat . L'observatoire peut « émettre des avis afin d'éclairer les pouvoirs publics sur la conduite de la politique économique et de cohésion sociale » (article 2). Il peut disposer de toutes les informations et études produites par les administrations et les établissements publics de l'État (article 6).

Soumis à l'obligation de se réunir au moins une fois par an et de remettre un rapport annuel au ministre chargé de l'outre-mer, au ministre chargé de l'économie et des finances et au ministre chargé de l'emploi, ces observatoires ont examiné un certain nombre de sujets.

Thématiques traitées par les observatoires depuis leur création

Guadeloupe

Martinique

Réunion

Guyane

Transport aérien

X

X

X

Fret

X

Télécom/internet

X

X

Carburants (prix administrés)

X

X

Panier « type » de consommation

X

X

Suivi de l'évolution des prix à la consommation

X

X

X

Logement

X

X

Écarts de revenus

X

X

Source : Secrétariat d'Etat à l'outre-mer

L'observatoire de La Réunion semble le plus actif des quatre DOM. Il a notamment contribué à mettre en place en octobre 2008 le chariot-type , dispositif précurseur de ceux mis en place après le mouvement social aux Antilles. Il a constitué une référence pour les autres observatoires.

En Guadeloupe , l'observatoire de prix s'est saisi de nombreuses questions, notamment du prix des carburants : son rapport remis en janvier 2009 avait déjà soulevé des questions soulignées depuis par le rapport de l'IGF, notamment le monopole de fait de la SARA pour l'approvisionnement ou la question des stations services.

En Martinique, l'observatoire a concentré son activité sur deux thématiques en 2008 : la continuité territoriale (transport aérien, fret et communications électroniques) et le panier de la ménagère. Reprenant l'exemple de La Réunion, il a mis en place un chariot type comprenant 105 produits de consommation courante représentatifs du panier de la ménagère martiniquaise, en vue d'effectuer les relevés de prix dans divers points de vente.

En Guyane , l'activité de l'observatoire a été plus limitée en 2008 avec seulement deux réunions, portant sur les caractéristiques de l'évolution des prix dans le département depuis dix ans et sur les écarts de revenu.

Au vu de ce bilan, il apparaît nécessaire de stimuler le fonctionnement des observatoires des prix , comme l'indique d'ailleurs le rapport de l'IGF sur le prix des carburants en notant qu'ils peuvent constituer « un lieu de débat pour l'ensemble des acteurs » . Ils peuvent en effet devenir l'outil de la concertation dans la perspective d'une plus grande transparence des prix dans les DOM, mais aussi un instrument d'alerte des services de l'État, incitant ces derniers à user de leurs pouvoirs d'investigation.

Les différents éléments évoqués précédemment, à savoir la pérennisation des dispositifs de suivi des prix mis en place au cours des derniers mois, le renforcement de la coordination des services de l'État compétents en matière de prix et de concurrence, l'élargissement des missions des services de la concurrence au suivi des prix ainsi qu'une dynamisation des observatoires des prix et des revenus, doivent constituer, sous l'autorité vigilante du préfet, les vecteurs d'un véritable « service de la transparence des prix » dans les DOM.

Proposition n° 28 : Instituer un véritable « service de la transparence des prix » dans les DOM.

* 98 Les prix des biens et services sont depuis lors « librement déterminés par le jeu de la concurrence ».

* 99 Décret n° 2007-662 du 2 mai 2007

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page